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tout le 6o régiment de dragons se tenait prêt à monter à cheval.

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tout le 6o régiment de dragons se tenait prêt à monter à cheval. Sur toute la ligne des boulevards, où devait passer le convoi, étaient échelonnés des sergents de ville.

Au moment où le char mortuaire arriva devant la porte du général, on détela les chevaux ; des jeunes gens s'y attelèrent, tandis que d'autres, se substituant aux employés des pompes funèbres, chargeaient le cadavre sur le corbillard.

Ce n'est qu'en arrivant sur le boulevard qu'un peu d'ordre put s'établir dans le cortége.

Les quatre cordons étaient portés par le général La Fayette, le maréchal Clausel, MM. Laffitte et Mauguin.

Le char était pavoisé de drapeaux tricolores et couvert de couronnes d'immortelles.

Immédiatement, derrière le char, venaient les membres des deux

Chambres.

Puis les gardes nationaux, armés de leurs sabres seulement.

Puis les artilleurs, avec leurs mousquetons, mais sans cartouches; seuls, les gardes du drapeau en avaient.

Puis les réfugiés de toutes les nations avec leurs drapeaux.

Puis la société de l'Union de Juillet, avec une bannière en deuil, ornée de crêpes et d'immortelles.

Puis les Écoles de droit, de médecine, de pharmacie, de commerce, d'Alfort; chacune ayant son drapeau avec cette légende : Au général Lamarque.

Tout cela se déploya sur le boulevard, sans confusion, en bon ordre, mais sombre comme une armée qui marche au combat.

Le temps était incertain, presque pluvieux; l'atmosphère était sillonnée par ces courants d'air chaud, qu'on dirait des éclairs invisibles et qui disent aux organisations nerveuses: Voilà l'orage!

Ce fut à la hauteur de la rue de la Paix seulement que le convoi dù général éprouva son premier trouble. Les jeunes gens qui marchaient devant le corbillard crièrent à ceux qui le traînaient.

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Cette déviation n'était pas prévue, elle jeta dans tout cet immense serpent qui emplissait le boulevard de ses anneaux et dont la queue

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touchait encore à la rue Saint-Honoré, une agitation et une inquiétude bientôt calmées, lorsque l'on sut la cause qui faisait prendre au corbillard la rue de la Paix.

On voulait faire faire au vieux soldat le tour de cette colonne, à laquelle, pour sa part, il avait apporté sans doute quelque canon ennemi.

Mais à la vue de cette foule qui s'approchait en désordre, le poste de l'État-Major crut à une agression; trop faible pour résister, il rentra vivement et ferma les portes de l'hôtel.

De leur côté, ceux qui conduisaient le convoi virent dans cette retraite, non pas sa véritable cause, mais un moyen de ne pas rendre les honneurs funèbres à l'illustre mort.

A l'instant, la foule s'amassa devant la porte, criant avec menace: -Les honneurs au cercueil! les honneurs militaires! les honneurs au général Lamarque!

Les soldats sortirent et présentèrent les armes; la foule se calma. Le corbillard, traîné par les jeunes gens, fit le tour de la colonne et vint reprendre sa place à la tête du cortége.

On avait obtenu ce que l'on voulait de l'autorité militaire, et cette concession avait produit son effet, c'est-à-dire qu'elle avait exalté les esprits.

Le convoi reprit donc sa marche avec cet air victorieux d'une foule qui croit à des obstacles, et qui vient de vaincre le premier obstacle qui lui était opposé.

Au cercle de la rue de Grammont, on entendit tout à coup un grand bruit et de menaçantes clameurs; ce bruit et ces clameurs étaient causés par l'apparition du duc de Fitz-James, qui regardait passer le convoi le chapeau sur la tête.

C'était une étrange provocation de la part d'un homme aussi intelligent que le duc; n'y eût-il que cette religion du cercueil qui survit à toutes les autres, parce qu'elle a sa source dans l'égoïsme humain, il eût dû regarder passer le cercueil tête nue.

L'explosion fut telle que le duc de Fitz-James dut se retirer.

Cette retraite de l'ex-pair fut accompagnée des cris de: Vive la République! poussés dans les rangs de l'artillerie, et sous les bannières des corps de métiers.

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