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publics. Les autres plaintes ont dû continuer d'être portées devant les tribunaux de police correctionnelle.

C'est donc une garantie politique que ces lois ont voulu donner à la presse politique. Or, ce but ainsi révélé, les termes, comme les expressions de ces lois, peuvent-ils être invoqués par des arbitres, en vue d'une répression plus sévère contre ceux qui les auraient diffamés à l'occasion de l'arbitrage? Peuvent-ils l'être davantage par ceux qui voudraient attaquer l'honneur et la réputation de leurs arbitres, à l'effet d'offrir contre eux la preuve des faits diffamatoires? Non : ce serait dénaturer le sens de la loi; ce serait, quant à la pénalité, attribuer à des hommes privés une garantie réservée à des hommes publics; ce serait, quant à la preuve des faits, exposer par contrecoup ces hommes privés, ces juges du coin du feu, à l'éclat d'une procédure d'assises et au scandale d'une preuve autorisée seulement par exception contre des fonctionnaires publics dans l'intérêt des libertés publiques. Nonseulement il n'y a pas analogie, mais il y a une différence essentielle.

» Aussi avez-vous jugé, par un arrêt du 9 septembre 1836, que la loi de 1819 était inapplicable à un notaire, quoiqu'il eût agi dans un caractère public, parce qu'il n'avait pas agi comme délégataire de l'administration publique. Et vous avez jugé par un second arrêt, rendu à la même date, que cette loi n'était pas non plus applicable à une chambre de discipline des notaires, qui n'avait pas davantage le caractère d'une autorité publique.

Tout ceci, Messieurs, amène une réflexion générale, qui se présente comme la moralité de toute cette affaire: c'est que, à l'époque où nous vivons, il importe sans doute plus que jamais de ne pas laisser attaquer ni méconnaître le caractère des délégations de la puissance publique dans la personne de tous ceux qui en sont revêtus, à un titre quelconque, si minime qu'il soit.

» Mais aussi, et comme complément indispensable de cette pensée, il importe de ne pas communiquer légèrement le caractère public, l'honneur et les garanties actives ou passives qui s'y attachent, à de simples particuliers, suffisamment régis ou protégés par le droit commun.

» Le caractère exceptionnel qui s'attache à la personne des fonctionnaires publics est éminemment de droit strict. Ce serait donc fausser la loi, que d'en étendre les dispositions à des cas ou à des personnes pour lesquels évidemment ces dispositions n'ont pas été établies.

»Dans ces circonstances et par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu de casser. »

ARRÊT.

LA COUR ; Après en avoir délibéré en la chambre du conseil ; →→ Vu les art 13, 14 et 20 de la loi du 26 mai 1819; Vu pareillement les art. 51 et 52 C. Comm; Attendu, en fait, que l'art. 25 du traité social, souscrit le 16 octobre 1828, ne contient en aucune façon la convention d'un arbitrage volontaire; que ce traité n'est, d'après sa teneur même, qu'un acte de sou. mission, par des associés commerçants, à l'art. 51 C. Comm., dont il reproduit les expressions et qui, dans l'absence même de la stipulation écrite, aurait exercé son empire sur les contractants, sauf l'extension de pouvoir que les arbitres ont reçue dans l'espèce de la volonté exprimée des parties,

autorisées par l'art. 52 à renoncer à tout recours d'appel ou de cassation; Attendu, en droit, que la faculté donnée à des arbitres-juges (créés par l'art. 51 C. Comm.) de prononcer comme amiables compositeurs, surtout lorsqu'elle est contenue dans un traité antérieur à toute contestation entre les parties, proroge, sans la dénaturer, la juridiction où la mission de ces arbitres ultérieurement nommés par le tribunal de commerce; D'où il suit que, dans l'exercice de leurs fonctions, ils n'ont pas cessé d'agir dans un caractère public; qu'il doit leur être fait application de l'art. 20 de la loi du 26 mai 1819, et qu'en jugeant ainsi, et renvoyant par suite les parties à procéder devant la Cour d'assises, la Cour royale d'Amiens n'a violé aucune loi; - REJETTe.

Du 15 mai 1838. Ch. réunies.

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Le juge du référé qui, conformément à l'art. 558 C. P. C., a fixé la somme jusqu'à concurrence de laquelle un créancier sans titre pouvait former opposition, mais EN RÉSERVANT A LA PARTIE SAISIE DE LUI EN RÉFÉRER EN CAS DE DIFFICULTÉS, peut, le cas échéant, et sans excéder sa compétence, restreindre les causes de la saisie à une somme inférieure à celle pour laquelle la saisie avait été autorisée.

(Bircklé C. Lacour.)

Le sieur Lacour demande à M. le président du Tribunal de la Seine l'autorisation de former opposition sur un sieur Bircklé pour une somme de 15,000 fr. Cette permission est accordée, mais à la charge qu'il en serait référé au président en cas de contestation.

La saisie-arrêt ayant été pratiquée, le sieur Bircklé introduit immédiatement un référé, et prétend qu'il n'est plus débiteur, au moyen d'une compensation dont il justifie, que d'une somine de 3,800 fr. En conséquence il conclut à ce que l'effet de la saisie-arrêt soit restreint à cette dernière somme, et à ce que le tiers-saisi soit autorisé à lui verser le surplus de la somme saisiearrêtée.

Une ordonnance conforme ayant été rendue, le sieur Lacour interjette appel et soutient que le juge du référé a excédé ses pouvoirs en restreignant à 3,800 fr. l'effet de la saisie-arrêt qu'il avait précédemment autorisée pour une somme de 15,000 fr. Suivant lui, la faculté qui est laissée au président par l'art. 558 C. P. C., ne va pas jusqu'à fui donner le pouvoir de juger le fond: or, c'est juger le fond que d'admettre une compensation

et que de restreindre à 3,800 fr. une saisie-arrêt pratiquée pour une créance de 15,000 fr.

ARRÊT.

LA COUR ; - Considérant que le juge avait le droit de refuser l'autorisation de saisir-arrêter, si la demande ne lui paraissait pas fondée; qu'en subordonnant cette autorisation aux justifications qui pourraient lui être faites contradictoirement en référé, le juge n'a ni méconnu les dispositions de l'art. 558, ni excédé ses pouvoirs; adoptant, au surplus, les motifs du premier juge;· CONFIRME.

Du 22 décembre 1837. — 3o Ch.

OBSERVATIONS.

La question n'est pas sans difficulté. D'un côté, on peut dire que lorsque le juge du référé, qui a incontestablement le droit de refuser l'autorisation qui lui est demandée, ne l'accorde qu'en la subordonnant à une condition acceptée par le créancier, on ne voit pas de quoi celui-ci peut avoir à se plaindre. On peut ajouter qu'il importe assez peu que les justifications que le président est en droit d'exiger soient fournies avant ou après l'opposition, et qu'il est au contraire de l'intérêt du créancier que le président ait ce pouvoir, parce qu'autrement il accorderait beaucoup plus difficilement les autorisations qui lui se-.. raient demandées.

D'un autre côté, on ne peut pas se dissimuler qu'il n'y ait beaucoup d'inconvénients à accorder au juge du référé le droit exorbitant de décider le principal, soit en admettant une compensation opposée, soit en jugeant du mérite d'une défense qui touche le fond ou qui le préjuge. Il ne faut donc pas s'étonner si la nouvelle jurisprudence qui tend à s'établir à Paris, où les référés sont si fréquents, trouve de vives contradictions. (V. RoGER, Traité de la saisie-arrét, p. 303, no 506.)

Pendant longtemps, la Cour a refusé de reconnaître au président du tribunal le droit qu'il s'arrogeait (V. notamment les arrêts des 25 mai et 28 juin 1833, J. A., t. 45, p. 593); mais depuis elle l'a en quelque sorte sanctionné par ses arrêts. Indépendamment de celui qui vient d'être rapporté, on peut en citer deux autres, l'un de la 2 chambre en date du 15 février 1836, et l'autre de la chambre des vacations du 13 octobre 1836.

Voici les motifs de cette dernière décision: « La Cour, considérant que les créances de Barré ne sont pas fondées en titre; considérant qu'étant contestées, et les juges du référé (1) les ayant reconnues litigieuses, ils ont dû refuser définitivement

(1) Dans cette espèce, il y avait eu renvoi à l'audience en état de référé,

l'autorisation demandée, en usant du pouvoir discrétionnaire dont l'emploi leur était réservé, après contestation, par la demande même de Barré, ainsi que par l'ordonnance du 13 septembre dernier ; CONFIRME,>>

En vertu de cette nouvelle jurisprudence, la réserve de statuer en référé sur les contestations que la partie saisie pourrait élever, est devenue de style à Paris, et aujourd'hui M. le président n'accorde plus la permission de saisir-arrêter, qu'autant que les requêtes sont terminées par cette formule: offrant de vous en référer en cas de difficultés. C'est dans cette formule, combinée avec la disposition de l'art. 558, que ce magistrat puise sa compétence; mais quelles en seront les limites? c'est là qu'est la difficulté.

COUR ROYALE DE PARIS.

Contrainte par corps. - Lettre de change.

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Aval. - Simple promesse.

Lorsqu'une lettre de change est réputée simple promesse, le donneur d'aval, quoique négociant, n'est point passible de la contrainte par corps, si l'aval a été donné par acte séparé. (Art. 142 Comm.)

(Joyeux C. Libault.)

Le sieur Joyeux, homme d'affaires du prince d'Eckmühl, avait, en 1836, garanti, par un aval séparé, le paiement d'une lettre de change souscrite par celui-ci et qui fut transmise à un sieur Libault.

Cette lettre de change n'ayant pas été payée à l'échéance, le tiers porteur exerça des poursuites simultanément et contre le prince d'Eckmühl et contre le sieur Joyeux. Devant le tribunal de commerce, des contestations très-sérieuses s'élevèrent au nom du prince d'Eckmühl contre les nombreuses lettres de change qu'il avait mises en circulation, et néanmoins le sieur Joyeux fut condamné, et par corps, au paiement de la traite qu'il avait garantie.

Appel.-Devant la Cour, Joyeux demande 1o un sursis jusqu'à ce que les contestations existantes entre le prince d'Eckmühl et les tiers porteurs soient définitivement vidées; 2o la décharge de la contrainte par corps, attendu que la lettre de change pour laquelle il a donné un aval ne constitue qu'une simple promesse. Il est impossible, disait-on dans son intérêt, que le donneur d'aval puisse être contraint par corps, lorsque le débiteur principal n'est pas soumis à cette voie d'exécution.

Pour l'intimé, on répondait qu'il importait peu que le prince

d'Eckmühl fût ou ne fût pas contraignable par corps; qu'il importait peu que la lettre de change fût à son égard réputée sim ple promesse; qu'il suffisait que le sieur Joyeux, donneur d'aval, fût commerçant, pour que la contrainte par corps dût être prononcée contre lui, aux termes de l'art. 637 C. Comin.

ARRÊT.

LA COUR; En ce qui touche la demande de l'appelant à fin d'être déchargé de la contrainte par corps: Considérant qu'il résulte évidemment de l'état de la prétendue lettre de change, des énonciations contenues dans les actes de poursuite et des faits de la cause que ladite lettre de change a été tirée de Paris et non de Nantes; que, par conséquent, il y a supposition de lieux, et que le titre produit ne constitue qu'une simple promesse, dont le paiement ne peut être poursuivi par la voie de la contrainte par corps; Considérant que le donneur d'aval ne peut être soumis à des conditions plus rigoureuses que l'accepteur ou l'endosseur, à moins que sa signature, dans le cas où il est négociant, ne soit portée sur la lettre de change; - Considérant que l'aval donné par l'appelant l'a été par un acte séparé; Sans avoir égard à la demande à fin de sursis; INFIRME quant à la contrainte par corps; ordonne que la condamnation ne sera exécutée que par les voies ordinaires de droit; La sentence au résidu, et par les motifs y exprimés, sortissant

effet.

Du 12 décembre 1837.-2¢ Ch.

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En matière de distrbution par contribution, il n'y a pas lieu à augmenter, à raison des distances, le délai accordé aux c'é¶n— ciers par l'art. 660 C. P. C. pour faire leurs productions; en conséquence, lout créancier qui n'a pas produit dans le mois de la sommation doit étre forclos. (Art, 660, 1033 C. P. C.) (1)

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(Bary C. Martin.) — ARRÊT.

Considérant, en droit, qu'en matière de contribution judi

(1) Décision conforme à la jurisprudence. V. les arrêts rapportés J. A., t. 10, vo Distribution par contribution, p. 591, no 5 bis, et t. 37, p. 187. V. aussi MM. CARRÉ, t. 2, n° 2173; THOM. DESMAZURES, p. 241; PIGEAU, t, 2, p. 190; et BERRIAT-SAINT-PRIX, t. 2, p. 618 au texte, et 619, note 18, La Cour de Paris est allée plus loin, elle a décidé que les créanciers sommés de produire, qui ne l'avaient pas fait dans le mois, devaient être déclarés forclos, même d'office. (V. arr. 3 mars 1835, J. A., t. 48, p. 297.)

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