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La cour ordonna l'interrogatoire, sauf à Vincart à s'expliquer lors de l'interrogatoire sur la pertinence ou impertinence des faits.

Il est donc hors de doute que le jugement qui ordonne l'interrogatoire sur les faits contenus dans la requête ne décide pas irrévocablement que les faits sont pertinens.

Aussi l'article 325 ne porte-t-il pas que l'interrogatoire ne pourra être ordonné que sur requête contenant des faits pertinens, mais il dit sur requête contenant les faits.

On observait pour Constance Quertemont que le jugement serait illusoire s'il ne supposait pas l'examen et la pertinence des faits :

Qu'il valait autant laisser les choses sur l'ancien pied, et permettre comme dans l'ancienne procédure l'interrogatoire sur simple ordonnance; que le seul but de l'innovation est que le jugement ne soit rendu que sur des faits reconnus pertinens :

Que, dans l'espèce, la cour avait statué à la vue du jugement de première instance, joint à la requête :

Que Pigeau lui-même, en donnant la formule de ce jugement, ne se borne pas à faire ordonner l'interrogatoire sur les faits contenus en la requête, mais qu'il y insère sur faits et articles pertinens.

Voici sa formule :

« Vu la requête présentée par ..., contenant demande à fin de permission de faire interroger sur les faits énoncés en icelle le sieur.

requête signée.

ladite

Avoué de l'exposant.

« Le tribunal, considérant que lesdits faits sont • pertinens et admissibles, permet à l'exposant de <«< faire interroger tel devant M. le président ou tel « des juges qui sera par lui commis sur les faits • pertinens.

Relater les faits.

Constance Quertemont faisait en outre les deux observations suivantes :

Quand il serait vrai que la partie à la charge de laquelle l'interrogatoire est ordonné conserverait la faculté de soutenir que les faits sont impertinens, elle devrait l'exercer sur chaque question séparément lors de l'interrogatoire, et non en masse, puisque les uns peuvent être admissibles et les autres impertinens ;

Que la partie qui a fourni les faits peut elle-même reconnaître par les réponses qu'ils ne sont pas pertinens, et éviter par-là tout incident à l'audience;

Que c'est dans ce sens que la cour, troisième chambre, l'a préjugé dans son arrêt du 23 février 1809, invoqué par Deciplet.

En second lieu, quel intérêt peut avoir la partie tenue de répondre? si les faits sont impertinens ou non-concluans, son aveu même n'est d'aucune importance: nam frustra probatur quod probatum non relevat.

Ces sortes d'incidens n'aboutissent donc qu'à produire des incidens inutiles.

Quant aux faits uniquement articulés à dessein d'injurier, de calomnier, ou qui blesserait les bonnes mœurs, les tribunaux en font justice dans le jugement.

Supposé, réplique Deciplet, que l'arrêt ait été conforme à la formule donnée par Pigeau, il n'en serait pas moins un arrêt sur requête, rendu à l'absence de la partie intéressée.

Le juge se reforme comme dans les jugemens par défaut, après avoir entendu contradictoirement les parties.

Il n'est pas question de savoir quel serait l'effet des réponses sur des faits non- pertinens.

La loi ne permet l'interrogatoire que sur des faits pertinens et concernant la matière du procès. On ne peut pas arbitrairement exiger le serment d'une partie sur des faits hors de la contestation; ce serait la faire jurer en vain.

En examinant ensuite la nature des faits relatés dans l'arrêt qui ordonne l'interrogatoire, on reconnaissait qu'ils appartenaient à la matière de la cause; mais peut-on établir une transaction par des réponses sur faits et articles?

Inutile de permettre l'exécution d'un moyen frus

tratoire.

Or, on objectait l'article 2044 du code civil au titre des transactions, où il est dit:

Ce contrat doit être rédigé par écrit.

En effet un acte, dont le but est d'étendre ou de prévenir un procès, ne doit pas être litigieux lui même, du moins son existence ne peut pas etre problématique; le législateur veut qu'elle soit fixée par écrit.

par

L'écriture est elle de l'essence de la transaction?

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Il est des actes qui ne subsistent qu'autant qu'ils sont écrits dans, les formes prescrites par la loi; tels sont les contrats de mariage, les donations entrevifs. On tenterait inutilement la voie de l'interrogatoire, pour les établir on répondrait avec succès: il n'y a de contrats de mariage, ni donations, que quand on produit des actes conformes au vœu du Code - Napoléon, et le code requiert non seulement qu'ils soient consignés par écrit, mais aussi qu'ils soient authentiques.

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Ils sont donc soumis à des formes particulières dans l'ordre de l'intérêt général.

Les contrats de mariage ne concernent pas seule. ment les époux, 'ils sont des lois de famille.

Les donations intéressent aussi des tiers.

Les transactions au contraire sont des contrats qui se forment par le seul consentement des parties et pour elles-mêmes, comme toutes les autres conventions.

Pourquoi le Code - Napoléon exige-t-il que les transactions soient fixées par écrit? pour exclure la preuve par témoins, quand même l'objet serait audessous de 150 francs, et dans ce sens on pourrait

dire que l'écriture est de l'essence de cette espèce de contrat.

Comment abandonner au sort d'une preuve testimoniale un arrangement sur des droits litigieux? comment établir les points convenus? il n'y aurait, le plus souvent, que confusion dans la mémoire et la déclaration des témoins.

S'ensuit-il que sur des points clairs et précis, dont l'aveu pur et simple formerait la preuve du contrat, la voie de l'interrogatoire ne soit pas "admissible?

L'aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait. (Code - Napoléon, art. 1356.).

La partie peut-elle se plaindre de ce qu'on interroge sa conscience, de ce qu'on la prend pour juge dans sa propre cause?

N'aurait-on pas aussi la faculté de déférer le serment décisoire? il peut être déféré sur quelque espèce de contestation que ce soit (Code - Napoléon, art. 1358.);

De même qu'aux termes de l'article 324 du code de procédure civile, il est permis aux parties de se faire interroger en toutes matières.

On conclut de ces observations que l'article 2044 du Code-Napoléon n'exclut que la preuve par témoins et non l'aveu de la partie, et cette opinion a été adoptée par l'arrêt qui a statué sur l'incident envoyé à l'audience, ainsi qu'il suit :

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