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roient auffi reconnu, qu'il doutoit fi fort qu'on pût guérir les fuffufions par les remedes, que fur la fin du chapitre 4. de fon 4. livre De la compofition des remedes felon les Lieux, apres avoir propofé les remedes qui conviennent aux fuffufions, il conclud ainfi : Promiffiones itaque omnium horum pharmacorum magna funt, verum effectus aliquando nullus, aliquando valde exiguus.

Il y en a auffi d'autres qui fe font vantez un peu trop hardiment d'en avoir guéry, ou prévenu quelques-unes. Il y avoit chez ceux la plus de vanité que de bonne foy; & le feul recit vague, indéterminé & mal circonftancié qu'ils font de leurs cures, est plus que fuffifant pour les confondre de mensonge, ou tout au moins d'erreur, auffi bien que quelque charlatans modernes qui n'ont aucune teinture de Medecine ni de Chirurgie, ou s'ils en ont quelqu'une, elle est si mediocre, qu'ils ne meritent pas de porter le titre dont ils s'honorent, & qui cependant exagérent impunément les vertus de leurs prétendus fecrets pour guérir les cataracte, & trompent ainfi le public.

De tout ce que deffus, je conclus qu'on ne peut guérir par les remedes les cataractes, quand même elles ne feroient encore que naiffantes ou non confirmées, & qu'il eft tres difficile de les prévenir. Qu'ainsi, lorsqu'on a reconnu par les fignes diagnostics ci-deffus expliquez, qu'une cataracte fe forme, on doit laiffer les malades en repos fans leur faire aucun remcdes; à moins qu'il n'arrivât en même tems quelques autres maladies que l'on traiteroit fuivant les régles : & au reste leur recommander d'observer un bon regime de

vivre, jufques à ce que leur cataracte foit parvenue à une entiére maturité pour la pouvoir abbaisser par l'operation; les exhortant d'attendre patiemment ce tems, & leur faifant efperer un heureux fuccez de leur maladie, pour leur diminuer le chagrin quelle leur cause. Et en cas qu'une cataracte foit long-tems tems à parvenir en fa maturité, on ne doit pas effayer de la faire avancer par l'usage des aliments vaporeux & qui donnent dans la tête, comme quelques Auteurs le confeillent : cette conduite eft réprouvée par les meilleurs Praticiens, & avec raison; parcequelle seroit capable d'exciter des douleurs de tête. fâcheufes, & d'autres defor dres dans toute l'economie du corps, que l'on ne pourroit enfuite corriger qu'avec peine.

Ce qu'il faut faire avant l'operation, le tems que l'on doir choifir, la qualité des éguilles.

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Uand on s'eft affûré par les fignes tant diagnoftics que prognoftics, que la cataracte eft dans fa maturité & quelle pourra obéir à l'éguille, on en avertit le malade. Et s'il fouhaite ardemment qu'on lui faffe l'operation, la premiére chofe qu'un Chirurgien doit faire, c'eft de confiderer l'état prefent de fon malade. S'il reconnoît que fa fanté soit bonne, n'ayant point d'autre maladie que fa cataracte, il lui doit conseiller de se faire préparer à l'operation par Monfieur fon Medecin ordinaire, ou de lui préparer

lui même, s'il ne fe rencontre point de Medecin, comme il arrive affez fouvent à la campagne, ou fi le malade est si dénüé de moyens qu'il ne puiffe fournir à la dépence pour en faire venir.

Cette préparation confifte à lui prescrire un bon regime de vivre & fort exact quelques jours avant l'operation, lui deffendant le vin & les aliments échauffants ou groffiers & de mauvais fuc: lui tenir le ventre libre par. le moyen de quelques lavemens émollients & rafraîchiffants: le faigner une fois s'il y à plenitude, ou deux fois fi la plenitude eft grande : le purger enfin, si on juge qu'il y ait encore beaucoup d'excrements retenus que les lavements n'ayent pû vuider, ou qu'il y ait quelque indice de cacochymie. La purgation doit être douce, parcequ'on n'a deffein que de purger les premiéres voyes, fans trop ébranler les

humeurs.

Par exemple on prendra deux gros de fenné, un demy gros de rhûbarbe, une once de moëlle de caffe & un demy gros de cristal mineral, qu'on fera infuser dans un demy septier mesure de Paris de décoction de racines de cichorée & de chiendent, & dans la coulûre on diffoudra une once de manne & une once de firop de fleurs de pefché.

Ou, fi le malade eft d'une complexion fort délicate, on fe contentera d'une once de caffe mondée, une once & demie de manne & une once de firop de cichorée, qu'on diffoudra dans deux verres de petit lait pour deux prifes que l'on fera prendre à trois heures de diftance l'une de l'autre.

L'intention que l'on a en préparant ainsi le malade, c'eft de prévenir la fluxion & l'inflammation qui arrivent fouvent enfuite de l'operation, & qui font à redouter lors quelles font grandes. Ainfi comme l'abondance du fang en pourroit-être une cause, on diminuë fa quantité: & comme la cacochymie & la quantité des excréments retenus en pourroient auffi être une autre, on corrige l’'une & l'autre par les potions purgatives, & par les lavemens, & on empêche par la diete exacte une nouvelle abondance de fang & une nouvelle cacochymie.

C'est pourquoi quand il n'y a ni plénitude, ni indice de cacochymie, on peut obmettre la faignée & la purgation, fe contentant feulement d'un regime de vivre humectant & rafraichiffant, qu'on fera obferver au malade trois ou quatre jours avant l'operation, & la vieille de l'operation de lui faire recevoir un lavement pour décharger le ventre de fes gros excrements, quand même le malade auroit déja été purgé.

A l'égard du tems de l'operation, quand on la peut faire dans le primtems ou dans l'automne, choisissant le mois de May ou de Septembre, c'est le mieux : mais quand le malade ne peut, ou ne veut differer, ou que la cataracte eft d'une nature à s'endurcir, & que l'on aprehende en retardant, que ces accompagnemens ne refiftent trop, on la peut faire en tout tems; évitant · feulement les grands froids & les extremes chaleurs, comme contraires aux playes des yeux. Et quand on veut commencer à préparer le malade, il faut choifir un tems beau & qui paroiffe ftable, afin que le jour

de

de l'operation puisse se rencontrer beau & ferain, parcequ'il faut bien voir pour faire cette operation.

Avant l'operation il faut prendre garde fi les éguilles dont on doit fe fervir font en état. Elles doivent être d'une moyenne groffeur, à peu prés de celles de ces éguilles à coudre en linge commun. Les groffes font une trop grande folution & par consequent beaucoup de douleur, & les petites n'ont pas affez de réfiftance pour pouvoir pénétrer la cornée fans plier, & ne font pas fi commodes pour abbaisser abbaiffer la cataracte. Elles doivent être bien polies, pour gliffer plus aifément, bien pointuës pour piquer avec moins de douleur, un peu tranchantes des deux cotez vers la pointe, à peu prés comme ces éguilles droites à coudre les playes, pour entrer plus facilement & pour furmonter quelques difficultées qui fe rencontrent quelques-fois dans l'operation, dailleurs il eft plus aife de les rendre bien pointuës en les repaffant fur des pierres à lancette. Quelques Oculistes fe fervent d'éguilles rondes, parceque difent-t'ils les tranchantes coupeut les fibres. quelles pénétrent, ce qui eft vrai; mais les rondes meurtiffent auffi davantage les fibres quelles écartent, & ces fibres meurtries se rétablissent plus difficilement. Je m'en fuis fervi comme eux, & je me fuis mieux trouvé des premiéres par les raifons ci-deffus, Elles doivent être emmanchées dans des manches ronds, longs & déliés faits d'yvoire, d'argent ou d'autre matiére, pour les tenir & manier plus aifément. Enfin on en doit avoir au moins deux, afin que fi on fait l'operation fur les deux yeux en même tems, on puisse

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