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geance et de colère; elle n'a done pu être faite que pour punir les ci-devant seigneurs de leur ancienne puissance, que pour venger les ci-devant censitaires de leur ancien asservissement.

Mais de là même il résulte que la disposition de la loi ne doit frapper que sur les ci-devant seigneurs et leurs ayans cause; de là même il résulte qu'elle ne peut pas atteindre les communes qui sont appelées, par la loi du 28 août 1792, à jouir des cens et des rentes que des ci-devant seigneurs s'étaient réservés, en aliénant leurs propriétés communales; de là même il résulte que, priver les communes de ces cens et de ces rentes, ce serait leur appliquer une peine que la loi ne leur a pas infligée, et qu'elle n'aurait pas pu leur infliger sans une conséquence aussi injuste qu'absurde. — Conclusions au rejet.

Du 19 vendémiaire an 12, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, au rapport de M. Porriquet, par lequel:

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« LA COUR, — Attendu, en droit, que, pour donner un immeuble à cens ou en fief, il fallait être propriétaire et seigneur du fonds acensé ou inféodé; -Attendu, en fait, que le maréchal de Soubise n'était ni propriétaire, ni seigneur des communaux en question, dont, suivant l'art. 1er de la loi du 28 août 1792, il n'avait qu'une possession précaire, usurpée par l'effet de la puissance féodale; - Que de là il résulte que les juges d'appel de Douai ont parfaitement saisi l'esprit des lois des 28 août 1792 et 17 juillet 1793, lorsque, sans avoir égard à la dénomination erronée de rente seigneuriale, insérée dans l'acte d'aliénation du 5 février 1787, ils ont décidé que la rente dont il s'agit, créée lors de la tradition d'un fonds appartenant à des habitans non seigneurs, était une rente purement foncière, à laquelle on ne pouvait pas appliquer les dispositions des lois précitées; --REJETTE.>>

COUR DE CASSATION.

La Cour de cassation peut-elle, à raison de circonstances particulières, proroger le délai accordé aux habitans des colonies pour se pourvoir en cassation? ( Rés. nég.)

BEAUREGARD, C. LA DAME DEVIEUX.

L'art. 12 du titre 4 du règlement de 1738 accorde un an aux colonies occidentales pour se pourvoir en cassation, et deux ans aux colonies orientales.

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L'article ajoute : « Sauf, en cas d'insuffisance, et eu égard aux circonstances, à proroger le délai, etc. »

D'après cet article, il est évident que le conseil aurait pu, dans certains cas, proroger le délai pour se pourvoir. Mais la législation nouvelle n'ôte-t-elle pas à la Cour de cassation cette faculté? La disposition générale de la loi ne laisse, à cet égard, aucun doute sur l'affirmative.

L'art. 14 de la loi du 27 novembre 1790 défend d'accorder, sous aucuns prétextes, des lettres de relief de laps de temps, et celle de brumaire an 4 répète la même prohibition; et c'est en conformité de ces deux lois que la Cour régulatrice a décidé, dans l'espèce suivante, que le délai accordé aux habitans des colonies pour se pourvoir en cassation ne peut être désormais prorogé, alors même que des circonstances particulières auraient interrompu les communications de la elonie avec la métropole.

En l'an 11, Charles Beauregard, domicilié à Caïenne, s'est pourvu en cassation contre deux jugemens rendus par les tribunaux de la colonie en faveur de la dame Devieux et signifiés en l'an 4.

Mais ce pourvoi était-il recevable? Beauregard soutenait l'affirmative et se fondait sur l'art. 12 du titre 4 du règlement de 1738.

A l'égard de l'article 15 de la loi du 2 brumaire au 4, qui

supprime tout relief de laps de temps pour se pourvoir en cas. sation, il prétendait que cet article, expliqué par l'art. 14 de la loi du 1er décembre 1790, n'était applicable qu'à ceux qui habitent la France.

Le demandeur invoquait ensuite comme un préjugé favorable différentes lois qui avaient prorogé le délai du pourvoi en cassation pour les départemens de l'ouest, les villes bloquées ou assiégées par l'ennemi; et il soutenait que les mêmes considérations militaient en faveur des colonies que l'état permanent de guerre avec l'Angleterre privait depuis longtemps de toute communication avec la métropole.

Mais, le 19 vendemiaire an 12, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, au rapport de M. Delacoste, par lequel :

« LA COUR, — Attendu que l'art. 12 du règlement de 1738 ne donne qu'un an de délai pour se pourvoir en cassation contre les jugemens signifiés au domicile des parties dans les colonies de St-Domingue, Martinique, Guadeloupe, Canada et Ile-Royale; que celle de Caïenne ou de la Guyanne française, quoique non dénommée dans cet article, doit, par induction de sa nature de colonie, être considérée comme annexée à cette indication des colonies françaises qui doivent jouir de la faveur du délai d'un an pour le même effet; mais que sa situation dans la partie occidentale ne permet pas de lui appliquer le délai de deux ans, accordé par le même ar⚫ticle aux colonies orientales; -Attendu que les lois modernes, et notamment l'art. 15 de celle du 2 brumaire an 4, ont déclaré impérativement et sans aucune exception, qu'il ne serait point admis de relief de laps de temps, ce qui détruit ou repousse la faculté qu'accordait l'article cité du règlement de 1738, qui permettait d'avoir égard aux circonstances pour relever les parties du laps de temps; que cette défense faite par les lois modernes de n'accorder aucun relief de laps de tems ne peut être, comme le prétend le demandeur, écartée le texte précis d'aucune loi qui, vu le cas de guerre avec l'Angleterre, ait prorogé le délai pour se pourvoir en pareil

par

cas jusqu'à la paix; que celles de l'an 2 et de l'an 3, qui ont étendu aux habitans des villes bloquées, assiégées par l'ennemi, ou en état de siége, pays envahis, la disposition de la loi du 22 août 1793, qui décide que, pour les habitans des départemens en insurrection, les délais fixés pour se pourvoir ne commenceront à courir que quinze jours après la cessation des troubles et l'entier rétablissement de l'ordre, ne peuvent fournir, même en leur donnant le sens le plus favorable au système du demandeur, un texte précis qui proroge le délai pour toutes les colonies jusqu'à la paix; que d'ailleurs ces lois de circonstance, qui ont cessé avec leur objet, auraient été ré voquées par celles des 15 pluviôse an 5 et 12 nivôse an 6, qui statuent sur le mode des appels des jugemens rendus par les tribunaux des colonies occidentales, et ne font aucune réserve de prorogation de délai pour se pourvoir en cassation;

« DÉCLARE le demandeur non recevable. »

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COUR DE CASSATION.

Les tribunaux de police peuvent-ils infliger une peine pour contravention à un règlement de police qui n'en prononce pas? (Rés. aff.)

Peuvent-ils condamner le Ministère public aux dépens? (Rés. nég.)

LE MINISTÈRE PUBLIC C. DECOCK.

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Le 22 prairial an 11, le maire de Bruxelles avait publié un règlement de police, dont l'art. 4 portait que les boulangers seraient classés par numéros d'ordre, et devraient apposer leur numéro sur tous les pains par eux fabriqués; que tout pain trouvé sans numéro serait confisqué, et le boulanger traduit au tribunal de police.

Le 20 thermidor suivant, le sieur Decock est pris en contravention à ce règlement. Cette contravention légalement

constatée, le commissaire de police le traduit devant le tribunal de police de Bruxelles, et requiert contre lui la confiscation des pains sur lesquels il n'a pas, apposé son numéro, et la condamnation à une amende. Par jugement du 5 fructidor, ce tribunal, sans s'arrêter au réquisitoire, se déclare incompétent, et condamne le commissaire de police aux dépens. Il considère « 1° que le délit de police dont il s'agit n'est pas du nombre de ceux indiqués dans l'art. 605 « du Code des délits et des peines, et dans les lois des 19 « juillet et 28 septembre 1791; 2o que l'arrêté du 22 prairial <«^ne porte, outre la confiscation qui a déjà eu lieu par voie «de police administrative, aucune mesure pénale, et n'in« dique aucune ordonnance applicable à l'espèce.

>>

Le procureur-général près la Cour de cassation lui dénonce d'office ce jugement, et requiert qu'il soit annulé pour fausse application de l'art. 605 du Code de brumaire an 4, et pour violation, soit des art. 600 et 606 du même Code, soit de l'art. 5 du tit. 11 de la loi du 16 août 1790.

Du 20 vendémiaire an 12, ARRÊT de la Cour de cassation, section criminelle, au rapport de M. Barris, par lequel:

« LA COUR, -Vu l'art. 50 de la loi du 14 décembre 1789, les art. 3 et 5 du tit. 11 de celle du 24 août 1 1790, et les art. 456 et 600 du Code du 5 brumaire an 4; - Et attendu que le règlement de police, du 22 prairial dernier, publié par le maire de Bruxelles, pour assurer la fidélité du débit des boulangers, était un acte administratif dont l'autorité judiciaire devait assurer l'exécution, en en punissant les contraventions; - Que les contraventions au règlement de police sont, en effet, soumises à des peines par la disposition générale de l'art. 5 du tit. 11 de la loi du 16 août 1790; Que les tribunaux de police saisis de ces contraventions, par la poursuite du Ministère public, doivent donc les punir dans l'étendue des dispositions pénales qu'ils sont autorisés à prononcer d'après l'art. 600 du Code du 3 brumaire an 4; Que l'art. 605 du même Code n'est point limitatif, mais seulement démonstratif, et ne déroge point à la disposition gé

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