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appartient d'examiner s'ils furent nécessaires. » Par justice, par politique, par humanité, la commission avait donc proposé d'allouer le secours que demandait le gouvernement, en le réduisant toutefois à un million.

16 mai. La discussion de ce projet devait offrir le rare specta→ cle d'un gouvernement abandonné de ses défenseurs habituels. M. de Rancé repoussa le projet, comme violant le principe fondamental de toute société : la défense de la propriété par celui qui la possède. M. Ganneron l'attaquait encore plus énergiquement: il y voyait un encouragement à l'indifférence du citoyen, une prime à l'émeute. Lyon avait, en 1831, subi la loi des factieux, elle avait depuis laissé organiser dans son- sein les clubs chassés de Paris; si elle n'avait plus de garde nationale, c'est que cette garde était telle qu'on avait dû la licencier : il y avait eu dans les Lyonnais indifférence de cœur et une certaine paresse d'âme.

La défense du projet fut présentée par le ministre de l'intérieur lui-même. Après avoir établi que le mal avait été souffert pour une cause qui n'était pas lyonnaise, mais française, mais universelle, la cause de l'ordre contre l'anarchie, le ministre justifia les Lyonnais des reproches dirigés contre eux. Les Lyonnais, désarmés par le licenciement de la garde nationale, renfermés chez eux par la consigne militaire, si rigoureusement observée sous l'empire de la nécessité, que les soldats avaient été obligés de leur donner une part de leurs vivres, les Lyonnais ne pouvaient rien pour le rétablissement de l'ordre. Il ne s'agissait pas de leur payer une indemnité, il s'agissait de soulager leur détresse. Lyon, obérée, avait déjà été forcée d'augmenter ses octrois, d'une manière fâcheuse; que serait-ce donc si une nouvelle charge énorme lui était imposée ? « Pour la ville de Lyon, ajoutait le ministre, pour l'industrie qu'elle contient, pour rassurer par des témoignages d'intérêt les populations épouvantées, j'espère que la Chambre ne refusera pas de montrer la sympathie qu'elle éprouve pour des malheurs grands et non mérités. »

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que le vote du budget des recettes précédât à l'avenir la discussion du budget des dépenses, afin que des bornes fussent posées d'avance à celles-ci.

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Ces opinions se reproduisirent formulées en amendemens, dans les débats sur les articles. M. Larabit proposait que les dix centimes prélevés au profit du trésor, sur le produit des octrois, fussent supprimés et remplacés par deux centimes additionnels au principal des contributions indirectes; M. Anglade demandait que l'impôt sur le sel fût aboli; M. Dupouy, que les droits de navigation fussent évalués d'après la charge réelle et non d'après la charge possible; M. Viennet, que l'impôt sur les recettes des théâtres non subventionnés fût réduit du dixième au vingtième; mais tous ces amendemens furent successivement rejetés, ou retirés par leurs au

teurs.

Un seul point, la question des primes à la sortie des sucres raffinés, que soulevèrent les articles additionnels présentés par la commission, donna lieu à une contestation assez animée, mais toute spéciale, dans laquelle MM. Mauguin et Charles Dupin s'élevèrent contre les avantages faits aux raffineries, aux dépens du trésor, tandis que MM. Reynard et Passy insistaient sur la nécessité de favoriser une industrie en progrès, en prenant seulement des mesures pour que la fortune publique ne fût pas compromise. Les dispositions additionnelles, qui semblaient satisfaire à ces conditions de prévoyance, furent approuvées. Votant ensuite au scrutin sur l'ensemble du budget des recettes, la Chambre l'adopta à une majorité considérable (254 voix contre 52). Après cette discussion précipitée, qui n'avait offert qu'unintérêt médiocre, la Chambre des députés ne se réunit plus qu'une seule fois, pour recevoir communication de l'ordonnance de clôture de la session.

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CHAPITRE IX.

Discussion par la Chambre des pairs de ceux des projets de lois dont il est question dans le chapitre précédent, qui lui avaient été présentés. Objets divers: travaux inachevés. Propositions.-Lois d'intérêt local. Pétitions. · Clôture de la session de 1834. — Résumé.

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Les travaux législatifs de la Chambre des pairs avaient été presque suspendus, depuis les votes rendus par elle, dans la séance du 30 avril, sur les projets relatifs à l'échange de quelques dépendances du Palais-Royal contre des bois de l'Etat, et à la levée de 80,000 hommes de la classe de 1833. Elle ne s'était, ensuite, rassemblée que deux fois, le 12 et le 13 mai, pour s'occuper de projets de loi d'un intérêt local, ou de pétitions sans importance, et pour recevoir des communications du gouvernement. Ce fut seulement à partir du 15 mai que commença la délibération des divers projets de loi que nous venons de voir adopter par la Chambre des députés, c'est-à-dire que, comme d'habitude à la fin de chaque session, la Chambre inamovible, se trouvait forcément, à l'égard de ces projets, dans l'alternative d'une sanction puré et simple, ou d'un rejet absolu.

15 mai. Le projet de loi portant modification aux statuts de la banque de France fut le premier sur lequel elle délibéra. La commission d'examen avait conclu à l'adoption sans amendement de ce projet, par l'organe de M. le comte de Saint-Cricq (12 mai), bien que MM. les comtes Roy et de Bérénger eussent fortement attaqué la disposition nouvelle qui autorisait la banque à faire des avances sur des effets publics sans échéance fixe. Les considérations de principe et de prévoyance sur lesquelles ils appuyaient leur opinion furent développées par eux dans la Chambre, mais ces conAnn, hist. pour 1834.

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sidérations que combattirent le ministre des finances et M. le comte d'Argout, gouverneur de la banque, qui alléguèrent l'utilité de créer des placemens au numéraire surabondant de la banque, et qui déclarèrent que ce genre d'escompte se pratiquait déjà en fait sans inconvéniens, ne déterminèrent pas plus la Chambre qu'elles n'avaient déterminé la commission, et le projet fut purement et simplement adopté, à la majorité de 75 voix contre 19. M. le marquis de Barbé-Marbois avait, au commencement de la discussion, émis l'opinion que, puisque la banque jouissait d'un privilége, il serait juste de le lui faire payer; car tout monopole devait être une source de revenus.

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La Chambre sanctionna ensuite (19 mai), à la majorité de 106 voix contre 4, le projet relatif à l'ouverture d'un crédit extraordinaire de 400,000 francs, pour être distribués aux victimes des événemens du mois d'avril. Dans la discussion, M. le vicomte Dubouchage, renouvelant une tentative inutilement faite à l'autre Chambre, avait proposé d'admettre aux secours tous les individus blessés, et toutes les familles des personnes tuées dans les troubles, excepté toutefois les condamnés pour rébellion mnés pour rébellion et leurs familles, tandis que le projet ne mentionnait que ceux-là seulement, qui auraient été blessés ou les familles de ceux qui auraient péri en défendant l'ordre. Repoussé par le président du conseil et par le ministre de l'instruction publique, comme en dehors de l'esprit de la loi qui tendait spécialement, dans un but moral et politique, à secourir les défenseurs de l'ordre, l'amendement fut rejeté.

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La Chambre s'occupa dans la même séance du projet de loi relatif à la répartition des intére des intérêts du capital versé par Haïti. La cause des colons de Saint-Domingue fut plaidée ici comme dans l'autre Chambre, tant contre le trésor qui mettait à leur charge les frais de la liquidation onéreuse de leur créance, que contre le gouvernement haïtien, qui était infidèle à ses engagemens. MM. le baron Mounier et le prési

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dent Cassaignoles firent valoir les malheurs et les droits des créanciers: M. Gautier, rapporteur de la commission, et le ministre del'instruction publique leur opposèrent cette fin de non recevoir, que la question de savoir sur qui retomberaient les frais de la liquidation avait été tranchée nettement contre les colons, par la loi du 21 avril 1832. Répondant, en outre, à quelques observations présentées dans le rapport (17 mai) et dans la discussion, sur la mollesse du gouvernement à demander aux Haïtiens l'accomplissement de leurs

promesses, le ministre déclara que le gouvernement ferait jusqu'au bout tous ses efforts, mais qu'il n'en pouvait pas garantir les résultats. En définitive, une majorité de 79 voix contre 18 se prononça pour la loi..

Porté, le 12 mai, à la Chambre des pairs, le budget des dépenses y fut l'objet d'un rapport peu étendu, que M. le comté Roy présénta dans la séance du 17. Le rapporteur motivait, en quelque sorte, son laconisme par l'inutilité de toute observation à une époque où la Chambre était obligée1 de voter, sans discussion et sans examen, une somme énormé que de nouvelles dépenses, viendraient encore augmenter.

« Vous êtes encore forcés, disait le rapporteur, de donner votre assentiment à un projet de loi qui présente un grand nombre de dispositions Tégislatives diverses, étrangères les unes aux autres, dont plusieurs n'obtiendraient même probablement pas votre approbation; si vous étiez appelés à les voter librement.

La France doit gémir de la continuation d'un si grand désordre, et de l'impuissance dans laquelle vous êtes continuellement placés de pouvoir remplir avec efficacité et avec dignité la haute mission que, intérêts, vous tenez de la constitution du pays. »

dans ses

20 et 21. mai. Ces plaintes se reproduisirent avec plus de force dans le cours de la discussion, surtout de la part de M. de baron Mounier. I critiqua vivement un ordre de travaux législatifs qui empêchait la Chambre des pairs de rem plir le rôle qu'elle était destinée à jouer, et qui l'obligeait d'adopter même des dispositions que sa conviction l'engagerait à repousser. It appelait un changement complet dans' l'économie, dans le classement des matières, et dans les formes de la discussion des lois de finances.

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