Page images
PDF
EPUB

de la sanction donnée par le roi à plusieurs décrets, et notamment à ceux qui avoient été l'objet de la motion de M. Bouche.

Dès-lors, observa M. Guillaume, le décret rendu sur la motion de M. Bouche doit être. retiré du procès-verbal.

Ce dernier membre s'opposa fortement à cette mesure; « mais, disoit Mirabeau, il me semble que cette discussion auroit pu être bientôt terminée, si le préopinant s'étoit borné à demander s'il est possible que des décrets disparoissent du procès-verbal

L'assemblée ne délibéra pas sur cette discussion, et le procès-verbal resta tel qu'il étoit.

16 mars. Au nombre des ennemis de la

plus belle révolution on doit compter sans doute les gens de finances, qui calculent si inhumainement sur les sueurs des malheureux; ainsi un plan dont l'objet étoit de rétablir le crédit et la confiance, de faire reparoître le numéraire, de donner de la vie aux assignats, devoit être accueilli de la' part d'hommes éclairés.

Ces avantages ont paru réunis dans le mémoire présenté par la municipalité de Paris, relativement aux biens ecclésiastiques, et?

dont M. le comte de la Blachè fit le rapport au nom du comité des finances.

Une des dispositions de ce mémoire accordoit à la ville de Paris, en retour de l'emploi de son crédit, un bénéfice d'un seizième sur la totalité de l'opération, bénéfice qui seroit commun avec les autres municipalités du royaume.

A la suite de son rapport, M. de la Blache lut le projet du décret du comité, dont la principale base concernoit la vente et l'aliénation à la municipalité de Paris, et à toutes les municipalités du royaume, des biens domaniaux et ecclésiastiques, jusqu'à la concurrence de 400 millions.

Aucun membre ne s'opposa précisément à l'adoption de ce projet. Mais M. de Cazalès, M. d'Esprémesnil et quelques autres, demandèrent que la discussion fût différée et ajournée.

Des bruits injurieux s'étoient répandus contre la municipalité de Paris; M. Bailly embrassa avec chaleur sa défense. Le tableau

présenté par M. le maire de la gloire que s'est acquise la capitale dans la révolution, et de la misère sous laquelle gémissoit le peuple

peuple de cette ville, touchá profondément l'assemblée.

M. d'Esprémesnil prétendit appercevoir des contradictions dans le discours de M.

Bailly.

MIRA B E A U.

«Lorsque j'ai demandé la parole, c'étoit pour combattre l'ajournement. Je crois d'après la discussion du préopinant, pouvoir me dispenser d'établir mon avis à cet égard, puisque la question est jugée par le fait. M. Bailly, comme député, a donné son opinion sur le fonds de la matière; M. d'Esprémesnil, autre membre de l'assemblée, a donné la sienne: la discussion est donc ouverte. Je ne sais en quel sens on pourroit maintenant proposer l'ajournement: en effet quelle est l'opération proposée ? c'est un mode de réalisation pour plusieurs décrets qui renferment les propositions les plus urgentes, les plus pressantes; ce mode est bon ou mauvais il faut décider cette question; il faut la décider sans retard; quel est donc le motif de l'ajournement? On croiroit qu'il y a beaucoup de danger à lever enfin le doute sur la vente des biens du clergé : “on diroit Tome III.

D

qu'il est extrêmement déplaisant de voir le terme où les alarmes que donnent les besoins de l'année présente doivent disparoître : en vérité, je ne sais si avec quelque prudence on peut vouloir différer encore. Je ne m'étois pas proposé de traiter l'affaire au fond; mais s'il faut dire un mot de mon opinion, il me semble qu'on exagère les avantages et les inconvéniens de ce plan un peu partiel; j'y vois cependant un avantage incommensurable, c'est de s'occuper réellement des ventes décrétées, c'est de commencer cette réalisation si redoutée. Les objections de détail ne sont pas difficiles àrésoudre, si elles ressemblent toutes à la contradiction supposée entre le mémoire de la municipalité et le discours de M. Bailly, le quart de deux cents millions étant de cinquante millions, le quart de ce quart n'est que le seizième de deux cents millions. L'autre contradiction est aussi véritable; n'aguère M. Bailly, se présentant comme maire, est venu proposer une magnifique acquisition; aujourd'hui, membre de cette assemblée, il a parié sur les très-véritables sacrifices que font incessamment les habitans de Paris; il avoit annoncé d'abord que le bénéfice de

[ocr errors]

la ville de Paris sur les ventes seroit employé en constructions utiles; il demande aujourd'hui qu'il soit employé à secourir le peuple. On secourt le peuple quand on lui donne du travail. Je ne vois encore ici nulle contradiction; mais j'applaudis au très-louable et trèsheureux accord des droits de M. Bailly, quand il réclame l'établissement d'atteliers publics comme un soulagement véritable du peuple ; le soulagement du peuple est le premier de ses devoirs et le plus sacré des nôtres. Je conclus à ce que le projet de décret présenté par le comité soit discuté sans désemparer.

La discussion fut ouverte et continuée au lendemain; le projet de décret du comité des finances fut enfin décrété avec un petit nombre d'amendemens.

Du mardi soir 16 mars. La suite des articles concernant les prisonniers détenus par lettres-de cachet fut soumise à la discussion.

M. Fréteau proposa l'article concernant les prisonniers qui auroient été préalablement jugés en première instance, ou qui seroient seulement décrétés de prise-decorps, ou prévenus de quelques crimes capitaux; ils devoient jouir du bénéfice d'un

« PreviousContinue »