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verd blanchâtre, ou d'une couleur celefte fort claire : enfin il devient d'un verd plus foncé, ou jaûne, ou noirâtre, ou d'un blanc luifant, ou d'un grain de grêle, comme je l'ay dit, & alors il perd sa transparence & la vie eft entiérement ôtée.

Comme cette altération fe fait fans que la membrane qui recouvre le cristallin fe détruife, je dois avertir ici que dans le Glaucoma & dans les autres maladies du criftallin ou cette membrane refté entiére le cristallin alteré paroît prefque toûjours luisant : & c'est pour cela que les cataractes luifantes font toûjours tres fufpectes, pour la crainte qu'il y à quelles ne foient de fauffes cataractes, ou pour le moins quelles n'en participent.

Tant qu'il paffe au travers du cristallin des rayons de lumière, le mouvement de l'uvée fe conferve plus ́ou moins, fuivant les differents dégrez de la maladie: & quand il n'en paffe plus, elle demeure immobile, je veux dire que fon trou ne fe dilate, ni se refferre, & examinant l'œil de l'une ou de l'autre des trois maniéres énoncées au commencement du chapitre 9.

Lorfque le Glaucoma arrive par une intemperie de tout l'œil, l'œil fe diminüe & deffeiche, & quand c'est par une autre cause particulière, il conferve davantage fa groffeur naturelle. Chez les vieillards il diminuë auffi, comme on le remarque par les rides de l'uvée, alors pour l'ordinaire les deux yeux sont affectez également.

Il arrive quelques-fois que le Glaucoma reste dans un état imparfait fans augmenter, ce qui est plus or

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rayons

dinaire chez les vieillards: & comme en cét état les de lumière peuvent encore paffer au travers du criftallin, les malades auffi peuvent voir les objets communs, confufément toutes-fois.

Dans cette maladie, le cristallin se deffeichant & diminuant en volume, paroît pour cette raison plus enfoncé que dans la cataracte vraye, & dans celle que je décriray ci-apres.

Il est inutile, de marquer ici les differences du Glaucoma d'avec la cataracte vraye : ce que j'ay dit de ces deux maladies, fuffit pour les pouvoir diftinguer l'une de l'autre ; dailleurs il eft difficile de les confondre, & la plûpart de nos Auteurs ne s'y font gueres trompé, quoi qu'ils ayent compris fous cette maladie celle que je décriray dans le chapitre fuivant, qui en differe beaucoup comme je le feray voir.

Quoique plufieurs de nos Auteurs propofent des remedes dans le commencement de cette maladie pour empêcher fon progrés, l'expérience toutes-fois nous montre qu'ils y font inutiles; & pour moi j'ay toûjours reconnu cette maladie pour incurable en tout fes états, & en cela je fuis du fentiment d'Oribafe raporté ci-devant au chapitre premier, lorfqu'il dit, Glaucomata omnia curationem non recipiunt.

Je n'ay point trouvé d'occafion d'obferver cette maladie apres la mort de personnes qui en fussent travaillées mais je l'ay examinée beaucoup de fois fur des perfonnes vivantes : ce qui m'a donné lieu de faire les remarques fufdites. Voici une obfervation qui fera connoître jufques à quel dégré le cristallin fe peut deffeicher. Obfervation

OBSERVATION.

Etant à Sezanne au mois de Septembre 1700. Mr. Houllier Maître Chirurgien me parla d'un Maréchal du Faux-bourg de Broyes, travaillé d'une cataracte toute extraordinaire. J'eus la curiofité de voir cet homme, je me transportay chez lui avec ledit fieur Houllier. Je reconnus que le criftallin de l'œil gauche étoit fi desseiché, que les fibres qui forment les pellicules extérieures de ce corps, laiffoient entr'elles des petites cannelûres, qui formoient une infinité de lignes tres bien ordonnées, qui partoient du milieu de fa fuper•ficie antérieure, & s'étendoient à fa circonférence. La couleur de ce cristallin étoit d'un brun jaunâtre, & quand on le regardoit au grand jour, elle paroiffoit changeante. Cet homme qui eft affez âgé me dit qu'il y avoit bien vingt ans qu'il avoit perdu la vue de cet œil.

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Ne maladie contraire à celle ci-deffus décrite, eft une excroiffance démesurée du cristallin, qui n'a point été remarquée par nos Auteurs, ni même par nos Oculiftes modernes, les uns & les autres la confondant avec le Glaucoma. Je l'apelleray, Protuberance, à cause que le criftallin dans cette maladie paroît éminent, & qu'il s'avance en devant.

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Cette maladie est une altération toute particuliére du criftallin, par laquelle il augmente en volume, perd fa transparence & fa figure naturelle, & devient plus folide qu'il ne doit être naturellement.

Si le deffaut de nourriture eft la caufe du deffeichement du cristallin, il y a tout lieu de croire que l'excez de nourriture eft la caufe de fa Protuberance: car il eft aifé de concevoir qu'un fuc nourricier un peu plus vifqueux qu'il ne doit être, fe portant abondamment par les canaux ciliaires entre le criftallin & la membrane qui le recouvre, ne circule que difficilement, je veux dire, que n'y ayant que les parties les plus fubtiles & aqueufes de ce fuc, qui puiffent traverfer les pores de la membrane qui recouvre ce corps pour fe mesler avec l'humeur aqueufe & circuler avec elle, les parties les plus vifqueufes & les plus difpofées à s'unir s'amaffent entre ce corps & cette membrane: ainfi ce fuc échapé & errant pour ainfi dire autour du cristallin, & entre les interftices de fes fibres, s'épaiffit enfin & augmente le volume de ce corps. Et cela de la même maniére que le fuc nourricier de l'os, s'échapant, ou à cause de quelque folution de l'os, ou à cause de la féparation du periofte, en s'épaiffiffant & prenant corps, forme un callus, ou une exotose.

Que ce foit un fuc nourricier qui foit la cause de cette maladie, il y a aparence, puifqu'il eft capable d'augmenter le volume du cristallin, fans lui caufer d'autre altération que celle de la perte de fa diaphaneïté, qu'on doit attribuer feulement au changement que cette humeur cause dans la difpofition des pores

de cette partie de la même manière que les corpufcules du froid, en s'infinuants dans les pores de l'huile, de l'eau & d'autres liqueurs, en changeant les couleurs, & détruisent ou diminuent beaucoup leur tranfparence en les glaçant.

Les fignes de cette maladie dans fon commencement font un peu équivoques; mais dans fon progrés ils deviennent tres fenfibles.

Les malades fe plaignent d'une diminution de la vüe de l'un ou de l'autre oil, ou de tous les deux. Le trou de l'uvée paroît un peu plus grand qu'à l'ordinaire, fans fe refferrer, & le cercle de l'iris par consequent eft un peu plus étroit, fans qu'on remarque dabord rien de blanc par de là la pupille, & jufques alors on ne peut encore diftinguer cette maladie de la cataracte vraye, & de la maladie que je décriray au chapitre premier de la feconde partie, les premiers accidents de ces maladies fe trouvants prefque femblables. Mais dans celle-ci', quelque tems apres on remarque un nuage à l'endroit du cristallin, qui augmentant de plus en plus, fait paroître le criftallin plus ávancé, & d'une couleur de cotne blanche, polie & luifante, quelques fois fa fuperficie est égale, & fort fouvent elle eft inégale. Le trou de l'uvée s'agrandit encore & conserve sa rondeur, lorsque la superficie du cristallin est égale, & quand elle eft inégale & cornüe, ce trou n'eft plus rond, mais inégale, fuivant les inégalitées du cristallin qui s'avance. Souvent en. cet état les malades voyent une foible lueur, & quelques-fois ils n'en voyent aucune. Et quoi qu'on les ex

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