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de Liege, et sur les différentes routes qui amenent de Cologne sur nos frontieres, des convois, des chariots innombrables. Il m'a attesté que sur une seule route il en avoit compté 1200. Il est juste de rassurer les départemens qui s'effrayent parce qu'ils ne sont pas fournis, et de veiller à ce que les mesures que nous avons annoncées et que les circonstances rendent si intéressantes à réaliser n'éprouvent aucun retard. Je demande donc que le rapport du comité militaire soit mis à l'ordre du jour demain, et l'impression de la lettre à la suite du rapport de M. de Montesquiou.

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(Je passe de suite à la discussion de l'affaire du 21 et remets à un autre moment le rapport de M. Regnault, çommissaire).

M. Goupil : Le roi est-il inviolable? C'est la question, et ce ne devroit pas en être une. La lecture de nos décrets devroit terminer toutes les controverses par lesquelles on s'efforce d'obscurcir cette inviolabilité relative seulement aux fonctions de la royauté. On vous a dit dans cette tribune: la responsabilité du roi est semblable à celle du corps législatif. Quand on a avaneé ce paradoxe, on n'a pas assez pesé les termes de votre décret sur l'inviolabilité du roi. Si on l'eut fait on eut vu que cette inviolabilité rend la personne du roi sacrée, par exemple, nous sommes inviolables, mais personne ne s'est avisé de dire que nos personnes soient sacrées (on rit). On a répandu, sur une vérité évidente, les ombres de la malveillance. Il faut approfondir cette question, en remontant aux principes d'après lesquels je me flatte de démontrer que ce seroit la chose la plus importante que nous aurions à faire que d'établir cette grande loi par laquelle nous avons commencé notre constitution. Tout pouvoir émane de la na tion; mais la souveraineté, image de la divinité, doit être considérée sous deux relations différentes: 1o. lorsqu'elle donne des loix; 20. lorsqu'elle régit la nation suivant la constitution. C'est ainsi que nous considérons la toute-puissance. Dans la formation de la constitution, la souveraineté est simple; elle est simple, mais le pouvoir exécutif l'est dans un sens bien plus étendu. Il faut une inviolabilité bien plus marquée pour que, lorsque l'utilité publique le deinande, l'assemblée nationale prenant cette loi pour fondement, rende faux les raisonnemens par lesquels on veut lui persuader qu'elle confond tous les pouvoirs. Mais il n'en est pas ainsi de la souveraineté constituée : autant il est nécessaire que la souveraineté constituante soit une, soit individuelle, autant il seroit funeste, autant il seroit pernicieux que la souveraineté constituée fut une, fut indivisible. C'est

donc, messieurs,fune grande vérité que vous avez établie que pour assurer la liberté nationale, la souveraineté ne peut être une, individuelle. Comment doit-elle être divisée ? Permettez-moi de reposer sur cette théorie là, l'éloge judiċieux, ce me seinble, de cette belle constitution que vous avez donnée à la France. Quelques hommes ont cru qu'il falloit deux ou plusieurs rois pour assurer la liberté. Vous avez adopté, messieurs, un principe plus simple; vous avez considéré que comme un corps national ne forme qu'une personne morale et politique, il falloit le considérer sur les rapports politiques. Or une personne, pour remplir ses fonctions, doit avoir une volonté et une force qui exécute les ordres de la volonté. Voilà, messieurs, l'image simple et naïf de ce que vous avez formé par la constitution. Vous avez donc distribué la souveraineté en deux grandes branches, dont l'une seroit, par exemple, la volonté nationale, et l'autre, le centre et l'énergie sociale par laquelle s'exécuteroit la volonté nationale. Ainsi, la souveraineté constituée se trouve, par votre constitution, distribuée en deux branches, la souveraineté législative et le pouvoir exécutif, et vous avez encore donné au pouvoir exécutif l'attribution particuliere, le modérateur de la puissance législative, en l'investissant du veto suspensif jusqu'à la troisieme législature.

Maintenant, messieurs, je dis que puisque la souveraineté constituée a été pour le bonheur du peuple, pour assurer la liberté nationale, ainsi distribuée en deux branches, chacune de ces deux branches doit participer à l'attribut essentiel de la souveraineté, et doit nécessairement être inviolable. Comment, messieurs, le pouvoir exécutif, tel que vous l'avez institué, seroit-il vraiment suprême ainsi que vous l'avez déclaré et indépendant. S'il n'étoit pas inviolable, comment le pouvoir exécutif modérateur du pouvoir législatif, pouvant accorder ou refuser, suivant ce qu'il croira convenable à l'intérêt de la chose publique, et conforme à la volonté générale, sa sanction aux résolutions du corps législatif? comment, dis-je, pourroit il remplir avec liberté, avec indépendance, le grand devoir s'il n'étoit pas inviolable? Vous voyez bien, messieurs, que cette inviolabilité résulte de votre constitution même, résulte de la nature de la chose qui si elle n'étoit pas dans vos loix il la faudroit établir; mais j'en viens aux objections; on vous dit, messieurs, que cette inviolabilité ne doit s'entendre que des actes d'administration que fait la royauté, que des actes dans lesquels la nation à un ministre responsable, dans lesquels l'acte du roi est garanti par la signature d'un ministre responsable, la

justice l'exige, et la justice est la politique d'une grande

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Je sais, messieurs, tout le respect qui es dû à la justice; mais il est bien plus facile d'en prononcer le mot que d'en saisir la notion. Eh bien! qu'est-ce donc que la justice? je demande à ceux qui me font une objection semblable, et sans attendre leur réponse, je leur dis moi; la justice est cette harmonie entre les hommes par laquelle leur intérêt particulier et les intérêts généraux se trouvent subordonnés les uns aux autres, et les mêmes qu'exige l'intérêt général du genre humain, et l'ordre établi dans chaque corps social. Il est démontré que l'inviolabilité est juste, parfaitement juste et conforme aux droits du genre humain et des nations; comment entendrez-vous actuellement les déclamation qui viendront vous assiéger?

Je vous demontrerai par nos fastes que la royauté, lorsque l'aristocratie ne l'a point tyrannisée, lorsqu'elle a été livrée à elle-même, libre dans son action, défendoit la liberté du foible; c'est lorsqu'elle a été entraînée, subjuguée par des entreprises d'aristocratie militaire, d'aristocratie sacerdotale, aristocratie sénatoriale. c'est alors que les ennemis de la liberté ont avili cette dignité pour la relever d'une maniere ridicule pour asservir, pour opprimer.

Notre constitution a déja déterminé un genre de déchéance; savoir, celui où le roi étant sorti du royaume sans le consentement du corps législatif, est interpellé par une proclamation de rentrer. Ainsi, messieurs, ce principe, déja décidé par votre constitution, répond au grand échafaudage d'objections fondées sur le crime personnel dont la personne royale pourroit se rendre coupable. Vous avez résolu hier, quoique vous ne l'ayez pas encore décrété, qu'en completant votre constitution, vous détermineriez avec soin le cas où les déchéances pourroient avoir lieu.

On vous parle de nos ennemis; mais, parmi ces ennemis, il en est qui, séduits par d'aveugles préventions, murmurent, et ne sont pas capables de méditer des forfaits. Il est aussi des machiavélistes d'une perversité consommée, qui voudroient détruire cette constitution' qu'ils tenteroient en vain d'attaquer de vive force; cette constitution qu'ils abhorrent, parce qu'elle est équitable, ils ont résolu de la faire périr dans les convulsions de l'anarchie. Ces intentions sont abominables.

Les clubs établis dans cette capitale, lesquels ayant signalé bien des fois leur zele pour la liberté, sont aujourd'hui la ma

chine de laquelle on s'est servi, et avec laquelle on a entrepris de précipiter la nation françoise dans le goufre des horreurs de l'anarchie et des troubles.

La direction de ces dangereuses et perfides machinations a été donnée par des hommes que l'on peut appeller clubocrates, factieux, intriguans, versés dans l'art de séduire la multitude irréfléchie, et de la diriger à leur gré : distribués en différens clubs on connoit les manoeuvres de ces hommes. Il faut, messieurs, vous en rendre compte. Les uns ont ameuté le peuple dans les lieux publics; d'autres se retranchent dans un coin des salles destinées aux assemblées des sociétés dont je viens de vous parler; ils ont préparé le tumulte, les applaudissemens. On parle, on dit les choses les plus extravagantes. « Le roi ne peut pius obtenir de confiance, conseil de régence, conseil de surveillance, conseil exécutif, monarchie sans monarque, régence sans régent. » Et par moyen d'une vingtaine de gens ils obtiennent des applaudissemens (on applaudit).

le

Voila la manoeuvre que l'on ne cesse de faire depuis la malheureuse époque du 21 juin; et je ne puis m'empêcher de remettre sous vos yeux cent traits fra pans auxquels j'ai été présent. Le 8 de ce mois, dans un de ces clubs, qui lorsqu'il n'a pas été influencé par des hommes pervers, a montré des sentimens vraiment patriotiques dans ce club on y donne lecture d'une adresse à l'assemblée nationale (et je vous observe qu'elle n'étoit adressée ni faite pour l'assemblée nationale); et notez que dans cette adresse l'assemblée nationals y étoit censurée injurieusement; de quoi? vous ne vous en douteriez pas d'avoir envoyé vers le roi des commissaires, et de n'avoir pas inandé le monarque à la barre de l'assemblée nationale. An trait d'une aussi odieuse et eussi abominable démence, je frémissois, et tout retentissoit d'applaudissemens. Il y a plus, messieurs; on a eu l'indécence, l'inconséquence (je ne sais quel terme employer) d'arrêter que cette adresse seroit imprimée et envoyée dans les provinces. M. Legrand: M, Goupil a été président de cette assemblée.

M. Goupil : Si j'avois été président je ne l'aurois pas Sou fert, et j'ai fait preuve que j'en suis incapable. Pour soutenir ces abominables manoeuvres on accapare des journalistes, des folliculaires de pamphletaires. Un homme investi d'une réputation qu'il avoit obtenue je ne sais comment, et décoré du titre d'académicien, a été employé dans cette occasion comme il y a quelques tems on avoit employé le nom de Ray. - nal pour décrier notre constitution et préparer les rits à la

es

contre-révolution que l'on méditoit. Qui voudroit de la malheureuse et criminelle célébrité de ces érostrates modernes? Un autre avec moins d'éclat que les deux précédens, fait comme eux un trafic de son érudition. Le sieur Brissot de Warville s'est lui-même annoncé à cete assemblée, il a fait un discours, un discours! dont l'impression a été ordennée ; on a eu la hardiesse, l'imprudence d'en faire la distribution au burean de distribution de l'assemblée avant hier. Il est nécessaire, messieurs, de vous donner une idée du point où est parvenue l'audace des écrivains de ces odieux et méprisables pamphlets.

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M. Dubois-des- Gais S'il s'agissoit de dénoncer un homme qui ait conseillé la désobéissance, ou quelque chose qui puisse avoir trait à la désobéissance rassemblement, soit; mais cela n'est pas.

au meurtre,

au

M. Goupil: Il est nécessaire de vous donner une juste idée de l'excès auquel les écrivains de ces méprisables pamphlets se sont portés par leur audace criminelle (murmures). Il est essentiellement vrai que la question d'examiner les propositions qui vous sont faites à la suite d'une proposition qui a échoué de toutes ces propositions d'une convocation d'un nouveau corps constituant, de renvoi à une prochaine législature, pour décider ce qui concerne la personne du roi; ces propositions nous ont été faites, je les combats: or, pour les combattre raisonnablement, et avec succès, je dois mettre sous vos yeux les raisons qui ne vous permettent pas de différer d'un seul instant la décision de la grande question qui vous occupe: or, ces raisons il est visiblement facile de les saisir dans les manoeuvres qui s'exercent, dans la maniere dont on agite les esprits, dans les mouvemens que l'on veut produire. Je vais donc mettre sous vos yeux l'excès d'audace auquel l'écrivain de ces odieux et criminels pamphlets s'est porté pour la destruction de la royauté: il veut y substituer le monstre d'une république qui ne fut jamais fait pour la France; il dit que ceux qui ne sont pas de son avis ont de bonnes raisons pour vivre sous notre gouverne ment, et qu'ils sont payés par la liste civile; voudroit-il bien nous dire, ce lâche, cet artificieux calomniateur, quelle bonne raison il peut avoir eu pour nous produire dans son mémoire l'infamie de l'escobarderie la plus honteuse, inventée pour nous rendre parjure au serment qui nous lie à notre divine constitution. Brissot n'a pas craint d'écrire, il n'a pas craint de débiter: Je fais la motion que l'inviolabilité absolue soit regardée comme attentatoire à la souveraineté de la nation et du roi, et subversive de la constitu

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