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ruraux, que les eaux pluviales établissent des servitudes, elles en constituent encore à l'égard des propriétés urbaines. Les questions auxquelles cette autre espèce de servitude donne lieu seront rappelées au tit. 3, ch. 3, où nous traiterons des Servitudes en général.

S VI.

Eaux de source.

26. Toute eau qui n'est pas pluviale est eau de source, dans le sens des lois qui appellent source d'eau non- seulement l'endroit d'où l'eau sort et d'où elle commence à couler, fût-ce par de simples filtrations, mais encore les prises ou premiers ruisseaux ou fossés destinés par la nature ou par l'homme à recevoir l'eau qu'on tire d'un fleuve, d'un lac ou de tout autre amas d'eau. Caput aquae illud est unde aqua nascitur; prima incilia vel principia fossarum quibus aquæ ex flumine, vel ex lacu, in primum rivum compelli solent (1). Et c'est avec raison puisque, quelque part qu'on les fasse, l'eau devient la propriété du maître de la prise dès l'instant qu'elle y entre, et cesse d'être la propriété de celui à qui appartient la pièce d'eau d'où elle est dérivée : c'est ce qui va être établi dans la section suivante.

(1) L. 1. § 8. ff. de Aq. quot, et œstiv.

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SECTION DEUXIÈME.

Propriété des Eaux.

27. Nous l'avons dit, no 2 et 4, l'eau perd son indépendance naturelle en touchant au sol. Son extrême mobilité ne la soustrait pas à cette loi générale. Elle ne fait en changeant de lit que changer de maître; elle en rencontre inévitablement un, quelque part qu'elle coule. Quand ce maître n'est pas l'État, il est nécessairement les agrégations ou les particuliers qui le composent; car, n'y ayant point de terrain qui n'appartienne à l'un ou aux autres, il n'y a pas d'intermédiaire entre la propriété publique ou de l'État et la propriété privée ou des particuliers. «< Notre législation, dit M. Pardessus, << des Servitudes, p. 101, no 77, ne reconnaît « que deux sortes de cours d'eau, ceux qui « sont dans le domaine public et ceux qui sont <«< dans le domaine privé ». En déclarant (articles 538, 539 et 713 ), que les biens qui n'ont pas de maîtres appartiennent à l'État, le Code a suffisamment déclaré ne reconnaître que deux sortes de propriétés, la propriété publique et la propriété privée puisque tout ce qui ne fait point partie de celle-ci appartient à celle-là.

Aussi ne s'occupe-t-il que de ces deux propriétés, et s'il admet (art. 714) qu'il est des choses qui n'appartiennent ni à l'une ni à l'autre, on peut d'autant moins placer les eaux dans cette catégorie, que des lois antérieures avaient déjà classé parmi les propriétés domaniales, les cours d'eau à l'usage du public, et toutes les autres parmi les propriétés privées (1).

§ Ier.

Eaux faisant partie du domaine public.

28. Les aquéducs publics, les fleuves et les ports tenaient le premier rang parmi les propriétés publiques chez les Romains (2). Ils ne distinguafent pas le fleuve qui était navigable de celui qui ne l'était pas ; ils n'attachaient la publicité qu'à la continuité du cours. Il est, disaient-ils, des fleuves qui sont publics, d'autres qui sont privés. Le fleuve public est celui qui coule perpétuellement; il peut ne pas être navigable, mais il est public, s'il coule toujours (3) ce qui a fait dire à Godefroy, et,

(1) L. du 21 vendémiaire an 5. Arrêté du 19 vent. an 6. (2) Sa. Instit. de Rer. divis.

(3) L. 1. S3 et 18. ff. de Flum. nequid.

après lui, à Perezius, sur le premier de ces paragraphes, que presque toutes les rivières sont publiques : c'est pour cela sans doute que, dans le Piémont, où l'on suit le Droit Romain, tous les cours d'eau, sans distinction, appartiennent au domaine (1).

29. Les rives des fleuves étaient aussi publiques, mais leur publicité différait de celle des fleuves; elles n'étaient publiques que quant à l'usage accessoire à la navigation. Ainsi tout le monde pouvait s'y arrêter, y amarrer ses navires, les attacher aux arbres, y déposer leur chargement, en un mot, y faire tous les actes qui sont une suite nécessaire du droit de naviguer; mais la propriété de la rive, sauf ces usages, appartenait aux riverains (2).

Au fond, c'était moins la rive qui était publique que les usages auxquels elle était soumise. La rive était propriété privée, soumise à un droit d'usage, à une servitude envers le public (3).

30. Nos lois déclarent domaniales les eaux

(1) Constit. Sardes, liv. 1. tit. 7. art. 1 et 2.

(2) § 4. Instit. de Rer. divis.

(3) Perezius, ibid., p. 102.

que leur nature ou leur destination consacrent aux besoins du corps social, et qui, ne pouvant devenir propriété privée sans cesser de remplir leur destination, appartiennent au domaine public; et en cela elles ne font que répéter ce que la Loi Romaine avait établi (1).

Les fleuves et les rivières navigables ou flottables, les ports, les havres et les rades, sont des dépendances du domaine public (2).

L'Ordonnance de 1669 n'y comprenait que les fleuves et les rivières portant bateaux de leur fonds, sans artifice et ouvrages de mains, ce qui excluait du domaine les rivières rendues navigables par la main de l'homme.

31. Le Code n'a point conservé cette restriction; et il ne le devait pas puisque les grands canaux de navigation à l'usage du public, de même que ceux d'irrigation et de desséchement généraux, sont déclarés faire partie du domaine de l'État (3).

Mais ce n'est point l'étendue de terrain que

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(3) L. du 21 vendémiaire an 5 (12 octobre 1796). du 19 ventose an 6 (9 mars 1798).

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