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CAPITULATION

Pour l'évacuation du Cap entre John Bligh, capitaine du vaisseau de S. M. le Theseus, investi des pouvoirs de John Loring écuyer, capitaine du vaisseau de S. M le Bellerophon, et le plus ancien officier de l'escadre croisant devant le Cap, d'une part; et Jacques Boyé, général de brigade, chef de l'état-major de l'armée française, et Henri Barré, capitaine de vaisseau, commandant les forces navales de St Domingue, autorisés l'un et l'autre par le général en chef Rochambeau, capitaine général de la colonie, d'autre part.

Art. fer. Les navires français de guerre et marchands qui sont maintenant à l'ancre dans ce port seront livrés aux Anglais. Réponse Accepté.

Art. 2. La garnison du Cap-Français embarquée à bord des bâtimens, et les équipages, seront prisonniers de guerre, et seront envoyés en Europe, à condition de ne pas servir, à moins qu'ils ne soient échangés, et cela aussitôt que possible, afin que l'échange puisse avoir lieu sans délai.

Réponse Accepté.

Art. 3. Tous les généraux et autres officiers sont compris dans l'article précédent, et retiendront leurs armes.

Réponse: Accepté.

Les

Art. 4. Les malades qui sont embarqués à bord de la Nouvelle Sophie et de la Julienne, seront envoyés directement en France, et les Anglais s'engagent à leur donner toutes sortes d'assistances pour cet effet, et à leur fournir des provisions et des médicamens. équipages de la Nouvelle Sophie et de la Julienne ne suffisant pas pour conduire ces bâtimens en France, le nombre nécessaire pour cet effet sera complété par des marins des autres navires; et les provisions et médicamens qui peuvent être fournis, sans inconvénient, seront fournis par les vaisseaux de S. M. B.

Réponse: Accepté.

Art. 5. Les propriétés individuelles seront rigoureusement respectées. Les archives appartenant à l'armée seront livrées au chef de l'état-major général.

Réponse: Accepté.

Art. 6. Les Américains, les Espagnols et les Suédois, à bord desquels sont embarqués des habitans de St. Domingue disposés à suivre l'armée, auront la liberté de se rendre à leurs destinations sans être inquiétés, pourvu qu'on puisse prouver que ces bâtimens appartiennent à ces nations; et pour cet effet une enquête sera faite. Réponse: Accepté.

Art. 7. La frégate prendra la mer sous les couleurs françaises, et elle déchargera ses canons avant de mettre à la voile.

Reponse: Accepté.

Art. 8. Les domestiques des officiers seront considérés comme appartenant à l'armée, et les individus qui se sont volontairement embarqués pour suivre l'armée française seront mis à terre sur le territoire de Sto. Domingo.

Réponse: Accepté.

Agréé et signé à bord de la Surveillante, au Cap Français, le 30 Novembre 1803.

Signé: J. BLIGH, capitaine du vaisseau le Theseus de S. M.

H. BARRE, capitaine de vaisseau.

J. Boyé, général de brigade, et chef de l'état-major.

Aussitôt après la signature du traité, les Français appareillèrent. Dès qu'ils sortirent de la rade, ils déchargèrent leurs canons, et furent pris par les Anglais, après avoir vainement tenté de les éviter. Ils furent conduits à la Jamaïque. Rochambeau fut envoyé en Angleterre où il demeura jusqu'en 1811. Alors Napoléon l'échangea contre des prisonniers anglais, 11 périt à la bataille de Leipsick

en 1813.

Dessalines, par la prise du Cap, se couronna d'une grande gloire. Les indigènes, exaltés par l'ivresse du triomphe, le plaçaient au dessus des plus grands capitaines. Il avait trouvé dans la bouche même de Rochambeau la glorification de sa bravoure audacieuse. Dans cette grande bataille, il avait déployé du génie et une audace prodigieuse; et après la victoire, il se conduisit avec dignité dans ses relations avec le commodore Loring. Mais la gloire qu'il s'était acquise dans ces mémorables journées eût été pure, s'il ne l'avait pas ternie, en méprisant les promesses solennelles qu'il avait faites au géné. ral Lapoype de donner toutes sortes de soins aux malades.

Trois jours ne s'étaient pas écoulés depuis l'évacuation, qu'il prétendit que les Français, laissés dans les hôpitaux, étaient à charge à l'Etat. On leur annonça leur départ pour France.

Des soldats les conduisirent sur le rivage de la mer; le ciel était étincelant d'étoiles; le Cap était plongé dans le sommeil. Ils furent embarqués dans de grandes chaloupes qui ne s'arrêtèrent que dans le canal de la Tortue. Ils furent tués à coups de baïonnettes, et leurs cadavres disparurent sous les flots. Ils étaient environ au nombre de 800. Les passions politiques qui animaient alors les indigènes étaient telles, que ce grand crime n'excita pas une vive indignation. Les colons, les capitaines-généraux Leclerc et Rochambeau avaient exercé tant de cruautés sur les indigènes, que ceux-ci se faisaient, pour ainsi dire, une vertu de rendre aux français crime pour crime. Ils étaient devenus aussi féroces que leurs persécuteurs. Peut-on s'étonner des vengeances exercées par celui que l'esclavage l'esclavage a rendu cruel ? Mais quant au général Rochambeau, il appartenait à un peuple vieilli dans la civilisation,

Il n'a pas existé un barbare qui l'ait surpassé en férocité; aucun n'inventa de plus affreux supplices. Mr. Bignon, dans son histoire de France, page 444, dit : « Cependant l'histoire doit son tribut à la sévérité de la justice: elle nommera donc comme « coupables des plus odieuses exécutions, parmi les blancs, et par « suite des préjugés des blancs, Rochambeau, etc.»

R

Pendant cet intervalle, le colonel Pourcely, à la tête d'un bataillon de la 9e et de nombreuses bandes de cultivateurs de Jean Rabel et de Bombarde, cernait étroitement la ville du Môle St Nicolas occupée par le général Noailles. Le commodore Loring qui était venu bloquer le port de cette ville, apprit aux français l'évacuation du Cap. Par une lettre en date du 10 Frimaire an 12, (2 Décembre 1803), il leur proposa de capituler. Le général Noailles lui répondit :

ARMÉE DE ST-DOMINGUE. -DIVISION DE DROITE DU NORD.

Au quartier-général du Môle, le 10 Frimaire an 12 de la République Française, (2 Décembre 1803).

LOUIS NOAILLES, Général de brigade, au Commodore LORING.

Monsieur,

J'ai reçu la lettre dont vous m'avez honoré sous la date du 10 Frimaire. Je désire connaître les termes auxquels vous m'offrez de traiter avec vous.

J'ai l'honneur d'être avec la plus haute considération, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,

NOAILLES.

Le général français reçut par une dépêche les propositions du commo. dore qu'il refusa d'accepter. Il résolut de tenter la fortune en perçant, de nuit, la ligne anglaise. Il monta une frégate et chargea deux corvettes de toutes les familles blanches, Dans la nuit du 3 au 4 Décembre 1803 il appareilla et gagna la haute mer. Les deux corvettes furent capturées. A la pointe du jour Noailles découvrit, non loin des côtes de Cuba, un vaisseau Anglais dont il s'empara après un com bat acharné. Il gagna la Havane où il mourut des suites d'une blessure qu'il avait reçue pendant l'action. Le 4 Décembre 1803, Pourcely prit possession du Môle qu'il trouva garni d'un matériel de guerre considérable.

Ainsi se termina à la gloire des indigènes cette guerre sanglante contre les Français, qui en 22 mois dévora près de 55,000 hommes de troupes européennes. La France perdit sa prépondérance en Amérique. Un immense débouché fut enlevé à son commerce dont les exportations

s'élevaient au-delà de cent millions de francs. St. Domingue seul réunissait tous les élémens de prospérité du commerce maritime de la France. La navigation de cette colonie employait 20,000 marins et plus de seize cents navires marchands.

Tous les points de l'ancienne partie française avaient été abandonnés des troupes européennes ; l'indépendance du pays était entièrement conquise. On songea tout de suite à donner un nouveau nom à cette terre qui formait un nouvel Etat. Le nom d'Haïti rappelant les aborigènes de l'île qui s'étaient fait exterminer en défendant leur liberté, sortit de toutes les bouches. Il fut accueilli avec enthousiasme, et les indigènes s'appelèrent Haïtiens.

En 1804 et en 1803, on a beaucoup reproché, en Europe, au général Rochambeau, de n'avoir pas évacué le Cap sur Sto. Domingo, avant l'arrivée de Dessalines. C'était chose impossible. Les cinq mille hommes de troupes qu'il avait encore sous ses ordres, suivis de nom-, breux malades, des familles blanches, de l'artillerie de campagne, des archives des greffes et des administrations militaires auraient péri sous les coups des indigènes. Le gouvernement Français le blama d'avoir traité avec Dessalines. Il n'était pas permis à Rochambeau d'agir autrement. Il n'avait de provisions que pour vingt-huit jours; il lui était impossible de forcer la ligne Anglaise pour atteindre l'île de Cuba; car l'escadre de S. M. B. était forte de onze vaisseaux, et lui n'en avait que quatre. Il aima mieux livrer la place à Dessalines qu'aux Anglais, craignant que ceux ci ne voulussent pas la remettre aux indigènes après en avoir pris possession. Il sentait que les Anglais, maitres de cette position, nuiraient considérablement au commerce français; et il croyait qu'il serait toujours facile, à l'avenir, de la reprendre sur les indépendans.

On le blama aussi de n'avoir pas supporté trois assauts. Rocham beau qui avait, comparé, après la première journée, la faiblesse de ses moyens de résistance à la puissance de Dessalines, craignait avec raison que la ville, au second assaut, ne fut enlevée et saccagée. En capitulant il sauva les débris de l'armée Française, et une foule de familles blanches qui n'auraient pas été sacrifiées plus tard si elles avaient voulu abandonner leurs propriétés pour le suivre.

Les Français avaient encore trois mille hommes dispersés dans l'ancienne partie espagnole. Dès que le général de brigade Ferrand qui commandait à Monte Christ apprit la chute du Cap, il trahit la confiance des habitans du département de Cibao, en abandonnant celte vaste province, et en se retirant à Sto. Domingo, après avoir détruit toutes les munitions qu'il ne pouvait pas emporter. Ne se sentant pas capable de résister, à St. Yague, à l'armée indigène qui pouvait venir l'y attaquer, il avait cherché un refuge dans les murs de Sto. Domingo où commandait le général Kerverseau. Les Espagnols du Cibao redoutant les vengeances des indigènes, envoyèrent

auprès de Dessalines une députation composée du père Jean Richardo, des capitaines don Domingo Perez Guerra et José Compas Tabarrès. Les députés offrirent au général en chef de se soumettre à son autorité. Dessalines les reçut favorablement, leur promit que leur province ne serait pas ravagée. Mais il établit sur eux une contribution de 500,000 livres tournois qu'ils furent contraints de payer. Ainsi tout le département de Cibao, quoique Dessalines n'y eut pas envoyé un seul soldat, fit partie du nouvel état. Le commandement en fut confié à José Compas Tabarrès, indigène espagnol, un des membres de la députation. Mais le général Ferrand sortant de Sto. Domingo ne tardera pas à revenir prendre possession de cette province où flottera de nouveau le drapeau français. ETAT des forces envoyées à Saint-Domingue par la France en 1802 el en 1803.

Première expédition, à partir de Février 1802, sous LECLERC. 5c., 11e, 3e. demi-brigades légères; 22e., 31e, 79e demi-brigades de ligne; 19. chasseurs à cheval, un détachement d'artillerie, fournissant 6,600 hommes, venus sur l'escadre de Brest, composée de 18 vaisseaux, 9 frégates ou corvettes, 3 bâtimens légers ou de transport, sous les ordres de l'amiral Villaret Joyeuse, ci

71e. demi-brigade de 990 hommes, venue sur l'escadre de Lorient, composée d'un vaisseau de ligne, d'une frégate, de deux corvettes, ci

15e, 56e, 68e et 90e de ligne, la légion de la Loire, 19e de dragons, un détachement d'artillerie, venus sur l'escadre de Rochefort, sous les ordres du contre amiral Latouche Tréville, fournissant 4000 h. ci

28e, 74e, et un corps d'artillerie fournissant 4,200 hommes, arrivés sur une frégate, quatre vaisseaux, une corvette et une flùte formant l'escadre de Toulon sous les ordres de l'amiral Gautheaume, ci

19e de ligne, un bataillon allemand, 10e de dragons, fonrnissant 2,400 hommes, sur l'escadre de Cadix composée de trois vaisseaux de ligne et de trois frégates, sous les ordres de l'amiral Linois, ci.

6,600

900

4,000

4,200

2,400

98e de ligne de 1,400 hommes sur l'escadre du Havre de quatre frégates, ci.

1,400

7e de ligne et une compagnie d'artillerie, fournissant 1,500 hommes sur l'escadre hollandaise, sous les ordres du contre amiral Hartzinch, ci.

1,500

21,000

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