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riére en devant, ou de devant en derriére, comme on voudra l'entendre : & c'est cette conduite de fibres qui est la cause qu'on peut rompre aisément le cristallin de devant en derriére & plus difficilement de travers.

Je dévelope ainfi par pellicules tout le cristallin jusques à fon centre, & j'observe en le dévelopant que ces pellicules ont moins de folidité vers fa fuperficie, & qu'elles s'endurciffent à mefure qu'elles approchent du centre: que leur couleur est d'un beau blanc, & que quand on les régarde avec un verre convexe, ce blanc paroît un peu bleüatre : que le centre eft fort dur & qu'il conferve encore un peu de fa transparence. J'obferve encore que les fibres qui forment ces pellicules font plus groffes vers les côtez du cristallin, & qu'elles diminüent en approchant en devant & fe en derrière. Il femble même que celles des pellicules fuperficielles ne fe joignent pas en devant & en derrière avec celles qui leurs font oppofées.

portant

Voila donc ce que j'observe dans les cristallins préparez de la premiére ou feconde maniére. Mais avant que de paffer outre je fuis bien-aife de dire en faveur de ceux qui voudront préparer des cristallins de la feconde manière, qu'on peut augmenter ou diminuer la quantité d'eau forte qu'on mefle avec l'eau commune; il faut seulement obferver que quand on en met trop le cristallin eft fujet à fe fendre, même la membrane qui le recouvre fe romp, du reste il se prépare également ; & quand on en met moins il est plus longtems à fe préparer, mais toutes ces parties demeurent en leur entier. On peut aufli faire tremper les cristallins.

fculs, quand on ne veut examiner que cette partie : cependant il eft meilleur de les laiffer envelopez de la membrane qui les tient attachez au corps vitré, parce leur fuperficie fe conferve plus égale. Cequi n'ar

que

rive pas

de même quand on les fait bouillir; car quils foient envelopez ou non, leur fuperficie eft toûjours inégale, parce que la membrane qui les recouvre se romp le plus fouvent dans l'eau chaude; auffi cette préparation quoi-que plûtôt faite ne vaut pas l'autre, tant par cette raison, que parce que le cristallin fe dêfeiche davantage, ce qui fait que fes fibres ne fe dévelopent pas fi bien. On remarquera aufsi que le cristallin ne fe diffoût nullement tel tems qu'on le laiffe tremper, j'en ay laiffé pendant trois mois entiers dans l'eau ci-deffus dite, fans que j'y aye obfervé aucune dimi

nution.

Je veux bien encore ajoûter ici une manière de préparer l'œil, qui eft une fuite de celle de l'infufion, & par laquelle prefque d'une feule-fois on peut voir & anatomiser toutes les parties intérieures du globe. Pour cet effet je fépare de l'orbite le globe de Facil, je nettoye bien toute la fuperficie extérieure de la cornée de muscles, de graisse & des autres parties inutiles pour cette expérience, & je laiffe feulement le nerf optique affez long. Je perce avec un ftile pointu ce nerf en fon milieu felon fa longueur jusques dans le globe, je seringue par ce trou l'eau fufdite que je tiens plus forte en ne mettant fur une partie d'eau forte que deux ties d'eau commune, & cela à caufe quelle s'affoiblit affez par par le mêlange de l'humeur aqueufe, & j'y en in

par

troduit tout autant que je puis, je Lie apres cela ce nerf pour empêcher aucune humeur de fortir, & je laiffe ainfi cet œil pendant trois ou quatre jours fans y toucher, & alors il eft en état d'étre anatomifé.

Par cette préparation la cornée tranfparente blanchit & devient fort trouble, le cristallin blanchit & durcit comme dans la préparation précédente, la membrane du corps vitré devient un peu trouble & blanche auffi bien que les fibres dont j'ay parlé, la rétine se caille en quelque maniére & blanchit, & tous ces changemens de couleur donnent plus de facilité à diftinguer les autres parties intérieures du globe.

:

Pour anatomifer un œil ainfi préparé, je coupe en rond la cornée transparente prés de la cornée opaque, & l'ayant enlevée j'obferve le criftallin & la partie antérieure de l'uvée qui forme l'iris dans leur situation naturelle je fends enfuite la cornée opaque depuis cette ouverture iufques aupres du nerf optique, laissant l'uvée entiere, enfuite je la coupe en rond à une ligne de diftance de l'attache du cercle ciliaire, & je remarque les nerfs, les arteres & les veines qui paffent au travers de la cornée & qui fe diffeminent dans l'uvée & au cercle ciliaire: je coupe auffi l'uvée en long & de travers & j'aperçois la rétine qui eft blanche, plus épaiffe du côté de fon origine, & diminuant infenfiblement à mesure qu'elle s'avance vers le cercle ciliaire ; j'observe encore qu'elle eft d'une confistance comme de lait caillé, & que cette substance caillée que je crois être la partie moëlleufe fe fépare aisément de certaines fibres un peu plus dures, qui avec plufieurs

fçions de vaiffeaux qui fe communiquent les uns aux autres forment une efpece de lacis qui fe porte jufques au cercle ciliaire : j'éxamine enfuite le cercle ciliaire & le corps vitré & enfin j'anatomise le cristallin & j'obferve en ces parties toutes les chofes ci-devant dites.

Apres avoir examiné le cristallin préparé comme deffus, je l'éxamine encore fans aucune préparation & dans l'état qu'il fe trouve naturellement dans l'œil.

Je remarque 1. qu'il eft fitué au milieu de la partie antérieure du corps vitré vis-à-vis le trou de l'uvée: qu'il est retenu fermement en ce lieu par la membrane du corps vitré, qui comme je l'ay déja dit, fe divife en deux membranes, dont l'une continue à environner la partie antérieure du corps vitré & l'autre passe par deffus le criftallin & l'embraffe de telle forte qu'il ne peut changer de situation.

2. Que de toutes les parties de nôtre corps, s'eft la feule que je connoiffe qui n'a point de continuité avec aucune de fes parties voifines, n'étant attaché par aucuns ligaments ni membranes, & ne recevant aucuns vaiffeaux; mais étant seulement contenu & affermi dans le lieu qu'il occupe par la membrane du corps vitré comme je viens de le dire, fans y être nullement adhérent : ce qui fe connoît quand on fend cette membrane, car le cristallin s'en échape fans aucune violence & fans qu'on y puiffe remarquer aucunes attaches.

3. Que fa figure dans l'homme & dans plufieurs animaux eft ronde & déprimée, approchant en quelque façon de celle d'une lentille; ainfi il a deux faces dont l'antérieure qui eft la plus petite eft plus dépri

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corps

mée, & la postérieure qui a plus d'étendüe, eft plus éminente & un peu allongée en maniére d'un cône : c'est cette face qui eft enfoncée dans le vitré. Il ne faut pas s'imaginer que ces deux faces forment chacune une portion tout-à-fait regulière de cercle, comme quelques-uns l'ont crû: car fi on coupe un criftallin en deux parties égales ( ce qui eft fort aife, fe fervant d'un cristallin préparé avec l'eau ci-deffus dite) qu'on en applique une moitié fur un carton, & qu'on en trace la figure avec un ftile pointu qu'on tourne tout à l'entour, on aura le profil naturel du cristallin & on en reconnoîtra la différence..

4. Qu'il eft d'une fubftance tres pure & tres tranfparente, imitant en cela le criftal, d'où lui vient fon nom: que cette fubftance quoique molle a affez de confiftence pour fe contenir aisément en fes propres bornes, & qu'aparemment elle eft difpofée par pellicules, formées par des fibres courbes, puifqu'elle fe rencontre ainfi lorsqu'elle eft endurcie par l'ébullition ou par les acides quelles eft différente en fon centre & en fa fuperficie, quoi qu'également diaphane, étant plus tendre & molle en fa fuperficie, & plus folide en fon centre, comme on peu le reconnoître dans un criftallin nouvellement tiré d'un œil, dont on fépare aifément la fuperficie qui paroît comme une gomme ou colle fondue & fort épaiffe, dont la quantité ramaffée enfemble fait à peu prés un tiers de tout le cristallin. Je remarque enfin que quoique le cristallin foit d'une fubstance molle, tres pure & tres transparente, qu'il s'endurciffe par la chaleur de l'eau & par les acides, il

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