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le transport sain et sauf de tout navire ou autre propriété appartenant aux sujets anglais et qui sont maintenant dans les limites du territoire des États-Unis. >>

Les termes de cette loi montraient que la propriété d'un sujet anglais n'était pas considérée par la législature comme étant attribuée aux États-Unis, par la déclaration de guerre, et le pouvoir que l'acte conférait au président était considéré comme un pouvoir qu'il ne possédait pas auparavant.

La proposition qu'une déclaration de guerre n'accomplit pas par elle-même une confiscation de la propriété de l'ennemi se trouvant sur le territoire de l'État belligérant, était admise comme entièrement hors de doute. Y avait-il dans l'acte du congrès qui déclarait la guerre contre la Grande-Bretagne quelque expression qui indiquât une pareille intention?

Cet acte, après avoir mis les deux nations en état de guerre, autorise le président à employer toutes les forces de terre et de mer des États-Unis pour conduire la guerre, « et pour délivrer aux vaisseaux armés particuliers des États-Unis des commissions, ou lettres de marque et de représailles générales, contre les vaisseaux, biens, et effets du gouvernement du royaume-uni de la GrandeBretagne et de l'Irlande, et de ses sujets. >>

On avait admis que les représailles pouvaient être faites sur la propriété de l'ennemi trouvée sur le territoire des États-Unis à la déclaration de guerre, si telle était la volonté de la nation. Mais il ne fut point admis que dans la déclaration de guerre, la nation eût exprimé sa volonté à cet égard.

Il serait inutile d'employer des arguments pour montrer que quand l'attorney des États-Unis dresse des actes de procédure pour la confiscation d'une propriété de l'ennemi trouvée sur terre ou flottant dans nos baies, aux soins et à la garde d'un de nos citoyens, il n'agit pas en vertu de

lettres de marque et de représailles, et encore moins en vertu de lettres semblables accordées à un vaisseau armé

particulier.

L'acte concernant les lettres de marque, les prises maritimes et prises de biens, ne contenait assurément rien qui autorisât cette saisie.

Comme il n'y avait pas d'autre acte du congrès relatif au sujet en question, on regarda comme prouvé que la législature n'avait pas confisqué la propriété de l'ennemi qui était dans les États-Unis au moment de la déclaration de guerre, et que la sentence de condamnation prononcée par la cour inférieure ne pouvait être soutenue.

Cependant on avait pris à ce sujet un point de vue qui méritait d'être approfondi. On exposa qu'en exécutant les lois de la guerre, celui qui les exécute peut saisir, et les tribunaux condamner toute propriété qui, d'après le droit des gens moderne, est sujette à confication, quoiqu'on pût invoquer un acte de la législature pour justifier la condamnation de cette propriété, qui, selon l'usage moderne, ne doit pas être confisquée.

Cet argument doit s'appuyer sur ce que l'usage moderne constitue une règle qui agit directement sur la chose ellemême, par sa propre force et non au moyen du souverain pouvoir. Ce fondement n'était pas admissible. Cet usage était un guide que le souverain suit ou abandonne à son gré. La règle, comme les autres préceptes de moralité, d'humanité et même de sagesse, s'adressait au jugement du souverain, et bien qu'il ne pût la méconnaître sans déshonneur, toujours est-il qu'il pouvait la mécon

naître.

La règle était flexible dans sa nature, elle était sujette à des modifications infinies. Ce n'était pas une règle immuable du droit, mais elle dépendait de considérations politiques qui pouvaient continuellement varier. Les nations commerçantes, dans la situation des États-Unis, avaient

§ 12. Dettes dues à l'ennemi,

toujours une quantité considérable de propriétés dans les domaines de leurs voisins. Quand la guerre éclate, la question de savoir ce que l'on fera des propriétés que possède l'ennemi, dans notre pays, est une question plutôt de politique que de droit. La règle que nous appliquons à la propriété de notre ennemi sera par lui appliquée à la propriété de nos concitoyens. Comme toutes les autres questions de politique, elle était bonne pour un pays qui peut la modifier à son gré, mais non pour un pays qui ne peut que suivre la loi comme elle est écrite. Elle pouvait être bonne pour la législature, non pour le pouvoir exécutif ou judiciaire. Il parut à la cour que le pouvoir de confisquer la propriété de l'ennemi appartenait au pouvoir législatif, et que le pouvoir législatif n'avait pas encore déclaré sa volonté pour confisquer les propriétés qui se trouvaient sur le territoire de l'État au moment de la déclaration de guerre'.

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A l'égard des dettes dues à un ennemi avant le commencement des hostilités, la jurisprudence anglaise suit une politique d'un caractère plus libéral, ou au moins plus sage que pour les droits d'amirauté. Une puissance qui possède une immense supériorité navale peut avoir intérêt, ou supposer avoir intérêt à prendre le droit de confisquer la propriété d'un ennemi saisie avant une déclaration de guerre; mais une nation qui, par l'étendu de ses capitaux, doit généralement être la créancière de tous les pays commerçants, ne peut, certes, avoir aucun intérêt à confisquer les dettes dues à un ennemi, puisque cet ennemi peut dans presque tous les cas lui rendre la pareille avec un effet bien plus préjudiciable. C'est pourquoi, bien que la prérogative de confisquer ces dettes existe en théorie, il est rare qu'on l'exerce dans la pratique. Le droit du créancier originaire de suivre le recouvrement de sa dette.

1 M. Chief Justice Marshall, CRANCH's Reports, vol. VIII, p. 123–129.

n'est pas éteint; 'il n'est que suspendu pendant la guerre, et renaît en pleine vigueur au retour de la paix'.

Telles sont aussi la jurisprudence et la pratique des États-Unis. Les dettes dues par les citoyens américains aux sujets anglais avant la guerre de la révolution, et nonentièrement confisquées, ont été juridiquement considérées comme ravivées, ainsi que le droit d'en suivre le recouvrement, à la restauration de la paix entre les deux pays. Les empêchements qui avaient existé au recouvrement des dettes anglaises sous les lois locales des différents États de la Confédération, furent stipulés écartés par le traité de paix de 1783, mais cette stipulation n'ayant pas réussi à indemniser complétement tous les créanciers, la controverse entre les deux pays sur ce sujet fut enfin arrangée au moyen du payement d'une somme en bloc par le gouvernement des États-Unis à l'usage des créanciers anglais. Le traité de commerce de 1794 contenait aussi une déclaration expresse, qu'il était injuste et impolitique que des contrats particuliers fussent altérés par des différends nationaux, avec une stipulation mutuelle que «ni les dettes dues par les individus d'une nation aux individus de l'autre nation, ni les parts ni les sommes qu'ils pourront avoir dans les fonds publics, ou dans les banques privées, ne seront jamais, à tout événement de guerre ou différends internationaux, séquestrés ou confisqués 2. »

Au commencement des hostilités entre la France et la Grande-Bretagne en 1793, la première de ces puissances séquestra les dettes et autres propriétés appartenant aux sujets de son ennemie. La pareille fut rendue à cette décision par une mesure réciproque de la part du gouvernement anglais. Par les articles additionnels au traité de FURTADO V.

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1 BOSANQUET et PULLER, Reports, vol. III, p. 494. ROGERS. VESEY, Jun. Reports, vol. XIII, p. 74, ex parte Boussmaker. EDWARD'S Admiralty Reports, p. 60. The nuestra Signora

de los Dolores.

2 DALLAS Reports, vol. III, p. 4, 5, 199–285.

paix entre les deux puissances, conclu à Paris en avril 1814, les séquestres furent levés de part et d'autre, et des commissaires furent chargés de liquider les réclamations des sujets anglais pour la valeur de leurs propriétés indûment confisquées par les autorités françaises, et aussi pour la perte totale ou partielle des créances à eux dues, ou autres propriétés indûment retenues sous séquestre après 1792. L'engagement ainsi extorqué à la France peut être considéré comme une application sévère du droit de conquête sur un ennemi tombé, plutôt que comme une mesure de justice impartiale, puisqu'il ne paraît pas que les propriétés françaises saisies dans les ports de la Grande-Bretagne et en mer avant les hostilités, et condamnées ensuite comme droits d'amirauté, aient été rendues aux premiers propriétaires, en vertu de ce traité, au retour de la paix entre les deux pays'.

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De même aussi, à la rupture entre la Grande-Bretagne et le Danemark, en 1807, les vaisseaux danois et autres propriétés qui avaient été saisies dans les ports anglais et en pleine mer avant la déclaration des hostilités, furent condamnés comme droits d'amirauté, par effet rétroactif de la déclaration. Le gouvernement danois publia une ordonnance qui rendait la pareille à cette saisie, en séquestrant toutes les créances dues par les sujets danois aux sujets anglais, et en les faisant payer au trésor royal de Danemark. La cour anglaise du Banc du roi arrêta que cette ordonnance, n'étant pas conforme à l'usage des nations, n'était pas une défense légale à la poursuite en Angleterre d'une pareille dette. Les jurisconsultes avaient condamné cette pratique, et il ne s'était présenté aucun exemple de l'exercice de ce droit, autre que l'ordonnance en question, depuis plus d'un siècle. La justesse de ce jugement peut être contestée. On vient d'observer qu'entre

1 MARTENS, Nouveau Recueil, t. II, p. 46.

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