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éguille vers la partie fupérieure du cristallin, & je l'abaiffay enfuite doucement, & pendant ce tems l'humeur aqueuse blanchiffoit davantage, je la portay une feconde fois de même, & en l'abaiffant le malade me dit qu'il voyoit un grand jour ; cela me fit juger que le criftallin fe précipitoit: en effet, quoique l'humeur aqueufe fût fort trouble, la prunelle ne me parût pas fi blanche, & je vis quelle fe refferroit beaucoup; ce qui me confirma que le criftallin étoit entiérement précipité. Je retiray peu de tems apres mon éguille, & je penfay le malade à l'ordinaire. Quelques jours apres je retournay le voir, & je trouvay que l'humeur aqueufe étoit fort élaircie, & qu'il diftinguoit toutes fortes d'objets : je le vis encore fept ou huit jours apres en paffant par fon village, & je le rencontray failant fon ouvrage & entiérement guéry, fans qu'il parût qu'il eût jamais été incommodé de cataracte.

II. Obfervation fur une autre Cataracte laiteuse.

Le 20. Octobre 1691. j'avois abaiffé une cataracte à Bernabé Contant de Vannes prés faint Benoît, qui réüffit comme on pouvoit le fouhaiter, auffi avoitt'elle toutes bonnes marques. L'oeil gauche dans le même tems étoit travaillé d'une autre cataracte qui ne paroiffoit pas être meure, j'en differay auffi l'operation. Au commencement d'Octobre de l'année suivante il me vint trouver. Cette cataracte me parut affez bonne & bien meure, auffi lui donnay-je jour pour l'operation au 11. dudit mois. Quand mon équille fut dans l'œil & que je travaillay à abaisser la cataracte, je m'a

&

perçeus qu'en preffant deffus elle enfonçoit, & il me fembloit quelle flotoit dans l'humeur aqueufe; je fis plufieurs tentatives fans avancer en rien, parceque mon eguille ne faifoit que gliffer deffus : je me déterminay à retirer un peu mon éguille, pour porter la pointe vers le milieu de la cataracte, & en la preffant, je rompis la membrane qui recouvre le cristallin auffi-tôt une matiére laiteufe s'épanche & rendit l'humeur aqueule comme une eau dans laquelle on auroit diffoût du favon: en abaiffant la pointe de mon éguille, j'aperçeus le cristallin comme un gros pois qui s'abaiffoit, je portay deffus l'éguille pour le loger au bas de la pupille où il demeura. Comme je retirois mon éguille, l'empreffement que le malade eut à répondre à un de fes voifins qui lui demandoit s'il voyoit, lui fit tourner brufquement l'œil en dehors pour le regarder, cela fit que là pointe de mon éguille rencontra le bord de la pupille & le déchira; quelques jours apres l'œil s'éclaircit entiérement & le malade guérit. La pupille est restée un peu dilatée, il void cependant de cet œil les objets proches comme de l'autre, mais les éloignez, il les void un peu confufément, parceque la pupille ne peut affez fe refferrer. Cela ne l'empêche pas de travailler aux vignes & de lire dans fes heures.

III. Obfervation fur une Cataracte caféense.

En l'année 1689. le 14. May, je fis l'operation fur un nommé Claude Robert tonnelier au fauxbourg Goyer de Sezanne. Quand mon éguille fut introduite dans

l'œil, la cataracte me parut fe divifer en plusieurs piéces, je portay la pointe de l'éguille vers la partie fupérieure & moyenne du cristallin que j'abaissay du premier coup, enfuite je travaillay à abaiffer les plus confiderables piéces; j'eus beaucoup de peine à en abaiffer une qui me paroiffoit grande, & il en refta plufieurs autres fur lefquelles mon éguille n'avoit point de prife & qui me fembloient floter; je ceffay mon travail & retiray l'éguille, efperant que ces piéces fe précipiteroient dans la fuite. Pendant l'operation l'humeur aqueufe fe brouilla un peu, & huit ou dix jours apres, retournant à Sezanne, je reconnus que cette humeur s'étoit éclaircie, que les moindres piéces s'étoient précipitées, & qu'il en reftoit une qui occupoit le milieu & prefque les deux tiers de la pupille, en maniére d'un nuage plus épais en fon milieu; de forte que le malade ne voyoit qu'une grande lumiére, fans pouvoir diftinguer la figure des objets, mais feulement leurs couleurs, comme blanches, rouges, vertes, &c. Ce nuage paroiffoit branler quand le malade remuoit Foil, ce qui me fit croire qu'il fe précipiteroit bientôt : cela n'arriva qu'environ quatre mois apres l'operation, comme je l'ay fçeu du malade qui me dit qu'en defcendant de fa chambre pour fortir dans la rue, il fut furpris, étant dans l'allée de sa maison, de voir & de connoître les paffants. Et depuis ce tems-là, il a toûjours continué à travailler de son metier de Tonnelier jufques à prefent avec cet œil là, ayant perdu l'autre d'un autre maladie..

Dans ce tems là j'étois perfuadé de ce que c'étoit

que

:

que la cataracte mais je ne pouvois m'imaginer ce que ce pouvoit être que ces pièces qui s'en feparoient, ne connoiffant point encore les accompagnemens.

IV. Obfervation fur deux Cataractes avec des accompagnemens nombreux.

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Le Mardy 26. Août 1698. j'abaissay deux cataractes à un nommé Carlet dit du Menne Paticier entre les deux portes du faux-bourg Goyer de Sezanne. Je jugeay par les fignes ci-deffus, que ces deux cataractes avoient des accompagnemens nombreux, quoique nouvelles l'une & l'autre, celle de l'œil droit étant un peu plus confirmée que celle de l'œil gauche. Je commençay par celle de l'œil droit, & quand j'eus introduit mon éguille comme je l'ay dit ci-deffus au fujet de ces fortes de cataractes, j'eus beaucoup de peine à lui faire quitter le lieu quelle occupoit ; & quand elle l'eût abandonné, j'eus encore plus de peine à le loger au bas de la pupille pour la multitude des accompagnemens qui s'embaroiffent autour de mon éguille, j'en vint cependant à bout; mais comme je la contenois ainfi, une legere foibleffe furvint au malade, & aprehendant qu'il ne tombât tout-à-fait en fyncope, je retiray mon éguil le. Quand il fut revenu de fa foiblefle, j'examinay fon œil, & je vis que la cataracte étoit reftée, & qu'il paroiffoit feulement un peu d'accompagnemens vers le bas de la pupille. Je travaillay enfuite à celle de l'œil gauche, qui ne me fit pas tant de peine à abaiffer, mais elle remonta plufieurs fois, à la fin elle demeura fujette. Huit jours apres je retournay le voir, & je

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trouvay que ces deux cataractes étoient remontées en partie, de forte que prefque les deux tiers de châque pupille étoient occupées par les accompagnemens & le malade ne distinguoit que tres difficillement les objets. Cela n'étoit arrivé que le cinquiême jour apres l'operation, à ce que me dit Monfieur Houllier fon Chirurgien ordinaire, qui en attribuoit la cause à l'impatience & à l'emportement que le malade eut ce jour là. Je ne trouvay pas à propos de les abaisser derechef, parceque je les voyois branler au moindre mouvement de l'œil, que le malade voyoit quelques-fois les objets affez bien pendant un peu de tems, que j'étois fûr quelles ne tenoient à aucune partie; & que dailleurs ayant refté pendant cinq jours abaiffées je crus quelles ne s'affermiroient pas dans le lieu quelles occupoient. Aing j'efperay que quand leurs accompagnemens feroient fletris & diminuez, elles fe précipiteroient derechef; ce qui arriva entiérement dans le cinquième mois ou environ apres l'operation, ne s'étant précipitées que petit à petit.

V. Obfervation fur deux Cataractes avec des accompagnemens folides.

Au mois de Juin 1694. une nommée Madame Germain de Villenoxe femme déja âgée me vint trouver pour lui abaiffer deux cataractes, une plus vieille & un peu jaune, l'autre un peu plus nouvelle, plus blanche & meilleure. Je lui fis l'opération chez un Bourgeois de ce lieu chez lequel elle étoit logée le trente du même mois, & je travaillay dabord fur la meil

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