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püe en quelqu'une de fes parties.

4. Enfin que ces cellules fe communiquent réciproquement les unes aux autres par des trous ou canaux •fort petits: d'où vient que quand on a percé ou rompu la membrane quirecouvre ce corps en quelques endroits, ces cellules fe vuident toutes fucceffivement, & quand on le presse doucement que l'humeur s'en écoule un peu plus abondamment.

Ces raifons font, ce me femble, affez fortes pour perfuader que le corps vitré n'eft point une humeur congelée ou épaffie comme on le croit ordinairement, mais comme je l'ay dit, un compofé de membranes, de fibres & d'une humeur fluide. Dans le Chapitre suivant je raporteray encore quelque expérience pour prouver ce que j'avance.

Le corps vitré occupe tout cet efpace qui fe trouve entre le cercle ciliaire, le cristallin & la rétine, c'està-dire les deux tiers ou environ du globe de l'œil, Comme il eft fort fléxible, il s'acommode aifément à la figure du lieu qu'il occupe : ainfi sa partie poftérieure eft fphérique, & fa partie antérieure eft enfoncée à l'endroit où eft logé le criftallin.

Il est comme je l'ay dit recouvert entiérement d'une membrane : cette membrane à l'endroit du cercle ciliaire s'y trouve attachée & à la rétine par le moyen des procez ou fibres ciliaires. En ce même endroit elle femble fe divifer en deux membranes dont l'une continüc à environner la partie antérieure du corps vitré fur laquelle est enfoncé le cristallin, & l'autre passe par deffus le cristallin, l'embrasse entiérement, & le tient

fermement attaché au corps vitré : ce qui eft fort aifé à reconnoître apres qu'on a ôté ces deux corps tranfparents hors du globe de l'œil fans les séparer l'un de l'autre.

Quelques Anatomistes donnent des arteres & des veines à cette membrane, ce que je n'ay pas de peine à croire, puifque je fuis perfuadé que toutes les parties membraneufes fe nourriffent de fang; mais il faudroit des yeux de linx pour les diftinguer. Je ne diray rien ici de l'origine de cette humeur qui eft renfermée dans le corps vitré, me réfervant d'en parler au Chapitre 14. & j'expliqueray l'ufage de ce corps au Chapitre 21.

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6. Du Cristallin.

CHAPITRE X I.

'Examen peu exact que nos Anciens ont fait du Cristallin, eft la caufe qu'ils ont peu connu cette partie: car n'éxaminans que fon écorce, je veux dire fa transparence, fa molleffe & fa viscosité lorsqu'ils le broyoient fous les doigts, ils ont conclu que ce n'étoit qu'une humeur épaiffe & congelée de même que le corps vitré. J'ay déja fait voir que le corps vitré n'étoit pas une humeur épaiffie, mais une partie compofée de membranes, de fibres & d'une humeur fluide; & prefentement je vais faire connoître que le cristallin est un corps d'une nature toute particuliére, & dont la structure est si réglée, qu'elle se rencontre toûjours femblable non-feulement dans l'homme, mais auffi

dans tous les animaux qui joüissent de la vüe.

Comme la molleffe & la tranfparence de ce corps font trop grandes pour le pouvoir anatomiser dans l'état qu'il le trouve naturellement, je cherche des moyens pour lui ôter cette moleffe & cette transparence, & j'y reüffiis en ces deux maniéres.

1. Je fais chauffer de l'eau jufques à ce qu'elle foit prête à bouillir, je plonge dedans un cristallin féparé de l'œil d'un homme ou d'un animal nouvellement mort: fi-tôt qu'il y eft je vois que fa fuperficie commence à blanchir: je fais boüillir l'eau quelques boüillons, & j'observe que fa blancheur augmente de même que fa folidité: je continue encore l'ébollition quelques momens & je retire enfuite ce cristallin de l'eau; je m'aperçois que fa fuperficie eft un peu inégale & raboteufe, & du refte je le trouve folide, blanc, fans aucune transparence, confervant la figure qu'il avoit avant l'ébollition, & en état d'étre anatomifé comme je le diray ci-apres.

2. J'ouvre l'œil d'un homme ou d'un animal, j'en tire le corps vitré & le criftallin que j'y laiffe attaché fans offenfer la membrane qui les joint, même le cercle ciliaire que j'ay foin de conferver entier le plus qu'il m'eft poffible, j'en fepare cependant la plus grande partie de l'uvée à caufe de fa noirceur: je plonge le tout dans une eau compofée de trois parties d'eau commune & d'une partie d'eau forte mellées ensemble: peu de tems apres la membrane qui recouvre le corps vitré & embrasse le cristallin devient un peu trouble, ensuite le cristallin blanchit & s'affermit toûjours de plus en

plus, jufques à ce qu'il foit antiérement pénétré par l'acide de l'eau forte, alors il demeure dans une même confiftance; je laiffe ainfi le tout pendant vingt quatre heures, je le retire enfuite hors de l'eau, & j'obferve fans diffection.

1. Que la membrane qui recouvre le criftallin eft une continuité de la membrane du corps vitré, comme je l'ay dit au Chapitre précédent,

2. Que la face intérieure du cercle ciliaire eft legéremont collée fur la membrane du corps vitré; & en détachant doucement ce cercle, je remarque affez diftinctement que les cannelûres qui font entre fes fibres droites & paralleles répondent à celles qui font fur la membrane du corps vitré, comme je l'ay ci-devant dit, & je vois auffi comme ces mêmes fibres fe réfléchiffent & s'inférent aufli-tôt à cette membrane à l'endroit où elle fe divife pour embraffer le criftallin, c'est-à-dire vers les côtez de ce corps.

3. Que le corps vitré eft fort peu alteré, fa membrane étant feulement un peu trouble & blanche, comme je viens de le dire, auffi bien que quelques fibres membraneufes qu'on remarque en dedans de ce corps & qui femble partir de differents androits de fa membrane vers fa partie poftérieure & un peu latérale & s'unir ensemble vers la partie antérieure vis-à-vis le milieu de la partie poftérieure du criftallin. Cette difpofition de fibres forme ainfi une espece de cône, dont la pointe répond au cristallin & la bafe à la partie poftéricure de ce corps vitré; elles l'empêchent par ce moyen de s'allonger comme il feroit, & de preffer ou

de

de pouffer le cristallin trop en devant. Quand même on éleve le cristallin, le foûtenant par les côtez, & que le corps vitré y eft encore attaché, il fe forme une enfonceure vers le milieu de la bafe du cône, ce qui marque que ces fibres font plus courtes en cet endroit. A l'égard des autres fibres membraneuses on n'y peut obferver aucune difpofition particuliére, parce qu'elles confervent trop leur transparence.

Je fends enfuite en quatre parties, avec la pointe de la lancette, la membrane qui couvre le cristallin, aprés quoi le cristallin s'échape de lui même, fans que je puiffe remarquer aucune attache, ou vaiffeaux, ou fibres : ce qui me fait connoître qu'il n'eft joint à aucune partie, étant feulement contenu dans le lieu qu'il occupe, par la membrane qui le recouvre.

J'examine anatomiquement ces deux cristallins préparez, je m'attache plûtost à celui qui est préparé avec l'eau forte, parce qu'il fe dévelope plus ailément, que fes fibres font plus fouples, & que fa fuperficie n'est point alterée; auffi eft-ce la meilleure maniére de le préparer. Je remarque d'abord que le cristallin n'eft autre chose qu'un amas & affemblage de plufieurs Pellicules, ou Ecailles, comme on voudra les appeller, qui font fort minces & polies, qui forment chacune leur fphére, & qui font renfermées les unes dans les autres de la même manière que plufieurs boëtes d'une même figure & de differentes grandeurs, ou comme les differentes lames ou pellicules qui cổmposent un oignon. Toutes ces pellicules font formées par quantité de fibres courbes & fort deliées qui vont de der

F

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