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naux du pays où les accusés se trouvent, quoiqu'elles aient été commises à bord d'un bâtiment d'une autre nation en pleine mer.. :

Chaque État souverain a le droit incontestable de réclamer les services de tous ses membres pour la défense nationale, mais il ne peut mettre à exécution ce droit que par des moyens licites. Son droit de réclamer les services militaires de ses citoyens ne peut être exercé que dans un lieu qui n'est pas soumis à la juridiction d'une autre nation. L'Océan est un tel lieu, et un État peut y exercer, à bord de ses propres bâtiments, le droit d'exiger les services militaire et naval de ses sujets. Mais peut-il exercer le même droit par rapport aux bâtiments d'une autre nation?

L'exemption des bâtiments de guerre d'une nation de l'exercice de tout droit de visite, en temps de guerre et en temps de paix, est généralement reconnue. Le droit de visiter les bâtiments de commerce des autres nations en pleine mer, pour y rechercher des déserteurs ou d'autres personnes engagées au service militaire ou naval, a été constamment soutenu par la Grande-Bretagne et aussi constamment nié par les États-Unis. Cette controverse entre deux nations qui, par l'identité de leur origine et de leur langue, sont les plus intéressées dans la question, est devenue un des principaux motifs de la dernière guerre entre elles. Cette même question est souvent devenue la matière de négociations entre les gouvernements américain et anglais; et notamment, dans la négociation qui a été terminée par le traité de Washington en 1842, le gouvernement américain a insisté de nouveau sur le principe que le pavillon national couvre toutes les personnes naviguant à bord du bâtiment qui porte ce pavillon 2.

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2 WHEATON'S History of the law of nations, p. 737–746.

§ 11. Juridiction

consulaire.

§ 12. Indépendance de

IV. Les lois civiles d'un État quelconque peuvent opérer au delà des limites de son propre territoire et dans le territoire d'un autre État, en vertu des conventions spéciales entre les deux États.

Tels sont les traités qui autorisent les consuls et autres agents de commerce d'une nation à exercer une juridiction sur leurs compatriotes dans le territoire de la nation où ils résident. La nature et l'étendue de cette juridiction dépendent des stipulations que renferment les traités entre les deux États. Entre les nations chrétiennes elle est en général limitée à la décision des litiges en matières civiles entre les négociants, les matelots et autres citoyens de l'État résidants en pays étranger; à l'enregistrement des testaments, des contrats et autres actes passés devant le consul, et à la conservation des biens de leurs compatriotes décédés dans le ressort du consulat. Les consuls des puissances chrétiennes résidants en Turquie et dans les autres pays du Levant exercent une juridiction civile et criminelle sur leurs compatriotes, à l'exclusion des magistrats et tribunaux du pays étranger. Cette juridiction est ordinairement soumise, dans des cas civils, à un appel aux tribunaux. La juridiction criminelle est, en général, limitée au pouvoir d'infliger une amende pécuniaire, et dans le cas d'autres délits plus graves, le consul exerce les fonctions d'un juge d'instruction. Il recueille les documents et autres preuves du délit, pour les envoyer avec les accusés dans la patrie pour y être jugés '.

Chaque État souverain est indépendant de tous les l'État quant autres États dans l'exercice de son pouvoir judiciaire.

à son pouvoir judiciaire.

Ce principe général doit être modifié par les exceptions à son application créées par des conventions spéciales avec les États étrangers, et par des actes de confédération avec

1 DE STECK, Essai sur les consuls, sect. VII, § 30-40. PARDESSUS, Droit commercial, part. VI, tit. vi, chap. 1, § 2; chap. IV, MILTITZ, Manuel des consuls, t. II, part. II, p. 402, 435.

§ 1-3.

d'autres États souverains pour certains objets d'un intérêt commun. Par les stipulations de ces conventions ou de ces actes, l'État en question peut céder une portion de son pouvoir judiciaire, ou il peut modifier son exercice pour atteindre le but du traité ou acte de conféderation.

Avec ces exceptions, le pouvoir judiciaire de chaque État est aussi étendu que son pouvoir législatif. Cependant il n'embrasse pas les cas où les lois civiles d'une autre nation peuvent opérer dans les limites territoriales de l'État. Tels sont les cas que nous avons déjà énumérés d'un souverain étranger, de son ambassadeur, de sa flotte ou de son armée, entrant dans les limites territoriales d'un autre État, où ils sont en général exemptés de la juridiction du pays.Br

I. A ces exceptions près, le pouvoir judiciaire de chaque État indépendant s'étend:

4° A la poursuite de toutes les offenses commises contre les lois de l'État dans ses limites territoriales, quel que soit l'auteur de ces offenses

"2o A la poursuite de toutes les offenses contre les lois de l'État commises à bord de ses bâtiments de guerre ou de commerce en pleine mer, et à bord de ses bâtiments de guerre dans les ports d'un pays étranger, quel que soit l'auteur de ces offenses 2.

3°: A la poursuite de toutes les offenses contre les lois de l'État commises par ses citoyens, dans quelque lieu qu'elles aient été commises.

4° A la poursuite du crime de piraterie et d'autres offenses contre le droit des gens, quel que soit l'auteur de ces offenses, et quel que soit le lieu où elles ont été commises 3.

Il est évident qu'un État n'a pas le droit de poursuivre

1 Vide supra, § 6.

2 Vide supra, § 9-10.

3 Vide infra, § 45.

§ 13. Etendue du pouvoir judi. ciaire quant aux délits criminels.

Règlements de commerce

et de

navigation.

devant ses tribunaux une offense contre ses lois commise dans les limites territoriales d'un autre État, à moins qu'elle n'ait pas été commise par ses propres citoyens. Il ne peut pas faire arrêter les personnes et saisir les biens des coupables sur le territoire étranger; mais ils peut faire arrêter ses propres citoyens dans un lieu qui n'est pas soumis à la juridiction d'une autre nation, tel que la pleine mer, et les punir pour des offenses commises dans un tel lieu ou dans les limites territoriales d'un autre État.

D'après la jurisprudence reconnue par les États-Unis d'Amérique et la Grande-Bretagne, la justice pénale de chaque pays est regardée comme territoriale, et elle doit rester étrangère à la répression de tout délit commis hors de ce territoire. Cependant ce principe a été souvent écarté par la législation pénale de ces deux pays, en ordonnant la poursuite, devant leurs propres tribunaux, des offenses contre leurs propres lois commises par leurs citoyens dans les limites territoriales d'un pays étranger.

La plupart des codes de l'Europe n'admettent pas le principe que la justice pénale est territoriale. Plusieurs États, par leur législation criminelle, punissent leurs nationaux pour crimes commis par eux en pays étrangers. En France, ce principe forme la règle générale, et ne souffre que de légères exceptions. Des exceptions consistent en ce que certains crimes publics contre la sûreté ou la fortune de l'État sont déclarés passibles de la juridiction française, bien qu'ils aient été commis hors du territoire, soit par des Français, soit par des étrangers'.

Les lois concernant le commerce et la navigation d'un État ne peuvent pas être appliquées aux étrangers hors des limites du territoire, mais elles sont partout applicables aux citoyens de l'État. Les offenses contre les lois de prohibition de certains genres de trafic commises par

'FOELIX, Droit international privé, § 510-532.

les citoyens peuvent être poursuivies devant les tribunaux de l'État, quel que soit le lieu où elles ont été commises. Mais si ces offenses ont été commises par des étrangers, elles ne peuvent pas être poursuivies devant ces tribunaux, à moins qu'elles n'aient pas été commises dans les limites territoriales de l'État, ou à bord de ses bâtiments de guerre ou de commerce, dans un lieu hors de la juridiction de tout autre État. · ·

Les opinions des publicistes sont divisées sur la question de savoir si l'extradition des personnes accusées de crimes commis dans les limites territoriales d'un État, est obligatoire pour l'État où ces personnes ont cherché un refuge. Quelques-uns de ces écrivains soutiennent que l'extradition dans ce cas est obligatoire pour les nations, même indépendamment de toute convention spéciale. Telle est l'opinion de Grotius, Burlamaqui, Vattel, Rutherforth, Schmelzing et Kent'.

D'un autre côté, suivant Puffendorf, Voet, Martens, Klüber, Leyser, Kluit, Saalfeld, Schmaltz, Mittermaier et Heffter, il faut une convention spéciale pour qu'un État soit formellement tenu d'accorder l'extradition que lui demande un autre État; sinon l'extradition reste toujours soumise à l'appréciation et aux convenances de l'État à qui elle est demandée. Et le savant Mittermaier regarde le fait même de l'existence de tant de traités spéciaux concernant

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HEINEC1 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. II, cap. XI, § 3—5. CIUS, Prælectiones in Grotio, j. t. BURLAMAQUI, Droit naturel, t. II, part. IV, chap. 1, § 23-29. VATTEL, liv. II, chap. vi, § 76 et 77. RUTHERFORTH, Institutes of natural law, vol. II, ch. Ix, p. 12. SCHMELZING, Systematischer Grundriss des praktischen europäischen Völkerrechts, § 61. KENT'S Commentaries on American law, vol. I,

p. 36 et 37.

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2 PUFFENDORF, Elementa, lib. VIII, cap. 1, § 23 et 24. - VOET, de Stat., § 44, cap. I, no 6. MARTENS, Droit des gens, liv. III, chap. I, § 101. KLÜBER, Droit des gens, part. II, tit. I, chap. 1, § 66. LEYSER, Meditationes ad Pandectas, Med. 10. KLUIT, de Deditione profugorum, § 1, p. 7. SAALFELD, Handbuch des positiven Völkerrechts, § 40. SCHMALTZ, europäisches Völkerrecht, p. 160. MITTERMAIER, das deutsche Strafverfahren, Thl. I, § 59, p. 344-319.

Extradition des

criminels.

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