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genre avec l'Espagne, le Portugal et les Pays-Bas; la France ne consentit à traiter qu'en 1831 (1) et le droit de visite réciproque ne pouvait s'exercer que dans des parages déterminés.

Un traité signé en 1841 ne fut pas ratifié par le parlement français et en 1845 intervenait une convention anglo-française replaçant les navires de commerce des deux nations sous la surveillance exclusive de leurs marines de guerre respectives.

Le droit de visite peut être stipulé sans condition de réciprocité; il est alors une servitude unilatérale, mais lorsqu'il est accordé réciproquement il n'en est pas moins une servitude.

Naturellement le droit de vérification du pavillon et à plus forte raison le droit de visite ne peuvent pas être exercés dans la mer territoriale sinon par les vaisseaux de l'Etat riverain.

Les restrictions au droit de police et de juridiction sur la mer territoriale sont très rares. On en trouve cependant un cas dans la situation faite au Monténégro par l'article 29 du traité de Berlin ainsi conçu : « La police maritime et sanitaire, tant à Antivari que le long du Monténégro,sera exercée par l'Autriche-Hongrie au

(1) V. De Clercq, Recueil des traités de la France, t. IV, p. 157; t. IV, p. 226. Aux conventions franco-anglaises de 1831 et 1833 adhérèrent bientôt après, plusieurs Etats, Danemark, Sardaigne, Suède, Toscane, royaume des Deux-Siciles, villes libres de Lübeck, Brême et Hambourg.

moyen de bâtiments légers garde-côtes. » Cette dérogation au droit commun découle des restrictions au droit de législation maritime et à celui de sûreté, qui ont été imposées à cet Etat et que nous avons déjà signalées.

CHAPITRE IV

DROIT DE JURIDICTION.

SECTION I.

Condition des étrangers dans les pays d'Orient.

Dans les limites de son territoire, l'Etat n'a à subir aucune concurrence dans l'exercice du droit de juridiction, corollaire du droit d'empire. Seul il peut organiser les diverses institutions nécessaires pour trancher les différends survenus entre les particuliers et pour réprimer les violations de la loi. Toutes les personnes, regnicoles ou étrangères en résidence sur le territoire, relèvent de la souveraineté locale. Ce principe ne souffre pas d'exception, relativement aux Etats de civilisation chrétienne, mais il aboutirait à l'iniquité flagrante s'il était appliqué dans les pays où règne le fanatisme musulman. « Les Etats hors chrétienté, dit M. FéraudGiraud, sont forcés d'exclure les étrangers de leurs territoires ainsi que les sujets non croyants sous peine de violer la loi théocratique de leur constitution; ou bien il faut qu'ils autorisent, en faveur de ces dissidents étrangers ou nationaux, un régime exceptionnel, qu'ils leur permettent de vivre sous leurs lois propres que la juri

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diction de ces dissidents peut seule appliquer. On ne peut pas permettre normalement des dérogations à des ois religieuses en faveur de certains individus, l'exception en pareille matière entraînant l'abolition de la loi elle-même, le renversement des lois et des croyances; mais on peut, en conservant intacte la loi religieuse, autoriser des personnes étrangères aux croyances sur lesquelles elle est fondée à vivre sous l'empire d'une législation étrangère propre à leur nationalité ou fondée sur d'autres croyances religieuses (1). » C'est pourquoi les Etats occidentaux se sont depuis très longtemps préoccupés d'assurer à leurs nationaux résidant en Orient et Extrême-Orient une situation qui leur permette de vivre et de commercer en sécurité. Ils y sont parvenus au moyen des capitulations conclues avec les différents souverains de l'Empire ottoman, de la Chine, du Japon, du Siam, de Mascate, de la Perse.

Pour ce qui regarde la France les textes en vigueur soit partiellement, soit intégralement, sont : la capitulation de 1740, un édit de 1778 et la loi du 28 mai 1836 concernant les consulats du Levant et de Barbarie; les traités de 1844 et de 1852 pour la Chine, de 1844 pour I'Imanat de Mascate, de 1858 pour le Siam, de 1858 pour le Japon, de 1855 pour la Perse. Les traités du Maroc avec la France remontent à celui du 30 septembre 1630

(1) Traité de la juridiction française dans les Echelles du Levant et de Barbarie, I, p. 29 et s. Les justices mixtes dans les pays hors chrétiente, p. 12 et s.

sous Louis XIII: mais c'est le traité du 23 mai 1767 qui sert de base aux rapports actuels des deux Etats.

Dans ces pays les consuls jouissent des immunités et des honneurs qui ailleurs sont l'apanage exclusif des agents diplomatiques. Leur personne et leur domicile sont inviolables, ils sont exempts de toute espèce d'impôt. Au regard de leurs nationaux ils exercent des pouvoirs de police et de juridiction. Avant le XIX siècle les commerçants français établis dans les Echelles du Levant et de Barbarie formaient une « nation » qui s'analysait en trois organes : l'assemblée de la nation, les députés de la nation, le consul.

L'assemblée se composait de tous les commerçants français en résidence dans les Echelles. Sa fonction était de nommer les députés et de statuer sur les règlements en matière commerciale et les taxes à percevoir. Les députés élus chaque année veillaient aux intérêts de la communauté, levaient les droits établis et étaient en correspondance avec la chambre de commerce de Marseille. La nation et les députés participaient à l'administration, mais le gouvernement était réservé au consul.

Outre son rôle de juge, il était notaire et officier de l'état civil de plus en qualité de gouverneur il promulguait les ordonnances royales et tenait la main à leur exécution. Quelle était la sanction de ces pouvoirs de police du consul? D'abord l'admonestation en pleine assemblée, l'amende, enfin l'expulsion de la colonie et

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