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en Moravie, où l'attendait l'empereur François II. Il releva ses espérances par l'assurance de l'adhésion de la Prusse; et après avoir concerté les dispositions relatives à la réunion de leurs forces, il alla au-devant de sa seconde armée, qui se trouvait encore dans la Gallicie, pour hâter sa marche et prendre en personne le commandement.

Le ministre Haugwitz, chargé de la tâche difficile de présenter à l'empereur Napoléon les propositions convenues entre les souverains, la paix ou la guerre générale, et de tracer autour de lui le cercle de Popilius, ne partit de Postdam que le 14 novembre; ce retard prudent parut être calculé, d'après la position respective des armées, et l'imminence de quelque événement décisif. Le cabinet de Berlin n'abandonnait qu'à regret son système de neutralité, dont le résultat devait être la réunion de l'électorat d'Hanovre aux états prussiens. Les Anglais avaient donc un double intérêt à attirer le roi de Prusse dans la coalition. Aussi, dès qu'ils furent informés de la démarche de l'em

pereur de Russie, que leurs agens dans les deux cours avaient habilement préparée, ils se hâtèrent d'envoyer un négociateur extraordinaire. Lord Harrowby arriva à Berlin peu de jours après le départ du comte Haugwitz: il était accompagné de M. Hammond, sous-secrétaire d'état des affaires étrangères, et munis l'un et l'autre de pleins pouvoirs pour régler les subsides qui seraient accordés dans le cas où le roi prendrait une part active aux opérations. M. Pitt ne fut jamais si près d'atteindre son but; tout le nord de l'Europe était en armes, et prêt à fondre sur l'armée française. L'or ne pouvait manquer : la bataille de Trafalgar avait ouvert au ministre un crédit illimité. Le roi de Suède, entièrement à la solde de l'Angleterre, et qu'il était si facile d'irriter contre la France, fit paraître à cette époque une déclaration de guerre, dans laquelle il annonçait son prochain départ pour aller prendre le commandement de son armée en Poméranie, à laquelle s'était réuni le corps russe, sous les ordres du comte d'Ostermann.

Cette agitation, ces menaces ne firent qu'affermir Napoléon dans sa résolution de profiter rapidement de ses avantages, en frappant au cœur de la monarchie autrichienne, pendant que les alliés négociaient, délibéraient encore sur les moyens de la sauver.

Les diverses colonnes françaises, dont nous avons indiqué le premier mouvement, arrivèrent à peu près en même temps, du 26 au 27 octobre, sur les bords de l'Inn, et trouvèrent sur la rive opposée, à tous les points de passage, de fortes arrière-gardes, destinées à retarder le rétablissement des ponts qui tous avaient été coupés ou incendiés. On sait, et l'on a plus que jamais éprouvé dans les guerres de la révolution, que les rivières, les plus grands fleuves même, ne sont que de vains obstacles; le passage est toujours ou surpris, ou forcé à tout prix par l'armée attaquante, pour qui le plus grand avantage est de gagner du terrain, afin de vivre sur les ressources de l'ennemi. Ce n'est guère qu'entre des armées d'égale force que les lignes formées par le cours des eaux, offrant

des positions avantageuses, peuvent favoriser d'habiles manoeuvres, et resserrer plus ou moins long-temps le théâtre de la guerre. Cette supposition, dans ce cas-ci, n'était pas vraisemblable; Napoléon ne se laissa pas imposer par ces démonstrations de défense : les postes fermés, les retranchemens, les batteries dont la rive gauche de l'Inn était hé rissée; et, sans user d'aucun stratagème, il ordonna que ces corps d'armée effectuassent leur passage sur les directions des trois grandes routes, à Wasserbourg, à Mühldorf, à Brau nau; bien que le pays au-delà de l'Inn fût couvert de bois et de marécages, et que les pluies d'automne et le mauvais état des chemins rendissent la marche de l'infanterie extrêmement pénible, celle de l'artillerie trèslente et très-difficile, il supposa avec raison que l'infériorité de forces, et la crainte d'être tourné du côté des montagnes, et jeté sur le Danube, empêcheraient le général Kutusow de profiter de ces circonstances pour occuper et défendre les défilés avec obstination.

Le maréchal Bernadotte, après avoir jelé

pro

sur sa droite un fort détachement de cavalerie pour éclairer la route de Kuffstein et contenir la garnison de cette place, fit rétablir les ponts de Wasserbourg et de Rosenheim. Ces travaux, conduits sous la tection de son artillerie par les colonels du génie Morio et Sordis, ne le retinrent qu'un seul jour; tout son corps d'armée, y compris les divisions bavaroises, avait défilé le 28 octobre, et continua sa marche sur Saltzbourg.

Le maréchal Davoust, arrivé le même jour à Mühldorf, trouva l'ennemi bien retranché sur la rive droite; ses batteries, avantageusement placées, rendirent la reconstruction du pont très-difficile; on y travailla cependant toute la nuit avec tant d'ardeur, à travers l'échange des boulets, que le lendemain à midi une partie de ce corps d'armée effectua son passage. Dès que le premier régiment de chasseurs, conduit par le brave Montbrun, put se former au débouché du pont, il chargea l'arrière-garde autrichienne, et fit quelques centaines de prisonniers.

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