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une juridiction d'exception, qui doit être restreinte dans les limites expressément tracées par la loi ; que si l'art. 631 Cod. comm. porte que les tribunaux de commerce connaîtront entre toutes personnes des contestations relatives à des actes de commerce, il s'ensuit seulement que toutes personnes, même non commerçantes, qui font entre elles des actes de commerce, ou participent à des actes de cette nature, sont justiciables des tribunaux de commerce, pour les contestations qui peuvent s'élever par suite des actes de commerce auxquels elles ont pris part; mais qu'on ne saurait en conclure qu'un individu non commerçant et qui, en traitant avec un commerçant, n'a pas fait personnellement acte de commerce, puisse être appelé par ce commerçant devant la juridiction consulaire, sur le fondement que la convention formée entre eux avait pour objet le trafic auquel le commerçant se livre ; que si l'art. 634 Cod. comm. porte que les tribunaux de commerce connaîtront des actions contre les facteurs, commis des marchands, ou leurs serviteurs, pour le fait seulement du trafic du marchand auquel ils sont attachés, on ne saurait en induire, sans ajouter à la loi, que les actions des facteurs, commis ou serviteurs des marchands, ne peuvent, à peine de nullité, être portées devant les tribunaux ordinaires ;

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Attendu que, dans l'espèce, Rives, ouvrier platineur de faux, n'achetait pas pour revendre; que son industrie consistait à rendre confectionnée, moyennant salaire, la matière qu'on lui confiait; qu'en ce faisant, il louait purement et simplement son temps et ses œuvres, et ne faisait pas acte de

commerce;

Attendu que Rives n'était ni commis, ni facteur, ni serviteur de la maison Garrigou, puisqu'il travaillait dans son propre domicile et à son compte, sans recevoir de gages; que les mal-façons étaient à sa charge; qu'il n'était payé qu'à la pièce et à raison du nombre de faux rendues, et non à la journée ;

Attendu, enfin, que la juridiction des prud'hommes, invoquée par les demandeurs, pour établir la compétence de la juridiction commerciale, n'est relative qu'aux ateliers et manufactures, et limitée aux rapports respectifs des chefs d'ateliers à leurs subordonnés, et n'est pas applicable à la cause, puisque ces rapports n'existaient pas entre Rives et la maison Garrigou avec laquelle il avait traité à forfait: d'où il suit que l'arrêt attaqué,en ap. préciant comme il l'a fait les circonstances et les actes de la cause, n'a violé aucune loi; REJETTE.

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Du 12 décembre 18:6.

- Ch. Civ.

COUR ROYALE DE LIMOGES.

Assignation à bref déiai. ---Urgence. -Président. -Pouvoir discrétionnaire. L'ordonnance du président qui permet d'assigner à bref délai peut être réformée par le tribunal, lorsque la cause ne requiert pas célérité et devait subir l'épreuve de la conciliation (1).

(1) V. DICT. GÉNÉR. PROCÉD., vo Conciliation, p. 135, no 47; et vo Exploit, no 367 et 368.

1re ESPÈCE. (De Maulmont-de-Sainte-Feyre C. Dalby.) –

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ARRÊT.

LA COUR; Attendu que l'ordonnance du président qui permet d'assigner à bref délai dans les cas qui requièrent célérité ne saurait être considérée comme une décision judiciaire sur la nature de la demande exposée à ce magistrat; qu'il ne peut y avoir de décision judiciaire, et de décision irrévocable surtout, là où une des parties n'a été ni appelée ni entendue; -Qu'on ne peut y voir qu'une appréciation essentiellement provisoire de la nature de cette demande; un acte qui, sur l'exposé de l'une des parties, supposant la sincérité des faits allégués par elle, l'autorise provisoirement à se présenter à bref délai devant la justice pour y faire valoir ses droits; que la seulement la nature de la demande peut être jugée, parce que là seulement il y a contradiction, là seulement les faits allégués peuvent être vérifiés; que, s'ils sont reconnus faux, s'il est prouvé que le demandeur a surpris la religion du président, on ne peut admettre que la partie adverse soit liée par un acte fait hors sa présence, sans qu'elle ait été ni pu être entendue; que l'opinion de ce magistrat, celle du tribunal, soient enchaînées par un acte qui n'a aucun des caractères d'une décision judiciaire, par une permission accordée à l'une des parties, sur ses seules allégations, qui n'ont été ni pu être contredites;

Attendu que la nature des causes tient à l'ordre des juridictions, intéresse essentiellement l'ordre public;

Attendu que la défense faite aux tribunaux de recevoir les demandes sujettes au préliminaire de conciliation sans qu'elles l'aient subi est absolue; qu'il y a donc obligation pour les tribunaux de vérifier la nature des demandes portées devant eux, et de décider si elle les dispense ou non de l'essai de conciliation; qu'à eux seuls appartient ce droit, puisqu'à eux seuls en est imposé le devoir, puisqu'à eux seuls s'adressent les défenses de la loi; - Que, lorsqu'une demande leur parvient par assignation à bref délai, en vertu de l'ordonnance du président, cette ordonnance ne les dépouille pas de leur droit, ne les dispense pas de leur devoir; qu'elle ne pourrait les avoir dessaisis du droit de juger, si cette demande était dispensée du préliminaire de conciliation, comme requérant célérité, que tout autant qu'ellemême aurait jugé la question, qu'elle contiendrait chose jugée à cet égard, ce qu'on ne saurait raisonnablement prétendre, puisque la partie à laquelle on l'oppose n'était pas présente, n'avait pas même été appelée lorsqu'elle a été rendue;

Attendu que l'importance de cet examen de la nature des demandes ne se borne pas à faire respecter les décisions de la loi relatives au préliminaire de conciliation; que de leur nature dépend celle de leur instruction, et par conséquent les garanties inhérentes aux divers modes de cette instruction; que, lorsqu'une demande est jugée requérir célérité, il s'ensuit nécessairement (404 C. P. C.) qu'elle est sommaire; de ce qu'elle est sommaire, qu'elle doit être jugée beaucoup plus rapidement, et avec des formes d'instruction qui sont loin de présenter les mêmes garanties que celles prescrites pour les affaires ordinaires; qu'il importe donc essentiellement aux parties et à la bonne administration de la justice qu'une affaire ordinaire de sa nature ne soit pas instruite et jugée comme sommaire;

T. LIV.

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Attendu qu'il est impossible, en envisageant toutes les conséquences de l'appréciation de la nature d'une demande, d'admettre que la loi ait entendu l'attribuer exclusivement et irrévocablement à un magistrat statuant seul sur les allégations d'une seule des parties; qu'elle ait entendu autoriser ce magistrat à juger souverainement qu'une demande qui, au moment où il prononce, n'est pas même connue de la partie contre laquelle elle est forinée, est dispensée du préliminaire de conciliation; que cette demande est sommaire; qu'elle doit recevoir une décision rapide, après avoir subi l'instruction la moins complète et la moins solennelle; qu'elle ait entendu enfin attribuer sur tous ces points l'autorité de la chose jugée à cet acte, lors duquel la partie à laquelle on l'oppose n'a été ni entendue ni même appelée ;

Attendu, en fait, que, dans l'espèce, la religion du président a été évidemment surprise; que la demande n'avait rien d'urgent, et ne requérait nullement célérité; que dès lors la dame de Maulmont n'a pu, en alléguant de faux motifs de célérité, dispenser la demande du préliminaire de conciliation;

Attendu que, en la déclarant nulle et irrégulière pour n'avoir pas été précédée du préliminaire de conciliation, les premiers juges se sont servis d'une expression peu exacte, mais qu'ils l'ont suffisamment, quoique implicitement, déclarée non recevable ;

Met l'appel au néant; ordonne ce que dont est appel sortira son plein et entier effet.

Du 29 novembre 1832. 1re Ch.

2e ESPÈCE.

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(Laporte-Lissac C. Grand.) — ARRÊT.

LA COUR;-Attendu, en droit, qu'aucune demande, qui, aux termes de l'art. 48 C. P. C., doit subir le préliminaire de la conciliation, ne doit être reçue dans les tribunaux de première instance, à moins qu'elle ne se trouve dans un cas d'exception prévu par l'article suivant du même Code;

Attendu que l'autorisation accordée, par le président du Tribunal de Brive, à Grand père et fils, d'assigner à bref délai Lissac père et fille, n'est qu'une simple ordonnance, et non une décision judiciaire, puisque toutes les parties intéressées n'avaient été ni appelées devant lui ni entendues; que cet acte, émané du président seul, n'a pu dépouiller le tribunal entier d'un droit qui lui était spécialement attribué par la loi, et du devoir, qui lui était impérieusement imposé, de vérifier si le défendeur, préalablement à la demande, avait été appelé et dû l'être en conciliation devant le juge de paix; que le législateur n'a pas voulu confier à un seul magistrat, dont la religion serait souvent trompée par l'absence de la partie intéressée, le pouvoir de dispenser à volonté du préliminaire de la conciliation, et de déclarer sommaire une affaire qui, de sa nature, serait ordinaire; qu'ainsi le Tribunal de Brive n'était point lié par la permission, accordée par son président, d'assigner extraordinairement, etc...

Du 4 janvier 1834. 3e Ch.

COUR ROYALE DE PARIS.

1° Lettre de change. Echéance. Transmission.

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2o Contrainte par corps. - Etranger.

1° On peut transférer une lettre de change par voie d'endossement, même après l'échéance et le protét.

2o Le tiers porteur français d'une lettre de change souscrite par un étranger au profit d'un étranger, peut obtenir contre le souscripteur la contrainte par corps, encore bien que l'endossement n'ait eu lieu qu'après le protét.

(Demeu C. Sasse.)

Le sieur Sasse, Anglais, avait souscrit au profit du sieur Stormann, son compatriote, une lettre de change de 1087 fr., qui ne fut pas payée à l'échéance.-Quelque temps, après la lettre fut endossée au profit du sieur Demeu, Français, qui requit contre le sieur Sasse la contrainte par corps.

Le défendeur soutint que la lettre de change n'avait pas pu être transférée à un tiers après l'échéance.

Le 15 février 1838, jugement du Tribunal de la Seine, qui

statue en ces termes :

«Attendu que si, faute de réclamation de paiement à l'échéance, le porteur perd tous ses droits contre les endosseurs, l'engagement n'en subsiste pas moins contre le débiteur; qu'ainsi l'endossement de la lettre de change dont il s'agit, fait postérieurement à l'échéance, n'entraîne pas la nullité de l'obligation;

» Attendu que le titre ayant été originairement souscrit par un étranger au profit d'un étranger, n'emportait pas la contrainte par corps; qu'il n'a pu dépendre du créancier de rendre pire la position du débiteur en transmettant ce titre à un Français par voie d'endossement d'où il suit que Sasse ne peut aujourd'hui être contraint par corps au paiement de la lettre de change dont il s'agit, etc....»

Appel par toutes les parties.

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ARRÊT.

LA COUR; En ce qui touche l'appel principal du sieur Sasse (relatif au transport de la lettre de change): adoptant les motifs des premiers juges ;

En ce qui touche l'appel incident du sieur Demeu :

Considérant que le tireur et l'accepteur de la lettre de change sont directement tenus envers les porteurs; que Sasse, débiteur envers un Français, devait, d'après les dispositions de l'art. 14 de la loi du 17 avril 1832, être assujetti par toutes les voies de droit, et même par corps, au paiement de

la condamnation; met l'appellation et ce dout est appel au néant; émen

dant, etc.

Du 21 février 1838.

- 20 Ch.

TRIBUNAL DE LYON.

Conservateur des hypothèques.

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Adjudication. Transcription. Lots. Licitation. Paiement.

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1. Un conservateur des hypothèques à qui on remet l'expédition d'une adjudication d'immeubles en plusieurs lots distincts peut il ne la transcrire que partiellement, par exemple pour un seul lot?

2° S'il s'agit d'une licitation, le droit de transcription doit-il être assis sur la totalité du prix, bien que l'adjudication présentée à cette formalité ait été faite à un colicitant?

3o Est-ce contre la personne qui a déposé ou fait déposer l'expédition au bureau, sans paiement préalable des droits, que le recouvrement de ces droits doit être poursuivi?

(Enregistrement C. Convert.)

Le 29 août 1885, devant le Tribunal civil de Lyon il a été adjugé sur licitation, 1o à la veuve Convert, une maison située à Lyon, rue Belle-Cordière, n° 10; 2° à Anthelme Convert, un domaine situé à Saint-Genis-Laval; 3° à celui-ci et à la veuve Convert conjointement, une maison située cour des Archers, à Lyon. Ces adjudicataires étaient colicitants.

La veuve Convert ayant voulu revendre la maison rue BelleCordière, on reconnut la nécessité de faire transcrire quant à

cette maison.

Le 28 mars 1836, Me Casati, notaire à Lyon, fit déposer par un de ses clercs, au bureau des hypothèques de la même ville, sans paiement de droits, l'expédition du jugement qui contenait l'adjudication des trois lots; elle fut transcrite le même jour en entier, ainsi que le prescrivent les instructions générales n° 433, nomb. 2, et 1210, § 16.

Sur la demande des droits non payés d'avance et montant, indépendamment des salaires et du timbre des registres, à 498 fr. 96 cent., Me Casati prétendit 1o que ces droits n'étaient pas exigibles; 2° que s'ils l'étaient, ce ne serait pas à lui, mais aux héritiers Convert, qu'il faudrait les demander. De là contrainte, instance, mémoires respectivement signifiés, puis jugement du Tribunal civil de Lyon, ainsi conçu :

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Considérant que la demande de l'administration de

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