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Comme dans la confufion le corps vitré fe trouve déchiré & détruit, & que l'humeur qui le remplit na-, turellement s'échape & fe mefle avec l'humeur aqueufe; que le cristallin étant détaché & fouvent hors de fon lieu, s'altére & fe deffeiche quand il ne peut plus recevoir de nourriture comme dans le glaucoma; que la rétine qui est ou déchirée ou contufe change pareillement fa fituation naturelle; & que l'uvée eft fouvent auffi déchirée: on juge bien que tous ces défordres ne peuvent fe rétablir ni la par nature, ni par les remedes, & que la perte de la vie eft par confequent irréparable. Ce n'eft donc pas à ce deffein qu'on s'en fert dans les confufions récentes & qui viennent des causes extérieures: mais bien pour calmer l'inflammation tant intérieure qu'extérieure, pour appaifer la douleur, pour réfoûdre le fang extravafé au dedans & au dehors de l'œil, pour l'empêcher de fuppurer, & prévenir par ce moyen la fuppuration de tout l'œil & la difformité qu'une telle fuppuration cauferoit.

La faignée étant le remede le plus prompt pour prévenir ou calmer l'inflammation, on la doit faire incontinent au bras du côté de l'œil bleffé, la reïterant suivant les forces du malade. On doit auffi en même tems faire couler chaudement dans l'œil malade Du fang de pigeon, que l'on tire fous l'aîle, couvrant l'œil d'une compreffe trempée dans un Deffenfif fait avec le blanc d'œuf ou l'œuf entier, le vin & l'huile rofat, battus enfemble. On renouvelle ces remedes de tems en tems & on les continue pendant deux ou trois jours, ou jusques l'on voie que le fang extrevafé commence à se

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réfoûdre; ce qu'on connoît quand les lieux ou le fang eft épanché, jauniffent. Si pendant ce tems l'inflammation fe rendoit confiderable, au lieu Du vin, on mesleroit dans le deffenfif susdit De l'eau deftillée de plantain ou quelque autre eau rafraichißante, & on en continueroit l'ufage jufques à ceque l'inflammation fût calmée. Enfuite on fomente l'œil avec une décoction d'Absinthe ou d'hypope, de fænouil de fleurs de camomille de melilot. Quand l'œil eft nettoyé, on distille dedans Du lait de vache tiéde, dans lequel on a fait infufer un peu De faffran, ou bien on fe fert de Celui de femme; on trempe enfin une compreffe dans la décoction fufdite, que l'on applique chaudement sur l'œil & les parties voifines.

Ces derniers remedes fe continüent jusques à la fin, à moins qu'il n'arrivât quelques autres accidents, comme une ulcération de la cornée, un amas de pus, ou quelque fluxion, que l'on traiteroit fuivant les reigles & par les remedes prescrits pour ces maladies.

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4. De l'œil crevé ou rompu. a

CHAPITRE IX.

Uand les coups reçeus fur l'œil font fi violents, RHE X IS. qu'ils ne brifent pas feulement les parties intérieures comme dans la maladie précédente, mais brifent auffi, rompent & déchirent la cornée; alors nonfeulement l'humeur aqueufe s'écoule, mais auffi le cristallin & le corps vitré; en telle forte que le globe

de l'œil fe vuide entiérement; quand dans la fuite l'uvée & la rétine, contufes & déchirées, font fuppurées. Cette maladie eft encore une fuite des grandes playes de l'œil, faites par des inftruments tranchants, & des grandes ulcérations de la cornée, foit que ces ulcérations commencent fur la fuperficie extérieure de cette membrane, ou quelles foient caufées par un amas confidérable de pus au dedans de l'œil.

On juge bien que la rupture de l'œil ne peut guéres arriver par des coups, fans que les parties voifines de l'œil ne foient en même tems contufes ou dilacérées, ni par des inftruments tranchants, fans que d'autres parties que le globe de l'œil ne foient auffi bleffées : & qu'ainfi on doit pourvoir fuivant les reigles ordinaires de la Chirurgie, à tous les défordres qui accompagnent cette rupture, quand ils font de confequence & qu'ils demandent un traitement particulier, cependant qu'on travaille à prévenir l'inflammation, à appaifer la douleur, à réfoudre le fang extravafé, à procurer la fuppuration des membranes coupées ou déchirées, & à ses

mondifier & cicatrifer.

La faignée au bras reïterée fuivant le befoin, Le fang de pigeon, verfé dans l'œil, & Le deffenfif fait avec l'œuf, le vin l'huile rofat, étant adminiftrez dans l'ordre. prefcrit au chapitre précédent, fervent à prévenir l'inHammation & à appaiser la douleur. Le jaune d'œuf delayé avec du lait de femme y ajoûtant un peu de faffran en poudre fubtile, qu'on applique avec la frange d'une plume fur la rupture de la cornée y procure une fuppuration douce. L'inflammation diminuant, ou n'étant plus

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à craindre, La fomentation faite avec l'abfinthe, l'hyßope, le fænouil & les fleurs de camomille & de melilot infufees cuites dans le vin, dans laquelle on trempe des compreffes qu'on applique chaudement fur tout l'œil & les parties voisines, résoût le sang extravafé. On anime auffi quelques-fois cette fomentation Avec l'esprit de vin quand le fang extravasé est dans une quantité à faire craindre, par fa corruption, une gangrenne.

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Quand il eft tems de mondifier, on fe fert Du miel rofat meslé avec un jaune d'œuf & un peu des poudres de rhe & d'oliban. Ou bien on fe fert d'un collyre fait Avec de la myrrhe & de l'aloës de chacun une demie drachme, dix grains de faffran en poudre une demie once de miel rofat dißouts dans quatre onces d'eau diftillée d'abfinthe rendüe muccilagineufe par l'infufion d'un peu de femence de fœnugrec.

Et le même collyre y ajoûtant Une demie drachme de tuthie préparée & autant de plomb brulé & lavé, fert enfin à deffeicher & cicatrifer.

Si pendant la cure il furvenoit des chairs fongueufes, on auroit foin de les confommer avec une poudre faite De parties égales d'alum calciné, d'iris & de fucre candit. Et fi ces chairs avoient quelque difpofition à répulluler, on y ajoûteroit au collyre fufdit, Dix grains de vitriol blanc, ou quinze grains de pierre medicamenteuse de crollius, pour le rendre plus déficcatif.

Quand la rupture de la cornée vient de l'ulcération de cette membrane, on la traite d'abord avec les teme-* des mondifiants, & on pourfuit la cure comme je le viens de le dire, pourvoyant aux autres accidents qui peuvent accompagner cette ulcération, comme je le diQ q

ray au chapitre 17. ou je traiteray en particulier des ulcéres de cette membrane.

On remarquera que lorfque l'humeur aqueuse & les corps transparents fe font écoulez enfuite de la rupture ou de la playe de la cornée, les douleurs & l'inflammation ne font pas fi grandes, ni fi à apprehender comme dans la confusion. Et la raison c'est que dans la confufion les membranes contufes & dilacérées s'enflamment, corps vitré, l'humeur aqueufe & le fang épanché s'échauffent, fe fermentent & étendent la cornée, & quelques-fois même fuppurent, & toutes ces choses ne se peuvent faire fans de grandes douleurs.

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Si la plus grande partie de l'uvée refte dans le globe de l'œil fans s'être écoulée dans la fuppuration, & que la perte de la substance de la cornée ne soit pas confiderable; quand ces membranes font entièrement cicatrifées, il s'engendre ou s'amaffe au dedans de l'œil une humeur femblable à l'humeur aqueufe, qui le remplit & l'étend médiocrement; en telle forte que les malades pour ôter la difformité , peuvent s'accommoder d'un œil artificiel qui fuit les mouvements du globe de l'œil, & qui font croire à ceux qui ne le fçavent pas, que l'œil eft naturel. Mais quand l'uvée eft entiérement fuppurée, ou que la cornée eft consommée dans fa plus grande partie, cequi reste est fi enfoncé, & les paupières font fi renverfées au dedans, qu'il eft difficile d'y faire tenir un œil artificiel ; & fi quelques-fois les ouvriers reuffiffent a en faire un qui puiffe tenir, trouve alors fans mouvement.

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