Page images
PDF
EPUB

L

3. De l'Uvée.

CHAPITRE VIII.

A membrane qui eft immediatement au deffous de la cornée fe nomme Rhagoïde, ou Vvée, pour fa reffemblance à la peau qui recouvre un grain de raifin & dont on a féparé la queue, & Choroide, parce que de même que le chorion environne & contient l'enfant dans la matrice, & fert d'appuy aux vaiffeaux qui lui portent fa nourriture, cette membrane contient les parties principales destinées à la vie, & reçoit & affermit les vaiffeaux qui fe doivent distribuer à ces mêmes parties.

Elle est beaucoup plus mince que la cornée, & est tres délicate fe déchirant aifément. Elle paroît fort obfcure en toutes les parties, enforte qu'elle ne permet l'entrée de la lumière que par fon trou qui eft en fa partie antérieure, & cela à l'occafion d'une couleur noire dont elle eft enduite, qui dans l'homme & dans plufieurs animaux rend cette membrane fort noire, qui d'elle même ne l'eft pas, comme on peut le connoîtré en lavant ou ratiffant cette couleur qui se sépare aisément. Cette membrane ne fe trouve pas également enduite de cette couleur en toutes fes parties. Il y en a davantage en fa partie extérieure qui touche la cornée, & dans la surface intérieure de l'iris, que dans fa tie intérieure du côté de la rétine, & dans la partie antérieure de l'iris: même dans le bœuf & divers au

par

éres animaux l'uvée fe trouve de diverfe couleur du côté qu'elle touche la rétine, & dans ceux là il fe rencontre tres peu de cette teinture noire.

Cette membrane tapiffe tout le fond de la cornée dont elle imite la figure, & elle ne s'en sépare qu'à l'endroit où elle forme l'iris, où elle eft plus épaiffe & plus forte qu'en fa partie poftérieure. Elle s'atache à la cornée en differents endroits. Dans fon fond elle est intimement unie à la circonférence de l'entrée du nerf optique; enfuite elle n'eft plus attachée que par les vaiffeaux, je veux dire par les nerfs, les arteres & les veines qui paffent au travers de la cornée & fe jettent en cette membrane. Et lorsqu'elle eft parvenüe vers la fin de la cornée opaque, elle s'attache en rond fur & prés de fon bord, & cela par le moyen d'un cercle en maniere de petite couronne, qui est d'une substance differente de l'uvée, pour enfuite s'en féparer & former l'iris.

L'Iris, eft cette partie de l'uvée que l'on voit au travers de la cornée tranfparente, ainfi nommée à cause de la diversité ou du mêlange des couleurs qui s'y remarquent, qui font ou bleues, ou jaunes, ou vertes, ou noires, &c: & l'on croit que ces couleurs fuivent la diverse temperature du cerveau & des yeux, & qu'elles font plus ou moins vives felon que les efprits font plus ou moins agitez. La couleur dominante de l'iris donne le nom à l'œil; ainfi on appelle un Oeil bleu, quand l'iris eft plus meflé de bleu &c.

On remarque au milieu de l'iris un trou qui eft toûjours rond en l'homme, & qui dans quelques animaux

est oblong ou d'autre figure. qu'on appello Papille ou Prunelle. Ce trou fe dilate & fe refferre; il fe dilate dans les tenebres & lorfque l'on eft expofé à une foible lumiere, ou lorsqu'on regarde des objets qui font prés. de l'œil; il se refferre lorfque la lumiere est forte, ou que l'on regarde des objets fort éloignez. Il paroît noir dans l'homme & dans les animaux dont l'uvée eft noire, parce que les rayons de lumiere paffants par ce trou & traverfants l'humeur aqueufe, le cristallin & le corps vitré, ne trouvent point de corps au delà capable de les réfléchir au dehors: la rétine qu'ils ébranlent en l'illuminant, ne le pouvant, & l'uvée qui eft noire s'opofant à cette réfléxion.

L'Uvée depuis fon fond jufques au cercle ciliaire paroît tiffüe de quantité de petites fibres qui femblent differentes de fes fibres membraneufes, qui ayants abandonné la circonference de l'entrée du nerf optique elle font attachées, fe conduifent en biaifant un peu de derriére en devant; & avant que d'avoir atteint le Cercle ciliaire, quelques-unes de ces fibres se réfléchisfent & forment des efpeces D'aillets, on Volutes, à peu prés femblables à ces ceillets formez par ces petites lignes que l'on remarque en la furpeau de la partie intérieure du bout des doigts. Cette difpofition de fibres me fait conjecturer que cette partie de l'uvée n'a point de mouvement comme quelques-uns le paufent; parce que fi cela étoit, ces fibres fe porteroient toutes, fans changer leur premier ordre, jufques au cercle ciliaire. Quand ces fibres (differentes des nembraneufes) ont atteint le cercle ciliaire, elle s'y attachent fortement

&

& fe gliffent en lignes droites & paralleles par le travers de la fuperficie intérieure de ce cercle; & parvenües vers sa partie antérieure elles s'en separent, se réfléchiffent, & ordonnées en maniére de petits rayons fort courts elles s'inferent tout auffi-tôt au tour de la membrane du corps vitré à l'endroit où elle se double fe pour embraffer le cristallin. Ces fibres ayant abandonné le cercle ciliaire, paroiffent plus groffes, plus blanches, & elles font fi tendres qu'elles fe rompent trés aifément; & cela d'autant plus qu'elles ne font contenües. n'y affermies par les fibres membraneufes de l'uvée.

Entre toutes les fibres qui fe gliffent par le travers du cercle ciliaire, il y a des petites cannelûres remplies de cette teinture noire, dont j'ay parlé ci-devant. Il y en a de femblables fur la membrane du corps vitré à l'endroit où ce cercle fe colle fur cette membrane, & qui répondent aux premiéres : en forte que quand ce cercle eft uni à la membrane du corps vitré, ces cannelûres forment des efpeces de conduits qui fe trouvent toûjours remplis de cette teinture noire: d'où vient que lorsqu'on a feparé ce cercle du corps vitré, il refte fur ce corps des lignes noires difpofées comme des cils, que la plûde nos Anatomistes (faute de les avoir bien exapart ( minées) appellent Fibres ciliaires. Ce ne font point ces lignes ou cannelûres que j'appelleray Fibres ou Procez ciliaires, mais bien ces fibres blanches & molles dont je viens de parler.

A l'égard des fibres membraneufes de l'uvée, elles paffent au de là du cercle ciliaire & forment l'Iris. Ce ne font pas ces seules fibres qui constitüent l’iris; j'en

D

remarque encore d'autres dans fa partie intérieure, & d'autres dans fa partie antérieure qui tiennent des routes différentes, & qui font que l'uvée eft beaucoup plus épaiffe & plus forte à l'endroit de l'iris, qu'en fa partie postérieure.

La délicateffe de toutes ces différentes fibres de l'iris est si grande qu'il est impoffible de les féparer les unes des autres pour connoître leur nature; mais quand une partie fuit mon fcalpel, je l'abandonne, & pour connoître ce que c'eft, j'ay recours à la raison. Âinsi confiderant le mouvement de l'iris lorfque la pupille fe dilate ou fe refferre pour régarder les objets proches ou éloignez, je conçois qu'il faut qu'il y ait des parties pour faire ces mouvements: & comme je ne vois pas qu'il en vienne d'ailleurs, j'infere que ces parties fe doivent trouver dans l'iris même.

En effet aprés avoir ratiffé & lavé la partie intérieure de l'iris pour en ôter la noirceur dont-elle eft enduite, je remarque des fibres differentes de celles dont j'ay parlé ci-devant, qui partent de la circonférence de la partie antérieure & interne du cercle ciliaire & fe terminent en ligne droite vers le bord de la circonférence de la pupille; je conclus que ce font des Fibres motrices, dont la difpofition eft fort propre à dilater le trou de l'uvée, lorfque ces fibres agiffants vers leur principe fe

racourciffent.

Dans les vicillards chez lefquels ces fibres acquiérent une confiftance un peu plus forte, on les diftingue aifément au travers de l'iris, fe fervant de bonnes lunetnès, ou d'une loupe de verre quand la vüe n'est pas

« PreviousContinue »