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les visiter ensemble et traiter une nouvelle affaire, s'il y a lieu »>:

Que Scrive lui répondit le lendemain 26 : « Veuillez m'écrire demain ou après-demain si les Pava et les Longa sont arrivés. Aurezvous le temps de les examiner lundi? Sinon, l'écrivain aura le plaisir d'aller vous voir mardi avec une offre ferme »>;

Que, dans la matinée du lundi 29, Farinaux, employé de Scrive, se rendit à Courtrai; qu'il y procéda avec Boutry à la vérification des premiers wagons qui étaient arrivés à la gare de cette ville; que cette vérification eut pour résultat que Farinaux et Boutry s'entendirent pour placer sous séquestre quatre wagons des lins expédiés et que Farinaux télégraphia et écrivit le même jour à Tikhonoff et lui proposa, notamment, de reprendre les Longa et de les remplacer;

Attendu qu'il résulte clairement de ces divers faits qu'il n'était pas entré dans l'intention des parties que les lins fussent vérifiés et agréés à Anvers;

Qu'il est évident, en effet, que si telle avait été leur intention, Boutry n'aurait pas songé à inviter Scrive à venir faire la vérification à Courtrai; qu'il est évident aussi que Scrive n'aurait pas accepté l'invitation de Boutry; que, tout au moins, il aurait fait des réserves; qu'il est constant qu'il n'en a fait aucune; qu'il s'est borné à envoyer à Boutry, le lendemain de la vérification, copie de la dépêche qu'il avait reçue de Tikhonoff et dans laquelle celui-ci disait : « Demande expertise à Anvers, ayant vendu caf Anvers. Si lins déjà Courtrai, accepterai aucune réclamation »;

Que même, en transmettant cette dépêche, Scrive gardait le silence le plus absolu sur le mérite de la fin de non-recevoir opposée par Tikhonoff; que ce silence achève de démontrer que, dans son opinion, cette fin de nonrecevoir n'avait aucun fondement;

Attendu, du reste, qu'à l'effet d'établir que les lins dont s'agit devaient être agréés à Anvers, les intimés se bornent à invoquer la circonstance que les lins étaient vendus caf Anvers ;

Attendu que cette formule signifie uniquement que le prix de 70 francs pour les Longa et de 78 francs pour les Pava, comprenait le coût des lins, le fret et l'assurance jusqu'à Anvers, et qu'à partir d'Anvers, le transport et l'assurance étaient à charge de Boutry;

Que la dite formule, prise à elle seule, est donc insuffisante pour renverser l'argument péremptoire que l'on doit tirer des agissements de Scrive, qui avait personnellement traité avec Boutry et qui, mieux que Tikhonoff, devait savoir quelle avait été la volonté commune;

Attendu que vainement les intimés allé

guent que Boutry a vérifié les lins à Anvers; Attendu que Boutry peut avoir vérifié si les lins, dont l'arrivée lui avait été annoncée, portaient les marques indiquées dans sa facture et s'ils présentaient les apparences extérieures des lins qu'il avait achetés; mais qu'il est constant qu'il n'a pas fait autre chose; qu'une vérification aussi superficielle n'est pas une agréation; qu'au surplus, le négociant, trompé par les apparences extérieures d'un envoi, n'est pas désarmé;

Attendu que vainement aussi les intimés allèguent que Boutry a disposé des lins en les faisant transporter d'Anvers à Courtrai et en les déposant en partie dans ses magasins;

Attendu que l'on ne saurait voir un acte de disposition dans le transport d'une marchandise au lieu où elle doit être vérifiée; que l'on ne saurait voir non plus un acte de disposition dans le dépôt provisoire fait, comme dans l'espèce, de commun accord, dans le magasin de l'une des parties, jusqu'à ce que les parties se soient entendues à l'amiable ou aient obtenu une décision de justice;

Attendu, enfin, que c'est encore sans raison que l'on a objecté que Boutry a fait acte de disposition et, par suite, d'agréation définitive, en expédiant, le 25 août, neuf balles Longa et huit balles Pava au comptoir de l'Industrie linière à Frévent;

Attendu que cette expédition, qui ne portait que sur la centième partie des lins achetés, a été faite par Boutry, à la demande de Scrive, pour lui rendre ce que celui-ci appelait un service et pour permettre à l'Industrie linière de faire un essai;

Attendu que, dans ces circonstances, il est évident que l'envoi fait par Boutry ne constituait qu'un acte de bienveillance, qui n'aurait pas dû lui être opposé; que, dans la rigueur du droit, on ne peut y voir qu'une renonciation à une partie insignifiante du chargement qu'il devait recevoir; qu'il n'est pas sérieux d'y trouver l'agréation anticipée et sans examen de 1,711 balles qui composaient ce chargement; que Tikhonoff peut dire tout au plus qu'il n'est pas tenu de remplacer les dix-sept balles dont il argumente;

Attendu qu'il suit de ce qui précède que c'est à tort que le premier juge a accueilli les exceptions opposées par les intimés;

Au fond:

Attendu qu'avant de statuer définitivement, il convient que les lins litigieux soient vus et visités par des experts;

Par ces motifs, met le jugement dont appe à néant; émendant, rejette les exception! opposées par les intimés; et toutes fins cons traires écartées, ordonne que par un ou troiexperts à convenir entre les parties dans les trois jours de la signification du présent arrêts

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C. WATRIN ET AUTRES.)

ARRÊT.

LA COUR; Vu l'arrêt défaut-joint de cette cour en date du 17 mai 1882;

En ce qui concerne la fin de non-recevoir fondée sur l'article 3 de la loi du 16 décembre 1851;

Attendu que, par exploit du 17 juin 1879, les intimés ont assigné la demoiselle Pierron aux fins de voir prononcer l'annulation : 1° d'un acte de vente du 17 janvier 1873, aux termes duquel feu Jeanne - Dorothée Chabot a déclaré céder à l'appelante la nue propriété de ses immenbles et du mobilier garnissant la maison qu'elle occupait au village de Bleid; 2o d'un testament olographe, daté du lendemain, 19 janvier, par lequel la dite demoiselle Chabot l'a instituée sa légataire universelle;

Attendu que la demande en nullité de l'acte de vente n'a été inscrite en marge de la transcription, laquelle a eu lieu le 24 février

(1) Voy. conf. Bruxelles, 10 novembre 1869 (PASIC., 1869, II, 419), et voy. aussi Liège, 5 mai 1881 (ibid.,

1873, que le 9 juin 1881, et, par suite, postérieurement au jugement dont est appel;

Attendu que l'article 3 de la loi hypothécaire défend aux tribunaux de recevoir aucune demande de l'espèce, si elle n'a été préalablement inscrite en marge de la transcription;

Attendu que cette disposition a été édictée surtout dans l'intérêt des tiers, afin qu'ils soient avertis de l'introduction de la demande et des risques qu'ils courent en traitant avec le propriétaire menacé; qu'elle est donc d'intérêt général et d'ordre public;

Attendu que ces principes ont été formellement reconnus dans les discussions législatives qui ont précédé l'adoption du dit article (Pasinomie, 1851, p. 354, notes sur l'article 3 de la loi);

Attendu, en conséquence, que l'inscription doit avoir lieu au début de l'instance, et que l'inobservation de cette formalité fait naître une fin de non-recevoir ou de non-procéder qui paralyse l'action et ne peut être couverte par une inscription faite dans le cours des débats, notamment après le jugement;

En ce qui concerne la fin de non-recevoir basée sur ce que l'avoué de feu Antoine Hustin, l'un des demandeurs, a conclu contradictoirement pour celui-ci, bien qu'il fût décédé durant l'instance;

Attendu qu'il est avéré que le décès de Hustin a eu lieu après que les conclusions avaient été contradictoirement prises à l'audience; que l'exception n'est donc aucunement justifiée (code de proc. civ., art. 542);

Par ces motifs et adoptant ceux des premiers juges quant aux deux autres fins de non-recevoir soulevées par l'appelante, de l'avis conforme de M. l'avocat général Faider, statuant entre toutes les parties, met à néant le jugement à quo ainsi que toute la procédure, tant de première instance que d'appel, sauf l'assignation, et ce en tant qu'il a déclaré recevable la demande d'annulation de la vente d'immeubles faite à l'appelante par l'acte du 17 janvier 1873; confirme le jugement pour le surplus; condamne l'appelante et les intimés chacun à la moitié des dépens d'appel.

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BRUXELLES, 10 juillet 1882.

CHEMIN DE FER CONCÉDÉ. — CLAUSE DE RACHAT. PRIX STIPULÉ. ETENDUE DE L'OBLIGATION DE LIVRER. - MATÉRIEL ROULANT, OUTILLAGES ET MOBILIER DES STATIONS.

Lorsque l'Etat fait usage de la faculté de rachat

stipulée dans le cahier des charges d'une concession de chemin de fer, le prix de rachat stipulé comprend-il l'outillage, le mobilier des stations et le matériel roulant (1)?

Cet outillage, ce mobilier et ce matériel ne sont pas légalement les accessoires de la concession ou de l'immeuble constituant le chemin de fer (2).

Ils ne sont pas compris dans le prix de rachat stipulé dans l'article 51 du cahier des charges de la concession du chemin de fer de Lierre à Turnhout. L'Etat ne peut donc exiger, en payant ce prix, qu'ils lui soient délivrés (3).

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(1, 2 et 3) La note de M. le représentant Demeur annexée au rapport de la commission de la chambre des représentants chargée de l'examen du projet de loi relatif au rachat de la concession du chemin de fer de Lierre à Turnhout (Docum. parlement., session de 1880-1881, appendice au no 42) porte ce qui suit :

A l'origine, et pendant de longues années, le département des travaux publics fut d'avis que l'État avait le droit, en rachetant les chemins de fer de Turnhout et celui d'Anvers à la frontière, d'entrer en possession non seulement de la voie ferrée, mais aussi du matériel, du mobilier des stations, de l'outillage. Telle était encore, notamment, l'opinion du ministre des travaux publics qui a précédé le ministre actuel.

• Des jurisconsultes éminents, consultés dans ces derniers temps, la rejetèrent.

Deux opinions furent exprimées par eux. Suivant l'une, « le prix de rachat stipulé par l'article 51 du cahier des charges comprend la ⚫ valeur du mobilier et de l'outillage, mais non celle << du matériel roulant. Il en résultait que l'État, en

« Il ne pourra être fait usage de la faculté de rachat qu'après que le chemin de fer aura été exploité pendant vingt ans, et le rachat se fera alors, au choix des concessionnaires, soit en capitalisant à raison de 4 p. c. le revenu garanti par l'Etat, soit en calculant le revenu net des sept dernières années d'exploitation dont on retranchera celui des deux années les moins favorables, et en capitalisant à raison de 5 p. c. plus une prime de 15 p. c. la moyenne du revenu des cinq années res

tantes. >>

Pour repousser l'argument tiré de ce que, en France, les cahiers des charges des concessions de chemins de fer stipulent que le concessionnaire recevra, en cas de rachat, les remboursements auxquels il aurait droit à l'expiration de la concession, c'est-à-dire le prix du matériel, etc., l'intimé disait :

« D'après ces cahiers des charges l'Etat français, à l'expiration de la concession, n'entre pas de plein droit en possession du matériel, mais seulement lorsqu'il intervient à cette fin, entre lui et les concessionnaires, un contrat dont les bases sont établies par les cahiers des charges de la concession. D'après ces cahiers des charges, l'Etat, qui a le droit de racheter le chemin de fer quinze ans après la mise en exploitation, n'est tenu, pour prix de rachat, de payer le produit net moyen des cinq années d'exploitation les plus productives prises parmi les sept dernières, que pendant chacune des années restant à courir sur la durée de la concession et sans que ce produit soit augmenté d'une prime quelconque.

« Les auteurs du cahier des charges de

payant le prix stipulé au cahier des charges, pouvait exiger la délivrance du chemin de fer avec son mobilier et son outillage, mais non avec le matériel roulant.

Suivant une autre, la faculté de rachat du chemin de fer ne comprend ni le mobilier, ni l'outillage mobile, ni le matériel roulant. Le payement du prix du chemin de fer ne donnerait donc à l'État aucun droit quelconque sur ces objets.

« C'est cette dernière opinion que le gouvernement accepte aujourd'hui et qu'il a demandé à la chambre de consacrer.

« La commission, au contraire, est d'avis que l'opinion première du département des travaux publics est la seule admissible. »

Voy. aussi le rapport de M. Jottrand, au nom de la commission (Docum., session de 1880-1881, no 49, p. 73).

Les consultations rappelées dans cette note ont été publiées comme annexes au projet de loi déposé le 10 août 1880 (Session extraordinaire de 1880, p. 26 et 28).

l'appelante, qui ont admis aussi, pour base du prix de rachat, le produit net moyen de la ligne pendant les cinq années d'exploitation les plus productives parmi les sept dernières, non seulement y ont ajouté une prime de 15 p. c., mais ont stipulé que ce revenu serait capitalisé et que le capital serait payé au concessionnaire, de telle sorte que, à l'expiration du terme fixé pour la durée de la concession, le concessionnaire, après avoir perçu chaque année le revenu annuel moyen, augmenté de la prime, se trouve encore en possession du capital qui représente la valeur du chemin de fer, y compris le matériel. »

ARRÊT.

LA COUR; Attendu que le litige porte uniquement sur l'interprétation de l'article 51 du cahier des charges du 10 janvier 1855, annexé à la convention intervenue, le même jour, entre parties, et modifiée en certains points le 2 juin suivant;

Que spécialement il s'agit de rechercher si l'Etat, en se réservant, par le dit article, la faculté de « racheter le chemin le fer », moyennant un prix alors fixé sur une double base, au choix du créancier, a entendu stipuler que l'outillage, le mobilier des stations et le matériel roulant seraient compris dans l'objet de ce « rachat »;

Attendu qu'il convient de déterminer d'abord la portée exacte des conventions, dans leur ensemble, pour écarter du débat les termes impropres qui en obscurcissent la solution;

Attendu qu'aux dates prérappelées, les auteurs de l'appelante se sont engagés « à construire et à exploiter à leurs frais un chemin de fer de Lierre à Turnhout, par Herenthals >>;

Que l'Etat, de son côté, « pour indemniser les constructeurs-exploitants de leurs travaux et dépenses,» les autorisait « à percevoir à leur profit, pendant quatre-vingt-dix ans à dater de la mise en exploitation de la ligne, des droits et péages » sur les transports, d'après des tarifs « à arrêter de commun accord entre les concessionnaires et le département des travaux publics »;

Qu'il leur garantissait, en outre, un minimum d'intérêt de 4 p. c., sur un capital de 4,300,000 francs, affecté à l'exécution de l'entreprise;

Attendu que le chemin et ses dépendances devaient être établis sur des terrains payés par les concessionnaires, mais acquis au nom de l'Etat belge (art. 58 et 12 du cahier des charges);

Que celui-ci est donc devenu propriétaire de l'assiette du chemin, à mesure de l'acqui

sition des terrains y destinés, ou tout au moins à partir de la réception de la ligne et de son affectation à l'usage de voirie publique;

Attendu qu'il ressort de là que l'Etat, acquérant le chemin de fer par l'exécution même du contrat, n'avait pas à stipuler qu'il pourrait le racheter plus tard;

Que l'expression « racheter le chemin de fer », prise littéralement, est dénuée de sens juridique, comme le sont, dans les cas de l'espèce, celles que l'intimé invoque, en les puisant dans l'usage ou dans certaines dispositions réglementaires, et qui reconnaissent à des concessionnaires la propriété d'un chemin de fer, au lieu de la propriété du droit mobilier qui leur a été concédé sur l'exploitation de ce chemin;

Attendu qu'on ne peut racheter que ce qu'on a aliéné;

Que l'Etat n'a pas cédé la propriété du chemin de fer de Lierre à Turnhout, ni aucun démembrement de cette propriété; qu'il ne pouvait pas le faire, puisque ce chemin, eu égard à sa destination publique, est chose hors du commerce;

Qu'il a uniquement cédé aux auteurs de l'appelante, en rémunération de leurs dépenses, de leurs travaux et du service public qu'ils entreprenaient, le droit de percevoir des péages, pendant quatre-vingt-dix ans, à l'occasion des transports à effectuer sur la ligne;

Que telle est la seule part de ses droits qu'il ait fait sortir temporairement de son domaine, et la seule, par conséquent, qu'il ait pu vouloir racheter ou retraire, moyennant prix ou indemnité, pendant le cours du temps pour lequel il l'avait concédée;

Attendu qu'après avoir construit la ligne au nom et pour compte de l'Etat, les entrepreneurs avaient à exécuter la seconde partie de leurs obligations, consistant à l'exploiter à leurs frais et risques, mais aussi à leur profit, sous la surveillance de l'autorité publique et selon toutes les conditions stipulées dans l'intérêt général;

Qu'à cette fin, ils étaient tenus notamment de fournir, d'entretenir et de renouveler à leurs frais le matériel nécessaire à la traction et aux transports, mais non pas d'en livrer la propriété à l'Etat;

Que le contraire ressort à l'évidence de la lecture du cahier des charges;

Que, notamment, l'article 28 exige qu'il soit dressé un état descriptif de toutes les parties du chemin de fer et de ses dépendances, et de tous les travaux rentrant dans l'entreprise, mais qu'il ne prescrit aucun inventaire du matériel;

Que la composition de celui-ci n'est spéci

fiée nulle part, et qu'il n'est pas dit un mot de l'ameublement des haltes et stations;

Que le cahier des charges est rédigé dans la prévision que ce matériel sera la propriété des concessionnaires, ou du moins ne sera pas celle de l'Etat ;

Qu'ainsi l'article 54 porte: « Leur matériel devra avoir été confectionné en Belgique. >>>

Que l'Etat se réserve le droit de le saisir, dans certains cas, pour assurer l'exécution des conditions de l'entreprise (art. 21), ce qui ne se concevrait pas s'il en était propriétaire;

Qu'enfin, à l'expiration du terme assigné à la concession, le prix du matériel, tel qu'il existera à cette époque, sera payé aux concessionnaires (art. 49);

Attendu que, de cette situation respective des parties, l'une propriétaire du chemin et de ses dépendances, l'autre propriétaire des meubles servant à l'exploitation de ce chemin, il résulte cette conséquence que le rachat de la concession ne peut faire passer ces objets en la possession et propriété de l'Etat que pour autant qu'ils soient légalement les accessoires de la concession, ou les accessoires de l'immeuble constituant le chemin de fer, ou bien encore que la convention l'ait ainsi réglé, sinon explicitement, du moins de manière à ne laisser aucun doute sur la volonté des contractants à cet égard;

Attendu que la première partie de l'alternative est inadmissible; qu'en effet, l'objet de la concession, le droit aux péages, est purement incorporel et ne peut avoir pour accessoires des meubles corporels;

Qu'un tel genre d'accession ne rentre dans aucun des cas prévus par la loi et est contraire à la raison;

Attendu que pour admettre que les objets servant d'instruments à l'exercice du droit du concessionnaire font partie intégrante du chemin de fer, selon l'expression employée par l'intimé, il faudrait leur reconnaître le caratère d'immeubles par destination;

Qu'en supposant qu'on puisse étendre à un chemin de fer la fiction légale que l'article 524 du code civil a formulée pour protéger certains droits du domaine privé, encore faudrait-il rencontrer, dans la cause, les éléments de fait que cet article exige;

Que la condition nécessaire pour qu'une chose mobilière soit réputée immeuble, contrairement à sa nature, c'est qu'elle ait été affectée au service et à l'exploitation d'un fonds par celui qui est à la fois propriétaire de l'une et de l'autre ;

Que l'espèce de lien intellectuel imaginé par la loi comme un équivalent de l'attache matérielle du meuble à l'immeuble, ne saurait se concevoir si la volonté d'un proprié

taire unique ne dispose à la fois des deux objets;

Attendu que telle n'est pas la situation d'un occupant ou détenteur à titre précaire, et notamment celle d'un concessionnaire, exploitant, à l'aide d'un matériel qui lui est propre, un chemin de fer qui ne lui appartient pas;

Attendu que, à la vérité, la destination immobilise l'objet, même quand son affectation à l'usage de l'immeuble est effectuée par un tiers, si celui-ci a mandat de l'opérer pour le compte et au nom du propriétaire, en vertu d'une convention conclue entre eux;

Qu'alors, en effet, la volonté d'un seul maître dispose encore du fonds et du meuble, au moment où ce dernier lui est livré pour l'usage convenu et devient sa propriété;

Attendu que rien de semblable n'existe dans l'espèce;

Qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'Etat n'a jamais stipulé qu'un matériel déterminé serait placé sur la ligne pour son compte;

Qu'il n'a jamais prescrit d'en dresser un bordereau, spécifiant les objets à livrer;

Qu'à la fin de la concession par expiration de son terme, il s'est seulement réservé le droit d'entrer en possession du matériel en le payant, et « tel qu'il existera »;

Que si l'exploitant avait été chargé par l'Etat de placer ce matériel sur la ligne avec le caractère d'immobilisation prévu par l'article 524 du code civil, il serait immédiatement devenu propriété de l'Etat, comme les rails, les billes et les appareils fixes, immobilisés par incorporation et par attache;

Attendu que cette conséquence, contraire aux faits, inconciliable avec le cahier des charges, notamment dans ses articles 49 et 15, démontre que cette hypothèse est erronée et que l'intention des contractants n'a pas été de considérer cette catégorie d'objets comme immobilisée par destination, à moins de supposer une immobilisation commençant au moment précis où les droits du concessionnaire expirent, c'est-à-dire quand ce dernier perd qualité pour opérer l'affectation de sa chose à l'usage du fonds d'autrui, ce qui serait une impossibilité juridique;

Attendu que, d'après toutes les considérations qui précèdent, il est donc certain que l'application des principes généraux du droit à la convention litigieuse ne donne pas à l'Etat le droit de revendiquer les objets mobiliers compris sous la dénomination générique de « matériel » comme des accessoires de la concession, ni comme des accessoires de son immeuble;

Qu'il reste à examiner si les parties, en employant les mots racheter le chemin de fer, ne les ont pas pris dans leur signification vul

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