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LORSQUE le taux d'une rente constituée en perpétuel est déterminé par le contrat, et que néanmoins il est stipulé que le débiteur paiera à un moindre taux, jusqu'à ce que le créancier lui ait notifié une résolution contraire, cette faculté réservée au créancier est-elle prescriptible?

Le créancier d'une rente constituée sous les anciennes lois du Brabant est-il en droit d'exiger le remboursement du capital, si le débiteur cesse de remplir ses obligations pendant deux années depuis le Code Napoléon ?

CES
Ces deux questions ne sont pas neuves, elles ont

déjà été décidées par la cour d'appel de Bruxelles. La première a été controversée.

La seconde avait reçu une réponse négative par arrêt (*) du 13 décembre 1808, seconde chambre.

Il y est déclaré que l'article 1912 du Code - Napoléon n'est pas applicable aux anciennes rentes.

Par arrêt (**) du 17 mai 1809, la première cham

(*) Rapporté pages 3 et suiv. du 1. volume de 1809. (**) Pages 193 et suiv. du 2. volume de 1809.

bre a également jugé que l'article 1912 ne s'appli quait pas aux rentes constituées sous l'ancien régime.

Il ne faut cependant pas se le dissimuler, cette jurisprudence a de puissant adversaires, et contre elle des juges d'autres cours..

La différence d'opinion peut avoir sa source dans les principes, sous les rapports desquels les rentes constituées étaient envisagées et régies dans chaque pays.

Pour ne pas répéter ce qui a été dit sur cette question, nous renvoyons aux arrêts qui viennent d'être cités.

Quant à la première, nous nous contenterons aussi d'indiquer les diverses décisions par lesquelles elle a été résolue en sens opposé..

Par arrêt (*) du 19 juin 1807, la troisième chambre a déclaré que la faculté réservée au créancier n'était pas prescriptible.

Un arrêt (**) de la seconde chambre, du 8 mars 1808, a préjugé le contraire, et il ne lui a manqué que le laps de temps nécessaire pour déclarer la faculté prescrite.

Semblable question s'étant reproduite à la méme chambre, alors composée d'autres juges, la prescrip

*(*) Voyez le présent Recueil, tome 12, 3. volume de l'an 1807, pages 227 et suiv.

(**) Voyez le même Recueil, tome 13, 1.' volume de l'an 1808, pages 289 et suiv.

tion a été rejetée par arrêt (*) du 30 novembre 1809.

La matière qui engendre cette difficulté et que You appelle communément clause anversoise est trop abondante pour ne pas ramener fréquemment des discussions judiciaires.

Elle s'est en effet renouvelée dans la cause dont nous allons succintement exposer les faits : il paraît quelle y a été approfondie, et que les motifs de l'arrêt qui la termine peuvent faire certaine impression sur le sort des clauses de cette nature.

Nous n'ajouterons rien au développement des moyens qui ont été rapportés lors des arrêts précédens.

13 Novembre 1714, constitution de rente au denier seize pour un capital de 2300 florins.

La rente était ainsi fixée à une somme annuelle de 143 florins 15 sous.

Il est ensuite stipulé, dans l'acte, qu'au cas de prompt paiement anuuel, ou au plus tard dans le délai de deux mois après l'échéance, le débiteur pourra payer, pour les six premières années, la rente sur le pied de 72 florins par an, au lieu du denier seize, et ainsi de- suite jusqu'à dénonciation.

Depuis la date du contrat, la rente a toujours été acquittée à raison de 72 florins par année.

En

1772,

les biens assignés en hypothèque furent;

(") Voyez tome 18, 3. volume de l'an 1809, pages 289 et suiv.

partagés par les héritiers du débiteur, et chaque lot fut chargé d'une portion de rente qui correspond à la somme de 72 florins.

12,

la

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Le 7 fructidor an veuve Vanlemmens " créancière, notifia à Vanreet, l'un des débiteurs qu'elle entendait être payée à l'avenir sur le pied du denier seize, et ce, à l'échéance du 9 fructidor

an 13.

Le 27 août 1805, Vanreet offrit la rente à raison de 72 florins par an; mais la créancière refusa les offres, et le poursuivit au paiement de deux années d'arrérages échus le 27 août 1806, à raison du denier 16.

Elle demandait en outre à ce que Vanreet fût condamné à lui rembourser le capital, attendu qu'il était en demeure d'acquitter ses obligations depuis deux ans, et qu'ainsi, suivant l'article 1912 du CodeNapoléon, il pouvait être contraint au rachat.

14 Mars 1808, jugement par défaut, qui accorde les conclusions à la créancière.

Vanreet, ayant interjeté appel de ce jugement,

.soutenu

a

1. Que, faute par le créancier d'avoir fait usage pendant près d'un siècle de la faculté qu'il avait d'exiger la rente au denier seize, cette faculté était prescrite et avait été prescrite par le laps de trente ans;

2.° Que les dispositions de l'article 1912 du CodeNapoléon ne pouvaient pas s'appliquer à une rente créée en 1714, qu'il avait d'ailleurs purgé sa de

meare par ses offres, et que la demande en remboursement n'était autre chose que le fruit d'une spéculation insidieuse que la cour ne manquerait pas de repousser.

Considérant, sur la première question, que la rente dont il s'agit, bien que créée en 1714 au taux du denier seize, a constamment été acquittée et perçue sur le pied de trois et un huitième par cent, sans réserve ni protestation de la part des crédirentiers successifs, pendant environ un siècle :

Que la faculté de renoncer après les six premières années à ce dernier taux, et d'exiger celui de six et un quart, même dans les deux mois de l'échéance, dérive d'une stipulation particulière, faisant partie de ladite constitution; que cette faculté contractuelle formait donc un droit qui a pu donner lieu à une action; mais que cette action, n'ayant jamais été exercée, se trouve en conséquence éteinte par la prescription plus que trenténaire.

« Considérant que la maxime que l'on ne peut prescrire contre son titre n'est applicable qu'à la prescription envisagée comme moyen d'acquérir lorsqu'on voudrait se changer à soi-même la cause et le principe de sa possession; qu'au contraire cette règle n'empêche point que le débiteur ne prescrive sa libération, soit pour le tout, soit sous le rapport d'un certain mode de se libérer de l'obligation qu'il a contractée :

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Que l'intimée n'est donc plus recevable à prétendre les intérêts, pour les années 1805 et 1806, sur le pied du denier seize.

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