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Pour prévenir tous ces fâcheux accidents & rémédier à cette maladie, dés qu'on voit que l'œdème ne peut fe réfoudre & que l'humeur commence à s'aigrir, il faut faire quelques legeres mouchetûres dans les endroits les plus déclives des paupières, pour la faire écouler petit à petit & les en décharger plus promptement; & cependant continuer à appliquer deffus les fomentations fortifiantes réfolutives décrites dans le chapitre précédent & animées avec l'esprit de vin. Et si déja l'humeur s'eft fait jour, il n'est point besoin de mouchetûres, elle s'écoulera affez par les paffages quelle s'eft fait, il faut feulement s'oppofer aux progrés de la pourriture par l'usage d'un collyre fait avec de la myrrhe de l'aloës un scrupule de chacun, du camphre & du vitriol blanc huit grains de chacun & une drachme & demie de miel rofat, qu'on diffoût dans quatre onces des eauës diftillées de rofes & d'abfinthe, pour introduire fouvent dans l'œil, fi la matiére s'eft fait jour de ce côté la : ou bien on fe fert de la teinture de myrrhe & d'aloës tirée avec le vin

animée avec un peu d'efprit de vin pour en laver entiérement les paupières, fi l'humeur à fes iffuës en dehors, Et même fi la pourriture eft grande, on peut se servir avantageufement d'un peu d'agiptiac dißoût dans du vin, pourvû qu'on fe donne de garde qu'il n'en entre dans l'œil. On peut même laiffer fur la paupière un petit linge imbu de ces liqueurs, & par deffus le tout appliquer les compreffes trempées dans les fomentations fufdites.

Quand les paupières font déchargées de toute l'humeur qui les abbreuve, & que les endroits par lefquels elle s'eft écoulée font mondifiez, on incarne & deffei

che les ulcéres reftants, foit qu'ils foient au dedans ou au dehors des paupières, avec le collyre fait avec l'aloës, l'encens, la tuthie préparée des trochifques blancs de Rhafis, un fcrupule de chacun, dix grains de pierre medicamenteufe de Crollius une drachme de fucre candit, qu'on diffoût dans quatre onces des eaues de rofes & de plantain pour s'en fervir comme deffus.

Si la peau qui recouvre les paupières a été pourrie dans toute fon épaiffeur & que la perte de la substance foit confidérable, il eft difficile d'empêcher quelle ne foit racourcie & que l'œil ne demeure éraillé : & si la même chofe arrive en la membrane de fa fuperficie intérieure, il est pareillement difficile d'empêcher que la paupière ne rentre en dedans, & que les cils ne bleffent le globe de l'œil. On préviendra autant qu'on le pourra ces choses comme je le diray au chapitre dixiême.

L

3. De la dureté & du fchirre des Paupiéres.

CHAPITRE IX.

'Inflammation des paupières caufée par un fang groffier & mélancolique, lorfquelle eft grande & quelle fubfifte long-tems, fe convertit quelques-fois, mais rarement, en une espece de tumeur dure & mal circonfcrite accompagnée de rougeur & de douleur. On la nomme, Scleriafis, ou durities palpebrarum, parcequ'en effet on ne s'en apperçoit que par la dureté des paupières, & par leur épaisseur.

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Difficillement cette tumeur fe guérit entiérement,

fubfiftant même apres que l'inflammation eft ceffée : & quelques-fois auffi elle s'endurcit fi fort, quelle paffe en vrai schirre; alors fa couleur rouge fe convertit en une couleur un peu livide. Quand elle eft convertie en vrai schirre elle eft indolente, elle incommode cependant, parcequelle rend les paupières fi pefantes quelle les empêche souvent de s'ouvrir, & que quelques-fois elle y provoque des fluxions qui fe renouvellent de tems en tems, quand déja les Malades y font fujets de leur nature; & cès differentes fluxions, la font même dans la fuite dégénérer quelques-fois en cancer.

Pour la guérir on doit dés le commencement & fitôt qu'on s'apperçoit de la dureté, fe fervir de fomentations émolliantes faites avec les racines & feuilles de mauves & de guimauves, les feuilles de violier, de pariétaire

de mercuriale de chacune une demie poignée, une demie once de graine de lin ou de coins qu'on fait bouillir dans une fuffifante quantité d'eau, & dans la décoction on trempe des compresses qu'on applique chaudement fur les paupières, les renouvellant cinq ou fix fois par jour. Apres s'être fervi pendant fept ou huit jours de ces fomentations, fi la dureté fubfifte & que l'inflammation foit entiérement paffée, on applique fur la tumeur ou le diachylon gomme, ou l emplâtre de muccilages, ou celui de vigo avec le mercure, en cas que la dureté paroiffe en dehors. Et fi au contraire elle paroît dans la partie intérieure des paupières, on ne peut fe fervir que des тисcilages de femences de lin de coins tirez avec l'eau rofe, & dans lesquels on diffoût quelques-fois un peu de myrrhe

de faffran pour introduire dans l'œil, & par deffus

les paupières les fomentations fufdites.

pas, ou

Si apres s'être fervi pendant quelque tems de ces remedes ou d'autres de femblable vertu, on s'apperçoit que la tumeur ne s'amolliffe & ne se réfolve quelle paffe en vrai fchirre, on en discontinuë l'usage étant inutile de fatiguer en vain un Malade. Mais fi dans la fuite il se faifoit quelque nouvelle fluxion, on y remedieroit comme je l'ay dit ailleurs. Et fi enfin la tumeur devenoit chancreufe, on fe conformeroit pour le traitement fur ce que je diray ci-apres en parlant du cancer des paupières.

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furvient quelques-fois à l'une ou à l'autre paupiére ou dans leurs environs, une petite puftule rouge & fort brûlante, qui fe noircit bien-tôt apres & caufe une fi grande inflammation, tumeur & tenfion aux paupières, quelles viennent d'un rouge livide, avec grande dureté & douleur tant aux paupières qu'à l'œil & aux parties voisines. La puftule s'agrandiffant continuellement, il s'y forme un escharre dur comme fi le feu y avoit paffe, & quelques-fois cette puftule croît si démesurément, quelle confomme entiérement la paupiére ou elle a pris naissance, & gâte fouvent l'œil. Cequi n'arrive point fans qu'il s'y faffe de grandes fluxions fur les parties voifines, que les glandes voifines des oreil les fe tumefient, & que la fièvre ne furvienne.

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Nous voions ordinairement que cette maladie n'arrive gueres que vers la fin de l'été dans le tems de la moisson, particuliérement quand les seicheresses sont tres grandes. Les pauvres gens obligez à paffer les jours entiers à fcier les bleds font fujets à être travaillez de cette maladie, non-feulement aux paupières, mais auffi au visage & autres parties, & croient que cela leur vient de dormir sur terre apres leur repas.

Un fang. groffier & brûlé, dépouillé de fes parties fpiritueufes & balfamiques, & de fon vehicule ordinaire eft fans doute la caufe principale de cette maladie, comme il l'eft de tous les autres charbons & de toutes les autres maladies communes de cette faifon : d'où vient auffi qu'il n'y a gueres que les pauvres mal nourris, continuellement expofez au travail & aux injures de la faifon, qui y foient fujets. Elle arrive à d'autres personnes, & auffi en d'autres faifons; mais cela eft beaucoup plus rare.

Pour la cure de cette maladie, fi-tôt que l'on voit la puftule commencer, il n'y à point de tems à perdre pour en arrêter le progrez: il faut faigner le Malade une fois ou deux au bras fuivant fes forces; lui donner des lavements émolliants & rafraichißants, lui faire prendre des émulfions ou des juleps rafraichiẞants deux ou trois fois par jour, & lui prefcrire fur tout un bon regime de vivre tendant à même fin.

Sur la partie malade il faut appliquer dans le commencement des compreffes trempées dans les muccilages de femences de coins de pfyllium, tirez avec les eaues de rofes

de plantain, meflez avec parties égales de lait de

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