Page images
PDF
EPUB

d'uraniens qui tant par leur cachet spécial que par leur extension, constituent une spécialité de Berlin.

Il y a aussi à Berlin des hôtels, des restaurants, des maisons de famille et des établissements de bains qui sont exclusivement fréquentés par les homosexuels.

La presse quotidienne berlinoise rend inconsciemment de grands services aux Uraniens. On peut lire dans certaines feuilles des annonces suggestives, fort claires, qui sont bien comprises par ceux auxquels elles sont destinées.

Comme toutes les capitales, Berlin a, à côté de la prostitution féminine, la prostitution masculine. Toutes les deux se touchent de très près par leur genèse, leurs façons, leurs causes et leurs effets. Ici comme là, il faut chercher deux raisons dont tantôt l'une, tantôt l'autre est prépondérante : les prédispositions intimes ou les motifs d'ordre extérieur. Les prostitués masculins se divisent en deux groupes : en normaux et en << authentiques », ou vrais homosexuels. Ces derniers sont en grande partie très efféminés et portent même parfois des robes de femmes, particularité très mal vue par les femmes prostituées.

C'est un fait connu que parmi les femmes prostituées, il y a un grand nombre d'homosexuelles, environ 20 %.

La prostitution et la criminalité se donnent la main : cambriolage, vols, chantages et coups de force de toutes sortes contre les personnes et la propriété, sont à l'ordre du jour parmi la plus grande partie des prostitués hommes, et le plus dangereux, c'est que ces délits ne sont pas dénoncés souvent par les homosexuels, de crainte de scandale.

A Berlin parmi les 50.000 homosexuels, - et ce chiffre n'est pas exagéré il n'y a pas plus de 20 Uraniens, en moyenne, tombant chaque année aux mains de la justice; il faut compter cependant qu'il y en a cent fois plus, donc 2.000 par an, qui se laissent prendre autrement et tombent dans les filets des maîtres chanteurs.

Les pratiques des homosexuels sont-elles justiciables des concepts de faute et de crime, et dans quelles limites? Leur répression pénale est-elle opportune ou nécessaire, et dans quelles limites?

L'auteur déclare ne pas vouloir résoudre ces questions pour son compte. On n'a cependant pas grand'peine à découvrir qu'il est partisan de l'abrogation du fameux § 175 du Code pénal allemand.

(Même SOURCE, p. 538).

Les homosexuels. Le Dr J. CROCQ, dans la Revue médico-sociale, consacre une étude : « Le troisième sexe », aux homosexuels.

Des enquêtes ont été faites en Allemagne sur le nombre de ces anormaux par le comité scientifique humanitaire de Berlin.

Une circulaire fut adressée aux étudiants de l'école polytechnique de Charlottenbourg et au syndicat des ouvriers métallurgistes; elle posait trois questions: Votre instinct vous porte-t-il vers les femmes ? Vers les hommes? Vers les deux sexes?

Cette lettre était accompagnée d'un bulletin de vote anonyme sur lequel se trouvaient les lettres: F., H. et F. et H., il suffisait de souligner l'une ou l'autre de ces lettres pour manifester ses penchants.

Il y eut 1.696 votants parmi les étudiants et 1.885 parmi les ouvriers.

Les réponses donnèrent pour les étudiants 91 % de normaux, 1/5 % d'homosexuels, et 4.5 % de bisexuels, soit 6% d'anormaux, et pour les ouvriers 95.6 % de normaux, 1.16% d'homosexuels et 3.24 % de bisexuels, soit 4.4 % d'anormaux.

En combinant les chiffres des deux catégories, on trouve 94.8% de normaux et 5.2 % d'anormaux. Ces chiffres concordent sensiblement avec ceux des statistiques antérieures, qui fixaient à environ 2 % le nombre des homosexuels.

Il faut, en effet, tenir compte que les professions les plus atteintes n'ont pas été examinées, tels la haute aristocratie, les officiers de marine, les écoles qui, dans le tableau des épreuves de hasard, tenaient le record.

Il résulte des recherches que, dans l'empire allemand, il y a 2% d'homosexuels et 3 % de bisexuels; en tout, 5% d'anormaux. Berlin comptant à peu près 2.000.000 d'habitants, on doit admettre qu'il existe, dans cette capitale, 40.000 homosexuels et 60.000 bisexuels; soit en tout 100.000 anormaux.

Ce chiffre formidable est peut-être atteint dans certains autres pays à Londres et en Hollande, par exemple. Il y a partout des homosexuels; mais il faut reconnaître que cette perversion particulière est moins fréquente en France et surtout en Belgique.

Le Dr Crocq conclut que ce n'est pas par le Code pénal que l'on arrivera à un résultat ; l'homosexualité étant un état pathologique, c'est dans les données scientifiques qu'il faudra chercher le remède.

Les résultats, difficiles à obtenir chez les homosexuels nés, peuvent certainement être poursuivis avec succès chez les bisexuels nés.

Une éducation rationnelle et un milieu favorable pourrait donc faire disparaître une grande partie des invertis; sur les 5% d'anormaux de Berlin (100.000), 3 % sont bisexuels (60.000). Sur les 2 % d'homosexuels, on peut admettre qu'il y a une bonne moitié d'invertis d'occasion. Si l'on parvenait à guérir les bisexuels et les homosexuels d'occasion, on ferait donc tomber le chiffre des anormaux de 5% à 1 %, et, au lieu de 100.000 invertis, Berlin n'en compterait plus que 20.000.

QUESTIONS ET SOLUTIONS PRATIQUES

Théâtre. testation.

- Artiste.

QUESTION 174.

Engagement théâtral.

Compétence. - Acteur étranger.

Con

En cas de contestation entre un directeur de théâtre de Paris et un acteur étranger en représentation à ce théatre devant quelle juridiction (tribunal civil ou conseil de prud'hommes) le différend doit-il être porté ?

Sous l'empire des textes antérieurs à la loi du 27 mars 1907, les Conseils de Prud'hommes enserrés dans les limites d'une compétence étroite ne pouvaient connaître des difficultés entre acteurs et directeurs.

Cependant, depuis plusieurs années, les revendications persistantes des artistes lyriques et dramatiques avaient attiré l'attention du législateur sur les avantages qui pourraient résulter de leur admission au bénéfice de la juridiction prud'homale.

Une première fois, en 1890, le Parlement fut saisi d'une pétition dans ce sens habilement rédigée par la Chambre syndicale des artistes dramatiques, en même temps que d'une proposition de M. le député LE SENNE. Il refusa de les prendre en considération. La tentative renouvelée deux années

plus tard n'eut guère plus de succès (Broca, Doléances des artistes, dans la « France théâtrale » du 15 décembre 1900; Davray, Tribulations de Thespis chez Thémis..... p. 142).

Ce ne fut qu'en 1901, lors de la discussion générale de la loi sur les Conseils de Prud'hommes, que M. Lagasse parvint à faire adopter par la Chambre une disposition portant attribution de compétence à ces Conseils « entre les entrepreneurs de spectacles ou leurs représentants et les artistes choristes, musiciens, employés de théâtre de toute catégorie (Chambre des députés, séance du 11 février 1901, Journal officiel du 12, Déb. parl., p. 384).

Mais le Sénat, sagement opposé en principe au développement des juridictions exceptionnelles, préféra s'en tenir au texte de la commission et ne ratifia pas le vote de la Chambre (Sénat, Déb. parl., Journal officiel, 1903, p. 1277).

Depuis cette époque, toutes les tentatives à ces fins rencontrèrent la même opposition et notamment un amendement de M. Strauss au Sénat, écarté sur la demande du rapporteur et malgré l'énergique intervention de M. le ministre du commerce Trouillot (Davray, loc. cit.).

Les protagonistes de la réforme ne se découragèrent pas et la législation nouvelle inspirée d'un libéralisme prudent est venu récompenser leurs efforts.

A vrai dire, la loi du 27 mars 1907 ne s'est pas formellement prononcée sur le principe, mais il ressort en toute évidence de son esprit et des travaux préparatoires de sa rédaction que la profession d'artiste dramatique doit être implicitement comprise dans la généralité des termes de ses art. 1

et 5.

Cette loi votée dans une intention démocratique a surtout eu pour but de faciliter l'accès de la juridiction prud'homale au plus grand nombre possible de travailleurs (Cluzel, Traité des Conseils de Prud'hommes, 1908, p. 15). D'où l'élasticité voulue de sa terminologie substituant aux mots restrictifs « marchands, fabricants, ouvriers », les dénominations plus spacieuses de « patrons, ouvriers, employés, apprentis» (Loi du 27 mars 1907, art. 1; Dalloz, 1907, IVe partie, p. 89. Rapports Strauss du 3 avril 1906, Journal officiel, 1906, Sénat, Doc. parl., p. 623, et du 10 juillet 1906, Journal officiel du 7 avril 1907, Sénat, Doc. parl., p. 20. - Rapport

Groussier, 7 mars 1907, Journal officiel du 23 mai, Doc. parl., Chambre, p. 206).

A l'origine, il avait paru nécessaire d'insérer dans la loi une disposition spéciale aux artistes dramatiques. Le premier texte soumis à la Chambre en 1906 mentionnait expressément parmi les litiges relevant de la compétence des Prud' hommes, ceux « entre les entrepreneurs de spectacles ou leurs représentants et les artistes, choristes, musiciens, employés de théâtres de toute catégorie » (Sénat, séance du 22 février 1907, Journal officiel du 23, Déb. parl., p. 436). Ces lignes ont été retranchées au cours des débats, mais leur suppression motivée ne peut être interprétée que comme la confirmation de la volonté du législateur d'admettre à l'avenir la profession d'artiste dramatique au bénéfice de la juridiction prud'homale. On fit, en effet, justement remarquer à la tribune de la Chambre que ce paragraphe additionnel était inutile puisque les directeurs sont des commerçants et les artistes des salariés, et que par conséquent ils rentrent de droit dans une des catégories générales visées par la loi. Et la commission du Sénat observa d'autre part que le mot « employé » est pris par la loi dans son sens le plus large et que l'on risquerait fort de le restreindre en le faisant suivre des termes « artistes dramatiques, lyriques. . . . . etc. » (Sénat, séance du 22 février 1907, loc. cit.).

D'ailleurs l'intention manifeste du législateur apparaît plus nettement encore dans les déclarations faites au Sénat et à la Chambre par les rapporteurs du projet et le ministre de la justice (Journal officiel du 23 février 1907, Déb. parl., p. 436; Id., 16 mars 1907, Déb. parl., p. 671).

[ocr errors]

1. Malgré qu'ils en aient, les artistes dramatiques et lyriques ne sont ni des «< salariés », ni des employés ». Ils louent leur art, leur industrie, et reçoivent, en échange, une rémunération variable suivant leur talent, leur réputation, leur autorité sur le public, etc. Cette rémunération est de même nature que celle allouée aux médecins, avocats, architectes, etc. Mais en se ramenant, par humilité démocratique, à la catégorie de « salariés » ou « d'employés », les groupements d'artistes ont pensé qu'ils pourraient se constituer en syndicats, au bénéfice de la loi du 24 mars 1884, et par ce moyen, se ratlacher aux Bourses du travail, peut-être à la Confédération générale du travail; ils en espéraient ainsi une puissance, que ne leur donnerait pas le caractère de rière libérale ».

# car

V. Clunet, les Associations au point de vue juridique, Paris, Marchalet Billard, 1969, nos 366 et s.

N. DE LA RÉD.

« PreviousContinue »