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sans le ministère des notaires, quels seraient les dangers et les inconvéniens inséparables des ventes publiques, dirigées par des particuliers ou leurs mandataires?

La mise aux enchères publiques est précédée d'affi. ches qui provoquent une réunion d'individus.

Qui répondra que la convocation n'a pas un autre objet? Quelle garantie la police peut-elle avoir dans un homme sans titre? Qui maintiendra l'ordre si l'assemblée devient tumultueuse et se porte à des excès?

Un notaire est un fonctionnaire public: il porte avec lui un caractère qui commande le respect; il offre, dans sa qualité, une garantie au gouvernement et aux particuliers.

Abandonner les ventes publiques des immeubles à des particuliers ou plutôt à des particuliers qui forment une espèce de corporation parasite à côté des notaires, c'est encore compromettre les droits de l'enregistrement, tandis que le notaire est soumis à une responsabilité.

A la suppression des offices des huissiers - priseurs, chacun se crut en droit de vendre ses meubles sans employer le ministère d'un officier public; mais on ne tarda point à s'appercevoir de l'abus.

Deux lois, l'une du 26 juillet 1790 et l'autre du 17 septembre 1793, ordonnèrent que les ventes de meubles seraient faites par des huissiers, des notaires ou des greffiers.

Un arrêté du directoire exécutif, du 12 fructidor an 4, défendit à tous autres qu'aux huissiers, gref fiers ou notaires, de procéder aux ventes soit volontaires, soit forcées, de meubles ou effets mobiliers.

Pourquoi n'a-t-on pas fait un semblable réglement pour les immeubles?

On répond que l'usage, généralement observé à cet égard, a formé la loi, et qu'il était inutile de prescrire l'observation d'une règle dont personne ne s'écartait;

Qu'il ne peut jamais tomber dans la pensée du législateur que des particuliers emploieront un moyen frustratoire ;

Que, la vente étant un acte synallagmatique, les parties s'exposeront à contracter par des procès - verbaux que le vendeur conserverait en son pouvoir et dont il aurait la faculté de désister, de même que l'acheteur, en sorte qu'il n'y aurait jamais de preuve

valable de la convention.

Aussi le Code Napoléon suppose-t-il, et il le dit implicitement, que les ventes d'immeubles aux enchères sont essentiellement dans les attributions du notariat.

Le président de la chambre des notaires indiquait plusieurs autres inconvénients que produirait l'abus: qu'il venait de combattre ; il employait aussi beaucoup d'autres moyens pour établir la justice de sa réclamation.

Le systême des notaires, répondait l'intimé, est

assez solidement réfuté par les motifs du premier juge, pour me dispenser de recourir à d'autres

moyens.

La base du jugement qu'on attaque repose dans l'art. 544 du Code Napoléon. « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les réglemens. »>

Où sont les lois ou les réglemens qui défendent à un propriétaire d'immeubles de les vendre publiquement par lui-même, ou de les faire vendre par un mandataire ? Où cette manière de disposer estelle prohibée ?

L'usage, la raison et la loi repoussent ce mode de vente. Voilà toute la théorie des prétentions des

notaires.

Peu de mots dissiperont les idées séduisantes, dans lesquelles ils ont tant d'intérêt de se complaire.

:

L'usage il n'a jamais existé en Flandre, et si le principe du droit de disposer de sa propriété avait besoin d'appui, l'intimé invoquerait un usage contraire.

La raison: il n'en est pas d'autre que celle de la cupidité des notaires qui, non satisfaits des émoluments que la loi leur accorde avec générosité, cherchent encore à les étendre aux opérations qui ne leur sont point attribuées.

Qu'importent les difficultés plus chimériques que réelles qui peuvent survenir à l'occasion de ces ventes? c'est l'affaire du vendeur et des acquéreurs, et sans

doute que ce n'est pas l'amour du bien public qui inspire cette tendre sollicitude aux notaires.

Ne suffit-il pas que les parties aient confiance les unes dans les autres ? La vente ne peut- elle pas se faire verbalement ?

La loi on la fait parler dans les articles 1686, 1687, 1688 et 827 du Code - Napoléon.

Toutes ces dispositions sont loin de la difficulté que les notaires suscitent.

Elles supposent que les parties majeures ne sont pas d'accord; alors il faut bien employer le ministère d'un homme neutre, et la loi désigne un notaire.

Il n'est pas exact d'avancer que la licitation doit nécessairement être faite pardevant notaire. Si les communiers sont majeurs, ils peuvent s'entendre entr'eux, et adjuger l'immeuble comme il leur paraît convenir.

N'ont-ils pas aussi la faculté de partager de gré à gré? L'article 1685 nous l'apprend.

Là il s'agit d'une licitation qui est également un moyen de partager, et, dans l'espèce, on conteste à un propriétaire le droit d'offrir aux curieux la vente de ses immeubles, tout en différant.

Ce n'est donc que par des inductions forcées que la chambre des notaires veut trouver une exception au principe général.

Que signifie l'article 846 du code judiciaire ?

Que les majeurs ne peuvent pas être contraints à vendre aux enchères en justice; la conséquence estelle qu'ils sont tenus de vendre par le ministère d'un notaire ?

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A-la vérité cet article est une sorte de triomphe pour le notariat, parce qu'en France on emploie le plus communément son ministère; mais il n'y a pas d'obligation.

La réunion des enchérisseurs est, comme toute autre assemblée, sous la surveillance de la police; cet objet n'intéresse pas les notaires mais ce qui prouve que les particuliers peuvent faire des annonces publiques sans permission, c'est que la loi du 22 juillet porte que les affiches des actes émanés de l'autorité publique seront imprimés sur papier blanc et celles faites par des particuliers sur papier de couleur.

Les notaires portent donc leur inquiétude beaucoup trop loin.

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On tire un argument des lois sur la vente des meubles; mais, comme l'a très judicieusement observé le premier juge, ce raisonnement se rétorque contre les notaires, relativement aux ventes d'immeubles.

L'appelant fait encore valoir l'intérêt de l'état sous le rapport du droit d'enregistrement, et c'est ainsi qu'à défaut de moyens, directs et personnels, il s'efforce d'en trouver dans des causes étrangères.

La régie de l'enrégistrement est à l'égard des ventes, qui se font par enchères, dans le mème état que pour les actes qui ont lieu sous signature privée.

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