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(Moniteur, No. 186.)

Traité définitif de Paix entre la République Française, Sa Majesté le Roi d'Espagne et des Indes, et la République Batave, d'une part, et Sa Majesté le Roi du Royaume-Uni de la GrandeBretagne et d'Irlande, d'autre part.

Le premier consul de la République Française, au nom du peùple Français, et sa majesté le roi du royaume-uni de la Grande. Bretagne et d'Irlande, également animés du désir de faire cesser les calamités de la guerre, ont posé les fondemens de la paix, par les articles préliminaires signé à Londres le 9 Vendémiaire, an 10 (1er Octobre 1801).

Et comme par l'article 15 des dits préliminaires, il a été convenu: "Qu'il serait nommé de part et d'autre des plénipotentiaires qui se rendraient à Amiens pour y procéder à la rédaction du traité définitif, de concert avec les alliés des puissances contractantes:"

Le premier consul de la République Française, au nom du Peuple Français, a nommé le citoyen Joseph Bonaparte, conseil

ler d'etat.

Et Sa Majesté le Roi du Royaume-Uni de la Grande Bretagne et d'Irlande, le Marquis de Cornwallis, chevalier de l'ordre trèsillustre de la Jarretiere, conseiller-privé de Sa Majesté, général de ses armées, &c.

Sa Majesté le Roi d'Espagne et des Indes, et le gouvernement de la République Batave, ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir: Sa Majesté Catholique, Don Joseph Nicholas d'Azara, son conseiller d'état, chevalier grand-croix de l'ordre de Charles III, ambassadeur extraordinaire de Sa Majesté près la République Française, &c.

Et le gouvernement de la République Batave, Roger-Jean Schimmelpenninck, son ambassadeur extraordinaire près la République Française.

Lesquels après s'être duement communiqué leurs pleins pouvoirs, qui sont transcrits à la suite du présent traité, sont convenus des articles suivans.

Art. I. Il y aura paix, amitié et bonne intelligence entre la République Française, Sa Majesté le Roi d'Espagne, ses héritiers et successeurs, la République Batave d'une part, et Sa Majesté le Roi du royaume uni de la Grande Brétague et d'Irlande, ses héritiers et successeurs d'autre part.

Les parties contractantes apporteront la plus grande attention à maintenir une parfaite harmonie entre elles et leurs états, sans permettre, que de part ni d'autre, on commette aucune sorte d'hostilité par terre, ou par mer, pour quelque cause et sous quelque prétexte que ce puisse être,

Elles éviteront soigneusement tout ce qui pourrait altérer à l'avenir l'union heureusement rétablie, et ne donneront aucun secours ni protection, soit directement, soit indirectement, à ceux qui vou draient porter préjudice à aucunes d'elles,

II. Tous les prisonniers faits de part et d'autre, tant par terre que par mer, et les ôtages enlevés ou donnés pendant la guerre et jusqu'à ce jour, seront restitués sans rançon dans six semaines au plus tard, à compter du jour de l'échange des ratifications du présent traité, et en payant les dettes, qu'ils auraient contractées pendant leur captivité. Chaque partie contractante soldera respectivement les avances qui auraient été faites par aucunes des parties contractantes pour la subsistance et l'entretien des prisonniers, dans le pays où ils ont été détenus. Il sera nommé de concert, pour cet effet, une commission spécialement chargée de constater et de régler la compensation qui pourra être due à l'une on à l'autre des puissances contractantes. On fixera également de concert l'époque et le lieu, où se rassembleront les commissaires qui seront chargés de l'exécution de cet article, et qui porteront en compte, non-seulement les dépenses faites par les prisouniers des nations respectives, mais aussi pour les troupes étran geres qui, avant d'être prises, étaient à la solde et à la disposition de l'une des parties contractantes.

III. S. M. Britannique restitue à la République et à ses alliés, savoir Sa Majesté Catholique, et la république Batave, toutes les passessions et colonies qui leur appartenaient respectivement et qui ont été occupées ou conquises par les forces Britanniques dans le cours de la guerre actuelle, à l'exception de l'isle de la Trinité et des possessions Hollandaises dans l'isle de Ceylan.

IV. S. M. Catholique cede et garantit en toute propriété et Souveraineté, à S. M. Britannique, l'ile de la Trinité.

V. La République Batave cede et garantit en toute propriété et souveraineté, à S. M. Britannique toutes les possessions et établissemens dans l'Isle de Ceylan, qui appartenaient avant la guerre à la République des Provinces-Unies, ou à sa Compagnie des Indes-Orientales.

VI. Le port du Cap de Bonne Espérance reste à la République Batave en toute souveraineté comme cela avait lieu avant la guerre.

Les bâtimens de toute espece appartenans aux autres parties contractantes, auront la faculté, d'y relâcher et d'y acheter les approvisionnemens nécessaires comme auparavant, sans payer d'autres droits que ceux la République Batave assujettit les bâtimens de sa nation.

VII. Les territoires et possessions de Sa Majesté très-fidele sont maintenues dans leur intégrité, tels qu'ils étaient avant la guerre ; cependant les limites des Guyanes' Française et Portugaise sont fixées à la riviere d'Arauari, qui se jette dans l'Océan au-dessus du Cap-Nord, près de l'isle Neuve et de l'isle de la Pénitence, environ à un dégré un tiers de latitude septentrionale. Ces limites ́suivront la riviere d'Arauari, depuis son embouchure la plus éloiguée du Cap-Nord jusqu'à sa source, et ensuite une ligne droite tirée de cette source jusqu'au Rio-Branco, vers l'ouest.

En conséquence, la rive septentrionale de la riviere d'Arauari, depuis sa derniere embouchure jusqu'à sa source, et les terres qui

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se trouvent au nord de la ligne des limites fixées ci-dessus, appartiendront en toute souveraineté à la République Française.

La rive méridionale de la dite riviere, à partir de la même embouchure, et toutes les terres au sud de la dite ligne des limites, appartiendront à Sa Majesté Très-Fidele.

La Navigation de la riviere d'Arauari dans tous son cours, sera commune aux deux nations.

Les arrangemens qui ont eu lieu entre les cours de Madrid et de Lisbonne, pour la rectification de leurs frontieres en Europe, seront toute fois exécutés suivant les stipulations du traité de Badajoz.

VIII. Les territoires, possessions et droits de la Sublime Porte, sont maintenus dans leur intégrité, tels qu'ils étaient avant la guerre.

IX. La République des Septs-Isles est reconnue.

X. Les isles de Malthe, de Gozo et Comino, seront rendues à l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, pour être par lui tenues aux mêmes conditions auxquelles il les possédait avant la guerre, et sous les stipulations suivantes.

1. Les chevaliers de l'Ordre, dont les langues continueront à subsister, après l'échange des ratifications du présent traité, sont invités à retourner à Malte, aussitôt que l'échange aura eu lieu: ils y formeront un chapitre général, et procéderont à l'élection d'un Grand-Maître choisi parmi les natifs des nations qui conservent des langues; à moins qu'elle n'ait été déjà faite depuis l'échange des ratifications des préliminaires.

Il est entendu qu'une élection faite depuis cette époque, sera seule considérée comme valable, à l'exclusion de toute autre qui aurait eu lieu dans aucun temps antérieur à la dite époque.

2. Les Gouvernemens de la République Française et de la Grande Bretagne, désirant mettre l'Ordre et l'isle de Malte dans un état d'indépendance entiere à leur égard, conviennent qu'il n'y aura désormais ni langue Française, ni Anglaise, et que nul individu appartenant à l'une ou à l'autre de ces puissances, ne pourra être admis dans l'Ordre.

3. Il sera établi une langue Maltaise qui sera entretenue par les revenus territoriaux et les droits commerciaux de l'isle. Cette langue aura des diguités qui lui seront propres, des traitemens et une auberge. Les preuves de noblesse ne seront pas nécessaires pour l'admission de chevaliers de la dite langue; ils seront d'ail leurs admissibles à toutes les charges, et jouiront de tous les priviléges, comme les chevaliers des autres langues. Les emplois municipaux, administratifs, civils, judiciaires et autres, dépendans du Gouvernement de l'isle, seront occupés au moins pour moitié, par des habitans des îles de Malte, Gozo et Comino.

4. Les forces de Sa Majesté Britannique évacueront l'isle et ses dépendances dans les trois mois qui suivront l'échange des ratifications, ou plustôt si faire se peut. A celte époque, elle sera rewise à l'Ordre dans l'état où elle se trouve, pourvu que le Grand

Maitre, ou des commissaires pleinement autorisés, suivant les sta tuts de l'Ordre, soient dans la dite isle pour en prendre possession et que la force qui doit être fournie par Sa Majesté Sicilienne comme il est ci-après stipulé y soit arrivée.

5. La moitié de la garnison, pour le moins, sera toujours composée de Maltais natifs: pour le restant, l'Ordre aura la faculté de recruter parmi les natifs des pays seuls qui continuent de posséder des langues.

Les troupes Maltaises auront des officiers Maltais. Le commandement en chef de la garnison, ainsi que la nomination des officiers appartiendront au Grand-Maître, et il ne pourra s'en démettre, même temporairement, qu'en faveur d'un chevalier, d'après l'avis du conseil de l'Ordre.

6. L'indépendance des isles de Malte, de Gozo et de Comino, ainsi que le présent arrangement, sont mis sous la protection et garantie de la France, de la Grande-Bretagne, de l'Autriche, de l'Espagne, de la Russie et de la Prusse.

7. La neutralité de l'Ordre et de l'isle de Malte, avec ses dépendances, est proclamrée.

8. Les ports de Malte seront ouverts au commerce et à la navigation de toutes les nations qui y paierónt des droits égaux et modérés; ces droits seront appliqués à l'entretien de la langue Maltaise, comme il est spécifié dans le paragraphe 3, à celui des établissemens civils et militaires de l'isle, ainsi qu'à celui d'un lazaret général, ouvert à tous les pavillous.

9. Les Etats barbaresques sout exceptés des dispositions des deux paragraphes précédens, jusqu'à ce que, par le moyen d'un arrangement que procureront les parties contractantes, le système d'hostilités qui subsiste entre les dits Etats barbaresques, l'Ordre de Saint-Jean, et les puissances possédant des langues ou concurrant à leur composition, ait cessé.

10. L'Ordre sera régi, quant au spirituel et au temporel, par les mêmes statuts qui étaient en vigueur lorsque les chevaliers sont sortis de l'isle, autant qu'il n'y est pas dérogé par le présent traité.

11. Les dispositions contenues dans les paragraphes 3, 5, 7, 8, et 10, seront converties en lois et statuts perpetuels de l'Ordre, dans la forme usitée; et le grand Maître, ou s'il n'était pas dans l'isle au moment où elle sera remise à l'Ordre, son représentant, ainsi que ses successeurs, seront tenus de faire serment de les observer ponctuellement.

12. Sa Majesté Sicilienne sera invitée à fournir deux mille hommes natifs de ses Etats, pour servir de garnison dans les différentes forteresses des dites isles. Cette force y restera un an, à dater de leur restitution aux chevaliers; et si à l'expiration de ce terme, l'Ordre n'avait pas encore levé la force suffisante, au jugement des puissances garantes, pour servir de garnison dans l'isle et ses dépendances, telle qu'elle est spécifiée dans le paragraphe 5, les troupes Napolitaines y resteront jusqu'à ce qu'elles soient rem

placées par une autre force, jugée suffisante par les dites puis

sances.

13. Les différentes puissances désignées dans le paragraphe 6, savoir: la Frauce, la Grande-Bretagne, l'Autriche, l'Espagne, la Russie et la Prusse seront invitées à accéder aux présentes stipulations.

XI. Les troupes Françaises évacueront le royaume de Naples et l'Etat Romain; les forces Anglaises évacueront pareillement Porto-Ferraio, et généralement tous les ports et isles qu'elles occuperaient dans la Méditerrannée ou dans l'Adriatique.

XII. Les évacuations, cessions et restitutions stipulées par le présent traité, seront exécutées pour l'Europe, dans le mois, pour le continent et les mers d'Amérique et d'Afrique, dans les trois mois pour le continent et les mers d'Asie, dans les six mois qui suivront la ratification du présent traité définitifs, excepté dans le cas où il y est spécialement dérogé.

XIII. Dans tous les cas de restitution convenus par le présent traité, les fortifications seront rendues dans l'état où elles se trou vaient au moment de la signature des préliminaires, et tous les ouvrages qui auront été construits depuis l'occupation, resteront intacts.

Il est convenu, en outre que, dans tous les cas de cession stipulés, il sera alloué aux habitans, de quelque condition ou nation qu'ils soient, un terme de trois aus, à compter de la notification du présent traité, pour disposer de leurs propriétés acquises et possédées, soit avant, soit pendant la guerre actuelle, dans lequel terme de trois ans, ils pourront exercer librement leur religion, et jouir de leurs propriétés. La même faculté est accordée dans les pays restitués, à tous ceux, soit habitans, ou autres, qui y auront fait des établissemens quelconques, pendant le temps où ces pays étaient possédés par la Grande Bretagne.

Quant aux habitans des pays restitués ou cédés, il est convenu qu'aucun d'eux ne pourra être poursuivi, inquiété ou troublé dans sa personne; ou dans sa propriété, sous aucun prétexte, à cause de sa conduite ou opinion politique, ou de son attachement à aucune des parties contractantes, ou pour toute autre raison, si ce n'est pour des dettes contractées envers des individus, ou pour des actes postérieurs au présent traité.

XIV. Tous les séquestres mis de part et d'autre sur les fonds, revenus et créances de quelqu'espece qu'ils soient appartenans à une des puissances contractantes ou à ses citoyens ou sujets, seront levés immédiatement après la signature de ce traité définitif.

La décision de toutes réclamations entre les individus des nations respectives pour dettes, propriétés, effets ou droit quelconques qui, conformément aux usages reçus et au droit des gens, doivent être reproduites à l'époque de la paix, sera renvoyée devant les tribunaux compétens, et dans ces cas il sera rendu une prompte et entiere justice daus les pays ou les réclamations seront faites respectivement.

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