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vrir sa ligne d'opérations. Napoléon ne pouvait la prolonger, si d'une part il n'était certain de l'entière évacuation du Tyrol, et si d'autre part la grande route sur la rive gauche du Danube n'était parfaitement éclairée, et les communications de la Bohême soigneusement observées. Ces deux objets motivè rent son séjour à Lintz; il ne suspendit point le mouvement général, il évita seulement de l'accélérer.

Les premières nouvelles qui lui parvinrent des opérations dans le Tyrol, furent celles du combat de Lover, entre la division bavaroise du général Deroy et l'avant-garde d'une colonne de cinq régimens autrichiens qui, détachés de l'armée d'Italie par M. l'archiduc Charles, étaient en marche pour rejoindre et renforcer l'armée alliée. Le maréchal Bernadotte, en partant de Saltzbourg pour se rendre par Volklabruck à Lambach, avait, conformément à ses instructions, détaché le général Deroy sur la route d'Inspruck, pour seconder le maréchal Ney, tourner et masquer le fort de Kuffstein, s'il ne pouvait s'en

emparer. Le commandant de la troupe autrichienne, informé que les Français avaient occupé Saltzbourg, marchait avec précaution; et dès qu'il eut connaissance de l'approche des Bavarois, il prit position au défilé de Lover, où de hautes montagnes, qui séparent les affluens de la Saltza et de l'Inn, resserrent la route, et la font changer de direction; c'est un col élevé, dont cet accident rend l'accès très-difficile; des rochers escarpés et coupés à pic flanquaient la position, et ces rochers étaient couronnés par des chasseurs tyroliens; trois redoutes ou fortins. revêtus barraient le passage, et avaient été liés à la hâte par un retranchement. Tout cet appareil n'arrêta point le brave général Deroy; les Bavarois attaquèrent de front, et sans hésiter, avec une bravoure incomparable. Ils culbutèrent tout ce qui se trouva devant eux, forcèrent les retranchemens s'emparèrent des trois forts et de deux pièces de canon, et firent cinq à six cents prisonniers. Cette action, très-vigoureuse, leur coûta trois cent vingt-cinq hommes tués ou

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blessés, et douze officiers, parmi lesquels se trouvait le général lui-même, blessé d'un coup de pistolet. La colonne autrichienne se dispersa dans les montagnes, et gagna ensuite par la haute vallée de la Saltza, la route de Léoben. La division bavaroise, après ce brillant combat, continua sa route sur Kuffstein.

Les rapports du maréchal Ney ne tardèrent pas à donner à l'empereur Napoléon la certitude de la conquête du Tyrol, si importante en elle-même, et si nécessaire pour qu'il pût avec sécurité porter le gros de son armée d'Allemagne au centre des états d'Italie. Les opérations du maréchal Ney, jusqu'à l'occupation d'Inspruck, trouvent donc ici d'autant mieux leur place, que ces faits coincident exactement avec ceux que nous venons de rapporter, et qu'étant relatifs à cette partie du théâtre de la guerre intermédiaire entre l'Allemagne et l'Italie, ils font voir avec quelle méthode et quel ensemble fut conduite l'exécution de ce gigantesque plan de campagne. Assez heureux pour avoir

trouvé, dans les matériaux que nous recueillons, un compte rendu par le maréchal Ney de l'occupation définitive de tout le Tyrol, nous laisserons ce grand capitaine exposer lui-même sa position, ses vues et ses motifs. Nous n'extrairons ici, de ce précieux document, que les considérations générales; nos lecteurs le trouveront tout entier dans le Recueil de pièces.

«........ Aussitôt que j'eus reçu des rap«ports un peu authentiques sur la position « de l'ennemi, je pris toutes les mesures que «la faiblesse de mes moyens pouvait me < permettre de prendre pour envelopper suc<cessivement les corps isolés qui couvraient « les principales communications du Vorarl<< berg et du Tyrol.

<< Pour mieux juger ces mesures, il faut << reprendre de plus haut l'ensemble des opé«rations. Lorsque je reçus l'ordre de porter « le corps d'armée dans le Tyrol, je n'avais « à ma disposition que » (ici se trouve la force de ses deux divisions, les 2 et 3 des généraux Loison et Malher. On se rappelle que

la première, celle du général Dupont, avait été détachée sous les ordres du prince Murat, et ensuite dirigée sur Passau.) « cent <<< cinquante chevaux du 3° de hussards et « du 10 de chasseurs, quelque artillerie <<< commandée par le général Seroux, for<<< mant en tout huit mille hommes.

« Les forces de l'ennemi étaient divisées << en cinq corps, ceux des généraux, 1o. ar<<< chiduc Jean, 2°. Chasteler, 3°. Saint-Julien, << 4°. Jellachich, Wolfkell et Rohan, 5o. Ihler. « Les trois premiers étaient dans le Tyrol, <«<le quatrième couvrait le Vorarlberg, et <«<appuyait les postes importans de Fues«sen et de Renti. Le cinquième remplissait «le double but de couvrir le Tyrol du côté << de l'Italie, et de soutenir au besoin les <<< autres divisions.

«La totalité de ces corps pouvait s'élever << à vingt-cinq ou trente mille combattans, << sans compter les milices du Tyrol.

<< Les seuls points par lesquels on pouvait << envahir cette province, étaient le passage « de Fuessen, celui de Scharnitz, et la vallée

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