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seil supériear divisionnaire. Ce conseil, dans lequel le général commandant la division et le préfet faisant fonction de commissaire extraordinaire auraient entrée, prendrait toutes les résolutions que nécessiteraient les circonstances pour la défense de l'ordre et des lois. Chaque préfet de la division militaire serait tenu d'en assurer l'exécution, aidé d'une commission permanente du conseil général de son département. Ces mesures extraordinaires seraient accompagnées d'une déclaration générale de l'état de siége par tous les commandants militaires. Le conseil supérieur de chaque division militaire maintiendrait l'état de siége ou en ordonnerait la levée dans toute ou partie de la division.

Tels sont les moyens à l'aide desquels on veut prémunir la France contre l'espèce de vasselage en vertu duquel les agitations révolutionnaires de Paris l'ont si souvent depuis soixante ans dominée et entraînée malgré elle.

« Assurément la principale cause de ce vasselage est, comme le dit la commission, l'absence de toute organisation locale qui puisse régulièrement fonctionner, résister, agir et maintenir les droits du pays dans ces occasions. C'est l'isolement forcé et subit des fonctionnaires qui représentent dans les provinces le pouvoir central, et dont l'autorité, toute de délégation et de second ordre, s'affaisse et tombe pour ainsi dire au moment où elle devrait être le plus énergique, au moment où le télégraphe vient annoncer d'heure en heure que les événements se précipitent dans la capitale, que le combat s'est engagé, que le pouvoir attaqué chan

celle, et que peut-être dans quelques heures il ne sera plus. A ces nouvelles le pays se trouble, il s'agite, il s'inquiète il sait bien qu'il a pour lui la force et le droit, mais il sait aussi que des forces sans direction et sans unité ne constituent pas une force et ne défendent pas d'une entreprise subite et hardie! Il cherche autour de lui quel sera le centre de son action et où sera le pivot de sa résistance, et il ne trouve rien ! »

Tout cela est juste, mais un pouvoir improvisé, temporaire, participant du trouble révolutionnaire dont il sera né, ne prenant conseil à la hâte que de ses propres inspirations, offrira-t-il toutes les ressources que l'on en espère; et s'il peut y avoir ici quelque danger de fédéralisme, ce danger ne sera-t-il pas plus grand du côté d'un pouvoir né dans les orages et isolé, que du côté d'un pouvoir stable, normal, et faisant partie de l'ensemble des institutions administratives?

Un lien permanent établi entre les départements qui font partie de la même division militaire, de la même circonscription judiciaire, de la même province ecclésiastique, voilà ce qui peut seul assurer une bonne administration et une action politique efficace. Or, ce lien ne peut s'établir qu'à l'aide d'un conseil divisionnaire, composé des délégués des conseils généraux et des fonctionnaires supérieurs, archevêque, recteur, général divisionnaire, ingénieur divisionnaire, président de cour d'appel, directeur général de police, etc.

Hâtons nous donc de compléter par la création, ou plutôt, par la restauration d'une institution qui doit être comme le couronnement de notre édifice administratif, une réforme sans laquelle tout gouverne

ment de notre pays deviendrait désormais impossible. Au sein de toutes les conditions sociales de prospérité et de force, la France se meurt par l'effet du vice de ses institutions politiques. Accoutumée à ne vivre que de la vie de sa capitale, elle a beau demander aux partis qui s'y déchirent et dont les cent mille voix de la presse proclament chaque matin les triomphes et les défaites d'un jour, elle a beau, dis-je, demander le repos, le travail, la sécurité, tout ce qui fait vivre et prospérer les sociétés, les partis acharnés dans une lutte impie et stérile, qui de l'arène parlementaire passe incessamment dans les jeux de bourse et dans les émeutes de carrefour, les partis ou plutôt les coteries politiques se rient de ses misères et de ses terreurs, et tiennent toujours suspendue sur sa tête, comme une épée de Damoclès, une révolution nouvelle.

Malheur et honte à notre patrie et à l'Assemblée qui la représente, si à la vue d'un si grand péril elle ne sait pas trouver dans son sein le principe de son salut! Malheur et honte si, sur cette terre où les ruines mêmes ont péri, ne s'élève pas spontanément dans la consciencc universelle le double principe qui peut seul désarmer les ambitions surexcitées par la politique des coups de main et faire refluer vers les extrémités glacées l'excès de vitalité qui concentré dans la tête menace le corps social d'apoplexie et de mort!

CHAPITRE XII

RÉSUMÉ ET PROJET D'ORGANISATION.

L'ORDRE MUNICIPAL, c'est-à-dire l'ensemble des institutions qui associent tous les citoyens à la charge commune de l'administration publique', repose sur le grand principe appelé par les anciens autonomie, par les Anglais self government, par les Français administration du pays par le pays, principe reconnu par le vieux droit public de l'Europe et par les lois contemporaines de le plupart des États voisins, et qui tend à reprendre partout la place qui lui appartient dans les institutions politiques.

De ce principe découlent deux droits essentiels et imprescriptibles: 1o La libre élection des mandataires municipaux par tous les membres de la famille politique admis à jouir du droit de cité; 2o la libre admi

1 Propriè municipes appellantur muneris participes. L. I, § 1, ff. ad municip. et de incolis.

2 Autonomie. Liberté dont jouissaient sous les Romains les villes grecques qui avaient conservé le privilége de se gouverner par leurs propres lois, Dict. de l'Acad. Avtovouμevx xxɩ elevbepa, DEMOSTH., phil.

nistration par ces mandataires élus des intérêts purement locaux, sous les garanties protectrices des intérêts du corps national et des générations futures.

Élevez-vous par la pensée jusqu'aux plus hautes régions de la métaphysique politique, vous trouverez ces principes liés aux lois primordiales qui tendent à édifier la société humaine sur la double base de l'association des travaux et des œuvres de charité.

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Toute la doctrine sociale se résume, en effet, dans cette parole de l'Évangéliste: « Qu'ils soient un comme nous, afin qu'ils soient tous ensemble; comme vous êtes en moi et moi en vous, qu'ils soient de même un en vous; je leur ai donné la gloire que vous m'avez donnée, afin qu'ils soient un comme nous sommes un. » De cette théorie sublime découlent, comme de leur source, le dogme de la fraternité3, le précepte de la charité, la double loi de la solidarité et de la réversibilité, tous ces principes éternels, immuables des

1 Jerusalem quæ ædificatur ut civitas cujus participatio est in idipsum.

2 JEAN, XVII, 2, 21, 22.

3 Vous êtes tous frères et vous ne devez donner le nom de père à personne sur la terre, car vous n'avez qu'un seul père qui est dans les cieux. Gen. IX, 5, 6. MATTH. XXIII, 819.- Is. LXIII, 16.

Écoute, Israël : le Seigneur ton Dieu est le seul Dieu, et tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée, et de toute ta force: voilà le premier commandement. Le second, qui lui est semblable, est celui-ci tu aimeras ton prochain comme toi-même (MARC, XII, 29, 30, 31). -En ces deux préceptes consiste toute la loi et les prophètes (MATTH. XX, 40).

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