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IV. - INTERVENTION DE L'ÉTAT

Il serait inexact de dire que l'Etat n'a marqué, par son intervention, son souci de l'amélioration de la santé générale qu'après 1848.

Au commencement du siècle, le législateur avait tout d'abord réglé l'état civil des citoyens par les articles du Code qui visent les naissances et les inhumations. Incidemment, par le décret de prairial, il avait touché à des questions d'hygiène.

C'était aussi d'une façon indirecte qu'il avait agi dans ce sens, quand il avait constitué le corps de santé de l'armée, celui de la marine, les médecins des lycées, etc. Le but était plus curatif que prophylactique. Mais partout où l'Etat plaçait un médecin, il plaçait également un gardien de la santé publique; le médecin a tou

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jours revendiqué ce rôle, et l'on peut dire que toutes les lois concernant l'hygiène, qui ont amené une amélioration dans la santé publique, ont été provoquées par les médecins.

Dans le milieu du XIXe siècle, on accusait les médecins de professer des idées très avancées, le fait était vrai et s'explique parce que le médecin pénètre dans l'intimité des familles ouvrières, connaît les causes de leurs misères, notamment de celle qui suit la maladie, surtout la maladie du chef de famille.

Le rôle du médecin s'est donc singulièrement modifié pendant la dernière moitié du XIXe siècle. La médecine était presque exclusivement curatrice, elle est devenue essentiellement préservatrice.

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La première intervention directe du législateur pour améliorer la santé du peuple date de 1848.

Les hommes de 1848, honnêtes, dévoués à la cause du peuple, mais peut-être un peu trop

théoriciens, convaincus de l'utilité de l'hygiène, voulurent en faire pénétrer les principes dans les classes pauvres.

« Il n'est plus aujourd'hui un bon citoyen, disait Royer-Collard, un homme sincèrement ami de son pays et du bien public, qui ne sente, quelle que soit la différence des opinions, que le premier devoir de tous est de venir promptement en aide aux classes malheureuses, aux ouvriers, aux paysans, aux pauvres habitants des villes et des campagnes. Il faut, avant tout, leur assurer la santé, sans laquelle les autres biens n'ont aucun prix. >>

Dans ce but, le gouvernement, par décret du 10 avril 1848, institua auprès du pouvoir central le Comité consultatif d'hygiène, modifié ultérieurement par les décrets du 23 octobre 1856, du 5 novembre 1864, 15 février 1879, 4 mars 1881 et 8 mars 1884 (1).

Puis le gouvernement se préoccupa d'organiser dans les arrondissements des Conseils d'hy

(1) Marcel Peschaud, De l'intervention de l'Etat en matière d'hygiène publique, 1898.

giène et de salubrité sur la création desquels on fondait les plus grandes espérances.

<< Bientôt, écrivait Royer-Collard dans son rapport, les campagnes seront assainies, et les fièvres qui désolent une si grande partie de la France reculeront devant la main industrieuse de l'homme; les aliments et les boissons ne seront plus altérés par des fraudes criminelles ; les malades recevront les soins et les secours qui leur sont dus, quelle que soit la modicité de leurs ressources. Les habitations privées, mieux exposées et mieux construites, les hospices et les établissements publics devenus salubres, la santé des petits enfants protégée par une surveillance sévère, diminueront de toutes parts l'effrayante mortalité qui moissonne les derniers rangs de la société (1). »

Des instructions rédigées par Tardieu et Magendie furent adressées aux Conseils, et leur attention fut particulièrement appelée sur l'assainissement des localités et des habitations.

(1) Royer-Collard, Rapport sur la création des Conseils d'hygiène départementaux.

Les résultats furent loin de répondre à l'attente. Les Conseils d'hygiène ne disposant que de ressources insuffisantes et leurs avis étant dépourvus de toute sanction étaient voués à l'impuissance.

A côté de ces raisons d'ordre général, il en est d'autres d'ordre local qui ne sont pas sans avoir quelque importance. Dans les régions où affluent les étrangers, les municipalités croient ne pas avoir intérêt à dévoiler l'état sanitaire ; quand il est mauvais, elles craignent, s'il existe une épidémie, que les étrangers aillent vers 'd'autres stations et que les bénéfices que la saison doit rapporter à la région soient perdus. Dans ces conditions, le Conseil d'hygiène n'est pas consulté, et je pourrais citer tel Conseil d'hygiène du littoral de la Méditerranée qui ne s'est pas réuni depuis une dizaine d'années.

A côté des Conseils d'hygiène, le législateur institua des Commissions de logements insalubres.

La loi du 13-22 avril 1858 concernant les logements insalubres, c'est-à-dire «< ceux qui se trouvent dans les conditions de nature à porter

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