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sont les fondements de sa croyance; et comme les preuves de la révélation sont à la portée de toutes les intelligences, l'homme peut les saisir à mesure que l'enseignement se développe, sans avoir besoin de suspendre son jugement pour attendre de nouveaux motifs. La révélation se manifeste et se prouve comme tout objet d'enseignement, sans supposer un doute préalable, parce qu'elle repose sur des faits et des témoignages qui peuvent être compris sans effort, comme toutes les preuves du même genre; et qu'ainsi les motifs de conviction précèdent ou accompagnent toujours la connaissance, et légitiment par conséquent l'adhésion immédiate aux objets de la foi, absolument de la même manière que pour toutes les vérités analogues. En un mot, celui qui est élevé dans le christianisme n'a pas plus besoin de passer par le doute pour arriver à la foi, que pour arriver à la connaissance des premiers principes, des faits historiques, et de toutes les vérités qu'il adopte sur le témoignage d'une autorité qui ne lui permet pas de douter (1).

10. D'un autre côté, en partant des vérités révélées comme d'autant de principes incontestables, le théologien en tire, à l'aide du raisonnement, des conséquences ou conclusions théologiques, qu'on appelle ainsi parce que les prémisses ou l'une des prémisses d'où elles dérivent appartiennent à la révélation. Ces conclusions sont plus ou moins certaines, plus ou moins probables, selon qu'elles sont plus ou moins prochainement déduites des prémisses, et qu'elles s'accordent plus ou moins avec la croyance et l'enseignement de l'Église. Il y a même des conclusions théologiques qui sont articles de foi: ce sont celles qui nous sont proposées par l'Église comme révélées, ses décisions et ses symboles étant toujours fondés sur l'Écriture sainte ou la tradition. C'est encore par le raisonnement que l'on réfute les objections des hérétiques et des incrédules. Mais, en les réfutant, le théologien ne perdra jamais de vue les enseignements de la foi, dont il ne doit s'écarter en rien : c'est le moyen d'éviter le double danger, ou de tomber dans des exagérations qui compromettent la vérité, ou de faire des concessions qui seraient un sujet de triomphe pour les ennemis de la religion.

11. Les lieux théologiques, c'est-à-dire, les sources d'où la théologie tire ses preuves pour établir les différentes vérités dogmatiques et morales dont elle traite, peuvent se réduire au nombre

(1) Voyez l'Introduction à la Théologie, par M. l'abbé Receveur.

de trois : ce sont l'Écriture sainte, la tradition divine, et les décisions de l'Église. La première source est l'Écriture sainte, qui est la parole de Dieu écrite par des auteurs inspirés. La seconde source est la tradition divine, c'est-à-dire, la parole de Dieu qui étant transmise de vive voix s'est conservée dans les écrits des anciens, dans les symboles et la liturgie, dans la pratique constante et générale des peuples, et particulièrement de l'Église catholique. La troisième contient les décisions de l'Église, les décrets et règlements des conciles généraux et particuliers, les constitutions des Papes. De là, la nécessité pour le théologien de faire une étude particulière des livres saints, des écrits des Pères de l'Église, des conciles et des décisions du saint-siége. Il peut utilement appeler à son secours la connaissance des langues anciennes, et particulièrement de la langue hébraïque, de la langue grecque et de la langue latine, ainsi que l'étude des sciences naturelles, de l'histoire profane considérée dans ses rapports avec l'histoire de la religion. La connaissance de l'histoire ecclésiastique, qui fait suite à l'histoire sacrée que nous trouvons dans les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament, est indispensablement nécessaire au théologien, puisque cette histoire contient les enseignements, les actes et les pratiques de l'Église. Néanmoins, ni l'histoire ecclésiastique, ni encore moins l'histoire profane, ni la philosophie, ni la raison par conséquent, ni les sciences naturelles, ne doivent être rangées au nombre des lieux théologiques proprements dits. Ce sont, il est vrai, autant de moyens d'arriver aux sources et de les protéger contre l'ennemi, mais ce ne sont pas les sources elles-mêmes où nous puisons la doctrine catholique.

12. Nous le répétons, comme la théologie a pour fondement la révélation, et pour objet les vérités révélées, ses vraies sources sont l'Écriture sainte, la tradition et l'enseignement de l'Église, qui est tout à la fois la dépositaire et l'interprète des Écritures et des traditions divines. Il est donc naturel qu'avant de parler des dogmes en particulier, nous établissions dans les trois premiers traités: 1o l'autorité des livres saints et de la tradition; 2o la divinité de la religion chrétienne; 3° les caractères et les prérogatives de l'Église de Jésus-Christ. Comme cet ouvrage n'est pas proprement un livre de controverse, nous avons cru devoir nous attacher plutôt à l'ordre des matières qu'à l'ordre logique que semble réclamer la hiérarchie, pour ainsi dire, des erreurs et des égarements de l'esprit humain. Ainsi, par exemple, nous parlerons de la tra

dition, comme faisant suite au traité de l'Écriture sainte, avant d'exposer les preuves de la religion.

13. En prouvant l'inspiration divine des livres de l'Ancien et du Nouveau Testament, nous prouverons par là même le premier dogme de la religion, l'existence de Dieu ; et cette preuve n'est pas moins convainquante ni moins sensible que les preuves tirées, soit de l'existence d'un être nécessaire, existant de lui-même, éternel, indépendant, immuable, et essentiellement distinct de la matière; soit de l'existence d'un premier moteur qui ait imprimé le mouvement au monde physique, soit de l'ordre admirable qui règne dans les différentes parties de l'univers (1). C'est même à nos livres saints que les philosophes chrétiens, ou qui ont été élevés dans le christianisme, doivent, du moins en grande partie, les notions sur la nature divine, à l'aide desquelles ils démontrent victorieusement l'existence d'un Ètre suprême. En effet, Moyse nous apprend que Dieu s'est révélé comme étant celui qui Est: Ego sum qui sum, c'est-à-dire, celui qui est par sa nature, qui est l'être par excellence, l'Étre des étres, qui a donné l'existence à tout ce qui est hors de lui, sans l'avoir reçue d'aucun autre. Il nous le représente comme éternel et tout-puissant, comme celui qui commande au néant et qui est obéi, Dixit, et facta sunt; qui a fait de rien le ciel et la terre, qui a créé l'homme et lui a dicté des lois. Partout, dans les Écritures, nous voyons que Dieu fait ce qu'il veut et comme il veut, qu'il gouverne tout, qu'il pourvoit à tout dans le monde physique et dans le monde moral, manifestant sa puissance et sa sagesse, sa grandeur et sa bonté, sa justice et sa miséricorde.

14. Pour ce qui regarde le concert unanime de tous les peuples à reconnaître un Etre suprême, cette croyance générale et constante qui est, sans contredit, une des preuves les plus frappantes de l'existence de Dieu, nous en trouvons encore la raison, ou du moins la raison principale, dans l'histoire sacrée. En effet, nous lisons dans la Genèse qu'après la création Dieu s'est fait connaître immédiatement au premier homme, qui est devenu lui-même le père et le précepteur du genre humain. D'ailleurs, en parlant de la religion et du dogme de l'unité de Dieu, nous aurons l'occasion de faire connaître la croyance de toutes les nations touchant la Divinité. Nous nous dispenserons donc de rapporter les différentes

(1) Voyez les Dissertations sur l'existence de Dieu, par Jacquelot.

preuves de l'existence de Dieu, nous bornant à exposer le dogme catholique sur sa nature, ses attributs et les œuvres de la création, sans négliger cependant les considérations philosophiques qui viennent à l'appui de la révélation. Nous ne négligerons point non plus les traditions primitives, qui, quoique plus ou moins altérées par les superstitions de l'idolâtrie, nous offrent néanmoins des rapports assez sensibles avec les principales vérités de la religion chrétienne, qui remonte jusqu'à l'origine du monde. « Jésus-Christ « était hier, il est aujourd'hui, et il sera dans tous les siècles : Jesus Christus heri et hodie; ipse et in sæcula (1). »

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(1) S. Paul, Epttre aux Hébreux, c. xш. v. 8.

DE L'ÉCRITURE SAINTE

ET

DE LA TRADITION.

15. « Dieu a parlé autrefois à nos pères en diverses occasions « et en différentes manières par les Prophètes, et il nous a parlé « dans ces derniers temps par son propre Fils, qu'il a fait héritier « de toutes choses, et par qui il a créé les siècles (1). » Or, on peut considérer la parole de Dieu, ou comme écrite sous l'inspiration divine, ou comme ayant été transmise de vive voix, sans être écrite par des hommes inspirés de Dieu. Dans le premier cas, on l'appelle Écriture sainte; dans le second, on la nomme Tradition. Ainsi l'Écriture sainte et la Tradition divine contiennent la parole de Dieu, sur laquelle sont fondées les vérités de la religion.

PREMIERE PARTIE.
DE L'ÉCRITURE SAINTE.

CHAPITRE PREMIER.

De la Notion de l'Écriture sainte, du Nombre et de l'Objet des Livres saints.

ARTICLE PREMIER.

De la notion de l'Écriture sainte.

16. L'Écriture sainte, l'Écriture sacrée, la Sainte Bible, les

(1) Multifariam multisque modis olim Deus loquens patribus et Prophetis; novissime, diebus istis locutus est nobis in Filio, quem constituit hæredem universorum, per quem fecit et sæcula. S. Paul, Epist. ad Hebræos, c. 1, v. 1 et 2

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