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que ce mot ne soit donc plus la base de toutes les défiances, de tous les reproches nous ne ferons rien de bon dans l'ordre social qui ne tourne au profit du pouvoir exécutif : vouloir que la constitution l'exécute avant que d'être achevée, c'est vouloir que la montre aille avant que d'être montée. Cette idée ne fait pas beaucoup d'honneur à la justesse d'esprit de ceux qui l'ont conçue, si toutefois elle en a fait à leurs intentions». << Des observations sur la responsabilité des ministres appartiennent à cette matière, comme à toutes les matières environnantes. Les ministres avec un peu de candeur, si la candeur pouvoit exister dans le cœur des ministres, n'auroient pas fait un obstacle de cette loi salutaire. Nous hésitons, nous marchons à pas lents depuis quelques semaines parce que ce dogme terrible de la responsabilité effraie les ministres : je ne dirai pas toutes les raisons de cet effroi, quoique, si j'étois malin, j'eusse quelque plaisir à les développer; j'en dirai une qui, selon moi, est la principale, elle est fondée, qu'ils me pardonnent cette expression, sur leur ignorance. Ils croient toujours que nous cherchons à les rendre responsables du suc

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cès; et cependant nous n'avons jamais ni pu, ni voulu faire porter cette responsabilité que sur l'emploi ou le non emploi des moyens. Aucun homme qui se respecte n'oseroit dire qu'il veut se soustraire à ce genre de responsabilité. Pourquoi donc, dans tous les tiraillemens qui ont eu lieu entre l'assemblée et les ministres, ceux-ci ont-ils sans cesse combattus cette responsabilité du succès dont nous ne parlions pas, tandis qu'ils se sont tû constamment sur celle qui nous paroissoit nécessaire, et à laquelle ils ne peuvent raisonnablement refuser de se soumettre? Je conclus à rejetter les amendemens qui portent sur cette idée, le , que pouvoir exécutif doit avoir, en ce moment, tous les moyens qu'en ce moment on ne peut pas lui donner. Quand votre constitution sera faite, le pouvoir exécutif, par cela même sera fait tous les amendemens qui tendroient à donner des moyens excentriques, des moyens hors de la constitution, doivent être absolument écartés ».

L'assemblée rendit un décret par lequel, 1o. elle déclare perturbateur du repos public quiconque se prévaut d'aucun acte émané du roi et de l'assemblée nationale, s'il n'est

revêtu des formalités prescrites par la cons titution; 2o. veut que le discours du roi, l'adresse aux françois

les décrets soient

envoyés aux municipalités à mesure qu'ils seront sanctionnés, et qu'ils soient lus au prône; 3°. fixe la conduite des officiers municipaux lorsque la perception des impôts sera en danger; 4°. oblige les municipalités à se prêter main-forte mutuellement et à répondre de leur refus; 5°. détermine le cas où l'on doit faire usage de la loi martiale, et rend les communes responsables des dommages causés par les attroupemens, quand elles auront pu les empêcher.

26 février 1790. L'assemblée avoit décrété que le comité de constitution seroit chargé de donner des dénominations aux quatrevingt-trois départemens.

M. l'abbé Maury attacha peu d'importance à cette dénomination; Mirabeau étoit d'un avis tout opposé.

s'est

le co

«Il me semble que le préopinant, dit-il, nə pas fait une idée nette de ce que mité se propose en donnant une nouvelle dénomination aux départemens. Rome fut toujours Rome depuis César jusqu'à Claude, et cependant César avoit l'empire du génie,

et l'autre celui de l'extrême imbécillité.

sans

« On vous a proposé d'indiquer les cheflieux des départemens par des numéros, je m'élève contre cet avis; car l'amour-propre humain qui se replie en tous sens, nous abanbonner, pourroit bien persuader un jour que le no. 24 ne vaut pas les nos. 1 et 2. Il faut donner une dénomination nouvelle aux départemens; une dénomination fixe la raison, et nos principes, d'accord avec la raison, nous en font un devoir; je ne pense pas qu'il puisse exister une opération plus grande, plus importante et moins digne de persiflage, malgré l'esprit du préopinant. Il seroit cependant très-fâcheux

que

le travail des dénominations fit perdre encore beaucoup de temps à l'assemblée ; je crois qu'il seroit raisonnable de charger deux personnes de terminer ce travail. »

Dans la même séance, M. le marquis de Montesquiou présenta, au nom du comité des finances, des observations sur les affaires publiques. Il proposa une réduction de 60 millions à faire sur les dépenses ordinaires de l'état.

« On ne peut certainement qu'applaudir, disoit Mirabeau, au comité pour avoir dé

tant,

terminé 60 millions de réduction; mais on peut espérer qu'elles s'élèveront encore plus haut. Qu'il me soit permis de faire une observation générale. On parle beaucoup de comptes rendus, on nous en montre en effet quelques-uns; mais sans doute on peut douter, on peut examiner et rechercher si ce sont-là les comptes que l'on doit rendre à une grande nation. En dernière analyse, je n'entends que ceci : j'ai tant, il me faut et l'assemblée demande : pourquoi avez-vous tant? pourquoi vous faut-il tant? Lorsqu'on se trouve dans cet embarrassant passage du désordre à l'ordre, c'est au ministre à faire des propositions sur cet ordre de passage, et le ministre n'en a fait aucune, et nous sommes bien arriérés sur les moyens à prendre. Nul de nous ne connoît l'état de cette année; malgré notre activité, nous ne connoissons que notre confiance dans le ministère et le mal-aise que nous éprouvons nous ne dormons que par ce qu'on dort au pied du vésuve : il est un mot que je n'ai jamais oublié, et dont je vous laisserai l'application. « Le cheval de Caligula fut consul, et cela ne nous étonne que parce que nous n'en avons pas été témoins..>

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