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de certificat en dehors de la présence et sans le consentement des parties, ainsi que l'a établi un arrêt de la Cour de Cassation du 1er mai 1899, pour une affaire étrangère d'ailleurs à la loi sur les accidents du travail. Cette jurisprudence a été adoptée par le tribunal de Fougères (8 novembre 1899) et par le tribunal de Laval, à propos de la loi de 1898.

Un dernier mot sur le certificat. Il doit être rédigé sur papier libre et il est payé au médecin au prix stipulé par l'assistance médicale gratuite du département. A Paris, où l'assistance médicale gratuite n'existe pas, le tarif a été fixé à cinq francs. En vertu de l'article 6 de la loi de 1892, sur l'exercice de la médecine, le certificat délivré à l'hôpital, mais à l'hôpital seulement, peut être fourni par l'interne en médecine remplaçant le chef de service.

2o Désignation d'un médecin par le

juge de paix.

La loi n'a pas prévu le cas dans lequel le chef d'entreprise serait mis dans l'impossibilité d'effectuer la déclaration de l'accident, suivant les

DÉSIGNATION D'UN MÉDECIN PAR LE JUGE DE PAIX 123

formalités requises, faute d'avoir pu obtenir le certificat médical, cependant le médecin voisin du théâtre de l'accident peut être empêché ou, ainsi qu'il en a le droit, refuser de visiter le malade blessé. Le Comité consultatif des assurances contre les accidents a émis sur ce point l'avis suivant : « En cas de refus du certificat médical par les médecins voisins du théâtre de l'accident, le chef d'entreprise, astreint à la déclaration prévue par l'article 11 de la loi du 9 avril 1898, doit demander au juge de paix désignation d'un médecin par justice pour l'établissement du certificat légal, par analogie avec les dispositions.du 3o alinéa de l'article 13 de la loi sus-visée et par application de l'article 23 de la loi du 30 novembre 1892. >>

Le médecin ainsi requis par le juge de paix est un expert et ne peut refuser (art. 23 de la loi du 30 nov. 1892), de se rendre à la réquisition de l'autorité judiciaire. Les démarches qu'aura dû faire le patron, le temps qu'aura demandé la nomination du médecin expert ne permettaient plus le dépôt de la déclaration de l'accident dans les quarante-huit heures réglementaires et le

patron pouvait être poursuivi en vertu de l'article 11. Dans ce cas, le patron pouvait peut-être se retourner contre le médecin qui avait refusé de rédiger le certificat et le mettre en cause.

Ces difficultés justifient amplement la modification introduite par la loi du 22 mars 1902: délai de 48 heures transformé en délai de quatre jours.

Lorsque le juge de paix ne trouve pas le certificat médical suffisant, il peut, en vertu du paragraphe 3 de l'article 13, nommer un expert qui fournira un rapport dont les conclusions pourront être absolument différentes ou même contredire celles du premier certificat médical. Ces contradictions souvent plus apparentes que réelles ne sont pas sans causer un profond étonnement aux magistrats; elles n'ont cependant rien que de normal. La nomination du médecin par le juge de paix demande quelques jours et, surtout s'il s'agit de lésions peu graves, d'éraillures, l'aspect extérieur, la dimension, la profondeur et même le pronostic de ces blessures auront pu notablement changer entre les visites des deux médecins. Les examens sont contradictoires, parce qu'ils n'ont pas été faits en un même temps.

3° Médecins des compagnies

d'assurances.

Au début, certains médecins traitants avaient voulu interdire au médecin du patron ou de la compagnie d'assurances l'accès auprès du blessé. Ces médecins avaient tort et du reste cette question avait été jugée dès 1885, dans les conditions suivantes :

En 1884, avant que ne fût votée la loi sur les syndicats, les médecins du Havre voulurent en fonder un; ils établirent un tarif de visites de jour et de nuit, et décidèrent que le prix des visites pour les compagnies d'assurances, fort nombreuses dans la ville, serait de vingt francs. Les compagnies, trouvant le prix trop élevé, firent venir un médecin retraité de la marine, qui accepta de faire toutes les visites des compagnies d'assurances au prix de dix francs la visite.

Peu après, un ouvrier blessé et assuré fut transporté à l'hôpital. La compagnie envoya son médecin, auquel on refusa l'entrée des salles. La compagnie d'assurances me demanda mon avis et je répondis dans le sens suivant : Un malade

quelconque soigné à l'hôpital a le droit de faire dans son intérêt ce qu'il ferait s'il était soigné à son domicile.

Le médecin traitant doit autoriser la visite du médecin de la compagnie d'assurances, parce qu'il peut être de l'intérêt du blessé que la visite ou les constatations soient faites dans le plus bref délai. Seul le blessé a le droit de refuser la visite, mais le médecin traitant ne doit, dans aucun cas, substituer son appréciation à celle du malade et se faire juge s'il sera utile ou nuisible que les constatations soient faites par la compagnie. Agir ainsi, serait mettre les malades peu fortunés, qui sont obligés de se faire soigner à l'hôpital, en état d'infériorité, en leur refusant les moyens de défendre leurs intérêts aussi facilement qu'ils eussent pu le faire, si leur fortune leur avait permis de se faire soigner à domicile (1).

Enfin, il est évident que si le médecin traitant interdit la visite d'un malade à un médecin de

(1) Brouardel, Rapports entre les médecins des compagnies d'assurances et des médecins traitants (Annales d'hygiène publique et de médecine légale, 3o série, 1885, t. XII, p. 443).

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