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de succès, elle le soit, suivant la nature et les circonstances de la guerre, pour l'assistance ferme et continue du pouvoir et des ressources qu'offrent les états de S. M.; et S. M. se repose sur l'aide de son parlement dans ses efforts empressés pour frustrer les entreprises de la France contre l'indépendance de l'Espagne et du Portugal, et contre le bonheur et la liberté de ces nations loyales et déterminées. (g)

(g) Il y a dans ce paragraphe bien de la mauvaise fois au moment même où le roi parle ainsi du haut de son trône, ses troupes abandonnent Badajoz et la rive gauche du Tage, pour se rejeter sur Lisbonne, laissant à decouvert la Sierra-Morena et toute l'Andalousie ! Si vous avez vous voulu ne pas avoir à "regretter que la Suède ait trouvé nécessaire d'acheter la paix par des sacrifices considérables," il fallait débarquer 40,000 hommes en Finlande. Si vous aviez voulu secourir l'Autriche, il fallait débarquer 40.000 hommes à Trieste ou à Hambourg, et si, quand vous avez su que la bataille de Ratisbonne avait été l'arrêt du destine de l'Autriche, vous avez voulu sẹ, courir les Espagnole, il fallait que votre armée de Walcheren se trouvât sur le champ de batille de Talaveyra! Mais le bruit des suceès et de la gloire de la France excite dans vos cœurs une rage si violente, un choc si tumultueux de tous. les sentimens de naine et de fureur, qu'il en jaillit comme des tourbillons de fumée qui

TOME IV.

obscurcissent votre vue. Vous
ne songez plus à ce qui vous
serait le plus utile, mais seule
ment à ce qui peut assouvir
votre rage.
Il lui faut des
meurtres et des incendies.

C'est ainsi que lorsque la
paix est venue à Tilsit con-
soler l'Europe, et faire succé-
der la tranquillité au carnage,
yous avez frémi à la vue de
la prospérité du Continent,
comme les démons de Milton,
à l'esprit du bonheur du pre-
mier homme; et pour dissi-
per vos sombres vapeurs, vous
vous êtes procuré l'affreux
spectacle de l'embrâsement de
Copenhague! Vous venez de
voir deux grandes nations s'en-
tendre pour faire cesser la
guerre, et aussitôt, pour vous
consoler de la cessation de ses
calamitiés, vous avez recours
à de nouvelles scènes de des-
truction et de massacre! Puis-
que tel est votre instant,
suivez-le, mais épargnez l'i-
ronie aux malheureux que
vous faits! Lorsque les deux
Castilles, la Manche, l'Arra-
gon, la Navarre, la Biscaye, le
royaume de Léon, la province
de Salamanque, la Catalogne,
les trois quarts du royaume de
Valence, etc. sont en notre
pouvoir; vous voulez réunir les
cortès-généraux, vous parlez
d'assemblées politiques à des
hommes qui n'ont d'autres
mobiles et d'autres énergies
que le fanatisme et la super-
stition! Dites-nous, où pour-
ront se tenir ces cortès, à
moins que ce ne soit à bord de
vos vaisseaux? Mais vous ne
croyez pas un mot de ce que
vous dites; la ville de Londres
le croit encore moins. Il y a
R

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trop d'Anglois en Espagne pour que vous puissiez tromper votre nation sur la véritable situation des choses dans ce pays. Votre but est seulement d'exciter les Espagnols à combattre les Français, pendant que vous regagnerez vos vaisseaux. Les guerres du continent, assurent votre empire des mers. Vous voyez les François et les Espagnols se déchirer; "ce sont, dites-vous, des ennemis qui se battent; serious-nous assez insensés pour ne pas animer leur querelle, et pour ne pas leur fournir des armes ? Les Espagnols ne payent-ils pas ces funestes présens du prix le plus précieux pour nous? ils les payent de leur propre sang!" Ce passage achève de dévoiler votre conduite, et donne à tout homme qui pense un nouveau sujet de malédiction contre vous.

Nous remarquons dans le même paragraphe une autre prostitution du pouvoir souverain. On y parle du roi Ferdinand VII, comme si le roi Charles IV n'existait plus, ou comme si le fils pouvait avoir des droits du vivant de son père. Que dirait George III, si, ce passage à la main, le prince de Galles montait sur son trône, et si, à la tête des gardes de Windsor et du peuple de Londres, il enfermait son vieux père 'aveugle dans la Tour? Il faut l'avouer, l'Europe serait autorisée, à dire au roi Georges : Vous l'avez mérité ! Quelle doctrine pour un roi qui a des fils de 40 ans ! quelle erreur et quelle immoralité! Ainsi, parce que le résultat d'une émeute

de valets et de gardes a été qu'un roi blanchi sur le trône en a été précipité par son fils, vous reconnaissez Ferdinand VII! Ce seul mot explique suffisamment vos intrigues sur les affaires de l'Espagne. Vous reconnaissez Ferdinand parce que vous avez séduit ses eutours, et que vous vous êtes servi du duc de l'Infantado pour l'entraîner dans des complots contre son père et sa mère, sous le prétexte d'attaquer le Prince de la Paix. Le plan arrêté par vos partisans étoit qu'aussitôt que le roi Charles aurait été renversé, on aurait approvisionné et fortifié les places, fait marcher des troupes vers les Pyrénées, changé ensuite de systême, et fait la paix avec l'Angleterre. Vous connaissiez assez le caractère de l'empereur des Français pour savoir qu'il ne transigerait pas, et que la France attaquerait l'Espagne; et vous pensiez que celle-ci serait obligée de se jeter dans vos bras, et deviendrait votre esclave! Voilà le nœud et le secret de toutes les affaires d'Espagne. Vos partisans ont fait éclater leurs complots. Vos funestes intrigues avoient réussi à armer le fils contre le père. Le roi Charles, voyant sa vie menacée, a réclamé l'appui de son allié et le secours de son armée, et il est venu, avec la reine, chercher au milieu de l'armée française un abri contre les fureurs de la populace.

Si même on pouvait penser qu'un fils pût avoir quelque droit au trône du vivant de son père, Ferdinand n'a-t-il pas renoncé à ses droits, et sa re

nonciation n'a-t-elle pas été entièrement libre et volontaire? Ce discours restera à jamais célèbre, comme un monument d'inconséquence et de cette corruption de morale politique, qui présage la dissolution des gouvernemens et la chute des trônes! Le roi de Suède, le plus fidèle allié de l'Angleterre, est renversé; au lieu de le soutenir, de lui tendre une main secourable, ou du moins de détourner les yeux d'un spectacle aussi affligeant, on reconnaît et on approuve dans ce discours tout ce qui s'est passé en Suède. Plus bas, on y reconnaît, du vivant du père, les droits du fils, qui n'a pas même régné ! c'est un des principaux traits du caractère anglais, que cette facilité à se jouer de ce qu'il y a de plus sacré; Gustave IV est détrôné; il est aussitôt désavoué et méconnu ! Vous dites comme Pierre: Nescio hominem istum quem dicitis! Charles IV est détrôné; vous reconnaissez à la populace lé droit de disposer du trône; enfin vous appelez gouvernement légitime, et vous traitez comme tel quelques factieux, qui s'intitulent Junte, et qui parlent au nom de Ferdinand VII qui les désavoue, et abHorre des misérables qui ne veulent que ruiner leur patrie au profit de l'Angleterre."

Tant que le nom de Ferdi nand VII n'a servi d'autorité qu'à des brigands, on n'a pas daigné s'expliquer; mais puisque ce nom est prononcé du haut du trône d'Angleterre, il n'est peut-être pas hors de propos de remettre sous les yeux

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