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Prusse. C'est ainsi également que le titre d'empereur de toutes les Russies, qui fut pris par Pierre-le-Grand en 4704, fut successivement reconnu par la Prusse, les Provinces - Unies et la Suède en 1723, par le Danemark en 1732, par la Turquie en 1739, par l'empereur d'Allemagne en 1745, par la Confédération germanique en 4746, par la France en 1745, par l'Espagne en 4759 et par la république de Pologne en 1764. Dans la reconnaissance que fit la France de ce titre, il fut expressément stipulé que ce changement de titre n'aurait aucun effet sur les relations de cérémonial entre les deux cours. A l'avénement de l'impératrice Catherine en 1762, cette princesse refusa de renouveler sous la même forme cette stipulation, mais déclara que le titre impérial ne changerait rien aux cérémonies à observer entre les deux pays. La cour de Versailles répondit à cette déclaration par une contredéclaration renouvelant la reconnaissance de ce titre, mais à la condition expresse que si la cour de Saint-Pétersbourg venait à changer quelque chose au cérémonial établi entre les deux cours, le gouvernement français cesserait de lui accorder le titre impérial 2.

Le titre d'empereur, eu égard aux souvenirs historiques qui y ont été attachés, a toujours été considéré comme le premier et le plus important de tous les titres souverains; pourtant ce titre, excepté dans le cas de l'empereur d'Allemagne, n'a jamais été regardé comme donnant à ceux qui le portaient des prérogatives ou des droits de préséance sur d'autres têtes couronnées.

§ 7. Du

L'usage a établi parmi les nations un certain cérémonial à observer soit sur l'Océan ou sur les parties de l'Océan cérémonial sur lesquelles un État particulier a droit de suprématie.

1 WARD'S History of the law of nations, vol. II, p. 245-248. KLÜBER, Droit des gens, part. II, tit. I, chap. II, § 407, note c.

2 FLASSAN, Histoire de la diplomatie française, t. VI, liv. III, p. 329-364.

maritime.

Dans ce cérémonial est compris le salut des navires de guerre entre eux, salut qui consiste à amener ou à ferler le pavillon, ou à amener les voiles hautes, ou bien à tirer un certain nombre de coups de canon à l'approche d'une flotte ou d'un simple bâtiment de guerre ou bien à l'entrée d'un port fortifié.

Chaque État souverain a le droit exclusif, en vertu de son indépendance et de son égalité, de régler le cérémonial maritime à observer par ses propres vaisseaux entre eux ou envers ceux d'une autre nation, soit en pleine mer ou dans les limites maritimes de cet État. Il a également le droit de régler le cérémonial à observer sur cette partie de la mer qui se trouve sous sa juridiction territoriale, soit par les navires étrangers entre eux, soit envers ses propres forteresses et bâtiments de guerre, et les honneurs à rendre par ces derniers aux bâtiments étrangers. Ce cérémonial est réglé par ses propres ordonnances ou par des traités réciproques avec d'autres puissances maritimes'.

Lorsque la juridiction réclamée par un État est contestée par des nations étrangères, comme cela arrive pour la suprématie que s'attribue la Grande-Bretagne dans les mers dites Britanniques, les honneurs à rendre au pavillon de cet État sont aussi sujets à contestation. Les disputes sur cette question ont souvent donné lieu à des guerres entre la puissance qui s'attribuait cette suprématie et celles qui la lui refusent. Les honneurs maritimes réclamés par le Danemark, par suite de la suprématie que cette puissance réclame sur le Sund et les deux Belts à l'entrée de la mer Baltique, ont été réglés par divers traités avec d'autres puissances, et notamment par la convention du 15 janvier 1829, signée entre la Russie et le Danemark.

1 BYNKERSHOEK, de Domino maris, cap. 11, IV. MARTENS, Précis du droit des gens moderne de l'Europe, liv. IV, chap. iv, § 189. KLÜBER, Droit des gens moderne de l'Europe, part. II, tit. I, chap. III, § 447-422.

Cette convention doit demeurer en vigueur jusqu'à ce que, selon le protocole du congrès d'Aix-la-Chapelle, signé le 3 novembre 1818, un règlement général aura pu être établi entre toutes les puissances maritimes au sujet du salut de mer '.

1 I. H. W. SCHLEGEL, Staatsrecht des Königreichs Dänemark, Thl. I, p. 412. MARTENS, Nouveau Recueil, t. VIII, p. 73. ORTOLAN, Diplomatie de la mer, t. I, liv. II, chap. xv.

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CHAPITRE IV.

DES DROITS DE PROPRIÉTÉ.

$1.

Droits de propriété nationale.

$ 2. Biens publics

et privés.

§ 3. Du domaine éminent.

4.

Le droit exclusif de chaque État indépendant à son territoire et à ses autres biens, est fondé sur le titre originairement établi par l'occupation, la conquête ou la cession, et postérieurement confirmé par la présomptien qui résulte du laps d'un long espace de temps, ou par des traités et d'autres contrats avec des États étrangers.

Ce droit exclusif comprend les biens publics ou domaine de l'État, et tous les biens qui appartiennent à des particuliers et qui se trouvent incorporés dans le territoire de l'État.

Les droits de l'État aux biens publics ou à son domaine sont absolus, et excluent ceux de ses propres sujets ainsi que ceux des nations étrangères. Le droit de propriété nationale, à l'égard des biens qui appartiennent à des particuliers ou à des corporations, et qui se trouvent dans son territoire, est absolu pour ce qui regarde les nations étrangères, puisqu'il exclut tous leurs droits, tandis qu'à l'égard des sujets de l'État ce droit se réduit à ce que l'on nomme domaine éminent, c'est-à-dire le droit, en cas de nécessité ou pour le salut public, de disposer de tout bien renfermé dans les limites de l'État '.

Les auteurs sont très-partagés sur la question de savoir De la prescription. jusqu'à quel point la présomption qui résulte de la longueur

1 VATTEL, Droit des gens, liv. I, chap. xx, § 235–244. FORTH'S Institutions of national law, vol. II, chap. IX, § 6. das europäische Völkerrecht, § 64, 69, 70.

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du temps écoulé, et que l'on nomme prescription, peut avoir lieu entre les nations; mais l'usage constant et approuvé des nations montre que, quel que soit le nom que l'on donne à ce droit, la possession non interrompue par un État d'un territoire ou de tout autre bien pendant un certain laps de temps exclut les droits de tout autre État à cet égard, de même que le droit naturel et civil de toutes les nations civilisées, assure à un particulier la propriété exclusive d'un bien qu'il a possédé pendant un certain temps sans que personne ait prétendu y avoir des droits. Cette règle est fondée sur la supposition, confirmée par l'expérience, que toute personne cherche à jouir de ce qui lui appartient, et que du silence de cette personne on peut naturellement conclure que ses titres à la propriété étaient peu valides, ou bien qu'elle y a renoncé'.

Les titres de presque toutes les nations européennes aux territoires possédés par elles en Europe sont tirés, dans l'origine, des conquêtes postérieurement confirmées par une longue possession, et par des relations internationales auxquelles toutes les nations européennes ont successivement pris part. Leurs droits sur les biens possédés par elles dans le Nouveau-Monde découvert par Christophe Colomb et d'autres aventuriers, et aux territoires qu'ils occupent en Asie et en Afrique, furent originairement tirés de la découverte, de la conquête ou de la colonisation, et ont été depuis confirmés par des contrats positifs. Indépendamment de ces sources du droit de propriété, le consentement général des hommes a établi le principe qu'une possession longue et non interrompue d'un terri

1 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. II, cap. IV. PUFFENDORF, de Jure naturæ et gentium, lib. IV, cap. xi. VATTEL, Droit des gens, t. I, liv. II, chap. XI. RUTHERFORTH's Institutions of national law, vol. I, chap. vi; vol. II, chap. IX, § 3, 6.

Sic qui rem suam ab alio teneri scit, nec quicquam contradicit multo tempore, is nisi causa alia manifeste appareat, non videtur id alio fecisse animo, quam quod rem illam in suarum rerum numero esse nollet. (GROTIUS in loc. cit.)

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