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écrivant, il leur fembloit que ces ombres fe mouvoient fur le papier.

On diftingue ces imaginations de celles qui précédent les cataractes, en ce quelles font fort long-tems à fe former, étant formées quelles augmentent peu, & quelles n'incommodent pas plus que feroient les chofes aufquel.. les elles reffemblent, fi elles étoient pofées entre les yeux & les objets qu'on regarde: au lieu que celles qui précé dent les cataractes augmentent tellement, quelles font bien-tôt fuivies d'une diminution tres fenfible de la vue. Ces imaginations, comme je l'ay dit, fubfiftent toute la vie, fans qu'on les puiffe faire diffiper par aucuns remedes. Ce n'eft pas auffi pour les guérir que je les décrits ici, c'eft feulement afin qu'on puiffe affurer ceux qui en font incommodez quelles ne feront pas fuivies de la perte de leur vie: pourveu que l'on fçache qu'il y a plufieurs années qu'ils en font incommodez, fans augmentation fenfible. J'en connois plufieurs qui depuis quinze & vingt ans fe font plaints à moi de telles chofes, & qui font encore à prefent dans le même état.

Il eft affez difficile de connoître au vray la caufe de ces imaginations, & les parties de l'œil dans lesquelles elles fe forment. J'ay quelques-fois penfé quelles provenoient d'un vice de quelques fibres de la rétine, & d'autres-fois quelles pouvoient avoir leur fiége dans le corps vitré: mais ayant confideré leur raport avec ces imaginations que précédent les cataractes; que comme elles, elles femblent être hors de l'œil & voltiger en l'air; quelles garde entr'elles une situation égalé, & quelles fubfiftent pendant toute la vie. Je me fuis déterminé à penser que

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leurs

caufes devoient fe rencontrer, où dans le cristallin même, puifque celles qui précédent les cataractes y ont leur fiége, où dans la membrane qui l'environne. Cequi me fait conjecturer, où que c'est un vice de quelques fibres qui compofent les pellicules extérieures du cristallin, où bien une dilatation des veines répanduës par sa membrane. Et cequi me feroit le plus pencher à cette derniére opinion, c'est que j'ay connu par expérience que ceux qui dans leur jeuneffe ont la vüe tres fubtile, & qui font expofez pendant le cours de leur vie au vent, au froid & aux autres injures de l'air, y font plus fujets que les autres : parceque ces chofes arreftants en quelque façon, dans les veines de cette membrane, le mouvement circulaire du fang, celui qui eft pouffé continuellement par les artéres, trouvant un obftacle qui s'oppofe à fon cours, étend & dilate insensiblement les vaiffeaux qui le contiennent; cequi arrive d'autant plus facilement que la tenture de ces parties fe trouve tres délicate; & cela de la même maniére que les varices fe forment dans les autres parties de nôtre corps.

Voila toutes les maladies dont le cristallin peut être affecté, du moins celles que j'ay pû connoître : car je fçais bien que beaucoup d'Auteurs lui en attribuent d'autres dont je ne feray point de mention, les croyant plûtôt imaginaires que réelles. Je paffe donc aux autres maladies qui attaquent les parties intérieures de l'œil, & les membranes qui forment fon globe, que je décriray plus fuccinctement que je n'ay fait celle du cristallin.

Fin de la premiére Partie,

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akakakakakakakakakakakak DES MALADIES DE L'ŒIL

SECONDE PARTI E.

Contenant les maladies du Corps Vitré, de l'humeur Aqueufe, de la Rétine, du Nerf optique, de l'Uvée, de la Cornée, & des Membranes qui forment le blanc de l'œil.

Des maladies du Corps Vitré.

CHAPITRE I.

Puifque j'ay commencé la defcription des maladies de par les intérieures, & que dabord j'ay décrit celles du cristallin, comme étant celles qui ont donné naissance à ce present Traité : je suivray le même ordre & je continueray cette defcription par les maladies dont châque partie renfermée dans le globe de l'œil peut être attaquée; puis je pafferay à celles de la cornée & de la conjonctive, & ainfi en retrogadant j'expliqueray celles de toutes les autres parties qui font attachées au globe & contenues dans l'orbite, & enfin je finiray par celles des angles des yeux & des paupières. 1. De la fonte & corruption du Corps Vitré.

J'ay déja parlé De la fonte corruption du Corps Vitré, au chapitre 18. de la première partie, & ce à l'occasion De la Cataracte Branlante, c'est pourquoi je n'en diray

rien davantage, puifque je l'ay affez expliquée en ce lieu là, & que dailleurs je n'ay point de remedes à propofer pour cette maladie qui de sa nature eft incurable.

2. De fon extenfion non-naturelle.

Il y a une autre maladie que je lui attribüe, & que j'aurois peine à faire connoître, fi je n'en commençois la defcription par les fymptomes qui l'accompagnent.

Jay vu plufieurs fois des malades qui fe plaignoient d'une douleur à la partie antérieure de la tête & à l'œil, quelques-uns d'un feul côte & d'autres des deux cotez: enfuite de cette douleur qui s'apaisoit en quelques-uns & en 'd'autres qui continuoit moins violemment, le globe de l'œil du côté de la douleur paroiffoit un peu plus gros & plus éminent, la pupille fe dilatoit beaucoup plus qu'à l'ordinaire fans fe refferrer que tres peu & tres difficilement au grand jour ou au foleil, & la vüe se diminuoit fi fort qu'a peine pouvoient-t'ils diftinguer la lumière & tres confufément les objets communs, ne pouvant même fe conduire feuls. En la plûpart ces accidents arrivoient fur les deux yeux, où en même tems, ou quelques tems apres. En quelques-uns la douleur qui précédoit la diminution de la vie n'étoit pas bien confiderable, ne reffentant même que quelque pefanteur en cette partie; en d'autres elle étoit violente. Quelques-fois je ne pouvois remarquer que le globe de l'œil fût plus éminent qu'à l'ordinaire, ticuliérement en ceux qui avoient les yeux noirs naturellement, dont ordinairement les membranes font plus épaifles & plus fortes, & en ceux qui en étoient travail

par

lez également des deux yeux: mais en ceux qui avoient les yeux bleües, ou blancs, ou gris & bien fendus, & en ceux qui n'avoient qu'un œil d'affecté, je remarquois plus aifément que l'œil étoit plus gros. Enfin dans la fuite, à la faveur de quelques remedes dont je parleray ci-apres, & même fans remedes, ces accidents diminuoient, & infenfiblement la plupart de ces malades recouvroient la vie, en telle forte pourtant qu'ils voyoient un peu moins bien qu'ils ne faisoient avant leur maladie.

Réfléchiffant fur tous ces fymptomes, je jugé que le globe de l'œil ne peut être rendu plus, gros & plus éminent, que par quelque humeur qui flue & s'amaffe au dedans de lui. Ceci pofé: je dis que cette humeur n'eft pas épanchée dans l'efpace qu'occupe l'humeur aqueuse, & quelle n'en augmente pas fa quantité; parceque, fi cela étoit, le globe de l'œil en feroit à la verité bien augmenté, mais la pupille ne fe trouverroit pas dilatée & prefque immobile; puifque cette humeur pouvant paffer par la pupille, fe logeroit également entre l'iris & la cornée tranfparente, & ne prefferoit point par confequent l'uvée plus d'un côté que de l'autre : ainfi l'uvée conferveroit fon mouvement, & fon trou La grandeur ordinaire. Où eft-t'elle donc ? je dis qu'il y a tout lieu de croire quelle cft renfermée dans le corps vitré, & quelle en augmente considerablement le volume.

Si on confidere ceque j'ay dit au chapitre 14. de la defcription de l'œil, touchant la nourriture de ce corps, il fera aifé de concevoir, que fi le fue nourricier qui fe

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