Page images
PDF
EPUB

tinople reprenne, par tous les moyens, la suprématie que la France avait depuis deux cents ans dans cette capitale. La maison qui est occupée par l'ambassadeur est la plus belle. Il doit tenir constamment un rang au-dessus des ambassadeurs des autres nations, être entouré d'une suite nombreuse, et ne marcher qu'avec un grand éclat. Il doit reprendre sous sa protection tous les hospices et tous les chrétiens de Syrie et d'Arménie, et spécialement toutes les caravanes qui visitent les Lieux Saints.

ne

2o Notre commerce doit être protégé sous tous les points de vue. Dans l'état de faiblesse où se trouve l'empire ottoman, nous pouvons pas espérer qu'il fasse une diversion en notre faveur contre l'Autriche. Il ne nous intéresse donc plus que sous le rapport du commerce. Le Gouvernement ne veut souffrir aucune avanie des pachas, et la moindre insulte à nos commerçants doit donner lieu à des explications fort vives et conduire notre ambassadeur à obtenir une satisfaction éclatante. On doit accoutumer les pachas et beys des différentes provinces à ne regarder désormais notre pavillon qu'avec respect et considération.

3o Dans toutes les circonstances, on ne doit pas manquer de dire et de faire sentir que, si la Russie et l'Autriche ont quelque intérêt de localité à se partager les États du Grand Seigneur, l'intérêt de la France est de maintenir une balance entre ces deux grandes puissances. On doit montrer des égards à l'ambassadeur de Russie, mais se servir souvent de l'ambassadeur de Prusse, qui est plus sincèrement dans nos intérêts.

4o S'il survient des événements dans les environs de Constantinople, offrir sa médiation à la Porte, et, en général, saisir toutes les occasions de fixer les yeux de l'empire sur l'ambassadeur de France. C'est d'après ce principe que, le jour de la fête du Prophète, il n'y a point d'inconvénient à illuminer le palais de France selon l'usage oriental, après toutefois s'en être expliqué avec la Porte.

En fixant les yeux du peuple sur l'ambassade de France, avoir soin de ne choquer jamais ses mœurs et ses usages, mais faire voir que nous estimons les uns et les autres.

5o Le ministre de la marine a des ordres pour tenir toujours deux frégates en croisière dans les mers de Syrie et d'Arménie et à Constantinople. Il y aura également plusieurs avisos. L'ambassadeur s'en servira, dans les circonstances nécessaires, pour s'entendre avec nos commissaires des relations commerciales et protéger notre

commerce.

6o Enfin on désire que l'ambassadeur se procure des renseigne

ments très-exacts sur les différents pachaliks et en fasse part au cabinet. Il doit même pousser ses recherches vers la Perse. Par ordre du Premier Consul.

[merged small][merged small][ocr errors]

MINISTRE DE LA MARINE ET DES COLONIES.

Saint-Cloud, 26 vendémiaire an XI (18 octobre 1802) '.

Nous avons besoin, Citoyen Ministre, d'avoir deux frégates, deux bricks et deux avisos perpétuellement en croisière dans les mers du Levant. Cette croisière pourrait se relever tous les six mois.

Le but de cette croisière serait d'avoir une frégate sur les côtes de Tripoli, d'Égypte, de Syrie, de Rhodes, de Chypre et de Candie, et une frégate et deux bricks qui mouilleraient à Constantinople, et de là se porteraient sur tous les points de l'Archipel où il serait nécessaire, en ayant soin de faire la tournée de tous les ports où nous avons des commissaires des relations extérieures.

L'instruction générale des capitaines de ces frégates doit être de mouiller dans tous les ports, d'envoyer le relevé des observations qu'ils sont à même de faire dans les endroits où ils vont, et de conférer avec nos agents sur les dispositions des pachas et officiers turcs pour le bien de notre commerce, et d'envoyer chaque fois un rapport pour faire connaître la conduite des différents agents français, les injustices dont on aurait à se plaindre, et le nombre des bâtiments qui ont mouillé dans les lieux où ils passent.

Une frégate et un brick doivent également croiser sur les côtes du Maroc, d'Alger, de Tunis, de Malte, de Sicile et de Sardaigne. Cette croisière serait également relevée tous les six mois, de manière que, deux fois par an, des bâtiments paraîtraient dans ces différentes places.

Au mois de germinal, on tiendra une croisière de deux vaisseaux de guerre dans le Levant; elle rentrera au mois de septembre, et se montrera sur tous les points essentiels.

Il faut s'attendre à de mauvais traitements de la part des Barbaresques, et, dès lors, il faut avoir prêt à leur expédier promptement un vaisseau à deux ponts avec une ou deux frégates.

Ainsi, on aurait trois frégates perpétuellement à la mer.

Une frégate toujours prête à appareiller de Toulon pour la protection de nos côtes et des côtes de Gênes, deux vaisseaux pour la croisière de la bonne saison dans le Levant, et une croisière prête à 1 Date présumée.

appareiller selon nos besoins, paraissent devoir nous être nécessaires dans la Méditerranée.

Il faudrait profiter de ces croisières régulières pour établir des écoles de jeunes aspirants, afin de leur bien faire connaître les ports que parcourraient ces bâtiments, et leur donner l'instruction nécessaire.

Archives de l'Empire.

6380.

BONAPARTE.

AU CITOYEN PORTALIS, CONSEILLER D'ÉTAT,
CHARGÉ DE TOUTES LES AFFAIRES CONCERNANT LES CULTES.

Saint-Cloud, 26 vendémiaire an XI (18 octobre 1802).

Le curé de Saint-Roch, Citoyen Ministre, s'est très-mal conduit, religieusement et politiquement. Faites donner des ordres par l'archevêque de Paris pour que ce curé soit mis deux ou trois mois au séminaire, et que des mesures soient prises pour que de pareilles scènes ne se renouvellent plus désormais. Il ne vous sera pas facile de faire sentir que, si tous les artistes des théâtres de Paris se faisaient protestants, ce serait une chose nuisible pour l'Église, et que ce préjugé, d'ailleurs, qui existait autrefois, est aussi injuste qu'absurde. BONAPARTE.

Archives de l'Empire.

[blocks in formation]

Saint-Cloud, 27 vendémiaire an XI (19 octobre 1802).

Votre Majesté m'a fait connaître, par sa lettre du 25 juillet, qu'elle verrait avec plaisir qu'il fût possible de faire quelque chose qui pût satisfaire davantage l'Autriche, et la rendre plus facile à terminer les affaires d'Allemagne.

Des conférences ont été ouvertes avec M. de Cobenzl, auquel on a fait connaitre les intentions de Votre Majesté. On lui a proposé l'évêché d'Eichstadt, ce qui ferait une diminution de lot pour l'électeur de Bavière, et un accroissement de plus de quatre-vingt mille àmes pour l'archiduc Ferdinand.

n'a

Mais cet accroissement, qu'il devait regarder comme inattendu, pas encore eu l'assentiment de la cour de Vienne, et, la voyant insister pour occuper Passau et l'Inn, nous avons pensé qu'une déclaration, faite de concert avec la Prusse dans les termes les plus forts, et appuyée par le ministre de Votre Majesté, autant que ses instructions le lui permettent, pourrait accélérer les affaires d'Allemagne.

Votre Majesté m'a fait connaître, par sa lettre du 8 septembre, qu'elle désirait que l'on fit quelque chose pour l'évêque de Lubeck: j'ai fait donner des instructions en conséquence à Ratisbonne, afin que la protection de Votre Majesté pour l'évêque de Lubeck lui fût efficace et qu'il se trouvât promptement satisfait.

Votre Majesté a paru, dans le temps, s'intéresser au sort des Suisses. J'avais fait évacuer leur territoire par les troupes françaises, pour les laisser jouir de leur indépendance. Mais ils se sont mis de nouveau en révolution, et j'ai été contraint, pour arrêter les troubles de la guerre civile, d'intervenir dans leurs différends. Au reste, quelque chose que l'on puisse dire, Votre Majesté peut rester persuadée que l'indépendance et le territoire de cette petite république seront maintenus dans leur intégrité.

Nous avons été ici un moment fort inquiets d'un attentat contre Votre Majesté. Je la prie de me permettre de lui dire, par l'attachement que je lui porte, qu'un peu de pompe et d'entourage est une des charges que doit supporter une personne qui est dans le rang où elle se trouve.

Je prie Votre Majesté de croire à la haute considération que j'ai pour elle.

Comm. par S. M. l'Empereur de Russie. (En minute aux Arch. de l'Emp.)

BONAPARTE.

6382. A L'EMPEREUR D'ALLEMAGNE.

Saint-Cloud, 27 vendémiaire an XI (19 octobre 1802).

Les sentiments que Votre Majesté Impériale veut bien m'exprimer dans sa lettre du 19 août m'ont vivement touché. Je la prie d'en agréer mes remerciments.

Son ambassadeur a dû lui faire connaître ce que je croyais possible de faire pour le prince Ferdinand. Je désire vivement que cela lui soit agréable. La paix avec Votre Majesté est le plus vrai de mes vœux; je crois lui en avoir donné des preuves dans des circonstances importantes, et je regrette sincèrement que les deux États n'aient pas marché de concert pour terminer les affaires d'Allemagne; il faut l'attribuer aux événements, qui ne l'ont pas voulu. Cependant il est vrai de dire que, de mon côté, je sens parfaitement que le concert de l'Autriche et de la France peut, plus que tout au monde, assurer la tranquillité de l'Europe.

Après deux guerres aussi longues et aussi sanglantes, peut-être, après tout, n'est-il pas étonnant qu'il y ait de l'éloignement et de la

défiance entre les deux cabinets. Cependant Votre Majesté sent que, dans la position où se trouve la France, ayant des engagements pour les affaires d'Allemagne avec la Russie, la Prusse et la Bavière, il m'est impossible de ne pas suivre le système que j'ai adopté. Mais, l'Allemagne pacifiée, les deux cabinets parviendront à se mieux connaître, et pourront alors marcher avec plus de concert.

Je conjure donc Votre Majesté de terminer promptement les affaires d'Allemagne. Elle aura, par là, consolidé le repos de toutes les nations. Que Votre Majesté considère que c'est la fin des événements malheureux qui ont agité l'Europe depuis dix ans, et que désormais elle n'aura plus à s'occuper que de choses agréables, qui feront le bonheur de ses peuples, et la dédommageront des années trop orageuses qui se sont écoulées depuis qu'elle règne.

Que Votre Majesté veuille alors compter sur mon désir de contribuer au bonheur de son règne et à tout ce qui pourra lui être agréable. BONAPARTE.

[merged small][merged small][ocr errors]

Saint-Cloud, 27 vendémiaire an XI (19 octobre 1802).

Je suis vivement touché des peines de Votre Altesse Royale; celles du cœur nous frappent plus sensiblement que celles de la politique. Je prie Votre Altesse Royale de rester persuadée que personne ne prend une part plus vraie à la grande perte qu'elle a faite.

Que Votre Altesse Royale croie également au désir que j'ai que les circonstances se présentent enfin telles, que je puisse la convaincre de l'envie que j'ai de lui être agréable.

Archives de l'Empire.

BONAPARTE.

6384. AU DOGE DE GÊNES.

Saint-Cloud, 27 vendémiaire an XI (19 octobre 1802).

Citoyen Doge de la République de Gênes, je vous prie de faire au Sénat mes remerciments des choses aimables contenues dans la lettre que vous m'avez écrite. Qu'il ne doute jamais de l'intérêt que je prends au bonheur de tous les citoyens de la République, et du désir que j'ai qu'ils vivent entre eux en paix et se livrent exclusivement au commerce et à tout ce qui peut accroître leur aisance, sans se donner aucune inquiétude sur l'avenir, ni se laisser agiter par l'esprit de faction.

« PreviousContinue »