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permets de rappeler que le présent hommage n'est pas le seul qu'il ait fait à l'Académie de Belgique.

Il y a quelques années, en effet, la Classe a reçu de lui une importante étude de législation comparée et d'histoire juridique, en plusieurs volumes, sur les droits de succession du conjoint survivant, avec des projets de réforme beau livre, d'une vaste érudition et d'une grande richesse de renseignements bibliographiques, sur lequel je me propose d'attirer un jour d'une façon plus digne l'attention de la Classe des lettres. ALPH. RIVIER.

Dans la séance du mois d'août 1883 et dans celle du mois de mai 1884, j'ai eu l'honneur de présenter à la Classe des lettres deux volumes d'Études historiques sur le comté de Savoie et le marquisat en Italie, dus à un diplo inate érudit et patriote qui compte en Belgique de nombreux amis, M. le comte Albert de Gerbaix de Sonnaz.

Dix années se sont écoulées depuis lors, durant lesquelles M. le comte de Sonnaz a constamment servi son pays, d'abord en qualité d'agent italien auprès du prince de Bulgarie, puis, depuis peu, dans ses fonctions actuelles de ministre à La Haye. Ceci explique suffisamment l'intervalle considérable qui sépare la publication des deux premiers volumes de celle du troisième, dont je viens faire hommage à la Classe des Lettres, au nom de l'auteur.

Ce volume contient l'histoire des règnes de Thomas Jer et d'Amédée IV, c'est-à-dire du temps qui s'est écoulé entre 1189, année où mourut Humbert III, et 1253, année de la mort d'Amédée IV, fils de Thomas ler et son successeur dans le comté de Savoie et le marquisat d'Italie. Je ne me reconnais pas la compétence nécessaire pour juger cette

œuvre aussi élégante qu'attrayante. Je me borne à constater que l'auteur, à côté d'une vaste lecture, a constamment puisé aux sources mêmes; que dans son tableau, toujours simple et sobre, d'une époque extraordinairement riche en hommes et en faits mémorables, il ne se confine point dans les limites de la Savoie, du Piémont, de l'Italie, et que bien loin de spécialiser son sujet, il l'élargit de manière à y comprendre l'Empire des Hohenstaufen, la Suisse romande, la Bourgogne, la France; enfin que, faisant l'histoire de la maison de Savoie, il en suit les membres dans les vicissitudes de leur existence, et montre Thomas II en Flandre, Guillaume, évêque de Winchester, élu princeévêque de Liége, Philippe archevêque élu de Lyon avant d'être comte et marquis et duc de Chablais, Boniface, archevêque de Cantorbéry, primat d'Angleterre, Pierre, comte de Richmond, brillant à la cour de Henri III et souverain du pays de Vaud, où il a conservé le surnom de Petit Charlemagne. M. de Sonnaz insiste avec raison sur la place importante qu'occupent les princes de Savoie dans l'histoire de l'Europe au XIIIe siècle. « Après avoir suivi pas à pas, dit-il en terminant, les traces des fils de Thomas Ier, comte et marquis, on reste convaincu que cette place est due à leurs dons éminents, à leurs brillantes vertus. » C'est ainsi qu'il y a déjà six cents ans, cette auguste maison préludait aux hautes destinées qu'elle accomplit aujourd'hui sur le trône de l'Italie unifiée et devenue l'une des six grandes puissances européennes. ALPH. RIVIER.

ÉLECTIONS.

La Classe procède, par scrutin secret, à la formation d'une liste de six noms pour le choix, par le Gouvernement, de trois membres du jury chargé de juger la deuxième

période quinquennale du prix de statistique fondé par Xavier Heuschling. Cette liste sera communiquée à M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction publique.

- La Classe passe ensuite à l'élection du Comité chargé, avec le Bureau, de présenter à la prochaine séance une liste de candidats pour les places vacantes. Sont élus : MM. Piot, Wagener et Wauters.

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Sur sa demande, M. P. Mansion est remplacé par M. J. Neuberg dans le jury chargé d'examiner les ouvrages soumis pour les prix De Keyn à décerner cette année.

RAPPORTS.

Histoire de la philosophie scolastique dans les Pays-Bas et la principauté de Liége (revision); par Maurice De Wulf.

Rapport de M. Le Roy, premier commissaire,

M. De Wulf, en écrivain consciencieux, n'a pas voulu livrer à l'impression son mémoire couronné (Histoire de la scolastique dans les Pays-Bas), avant de l'avoir soumis à une revision sévère, conformément aux observations des Commissaires. Le fond est resté le même; mais la forme a beaucoup gagné des redites ont disparu, des longueurs ont été condensées. De plus, l'auteur a mis son travail à jour, en tenant compte des derniers ouvrages publiés depuis le concours, sur le sujet qu'il a traité. Tel qu'il est, j'estime que le manuscrit peut être mis immédiatement sous presse. D

Rapport de M. Lamy, deuxième commissaire.

Je me range à l'avis de mon savant et honoré confrère. »

Rapport de M. Tiberghien, troisième commissaire.

< Même avis, avec réserves au sujet des opinions formulées par M. De Wulf sur l'ontologisme et le néo-thomisme. >

COMMUNICATION ET LECTURE.

Les correspondants belges du grand Huygens; par Georges Monchamp, correspondant de l'Académie.

Une voix auguste proclamait naguère (1) devant les Représentants de la nation que les États secondaires doivent s'attacher à grandir leur rôle par l'éclat des lettres et des arts.

Parole pleine de vérité : les lettres et les arts sont la fleur et l'aliment de l'esprit humain. En eux se révèle et s'épanouit la beauté immortelle cachée sous l'enveloppe périssable; ils sont admirés, et cette admiration nourrit en l'âme de chacun la sève mystérieuse qui prépare de nouvelles éclosions.

Cette belle et noble mission de faire fleurir les choses

(1) Discours du trône à l'ouverture des Chambres belges, 9 novembre 1892.

de l'esprit, notre chère patrie la comprend, et je n'ai qu'à jeter les yeux autour de moi pour en trouver d'éclatantes preuves.

Dans les âges passés, la Belgique a-t-elle eu toujours à cœur, du moins au même degré, son développement intellectuel? Grande question, Messieurs, à laquelle on a répondu très différemment.

Ces jours derniers, un orateur académique (1) avançait que l'imagination a son rôle légitime et même nécessaire dans l'histoire. Elle seule, disait-il, peut délivrer l'esprit des obsessions qui l'empêchent de se représenter, avec la Duance exacte de chaque siècle, la face mouvante des choses. Sans l'imagination, comment l'historien pourrait-il rassembler selon les lois de la vie, les membres épars, souvent incomplets, que lui livrent les documents, pour en tirer, je ne dis pas une résurrection, mais une simple restauration?>

Je ne démêle pas bien si l'orateur à qui je fais allusion a voulu faire de l'ironie ou de la charité (au fond, je crois qu'il a cherché l'une et l'autre); mais en tout cas, jusque dans ces derniers temps, on n'aurait su, sans beaucoup d'imagination, porter un jugement complet et définitif sur le passé intellectuel de notre pays. Non seulement les documents nous livraient des membres épars ou incomplets, mais les documents n'existaient pas, ou n'étaient pas à la portée des chercheurs.

Depuis quelques années, les sources de l'histoire littéraire du pays commencent à devenir accessibles, et nous entrevoyons la réalité des choses; à mon avis, elle flatte

(1) M. Challemel - Lacour. Discours de réception à l'Académie française, 25 janvier 1894.

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