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ruine des ames déjà perdues, & la dépravation des cœurs déjà flétris.

Ce n'eft pas d'aujourd'hui

c'eft depuis un

certain nombre d'années que la plupart de nos Journalistes & de nos Gazetiers affectent un ton irréligieux.

Exceptez - en un très petit nombre de Journaux, qui partent d'Auteurs connus & renommés par leur religion & leur mérite littétaire; les autres narrateurs de nouvelles affichent le génie philofophique & anti - chrétien, écrivant pour un Royaume catholique, tantôt ils taifent ce qui favorife le catholicifme, & tantôt ils le défigurent. Quelque fois, ils ménagent moins la Religion catholique qu'on ne la ménageroit dans un païs où elle ne domineroit pas. Quelque fois ils s'expliquent au fujet de la Religion en général, de la Providence, comme on n'oferoit s'en expliquer dans aucun autre païs chrétien, même dans aucune contrée où il exifte une Religion nationale. Il femble qu'ils ayent en vue de décrier la France dans l'efprit de tous les autres peuples. Comme il eft naturel de penfer que le goût d'une nation répond à celui des feuilles qui ont vogue chez elle, chacune de nos feuilles replace fous les yeux des étrangers ce problême qui leur paroît infoluble quelle eft la Religion des Français ?Quelle eft leur vertu ? Il femble qu'on ait pris à tâche de décréditer les Français, non- feulement dans l'efprit des autres peuples, mais dans leur propre efprit, en nous perfuadant à tous que l'irréligion prévaut dans le Royaume. Ces Ecrivains folliculaires revêtent les faits de couleurs bizarres : ils gliffent dans leurs écrits des principes erronés; ils nous offenfent courageufement & avec la coufiance qu'ils nous plairont. A l'offenfe, ils ajoutent le piquant de la raillerie, & à l'aide d'un

tour ironique, qui encore ne prend pas la peine de fe déguifer, ils fe flattent de nous faire goûter les plus infipides, les plus puériles réflexions. En vérité & à la honte de ce fiècle lumineux, ils nous croient fi aveuglés à force de lumières, qu'ils nous débitent leurs fornetes comme ils feroieut à de minces efprits, qu'on me pardonne l'expreffion, comme à des enfans; & nous avons la patience de les lire, & la bonté de leur payer péridioquement les infultes périodiques qu'ils font à notre Religion & à notre raifon.

T

L'Auteur de la France libre a mis le comble à l'audace: il n'a rien omis pour calomnier, pour déshonorer la nation. On ne doute pas que l'AT femblée de fes Répréfentans n'abhorre l'écrit; mais on fouhaiteroit avoir oui - dire qu'elle l'a blâmé. Elle adore, avec toute la France, le Divin Législateur des Chrétiens: on ne fait pas qu'elle l'ait honorablement nominé & vengé dans quelque décret, encore qu'on ait traité des affaires de Religion; & l'éclat du défaveu n'a point égalé la publicité du blafphême. Parmi les motions qui concernent la Religion, les papiers publics n'ont point inféré de motion contre l'impiété; & par rapport à ce mal, ils n'ont parlé ni de frein ni de remède.

Auteur impie, vous n'en êtes pas moins odieux. En vain vous mêlez un transport de joie à cette exclamation fépulcrale: Heureux déficit ! Votre humeur farouche vous fait efpérer à la fuite du déficit des Finances, le déficit univerfel de l'ordre politique, de la Religion, des Moeurs & des Lois. J'en jure par l'honneur de nos ancêtres, par l'honneur de l'Aflemblée Nationale & de toute la France vous vous ferez trompé.

De la liberté religieufe & politique. Des vrais intérêts de la France. MINISTRES du Très-Haut, c'eft à vous principalement de rendre gloire à Dieu & à fon Chrift. La plupart d'entre vous, MM., ne manquent ni de magnanimité, ni de conftance: mais, par une fatalité déplorable, par des contre-temps énigmatiques, des obftacles, on ne peut imaginer quels, qui font avorter notre attente, & des entraves mifes à la liberté de la renommée; les effets de votre zèle ne font pas affez connus affez divalgués dans le Royaume. Des gazetiers non fufpects de vous favorifer,& qui en général paroiffent avoir auffi peu d'amour pour le Clergé que pour la Religion, ont bien laiffé pafler dans les provinces quelques traits fuccinctement exprimés de courage eccléfiaftique & de dévouement à la Religion & à la faine doctrine. Quelque Journal à même rapporté avec complaifance des injures & des affronts elluyés à Paris par le Clergé: on auroit pu dire qu'il en parle avec déchaînement, & fur un ton vraiment incendiaire : & ces injures, le Clergé ne fe l'eft pas attirées fans doute par le facrifice qu'il a fait de fes priviléges pécuniaires; il doit y en avoir une autre caufe, & tout le monde fent qu'auprès d'une certaine claffe d'hommes répandus en France, la Religion & les vertus du Clergé lui doivent nuire beaucoup plus que fes défauts.

Cependant, Meffieurs, à peine fait-on que vous ayez voté contre diverfes motions particulières alarmantes pour le chriftianifme; votre oppofition, l'oppofition du Corps eft ignorée. L'on eft réduit à fe repofer de vos actions fur vos fentimens, & à bien préfumer de ce que vous avez

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fait, en fe retraçant l'idée de ce que vous avez
dû faire. A la vérité, tout nous invite, & nous
autorife à des conjectures avantageufes. Vous
êtes les fages & les forts du Clergé Français,
& lorfque nous nous repréfentons votre mérite &
votre fageffe, nous ne balançons pas à juger que
fouvent vous vous êtes excités vous-mêmes, &
encourages par ces réflexions.

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Si les Députés éccléfiaftiques ne foutiennent
pas avec intrepidité les maximes facrées & les
anciennes formes de l'unique Eglife du Dieu vi-
vant, qui les foutiendra? S'ils fe taifoient &
qu'ils ne réfiftaffent pas felon toute la dignité
de leur caractère à la violation ou au déperiffe-
ment de l'autorité fpirituelle, ne répondroient-
ils pas des fuites finiftres, & peut-être irrépara-
bles des arrêtés & des décrets dont le difpofi-
tif dérogeroit à cette autorité?

Vous vous êtes dit fouvent: quelle eft la fin de
notre miffion? Quel eft le fardeau de notre dépu
tation? N'avons-nous qu'à nous affliger & qu'à
condamner intérieurement ce qui ne compatiroit
pas affez avec la pureté de notre foi, avec la
délicateffe de nos confciences & la fainteté de
notre miniftere? Nos commettans peuvent auffi
ouvrir leurs cœurs à la trifteffe, & leurs yeux
aux larmes, ils peuvent comme nous pouffer des
foupirs, & ils ont des pleurs à verfer. Nous, nous
devons quelque chofe de plus. En nous envoyant,
ils ont en quelque forte envoyé leurs bouches
& leurs voix dans l'Affemblée nationale. Nous
fommes leurs organes & leurs interprêtes: Et
que feroient des bouches muettes & des voix qui
refteroient en filence, lorfque l'utilité la plus ma-
nifefte, & la néceffité la plus urgente comman-
deroient de parler? La foi du cœur juftifie l'ame
mais elle exige la confeffion de la bouche qui opère

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le falut. Cette confeffion importe d'autant plus au falut perfonnel du Pasteur, qu'elle opère auffi le falut du troupeau. Il n'eft pas permis à la lumière du monde de s'éclipfer, ni au fel de la terre de s'affadir. Qui craindrions-nous? Les chrétiens qui nous environnent, & tous les fidèles de ce beau Royaume! Ils nous écouteront, & ceux d'entr'eux qui auroîent pu être féduits, nous remercieront de les avoir détrompés. Mais fi nous ne parlons pas, nous ne faurions être entendus. Les écrivains incrédules & leurs difciples épars dans la France nous feront-ils peur? Ils n'auroient pas acquis tant de crédit & d'audace, s'ils euffent été moins craints. Ofons déplaire à des hommes qui ofent eux-mêmes irriter Dieu. N'eft-il pas ce Dieu, le protecteur de ceux qui l'honorent & le juge de ceux qui l'outragent! nous devons tout à l'état ; mais nous ne lui devons rien tant que la vérité ( 1 ).

Si quelqu'un ( ce qu'à Dieu ne plaife) cherchoit à vous intimider, Meffieurs, ne feroit-ce pas un figne manifefte qu'il redoute votre courage? Peut-il être vrai qu'au dedans de l'affemblée même, la féance tenant, quelqu'un de vos Codéputés ait contraint votre liberté en menaçant de vous noter, & qu'au-dehors des gens inconnus aient frappé vos oreilles par des propos plus menaçans encore? Mais la plus refpectable des affemblées ne renferme pas feulement toutes les lumières, il faut qu'elle raffemble toutes les vertus. La droiture & la grandeur d'ame, la franchife & la loyauté y doivent habiter comme dans

(1) Crede Deo, & recuperabit te, Eccl. 2 v..6. Pro_anima tua ne confundaris dicere verum. Eft enim confufio adducens peccatum, & eft confufio adducens gloriam & gratiam. Eccl. 4, v. 14, 15.

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