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Qu'à la

culier, non relevant de lui, un droit de terrage; vérité, le ci-devant seigneur de Rieux, l'un des territoires dans lesquels ce droit a été constamment perçu jusqu'en 1792, en possédait lui-même une quotité, concurremment avec le sieur Thobois et d'autres particuliers; mais qu'on ne peut inférer de là que la totalité du droit ait été originairement seigneuriale; qu'en effet ce droit n'aurait pu être seigneurial que dans la double supposition qu'il eût été constitué pour prix de la concession des fonds qui y étaient assujettis, et que ces fonds eussent fait, avant cette concession, partie du gros fief de Rieux; qu'il est impossible que, de ces deux conditions, la seconde se rencontre ici, puisque les fonds sujets au droit ne relevaient pas tous de la seigneurie de Rieux, mais qu'il en relevait une portion considérable, tant de la seigneurie de Villers-Cauchi, située en Hainault, comme celle de Rieux, mais absolument indépendante de cette dernière, que de celles de Casnonde et d'Avesnes-lès-Aubert, situées dans le ci-devant Cambrésis, contrée qui, avant les conquêtes de Louis XIV, reconnaissait un autre souverain, et, à plus forte raison, un autre ordre de suzeraineté que le ci-devant Hainault; qu'ainsi les fonds assujettis au droit de terrage dont il s'agit ne pouvaient pas appartenir au gros fief de Rieux, avant la concession qui a pu en être faite pour prix de ce droit; que dès lors on doit nécessairement présumer que, s'ils ont été concédés pour prix de ce droit, ils l'ont été par bail à rente foncière; que cette présomption légale n'est pas effacée par la circonstance que le demandeur tenait ce droit en fief du ci-devant roi, parce que cette tenure féodale, relativement au roi, n'emportait aucune seigneurie du demandeur sur les possesseurs qui devaient le terrage, et dont il est constant que les fonds relevaient de différens seigneurs; que ce n'est que passivement que le demandeur tenait en fief le terrage, comme il aurait tenu tous autres fonds ou droits immobiliers; que, lorsque l'art. 17 de la loi du 25 août 1792 parlé des possesseurs de fief, il ne peut s'entendre sainement que des possesseurs de fiefs dominans, et

non des propriétaires de fiefs servans; qu'il suit de là et des motifs ci-dessus que la Cour d'appel est contrevenue à l'art. 17 ci-devant rapporté, dont elle a fait une fausse application, et est en même temps contrevenue à l'art. 5 de la même loi, qui ne supprime que le terrage de nature féodale; - CASSE et ANNULLE, etc. »

COUR DE CASSATION.

Lorsqu'une partie a été condamnée à l'amende pour n'avoir pas comparu au bureau de paix sur une citation en conciliation, peut-elle se faire relever de cette condamnation, en justifiant qu'elle était malade et hors d'état de paraître devant le juge? (Rés. aff.)

LA RÉGIE, C. LAFON.

Le sieur Lafon avait été condamné à l'amende de 50 fr. par le tribunal civil de Villefranche, pour n'avoir pas comparu devant le bureau de paix de Montbesens, sur une citation en conciliation qu'il avait reçue.

Plusieurs années après cette condamnation, la Régie décerna contre Lafon une contrainte en paiement de l'amende, et fit ensuite saisir ses meubles.

Lafon, au lieu de se pourvoir par voie d'opposition à la saisie, présenta requête au tribunal de première instance de Villefranche, à l'effet de se faire décharger de l'amende, attendu qu'il était dans l'impossibilité de se rendre au bureau de paix le jour où il fut cité. A l'appui du mémoire, il joignait en effet un certificat d'officier de santé, qui attestait que ledit jour Lafon était malade et détenu au lit. Cette excuse fut agréée par le tribunal, qui déchargea Lafon de l'amende et condamna la Régie aux frais.

Demande en cassation par la Régie.-Son premier moyen en la forme consistait à dire qu'aux termes de la loi de frimaire an 7, Lafon devait se pourvoir par voie d'opposition à la saisie et non par action principale; et que, sous ce rap

port, le jugement qui avait admis sa demande était irrégu- Le second moyen au fond résultait de la vio

lier et nul.

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lation de la loi du 27 mars 1791.

Le législateur, disait la Régie, en prescrivant aux parties l'épreuve de la conciliation, n'a pas entendu ordonner une vaine formalité, commander une disposition illusoire, à laquelle on pourrait se conformer ou se soustraire à son gré. La preuve en est que le défaut de comparution entraîne l'amende de 30 fr., et le tribunal qui a déchargé Lafon de cette amende a violé évidemment l'article 22 de la loi précitée. -En vain on excipe du certificat de l'officier de santé. S'il est possible d'admettre cette excuse, tous les défaillans ne manqueront pas de recourir à ce moyen, et de rendre par-là sans effet la disposition de la loi. Si, dans la vérité, Lafon ne pouvait, à cause de son prétendu état de maladie, comparaître au bureau de paix, la loi, qui n'exige pas la comparution en personne, lui laissait le moyen de se faire représenter par un fondé de pouvoir. Cette seule observation réfute l'excuse adoptée par le tribunal de Villefranche, et rétablit l'ouverture de cassation dans toute sa force. Dans le système contraire, l'exécution de la loi sera toujours paralysée. Des certificats mendiés par l'intérêt et délivrés par la complaisance auront l'effet de frustrer le trésor public des condamnations encourues par ceux qui ont été rebelles à la loi.

Le sieur Lafon a fait défaut.

Du 19 floréal an 12, ARRÊT de la Cour de cassation, sèction civile, au rapport de M. Ruperou, sur les conclusions de M. Lamarque, avocat-général, par lequel :

« LA COUR,-Attendu, sur le premier moyen, que Régie, en plaidant devant le tribunal civil de Villefranche, n'a pas proposé l'exception résultante du défaut d'opposition, et que ce vice de forme a été couvert par sa défense au fond; -Attendu, sur le second moyen, que, dès que le défendeur a prouvé qu'il était malade et hors d'état de paraître au bureau de paix le jour où il a été cité, il a été justement dé

chargé de l'amende, et que, sous ce rapport le jugement attaqué n'est contrevenu à aucune loi; - REJETTE, etc. »

COUR DE CASSATION.

Autrefois l'adjudication des biens d'un interdit, faite sur une seule publication, était-elle nulle? (Rés. aff.) La garantie solidaire et absolue de tous troubles, évictions, et autres empêchemens généralement quelconques, stipulée dans un acte de vente, s'étend-elle aux évictions qui procèdent des vices mêmes du contrat ? (Rés. aff. ) QUENTIN, C. LEBON LABOUTRAYE, Bouillerot et AUTRES.

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Une maison, sise à Paris, était indivise entre plusieurs copropriétaires, parmi lesquels était un interdit, Lebon de Terville.-En l'an 3, le sieur Bouillerot, l'un d'eux, provoque la licitation. — En l'an 4, et au mois de vendémiaire, le tribunal de famille décide que l'immeuble sera visité et estimé. Le 24 brumaire suivant, il en ordonne la vente par licitation sur une seule publication. On dresse l'acte d'enchères. Le procès verbal d'affiches contient la clause suivante: « Les copropriétaires garantissent l'adjudicataire de tous dons, douaires, dettes, hypothèques, de toutes évictions, troubles et empêchemens généralement quelconques, et ce, conjointement et solidairement l'un pour l'autre, un d'eux seul pour le tout, sous toutes renonciations aux bénéfices de droit. >> Enfin, le 7 frimaire an 4, le sieur Quentin se rend adjudicataire pour un prix supérieur à celui de l'estimation.

Après le décès de l'interdit, et le 21 pluviôse an 7, Lebon de Laboutraye, son héritier, forme contre Quentin une demande en nullité de l'adjudication en ce qui concerne le tiers ayant appartenu à l'interdit. — Quentin, de son côté, dirige contre Bouillerot et ses autres covendeurs une demande en garantie du trouble à lui causé.

Par jugement du 18 nivôse an 10, le tribunal de première

instance de la Seine déclare l'adjudication nulle relativement à l'interdit, et rejette la demande en garantie formée par Quentin.

Appel; et, le 27 messidor de la même année, arrêt confirmatif de la Cour de Paris. Cette Cour, en ce qui concerne la nullité de l'adjudication, a considéré que la nécessité de trois publications dans les ventes des biens des mineurs et interdits est établie par les arrêts de règlement de 1620 et de 1622, par un acte de notoriété du Chatelet, qui constate qu'elles étaient d'un usage général, et par la loi du 7 messidor an 2, qui dispose formellement que la vente par licitation des biens des mineurs doit être précédée des affiches et publications prescrites pour les ventes judiciaires. En ce qui touche la garantie réclamée par Quentin, la Cour d'appel a considéré qu'en droit, on n'entend, par la garantie de tous troubles, évictions et autres empêchemens généralement quelconques, que ceux étrangers au contrat, et dont il y a une cause existante au temps de la vente, soit que la chose vendue n'appartienne pas au vendeur, soit qu'elle fût affec¬ tée et hypothéquée à d'autres droits; Qu'on n'entend point par cette garantie l'éviction dont les vices du contrat même sont la cause; Que le vendeur, s'il ne s'y est pas expressément obligé, n'est pas garant de l'éviction, lorsque l'acheteur avait, lors du contrat, connaissance de la cause qui y donne lieu ; — Que, dans l'espèce, Quentin n'ignorait pas qu'il traitait avec un interdit, et que les formalités requises n'étaient point observées; qu'enfin, par le contrat, les vendeurs n'ont pas expressément garanti l'acheteur des effets de la dérogation à ces formalités.

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Quentin se pourvoit en cassation pour fausse application de la loi du 7 messidor an 2, et pour violation de la loi du

contrat.

Et d'abord, a dit Me Couture, avocat du demandeur, la Cour d'appel de Paris a commis un excès de pouvoir et violé la loi en déclarant nulle l'adjudication dont il s'agit, sur le seul motif qu'elle n'avait pas été précédée de trois publica

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