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fait dire à quelques Auteurs, que la cataracte s'engendroit quelques-fois entre la cornée & l'uvée. Quand les accompagnemens font ainsi, la pupille ne fe refferre qu'avec peine, parce que l'uvée eft preffée par ces accompagnemens, & quand on abbaiffe la cataracte, quoique le cristallin refte en bas, il paroît souvent de ces accompagnemens en forme de nuages par le trou de l'uvée, qui quelques-fois ne fe diffipent pas entiérement. Ces cataractes pour l'ordinaire fe forment fort promptement, & pour reüffir on doit les abbaisser sitôt quelles commencent à être meures, parce que fi on attend, pour peu de folidité que ces accompagnemens ayent, elles font fujettes à remonter.

D'autres-fois ces accompagnemens font en fi petite quantité, que les cataractes en paroiffent petites & enfoncées. Dans cette rencontre le mouvement de l'uvée eft tres libre, fon trou fe dilatant & refferrant fort

promptement. Elles font pour l'ordinaire long-tems à le former, & fouvent elles fe trouvent traverfées, & ces traverses ou barres ne font autre chofe qu'une partie de la membrane qui couvre le cristallin, qui n'a pas été entiérement confommée, pour la petite quantité de l'humeur qui caufe la cataracte; même quelquesfois cette membrane ne fe confomme point: d'où vient aufsi que ces cataractes font pour l'ordinaire difficiles. à feparer; mais quand elles font feparées, elles fe précipitent aifément.

Enfin les cataractes different à raifon de leur couleur, en ce que les unes font de couleur celefte; d'autres blanches qui font les plus communes, sous lesquel

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les je comprens celles qui font d'un blanc de neige, d'un blanc de plâtre, d'un blanc de perles, d'un blanc argentin ou mercuriel, & d'autres blancs meflez: d'autres font jaunes: d'autres noires: d'autres brunes, ou de couleur de fer, ou de châtaigne d'autres grifes ou cendrées : & d'autres verdâtres. Nos Auteurs en font encore de rouges, mais je n'en ay jamais vû.

Il y a aparence que toutes ces differentes couleurs naiffent de la differente action de cette ferofité acide, que j'ay fupolée être la caufe des cataractes. Dabord en détruifant la transparence du cristallin, elle le blanchit, & en conduifant cette humeur qui forme les accompagnemens, elles les rend pareillement blancs, & leur blancheur eft diverse, fuivant leur diverfe difpofition: ainfi quand ces accompagnemens font fubtils, ils font paroître une couleur celefte, quand ils font plus épais, plus épars, ou plus ferrez, ils font paroître differents blancs, qui font plus ou moins luifants, felon que leur fuperficie eft plus ou moins polie. Certe même ferofité acide agiffant plus vivement & plus long-tems, elle jaunit non-feulement les cataractes, mais auffi leurs accompagnemens, enfuite elle les noircit, comme je l'ay montré au chapitre précédent : & de ces differents meflanges de blancs, de jaune, & de noir, viennent les verdâtres, les brunes, celles de couleur de fer ou de châtaigne, les grifes & les cendrées. On peut encore dire que la diverfe temperature des malades, contribue beaucoup à la diverfité de toutes ces couleurs, puifqu'un bilieux par exemple est plus fujet aux cataractes jaunâtres ou verdâtres, un melan

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colique aux noires, aux brunes, aux grifes ou cendrées, & à celles de couleur de fer ou de châtaigne, & un fanguin & un pituiteux aux celeftes & aux blanches, quoique quelque fois toutes ces efpeces de cataractes ne commencent que d'entrer dans leur maturité.

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Un Chirurgien Oculifte doit confiderer attentivement toutes ces differentes couleurs, parce quelles dénotent fouvent les differents âges des cataractes, & leurs differentes confiftances, qui lui aident à faire un pronostic plus certain de la bonne ou mauvaise reülite des operations, comme je le diray en son lieu.

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Uand l'humeur qui caufe la cataracte commence

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à couler ou à s'amaffer entre le cristallin & la membrane qui le recouvre. les malades ne s'en aperçoivent pas aufsi-tôt, parce qu'il eft rare que certe humeur fe jette en même tems & également fur les deux yeux : ce n'est que lorsqu'ils regardent à l'ordinaire & que ferments fortuitement l'oeil fain, ils s'aperçoivent de quelque diminution de vue dans l'autre. Souvent ils ne s'en plaignent pas, ayant quelques-fois ouy dire à quelques perfonnes, quelles ne voyoient pas également des deux yeux. Et quand ils consulteroient alors quelque Medecin ou Chirurgien, on ne pourroit leur rien dire de certain, ce figne étant équivoque, & on se contenteroit de leur ordonner quelques remedes ge

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neraux qui n'empêcheroient pas le progrés de leur maladie.

Quand ensuite les malades femblent voir voltiger en l'air, quelques-unes ou plufieurs de ces chofes qui ressemblent à des cheveux, à des fils, à de la pouffiere, à des toiles d'araignées, à un crefpe, à des barres, à des flocons de neige ou de laine, & à des moûches, ce que l'on nomme Imaginations, comme je l'ay dit au chapitre 5. on peut s'affûrer davantage du commencement d'une cataracte : mais ce figne n'eft pas encore certain, à moins qu'en même tems on ne s'aperçoive d'une diminution fenfible de la vüe. Il y a des perfonnes qui font travaillées de ces imaginations fans que la cataracte arrive, comme je le diray ciapres au chapitre 2z. même il y a des malades qui ne voyent aucunes, de ces chofes, mais feulement une forte diminution de vie précéde leurs cataractes.

Quand ces chofes fe fortifient de plus en plus, & fans intermiffion, que la vue diminue à mefure, & que les malades ne peuvent plus diftinguer que confufément les objets communs, on peut s'affûrer du com'mancemens d'une cataracte. Et on juge quelle fe formera promptement, fi tout ce que je viens de dire fe fait en peu; & lentement, fi cela ne fe fait que dans un long-tems.

Ne confondez pas parmi les fignes avant-coureurs des cataractes, ces efpeces d'imaginations à peu prés femblables à celles que je viens de raporter, ces dimínutions & ces erremens de vue qui arrivent à ces perfonnes cacochymes dont l'estomach est rempli d'im

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puretés, aux perfonnes atrabilaires, à celles qui tombent dans la frénéfie, aux femmes ou filles travaillées, de vapeurs ou de fuffocations, aux yvrognes & autres. Il est aisé de ne s'y point tromper, parce que ces fymptomes ne font pas continuels y ayant de l'intermiffion, qu'ils guériffent par les remedes, ou qu'ils cessent quand la maladie ou la caufe qui les produit ceffe; & les au

tres au contraire.

On connoît que la cataracte augmente, quand on voit que la couleur de la prunelle fe change, que l'on commence à s'apercevoir des nuages blancs, & que la, vüe est si diminuée, que les malades ne peuvent plus en aucune maniere distinguer les objets communs mais feulement les couleurs vives & encore tres confufément, & une lumiére blanche & confuse lorsqu'on les expofe au grand jour.

On connoît quelle est dans son état, lorsque ces nüages font fi fort augmentez que la pupille en paroît toute blanche, ou de quelqu'une des autres couleurs énoncées au chapitre précédent : que cette couleur eft égale en toutes les parties, ce qui dénote l'égalité de la fubftance des accompagnemens : & que les malades n'aperçoivent plus qu'une foible lueur, & les ombres des corps opaques, que l'on interpose ou passe entre leurs yeux & le grand jour.

Raportez ici quelques-uns des fignes que vous trouverrez dans le chapitre suivant, qui font connoître en +même tems l'état de la cataracte & le jugement qu'on en peut faire, & raportez y auffi quelques-unes des chofes dites aux chapitres 5. & 7.

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