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Nous ferons encore une remarque: la consommation d'alcool en Russie s'élève actuellement à un peu moins d'un gallon ; mettons en chiffres ronds: 4 litres; — c'est le chiffre de 1892, c'est-à-dire de trois années avant l'application du monopole.

Mais M. Alexis Raffalovich déclare que l'objet du monopole a été surtout << de faire échec à l'ivrognerie »; et si la consommation de l'alcool est restée à peu près au même niveau, il est de fait que les cas d'ivrognerie ont diminué en Russie. Nous ne dirons pas que c'est là un mal; cependant il est certain qu'au point de vue physiologique, un homme peut s'enivrer de temps à autre sans grand danger, tandis qu'au contraire la consommation régulière d'un petit excès d'alcool finit par lui être extrêmement préjudiciable.

Nous considérons que la question reste ouverte et qu'il faudra y revenir lorsque le monopole de l'alcool en Russie aura duré quelques années de plus, dans cinq ans, par exemple, s'il n'est pas réaboli auparavant.

The Economist, dans son fascicule du 27 avril, discute le droit de 1 shilling dont Sir Michaël Hicks-Beach vient de frapper la houille à son exportation. «< Jamais, dit-il, depuis la taxe sur les allumettes proposée par M. Robert Lowes, une proposition budgétaire n'a causé autant de trouble dans le commerce et provoqué autant de controverses que le droit d'exportation sur le charbon de Sir Michaël Hicks-Beach ».

Nous ne reviendrons pas sur les arguments connus mis en avant au sujet de ce droit; depuis deux mois, du reste, la question semble à peu près épuisée; il est cependant un point, dans l'argumentation de The Economist qui mérite d'être signalé; c'est celui-ci :

Près d'un tiers de nos exportations de charbon, dit-il, sont finalement consommées par des steamers britanniques se réap · provisionnant en ports étrangers. Si, comme le pense Sir Michaël Hicks Beach, c'est le consommateur qui supportera le droit, un tiers en sera payé par notre marine marchande; nous paierons donc, dans ce cas, un tiers de notre droit. Si, au contraire, la taxe fait baisser le prix du charbon, ce sont les proprétaires de mines qui la paieront. Dans les deux cas, la taxe, soit en son entier, soit pour un tiers, sera payée par des sujets britanniques.

The Economist ne prévoyait pas, à ce moment, que le droit pourrait retomber presque en entier sur le frèt. C'est pourtant ce qui se produit. Les nombreux «< charbonniers » anglais construits

spécialement pour le transport du charbon, et incapables de transporter autre chose, se trouvent forcés, pour ne pas rester inutilisés, d'accepter des frèts très bas, permettant au charbon britannique de soutenir. sur le continent, la concurrence des autres charbons, et le 11 mai, les frêts s'établissaient ainsi :

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de sorte, remarque The Economist, que, « jusqu'à présent la taxe n'est pas supportée par la prospère industrie minière, ni par les rapaces consommateurs étrangers, mais par notre marine marchande, dont l'état est loin d'être prospère ».

Et il ajoute avec amertume. « Et plus les frêts baisseront, meilleure sera la situation, pour les charbons américains, sur nos marchés étrangers »>!

- A signaler encore dans le numéro du 27 avril dont nous venons de parler, un article intéressant sur « la Politique et les Trusts », et, dans le numéro du 25 mai, une discussion très serrée d'une communication faite le 22 à la réunion du Bankers' Institute par Sir Robert Giffen, sur « The Expenditure of National Capital ». The Economist intitule son article « Fallacious theories of National Expenditure », et il faut dire que l'expression de «< fallacieuses » semble à peu près justifiée. Sir Robert Giffen ne prétendait en effet démontrer rien moins que ceci que les dépenses militaires, en état de paix comme en état de guerre, étaient légères pour un peuple aussi riche que le peuple anglais. Et, malgré toute son habileté, Sir Robert Giffen n'y est pas parvenu,

ment.

naturelle

Le Giornale degli Economisti publie, dans son fascicule de mai une intéressante discussion de M. P. Boninsegni sur « le principe de la convenance économique et la science des quantités », (Il prinripio della convenienza economica e la scienza delle quantità), lequel principe, suivant le professeur Ulisse Gobbi - qui en est

l'inventeur, présiderait aux lois de la production et de l'échange. Le professeur Gobbi part de ce point que l'individu, dans les opérations économiques, « se sert de certaines choses et de certaines énergies personnelles qui sont en son pouvoir » ; et il en déduit que, pour accomplir une opération donnée, l'individu est déterminé par un « jugement de convenance », dans lequel intervient une certaine fonction de quantité physique qu'il appelle importance.

La première remarque que fait, avec juste raison, M. Boninsegni, c'est qu'il est regrettable que le professeur Gobbi n'ait pas songé à définir ces expressions: importance et énergies personnelles. Il ressort de son ouvrage qu'il considère le terme importance comme << une quantité qui sert à instituer le jugement de convenance, et pour lequel il suffit de constater que l'importance d'une chose est supérieure à celle d'une autre, sans mesurer leurs importances respectives ». Pour prouver qu'il n'est pas nécessaire de procéder à ce mesurage, mais qu'il suffit de constater que l'importance d'une chose est supérieure à celle d'une autre, le professeur Gobbi fait observer que l'on peut mettre des choses par ordre d'importance, aussi bien que l'on peut disposer des soldats par ordre de taille, sans savoir à combien de centimètres se monte la hauteur de chacun d'eux. Ainsi posé, son terme importance semblerait ètre quelque chose d'objectif; or il est essentiellement subjectif. Prenons quelqu'un au hasard et demandons-lui quelle est la chose qui a pour lui le plus d'importance: un morceau de pain, ou le « Moïse » de Michel-Ange. Il vous répondra peut-être : « le Moïse de Michel-Ange », s'il est rassasie; mais, s'il a faim, il vous répondra: «un morceau de pain ».

-

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Il en est de même de l'expression énergies personnelles; on peut y voir tout un monde.

Sont-ce là des quantités ? Une quantité est une chose réelle, mesurable. Or si, à la rigueur, on peut apprécier que telle chose a une « importance » à peu près double de telle autre, je demande avec M. Boninsegni comment, en face de deux tableaux, par exemple, on peut mesurer et comparer les énergies personnelles que leurs auteurs y ont dépensées...

L'Economista.- Dans le fascicule du 10 mars,notre excellent ami Giretti, que les mesures d'intimidation du parquet italien ne parviennent pas à réduire au silence, continue son plaidoyer pour l'abolition du droit de douane sur le blé, qu'il décore de cette jolie

métaphore « le charbon de la machine humaine ». Sa conclusion est à citer:

<< Les armes dont nous entendons nous servir pour obtenir l'abolition du droit sur les céréales, et aussi la fin de toutes les oppressions des castes et des classes dominantes, sont exclusivement celles de la persuasion, dans les limites de la plus stricte légalité.

« Et c'est pourquoi, en combattant et en nous efforçant de réfuter les sophismes des agrariens, nous ne désespérons pas d'arriver à convaincre tous les hommes de bonne foi, y compris ceux auxquels l'abolition du droit sur les céréales pourra causer un dommage passager, qu'il y va du salut et de l'avenir de la patrie, s'il n'est pas pourvu à temps à l'institution d'un état de choses où soient consacrés et protégés les droits de tous et de chacun ».

- Sous ce titre : « Un épisode de la municipalisation des services publics en Angleterre », le fascicule du 5 mai relate l'histoire suivante, qui serait amusante si elle n'était pas aussi grave:

Un M. Ludwig Mond, inventeur d'un procédé perfectionné de fabrication du gaz pour emplois industriels, et qui annonçait pouvoir, grâce à ce procédé, vendre son gaz 2 pence, soit 20 centimes, au lieu de 2 shillings les 1000 pieds cubes, voyait, à la fin du mois d'avril, sa demande d'autorisation de constitution d'une Société au capital de 1 million de liv. sterl. pour la fabrication et la fourniture de ce gaz, prise en considération par l'une des Commissions de la Chambre des Communes. Immédiatement, vif émoi la municipalité de Birmingham, ainsi que celles de la moitié des autres localités du district, protestent avec véhémence contre ce projet : « Nous sommes nous-mêmes, disent-elles, productrices de gaz, et il serait contraire à l'intérêt public de permettre à une Compagnie privée de nous faire concurrence, de mettre en péril les capitaux investis dans nos entreprises par les contribuables 1».

Ainsi, ajoute l'Economista, il n'est plus possible, dans la libre Angleterre, à cause de la municipalisation de certains services publics, de fonder une compagnie industrielle sans rencontrer l'opposition la plus vive de la part d'autorités locales intéressées à ne pas avoir de concurrents. Autrefois, on aurait fait bon accueil à un industriel proposant de livrer à 2 pence les 1000 pieds cubes du gaz vendu actuellement 2 shillings; cette différence considé

1 Voir pour détails le Times du 27 avril.

rable aurait été saluée comme un événement de la plus grande importance pour les industries qui ont besoin du gaz comme force motrice. Aujourd'hui on proteste...

Nous ne savons quelle décision prendra la Commission de la Chambre des Communes à l'égard de M. Ludwig Mond; mais il est intéressant de constater que, grâce à la municipalisation des services publics, des autorités locales en arrivent à préten ire imposer aux contribuables l'obligation de payer 2 fr. 50 ce qu'ils pourraient avoir pour quatre sous.

Il reste entendu que la municipalisation des services publics a pour but et surtout pour résultat de « protéger les contribuables et de leur assurer des tas d'avantages... >>

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La Rassegna nazionale (1er mai 1901). « Un suddito fedele » publie un long article « à propos de la question sociale en Italie ». (Sulla questione sociale in Italia), article intéressant par cela même qu'il révèle un état d'esprit vraiment admirable. Le « suddito fedele » considère en effet que la crise sociale italienne provient de deux causes extrêmement simples : « d'abord du manque d'éducation morale du peuple, qui dissipe le dimanche le gain de la semaine, et ensuite de ce fait que les fils du peuple se marient avec l'imprévoyance la plus absolue des obligations graves que crée une famille future ». Un point c'est tout. Quant aux impôts, qui sont plus écrasants en Italie que dans tout le reste de l'Europe, quant aux droits de douane, grâce auxquels l'Italien paie son pain presque deux fois plus cher qu'il ne devrait le payer sans parler du reste; - quant à la mauvaise administration, au gaspillage des deniers publics, aux expéditions coloniales aventureuses, pas un mot. Le « suddito fedele » considère, ou, du moins, puisqu'il n'en parle pas, semble considérer qu'ils n'ont aucun rapport avec la crise sociale.

L'heureux homme!

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La Riforma Sociale. Dans le numéro du 15 mars, M. R. DallaVolta étudie la question du pain et la coopération ». Il expose qu'un bon pain doit, d'abord, n'être altéré en aucune façon, ne pas contenir d'eau au-delà d'une certaine proportion, être bien

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