Page images
PDF
EPUB

somme de 194.328.000 fr. et, en 1896, n'avait plus fourni que 181.987.000 fr., soit une moins value de 12.341.000 fr. due à une diminution du nombre des décès.

La vérification est facile à faire pour Paris.

[blocks in formation]

Donc voici, officiellement constatées, 9,250 vies épargnées, comptons pour plus de facilité 10.000. Les statisticiens et, en cela ils semblent se rapprocher de la vérité, comptent qu'il y a un décès pour dix malades, on a donc compté à Paris en 1900: 100.000 malades de moins qu'en 1886.

Les malades diminuent et le nombre des médecins augmente, le malaise dont souffre notre corporation n'est donc pas étonnant et tous ceux qui font partie d'une association médicale savent avec quelle rapidité s'élève le nombre des secours qui doivent être délivrés aux sociétaires

aux veuves de confrères, que la mort du

chef de famille a plongées dans la plus noire misère.

En 1893, il y avait à Paris 1963 médecins ; en 1900, il y en avait 2846, soit une augmentation énorme de 883 médecins, soit d'un tiers en sept ans. Pour mettre en relief les résultats pécuniers, palpables de cette pléthore médicale, nous allons faire l'hypothèse suivante :

Tous les médecins ont le même nombre de malades, qu'ilsvisitent par an une moyenne de dix fois, au prix de cinq francs la visite.

En 1886, chaque médecin aurait eu 280 malades, qui, visités dix fois à cinq francs, lui auraient rapporté 14,000 francs.

En 1900, chaque médecin aurait eu 146 malades, qui, visités dix fois à cinq francs, lui ont rapporté 7,300 francs.

Dans notre hypothèse, chaque médecin a vu la somme représentative de son travail diminuée de moitié, et cette hypothèse n'est pas loin d'être la réalité.

Les médecins parisiens se plaignent de la concurrence qui leur est faite par les hôpitaux.

Les hôpitaux sont faits et entretenus par l'As

sistance publique pour les nécessiteux. Mais d'abord il faudrait savoir à partir de quel degré de misère on devient nécessiteux, et on a droit au traitement à l'hôpital.

Il y a certainement des abus, mais ils sont bien difficiles à éviter, surtout quand il s'agit d'opérations chirurgicales.

Actuellement il n'est guère d'opérations dans la clientèle de ville que le chirurgien consente à faire au domicile du malade, il exige que celui-ci soit transporté dans un établissement spécial, une maison de santé, dans laquelle il y a une salle d'opérations installée suivant les règles les plus strictes de l'asepsie, où le malade trouve un personnel choisi, apte à lui donner les soins que nécessite son état avant et surtout après l'opération. Or, le prix de séjour dans une maison de santé est fort onéreux, pour peu qu'il se prolonge quelques jours et la somme à débourser, sans compter les honoraires du chirurgien, dépasse de beaucoup les ressources pécuniaires d'une modeste aisance. Où pourra bien se rendre aux fins d'opération un malade appartenant à une classe moyenne et qui ne peut pas

dépenser plus d'une dizaine de francs par jour pour sa santé? Il arrive fatalement à l'hôpital. Ce n'est cependant pas un nécessiteux.

Je rappelais, dans un de mes livres (1), le nombre énorme d'accouchements qui sont pratiqués dans les hôpitaux ou chez les sagesfemmes agréées par l'Assistance publique, et je soumettais aux méditations de mes confrères la statistique de 1896: sur 60,000 accouchements, 27,000 avaient été faits dans les établissements de l'Assistance publique et le reste est partagé entre environ 3,700 praticiens médecins, sages-femmes ou officiers de santé.

Toutes ces constatations ne nous font guère apercevoir l'avenir sous un jour favorable, nous pourrions ajouter que le prix de la vie augmente, que les impôts progressent et que la patente, qui nous est largement octroyée, ne semble pas devoir diminuer de sitôt.

En province, la répartition des médecins est, dit-on, mauvaise, et on fait remarquer que sur

(1) P. Brouardel, L'Exercice de la médecine et le charlatanisme, 1899, p. 38.

36,000 communes, il y en a 29,000 qui n'ont pas de médecin et que sur 2,000 cantons, il y en a 300 sans médecin. Je signalerai même, dans la Lozère, trois cantons contigus dans lesquels il n'existe aucun praticien. Autrefois, pour lutter contre cette répartition défectueuse on avait créé les officiers de santé. Pour des raisons multiples que j'ai exposées autrefois (1), le résultat ne répondit pas à l'attente et où il n'y avait pas de docteur il n'y eut pas davantage d'officier de santé. Pourquoi ? la raison en est fort simple. Le médecin, généralement peu fortuné, exerçant une profession libre, va s'installer dans une localité où il croit pouvoir vivre lui et sa famille. Si personne ne s'établit dans les cantons de la Lozère, c'est que là l'exercice de la profession médicale ne peut nourrir un médecin. J'ajouterai que c'est dans ces pays pauvres que l'on trouve le plus grand nombre de charlatans, magnétiseurs et rebouteurs de toute variété.

Bien souvent les maires des communes ne

(1) P.Brouardel, L'Exercice de la médecine et le charlatanisme, 1899, p. 11.

« PreviousContinue »