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Les partisans de cette mesure se demandent pourquoi, si l'on veut la vulgariser et en faire une excellente source de revenus pour le Trésor, on n'a pas fait pour la télégraphie ce qu'on a fait pour la poste, puisque la diminution et la réduction à un prix uniforme, très minime, de la taxe des lettres a produit de si heureux effets.

A cette observation, qui a été faite à la Conférence télégraphique de Berlin, en 1885, le délégué italien, M. le directeur général d'Amico, a répondu La poste peut doubler son trafic avec une légère augmentation de dépenses, tandis qu'en télégraphie il suffit d'une petite augmentation de dépêches pour exiger de nouveaux fils, de nouveaux appareils, de nouveaux employés.

C'est bien cela. La poste, au point de vue du temps comme au point de vue du matériel, transmet aussi facilement mille, dix mille, cinquante mille lettres que cent; tout part dans la même malle ou dans le même wagon. Mais pour la télégraphie qui, généralement parlant, ne peut expédier qu'un message à la fois et qui doit être outillée sur une assez vaste échelle pour être en mesure de pouvoir conserver une moyenne de vitesse raisonnable aux correspondances, une augmentation de trafic peut, quelquefois dans une proportion assez rapide, nécessiter un accroissement des moyens d'exploitation. Dans cette situation, il faut estimer avec circonspection le progrès des bénéfices, qui découleraient d'une affluence de télégrammes.

Toutefois on ne saurait nier que les réseaux télégraphiques, en général, présentent encore une assez belle marge sur leurs lignes. En examinant les tableaux de l'occupation des fils, on découvre partout des vides dans leur fonctionnement, sur les grands artères, quoique naturellement dans une moindre mesure, tout comme sur les lignes d'ordre inférieur. Aussi est-il évident que tous les fils restent susceptibles d'une plus grande somme de travail. Seulement, l'augmentation de besogne ne devra pas se produire aux heures de la journée où les lignes sont déjà suffisamment occupées.

A part cette réserve, il y a encore plus d'une étape à parcourir, avant d'avoir porté au maximum la puissance de transmission du réseau, qui est la base sur laquelle repose toute l'économie du service télégraphique. C'est ce qui nous conduit à l'examen du moyen indiqué en troisième lieu, comme pouvant amener la solution désirée.

III

Le moyen qui, à mon avis, tout en faisant développer le trafic, ferait en même temps accroître le chiffre des produits; dont l'application, par conséquent, ferait marcher l'institution vers son double but, consisterait dans la classification des correspondances en trois catégories, savoir:

1. Télégrammes à transmission accélérée (télégrammes urgents), à transmettre avant les dépêches de la catégorie suivante;

2o Télégrammes à transmission normale;

3o Télégrammes à petite vitesse (avec réduction du tarif), à transmettre après l'épuisement des dépêches de la seconde catégorie.

Notons d'abord, qu'à l'exception des quatre États suivants : la Bulgarie, la Grande-Bretagne, la Norvège et la Suisse, le télégramme urgent est déjà admis dans les relations européennes, et faisons observer que ces correspondances full speed, dont l'utilité est dûment reconnue, n'affluent pas en assez grand nombre pour que leur traitement puisse sensiblement affecter la rapidité de transmission des télégrammes ordinaires'. D'ailleurs, si le nombre des premiers prenait un essor assez considérable pour devenir un obstacle au libre écoulement de la correspondance générale, la somme des surtaxes dont ils sont frappés suffirait largement aux dépenses que nécessiteraient l'établissement et la mise en œuvre de nouveaux fils, ou d'appareils à transmission multiple, sur les trajets, où le besoin s'en ferait sentir.

Le télégramme de troisième classe, ou à petite vitesse, qui serait le complément du télégramme urgent (grande vitesse), doit encore faire son entrée en Europe.

2.

J'ai exposé ailleurs ce que l'on peut attendre d'une modération de taxe pour les correspondances qui peuvent subir un délai dans la transmission, sans encourir le risque de ne pas remplir leur objet. Ces télégrammes seraient nombreux, vu qu'il y a mille circonstances dans la vie où on utiliserait le télégraphe, pour se débarrasser de petites corvées épistolaires qui coûtent plus de temps que, généralement, on ne veut y consacrer. Et comme la transmission des télégrammes à petite vitesse pourrait s'effectuer aux moments où, présentement, les lignes sont inoccupées, sans aggraver le budget des dépenses, leurs produits rapporteraient au Trésor.

Sur les lignes qui actuellement chòment pendant la plus grande partie de la journée, la création d'une catégorie de télégrammes à bon marché, dans les relations entre les bureaux que ces lignes desservent, équivaudrait à une réduction générale du tarif, dont les heureux effets ne tarderaient pas à se faire sentir, puisque la plus grande consommation qui en serait la conséquence n'entraînerait aucun accroissement des moyens de transmission. Voici, en passant, une paire de chiffres qui font

La proportion des télégrammes urgents internes, en 1886 a été en Allemagne, de 2,2 0/0; en Autriche, de 1,5 0/0; en Belgique, de 1,8 0/0; dans les Pays-Bas, de 1,01 0/0.

* Mémoire sur les soi-disant télégrammes à petite vitesse ou de troisième classe. La Haye, Librairie royale, 1886.

entrevoir quels vides existent encore dans le fonctionnement des lignes. Sur 387 bureaux néerlandais il y en a eu, pendant l'exercice 1887, 134, qui, en moyenne, ont émis moins de 5 télégrammes par jour; en 1886, en Suisse, on en comptait 1.062 sur 1.222, qui émirent moins de 10 télégrammes, voire même 159 avec moins d'un télégramme par jour. Et il en sera bien un peu comme cela partout.

Il est évident que, là où il existe un fil, un appareil et un employé, le tarif qui a pour effet de laisser chômer tous ces éléments de production, au lieu de leur fournir de la besogne, laisse à désirer, car le travail seul produit des recettes, et les dépenses courent toujours, qu'il y ait travail ou chômage. D'où il suit que, dans la recherche des mesures qui conduiront à un maximum d'occupation du réseau, il convient de suivre le conseil que donne la science économique et commerciale, se traduisant pour ce service télégraphique, de la manière suivante: dans les limites de l'organisation du réseau, il est plus profitable de transmettre des dépêches à bon marché que de n'en pas transmettre du tout. On peut différer sur le mode d'application de ce principe. il n'en est pas moins le seul qui reste applicable, industriellement parlant.

Du moment qu'il est reconnu que la télégraphie renferme l'élément commercial, il n'y a qu'à poursuivre la ligne que la nature des choses a nettement tracée, qu'à introduire les mesures que le commerce libre n'hésiterait pas un instant à appliquer.

Après avoir relevé à ce sujet que si la fin qu'on se propose est de rendre la télégraphie accessible à plus d'individus et, s'il se peut, d'en faire en même temps une source de revenus pour le budget, M. E. Cuper fait observer que c'est au commerce, aux grandes industries, aux compagnies, qu'il faut, dans ce cas, demander des inspirations ». Et en développant cette idée, l'auteur ajoute :

<< Dans les chemins de fer, n'y a-t-il pas des transports de messageries par grande et petite vitesse? N'y a-t-il pas des trains express, directs, semi-directs, omnibus, que chacun est libre de prendre selon qu'il est plus ou moins pressé? - Par les trains express et directs on ne met en communication que les grands centres et, pour quelques heures, toutes les autres villes, situées sur la ligne, sont comme si elles n'existaient pas. Pourquoi alors n'y a-t-il pas uniformément rien que des trains omnibus, puisque ce sont les seuls qui peuvent, matériellement et pécuniairement, être pris par tout le monde? Dans un même convoi n'y a-t-il pas souvent des premières, secondes et troisièmes classes ? Pourtant la première n'arrive pas plus vite que la troisième cette division laisse seulement au voyageur la faculté de se placer plus ou moins confortablement et de ne dépenser que ce qu'il veut ou ce qu'il peut. Ne peut-on pas même, à la grande rigueur, avoir un train personnel?

• Toutes ces distinctions qui, prélèvent leurs frais de culte sur l'avantage, l'amour-propre et le libre choix, sont un moyen de rapport plus certain que ne le serait évidemment l'uniformité absolue.

Les administrations des voitures n'ont-elles pas autant de gradations qu'elles peuvent en faire...? Voitures de grandes remise, divisées en plusieurs classes, voitures de remise ordinaire et voitures de place, etc. La Poste elle-même, enfin, administration du gouvernement, n'a-t-elle pas des lettres chargées, sans que pour cela elles contiennent des valeurs, dont le transport n'est assurément pas plus rapide, mais dont la remise est plus certaine, puisqu'elle est garantie?

. En un mot, prenez toutes les grandes industries, toutes les grandes exploitations qui ont affaire au public, autrement dit à tous, et vous y trouverez plusieurs degrés de prix uniformément variés ».

IV

Après avoir exposé la raison d'être de différents degrés d'urgence pour les télégrammes, il ne me reste plus qu'à signaler les avantages qui découleraient de l'introduction du système préconisé. Ces avantages se traduiraient :

1o Par un accroissement de la puissance de transmission du réseau : en reléguant au dernier plan la transmission des télégrammes qui peuvent subir un délai, on parviendrait à élargir les moyens d'action aux heures d'activité du commerce, ce qui permettrait, sans surcroît des frais de main-d'œuvre, d'élever le nombre total de transmissions qu'on peut effectuer sur l'ensemble des lignes dans un temps donné;

2o Par un développement du trafic, comme suite de la réduction du tarif pour les télégrammes à petite vitesse.

Ainsi, en envisageant la situation qui serait créée, on peut considérer l'innovation comme utile à l'exploitation, puisqu'elle aurait pour résultat de retarder l'époque, où, pour faire face à des besoins croissants du service, il faudrait multiplier les moyens de transmission.

La réforme proposée donnerait donc ce que le relèvement de tarif ne peut procurer un stimulant à la consommation, en même temps qu'elle écarterait la nécessité d'augmenter les moyens de transmission. En résumé, elle conduirait à l'utilisation des ressources du réseau, la plus avantageuse à tous les intérêts.

P. G. H. LINCKENS,

Commis à la Direction générale des Postes et Télégraphes néerlandais.

La Réforme télégraphique, par Émile Cuper, pag. 61, 62. Mer. Imprimerie Camille Le Roy, 51, Grande-Rue, 1865.

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BULLETIN

PUBLICATIONS DU « JOURNAL OFFICIEL »

(Juin 1889.)

2 juin. Décret qui prescrit la promulgation de l'arrangement signé a Paris, le 12 décembre 1888, entre la France et la Belgique, dans le but d'établir un régime de réciprocité au profit des indigents de l'un des deux pays qui veulent contracter mariage sur le territoire de l'autre (page 2519).

7 juin. Loi tendant à rendre obligatoires la vérification et le poinçonnage par l'État des densimètres employés dans les fabriques de sucre pour contrôler la richesse de la betterave (page 2618).

8 juin. Rapport adressé au Président de la République par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, relatif à la statistique quinquennale de l'enseignement primaire (page 2633).

adressé au Président de la République par ie président du conseil, ministre du commerce, de l'industrie et des colonies, suivi d'un décret portant suppression de la contribution mobilière dans les établisse. ments français de l'Océanie (page 2631).

--

9 juin. Loi autorisant la ville de Châteauroux (Indre) à emprunter une somme de 47.000 fr. pour l'acquisition et l'appropriation d'un théâtre (page 2653).

Rapport adressé au Président de la République par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, relatif à la statistique décennale de l'enseignement supérieur (page 2654).

-

Réunion des délégués des sociétés savantes des départements. Procès-verbaux des sections (page 2685).

10-12 juin. Tableaux du rendement des sucres de toute origine pour l'année 1888 (page 2691).

-Tableaux des résultats comparatifs de l'exploitation des tramways pendant les années 1888-1889 (page 2696).

13 juin.

Règlement relatif aux bourses industrielles de voyage

(page 2723).

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