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« Le convoi parti d'Esher à dix heures et demie est arrivé à Weybrige à midi moins un quart; il se composait d'un corbillard trainé par huit chevaux, et de douze voitures de deuil trainées l'une par six chevaux et les autres par deux.

<< Au moment où le cerceuil avait quitté Claremont, la reine accompagnée par la duchesse de Nemours, et les autres membres de la famille royale, étaient partis pour Weybridge dans trois voitures de deuil.

« Le convoi est entré à Weybridge dans l'ordre suivant : Vingt-deux cavaliers,

« Les marchands d'Esher;

« Un enfant portant un encensoir;

« Un autre enfant portant une croix;

<< Deux acolytes suivis de M. Lyre, le révérend docteur White, provicaire apostolique, et de neuf autres ecclésiastiques;

« Enfin le corbillard et les voitures de deuil.

« A l'entrée particulière de la chapelle, le cercueil a été enlevé du corbillard et porté dans la chapelle sur les épaules de dix hommes, suivis par le comte de Paris, le duc de Nemours, le prince de Joinville, le duc d'Aumale et une centaine de personnes.

<«< Un nombre très-considérable de Français a voulu suivre le cercueil; mais le défaut de place n'a point permis de les admettre dans l'intérieur.

« La chapelle était tendue de noir, et le Saint-Sacrement était sur l'autel, une petite galerie avait été disposée pour recevoir la reine et les autres membres de la famille royale.

« Le cercueil a été placé devant l'autel, et après la messe il a été descendu dans le caveau, qui a été immédiatement scellé.

« Le convoi est aussitôt reparti pour Claremont. »

Depuis Louis XV, mort à la suite d'une débauche, c'est-à-dire depuis soixante-seize ans, c'était le cinquième roi de France qui descendait au cercueil.

De ces cinq rois de France, un seul est mort aux Tuileries:

Louis XVIII.

Louis XVI avait été guillotiné sur la place de la Révolution.
Napoléon était mort à Sainte-Hélène.

Charles X, à Goritz.

Et Louis-Philippe, à Claremont.

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Quel enseignement terrible pour ceux qui voudraient régner encore!

FIN DE L'HISTOIRE DE LOUIS-PHILIPPE.

Voici maintenant le jugement que porte la presse anglaise sur Louis-Philippe :

Le Morning-Chronicle dit que « dans cette famille, l'intrigue était une tradition héréditaire; » puis, ce journal le montre combattant pour sa maison, et en cela fidèle aux traditions de sa famille. « Nous ne saurions, » ajoute ce journal, « dire qu'un homme grand et bon vient de mourir; il conquit la couronne par la duplicité, la conserva par l'oppression, et sa conduite vis-à-vis de l'Angleterre fut marquée au coin d'une politique sans scrupule, aussi éloignée de la vraie sagesse que du véritable bonheur. >>

Le Morning-Advertiser lui reproche un désir immodéré d'accumuler des richesses, des honneurs et de la puissance sur sa famille, sans égard pour les intérêts ou les sentiments du peuple qu'il avait à gouverner, et au mépris des engagements les plus solennels.

Le Globe déclare que Louis-Philippe a péri pour avoir trop gouverné au profit des épiciers, trop compté sur l'appui exclusif des classes moyennes, trop sacrifié « les salaires aux bénéfices. »

Le Morning-Post dit que si la finesse d'un esprit froid et persé· vérant avait pu consolider l'établissement de Juillet, Louis-Philippe fût mort roi des Français; mais il avait le malheur de ne pas représenter ces principes, «et sa race est tombée» au milieu des moqueries de toute l'Europe.

T. 11.

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Le Times, qui donne une longue biographie du roi défunt, s'exprime en ces termes :

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Louis-Philippe, roi des Français, se distinguait parmi tous les hommes qui ont figuré avec la même prééminence que lui, sur le théâtre de l'histoire et dans le gouvernement de l'humanité, par l'absence de ces facultés intellectuelles transcendantes, de ces passions désordonnées, de ces vertus imposantes, ou ces crimes hardis qui marquent ordinairement les annales de l'humanité; mais ces dons dangereux du génie, de la puissance, il les remplaçait par une singulière combinaison de qualités inférieures de l'humaine nature. Soit pour le bien, soit pour le mal, ces qualités formaient l'ensemble de son caractère, et, en portant un jugement exact sur cet homme remarquable, il serait aussi dangereux de l'élever au rang de sage ou de héros, que de le faire descendre au rang d'un tyran égoïste. » Le Sun s'exprime ainsi :

« Louis-Philippe d'Orléans, après avoir pris une part active au terrible conflit des peuples contre les princes, était destiné à être témoin du triomphe de la démocratie, qu'il croyait écrasée sous sa toute-puissance, et à voir le bonnet phrygien prendre la place du diadème des Bourbons. Tel a été le juste châtiment du fils d'Égalité, pour avoir tenté d'étouffer la liberté dans ses embrassements, pour l'avoir trahie par ses baisers, comme fit Iscariote, pour l'avoir endormie avec l'insidieux poison de ses flatteries. Pour comble de chagrin, la Providence ne semble-t-elle pas ne l'avoir fait survivre si longtemps à sa chute, que pour lui montrer la République consolidée en France. La fin de ce personnage remarquable paraît due aux remords qui minaient sa santé et au coup de foudre de Février. >>

Enfin, dans le Daily-News, on lit ces lignes :

« Pendant les dix-huit années de son règne, pas une idée grande ou généreuse ne germa dans son esprit. Sa politique intérieure se bornait à cajoler ou à corrompre les députés. Il ignora toujours, ainsi que les hommes d'État à son service, la condition, les besoins, la fermentation de l'esprit de son peuple. Ils se contentaient, ses ministres et lui, de regarder à la superficie, sans dépasser la couche

d'herbe artificielle qui recouvrait un sol volcanisé et prêt aux éruptions.

« Les lois de rigueur ont accéléré l'explosion. Ce Salomon des salons de Londres et de Paris ne connut jamais l'essence et le but du gouvernement, le développement et la satisfaction des besoins populaires. Pour lui, la politique c'était la diplomatie et rien autre chose, »

FIN,

PIECES JUSTIFICATIVES.

Page 37.

« Vous avez bien raison, mon cher ami, il vaut mieux nous écrire. Quand on « discute avec quelqu'un que l'on aime un objet intéressant, on est bien exposé à s'é« chauffer, et je sens que c'est ce qu'il faut éviter entre nous; car il échappe des choses « qui font du mal dans le moment et qui en font encore après. Je serais bien aise de « terminer, pour ce qui regarde madame de Sillery (madame de Genlis), et vous ne << m'en montrez pas moins d'impatience. Ainsi, parlons-en, mon cher ami, pour n'y « plus revenir; car j'ai besoin, non-seulement de repos, mais de jouir des bien« faits que je vous dois. Vous avez déjà fait beaucoup pour mon bonheur, en m'ac«<cordant mes enfants un certain nombre de fois par semaine. Ce seront des mo«ments heureux que je vous devrai et qui répandront une grande douceur sur mes « jours. Je ne veux plus revenir sur le passé, ainsi que je vous l'ai dit; les torts que « je reproche à madame de Sillery existent et ne peuvent être détruits, ni par son « journal, ni par tout ce qu'elle pourra vous dire; c'est moi qui ai vu et entendu « tout ce qui m'a déplu. Ce n'est donc que l'avenir qui peut me faire revenir sur << son compte; elle ne peut pas se justifier, mais elle peut réparer, et si je vois que « sa manière d'ètre et celle de mes enfants est telle que j'ai droit de l'attendre et de « l'exiger, je suis juste et je serai bien aise d'oublier les sujets de plainte qu'elle m'a « donnés. Voilà, mon cher ami, ce qui est dans mon cœur et ce que j'ai déjà com« mencé à éprouver. Madame de Sillery a eu dernièrement de l'humeur, je l'ai sup« portée; mais le lendemain, elle a eu une attention pour moi, elle m'a écrit un « billet honnète; je l'ai fait remercier par ma fille, et je lui ai répondu d'une ma«nière dont vous avez été aussi content qu'elle; enfin, ce sera sur sa conduite que « je réglerai la mienne. Que pouvez-vous désirer de mieux, cher ami? je ne dis pas « que je lui rendrai mon amitié, ma confiance; quand elles ont été blessées à di« verses reprises, il est impossible que l'on puisse se rapprocher à un certain point; « mais madame de Sillery peut compter sur tous les égards, les marques d'attention « possibles. Je serai bien aise de pouvoir témoigner de la considération à la personne « qui élève mes enfants, ainsi ce ne sera pas ma faute si cela n'est pas. Vous devez être « content de moi, je l'attends de votre justice; mais encore une fois ne discutons « plus sur ma manière de juger madame de Sillery; je le puis moins à présent « qu'autrefois, car antérieurement, lorsque je m'éloignai d'elle, vous n'essayates « pas de la justifier; vous me dites seulement que vous aviez des raisons essentielles « qui vous faisaient tenir à elle. Je jouissais au moins de vous faire un sacrifice que « vous sentiez; mais actuellement vous me dites que madame de Sillery fait votre « bonheur, qu'elle m'aime. Je vous avoue que quand vous me dites de ces choses« là, elles me tuent. Eloignons bien, cher ami, tout ce qui pourrait troubler notre « union, et soyons comme toujours, sans gène, sans embarras l'un pour l'autre. « Vous savez trop bien que vous ne pouvez avoir une meilleure amie que moi, pour « que je le répète; mais j'espère que vous l'avez toujours pensé, et que personne ne « pourrait détruire la confiance que j'attends de vous. J'ose dire que je l'ai toujours « méritée, et je serais bien affectée de penser que vous ayez pu soupçonner un ins« tant que j'étais changée. Ceux qui vous ont mandé cette nouvelle avaient certaine«ment des raisons pour accréditer une chose démentie par toute ma conduite, car «assurément, il ne s'est pas passé un seul jour pendant votre absence où je n'aie « prouvé mon attachement pour vous; mais, comme vous me l'avez dit, on avait

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