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Le Corps-Législatif n'est point le théâtre de la faveur, l'hommage qu'il vous rend est donc aussi libre que sincère. »

L'Empereur témoigna sa satisfaction au tribunat de ce que, dans les discussions qui avaient eu lieu pour préparer les projets de loi, il avait montré unité de vues avec le conseil d'état.

Ensuite commencèrent les travaux de la session. L'exemption de la contribution foncière, pendant dix ans, fut accordée aux propriétaires de la ville de Mayence, des villages de sa banlieue, et de la commune d'Argenton-Château, département des DeuxSèvres, dont les maisons avaient été détruites pendant la guerre, et qui les avaient fait ou les feraient rebâtir.'

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Un conseil de prud'hommes fut créé pour la ville de Lyon, composé de neuf membres, dont cinq fabricans, et quatre chefs d'ateliers. Il était institué : pour terminer par voie de conciliation, les petits différends qui s'élevaient journellement entre les fabricans et les ouvriers, entre des chefs d'ateliers et des compagnons ou apprentis; et pour juger, en cas de non-conciliation, jusqu'à la somme de 60 fr., sans formes ni frais de procédure, et sans appel; 2° pour constater les contraventions aux lois et ré

1 Sur ce théâtre cependant, elle avait déjà passablement atteint Fon. tanes, et le menaçait encore de dignités, de titres, de dotations et d'argent.

2 Lois des 17 mars.

glemens, les soustractions des matières premières faites par les ouvriers, et les infidélités commises par les teinturiers, pour être les procès-verbaux en voyés aux tribunaux compétens; 3o le conseil était chargé des mesures conservatrices de la propriété des dessins, des réglemens de compte et de la police entre les maîtres d'ateliers et les négocians. La loi autorisait le gouvernement à établir des conseils de prud'hommes dans les villes de fabrique où il le jugerait convenable. 1

La réédification de la place de Bellecour, à Lyon, n'avançait point, malgré les avantages assurés par les lois des 7 nivose an ix et 14 germinal an XII. Des dix propriétaires, huit avaient déclaré qu'ils n'avaient ni le pouvoir, ni la volonté de construire, et qu'ils étaient dans l'intention d'aliéner leurs terrains. Les deux autres s'engageaient à construire, moyennant une augmentation d'indemnité pécuniaire. Le gouvernement résolut de les forcer tous à vendre leurs terrains, à dire d'experts, à la ville, si, dans le délai de trois mois, ils n'avaient pas commencé à rebâtir, et que la ville ferait rebâtir les maisons, aux conditions qui avaient été accordées aux propriétaires. 2 On autorisa la construction d'un pont sur la Seine, à Paris, vis-à-vis l'école militaire, avec une taxe au passage.

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1 Loi du 18 mars. Celui de Lyon fut organisé par décret du 3 juillet. 2 Loi du 6 mai.

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Loi du 27.

Des impositions de centimes additionnels furent ordonnées sur onze départemens pour acquitter la moitié des dépenses nécessaires à la confection du canal de Saint-Quentin, de celui de la Sensée, joignant la Scarpe à l'Escaut, pour la rectification de l'Escaut entre Cambray et Tournay, pour compléter les fonds de la canalisation de la Haisne, et pour rectifier la navigation de l'Oise entre Chauny et Sampigny; sur dix départemens pour les travaux du canal Napoléon, qui devait joindre le Rhône au Rhin, et la Méditerranée avec la mer d'Allemagne; sur quatre départemens, pour l'ouverture d'une route de Roanne au Rhône, par Feurs, Saint-Étienne, Annonay; sur douze départemens, pour l'ouverture d'un canal de navigation entre l'Escaut et le Rhin. Les travaux préparatoires en avaient déjà été ordonnés par le décret du 9 thermidor an xi. C'était le complément du vaste système de la navigation intérieure. La dépense était évaluée à près de 13 millions.

Ces divers travaux devaient être exécutés, et les contributions perçues pendant un certain nombre d'années. 1

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Le gouvernement fut autorisé à établir, par des réglemens, sauf à les présenter à la première session, des tarifs particuliers de la taxe d'entretien des routes, pour celles nouvellement ouvertes dans les

1 Lois des 11 et 27 avril, et 10 mai.

Alpes, par le Simplon, le Mont-Cenis, le Mont-Gele Lantaret et par Nice.

nevre,

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On donna à l'administration forestière l'attribution de constater et poursuivre les délits commis dans les bois et forêts de l'état et de la couronne, lorsque parmi les prévenus ou complices, se trouvaient un ou plusieurs de ses agens ou préposés. Cette attribution s'étendait jusqu'au droit de décerner des mandats d'amener ou de dépôt, d'interroger les prévenus, d'entendre les témoins, et enfin de faire, jusqu'au mandat d'arrêt exclusivement, tout ce que les magistrats de sûreté et directeurs de jury pourraient faire.

C'était une entreprise sur la juridiction ordinaire et qui avait surtout le grave inconvénient de distraire de leurs juges naturels, les citoyens étrangers à l'administration forestière, Le projet éprouva une vive discussion dans les conférences avec le tribunat. Au Corps-Législatif, Toulongeon demanda en vain que, conformément aux lois organiques, la délibération fût ajournée à deux jours, et qu'on s'en occupât dans un comité général. Le projet fut adopté par deux cent trois votans contre vingttrois. 2

Le système d'instruction publique, créé par la loi du II floréal an x, s'était établi et avait reçu tous ses développemens. De nombreuses écoles s'éle

1 Loi du 4 avril.

2 Loi du 22 mars.

vaient de toutes parts, mais elles étaient isolées et indépendantes les unes des autres; l'état des hommes qui se consacraient à l'instruction n'était point assuré; ils n'étaient point assujétis à une discipline commune. L'Empereur voulait lier, par des rapports immédiats, tous les établissemens, réunir en un seul corps tous les professeurs, former un corps enseignant.

Suivant lui, il n'y aurait pas d'état politique fixe, sans ce corps ayant des principes fixes. Tant qu'on n'apprendrait pas dès l'enfance s'il fallait être républicain ou monarchique, catholique ou irréligieux, l'état ne formerait point une nation, il reposerait sur des bases vagues, incertaines, il serait constamment exposé aux désordres, aux changemens.

Fourcroy, qu'il avait chargé de lui présenter un projet, lui demanda si son dessein était de confier l'enseignement à une corporation religieuse. L'Empereur répondit qu'il ne reconnaissait point de connexité entre ces deux idées. Il sentait que les jésuites avaient laissé, sous le rapport de l'enseignement, un très grand vide. Il ne voulait pas les rétablir ni aucune autre corporation qui fût soumise à une domination étrangère. Il voulait former une corporation non de jésuites qui auraient leur souverain à 'Rome, mais de jésuites qui n'auraient d'autre ambition que celle d'être utiles, et d'autre intérêt que l'intérêt public. On n'avait pas à craindre qu'il rétablit les moines, il n'y réussirait pas quand il le voudrait, surtout s'il exigeait qu'ils fissent, à vingt-et

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