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Explication trop fran

che avec ce

prétexte d'aviser aux moyens de conserver la paix, mais plutôt pour m'exciter à la guerre, car cet envoyé n'avait rien de ce qui pouvait nous concilier.

Quelques semaines après son arrivée, j'eus avec lui un long entretien, où je développai peutdiplomate. être avec trop d'abandon ma situation et celle de l'Europe. Je lui déclarai : « Qu'il était indigne

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de faire des traités pour refuser de les exécuter << dès le lendemain; que rien ne me ferait re<< noncer à l'évacuation de Malte; que j'aimerais « mieux voir les Anglais campés sur les hauteurs « de Montmartre, que de les voir en possession de «< cette île. >>>

Je me plaignis des journaux, mais surtout de l'asile et de la solde qu'on accordait à Georges et consorts, au lieu de les reléguer au Canada, ainsi qu'on l'avait promis. « Chaque vent qui << souffle d'Angleterre, lui dis-je, ne m'apporte << que haine et animosité; comment voudrait-on « que je ne fusse pas exaspéré!!

«

<< En abordant la question de l'Égypte, je l'as<< surai que le voyage de Sébastiani n'avait eu << aucun but hostile. Il n'eût tenu qu'à moi d'y << envoyer 25 mille hommes pour aider la Porte à <<< en chasser les Anglais, dont la présence m'au<< torisait à le faire; que, quelque désir que j'eusse d'y établir une colonie, je ne l'avais pas fait,

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«parce qu'il ne valait pas la peine de troubler «< la paix du monde et de paraître l'agresseur, « pour conquérir un pays qui tôt ou tard tombe«rait dans les mains de la France, soit par la « dissolution de l'empire turc, soit par arrange«ment avec la Porte. » Paroles indiscrètes que l'adroit Withworth ne laissa point tomber, et dont l'Angleterre se prévalut pour justifier sa conduite!

Après avoir témoigné mon désir de la paix, j'énumérai les chances réciproques de la guerre, j'abordai franchement la question de la descente et tous les dangers qu'elle me présentait ; mais il y avait une chance de succès sur cent, et c'était assez pour me décider à l'entreprendre. Je lui rappelai que j'avais 480 mille hommes sous les armes prêts à y paraître au premier signal; que l'Europe ne voulait plus s'allier à l'Angleterre et se sacrifier pour elle; que malgré cela je désirais la paix. « Je suis le plus puissant sur terre; vous dominez toutes les mers: si nous nous enten<< dions bien, nous gouvernerions le monde; nous «<le bouleversons, au contraire, par le moindre « différent. Si je n'avais pas éprouvé à chaque <«< occasion l'animosité de l'Angleterre, j'aurais << tout fait pour me la concilier; participation aux «< indemnités; influence sur le continent; traité << de commerce ; j'aurais tout accordé à une puis«<sance qui m'eût témoigné de la considération

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Déclaration hostile de

<< et de la bienveillance, tandis que je devais tout << refuser à d'implacables ennemis. >>

Cette longue conférence fut loin de rien racGeorges III. commoder; les Anglais n'y virent que mon désir de coloniser l'Égypte et s'en autorisèrent pour garder Malte, pour armer et prendre l'initiative de la guerre. Le 8 mars, un message du roi au parlement ne laissa plus de doute à ce sujet. Cette déclaration m'indigna, car les allégations étaient injustes. Depuis quand en effet les projets supposés et lointains d'un cabinet sur une province appartenant à un tiers seraient-ils une cause légitime de rupture? L'Angleterre ne niera pas que, déja sous Walpole et Georges Ier, elle ambitionnait l'Amérique du sud; le désir vague de son ministère de s'établir dans ce pays eût-il été un motif légitime de rupture pour la France?

Violente

je fais à son

teur.

Je ne pus dissimuler mon ressentiment à Withsortie que worth à sa première apparition aux Tuileries ; et négocia- je l'apostrophai peut-être avec trop de vivacité : « Nous avons déja fait la guerre pendant dix ans, << vous voulez encore la faire dix autres années; << vous m'y forcez!» puis me tournant vers les ambassadeurs étrangers, je leur dis : « Les Anglais « veulent la guerre; s'ils me forcent à tirer l'épée, « je ne serai pas le premier à la remettre dans le « fourreau. Ils ne respectent pas les traités, il faut « les couvrir de crépe noir. »

Sentant que j'étais allé un peu loin, je m'adressai de nouveau à Withworth en ces termes. «Pour

quoi ces armements, contre qui ces mesures? « Je n'ai pas un vaisseau de ligne armé dans les << ports de France: si vous voulez vous battre, je <<< me battrai ; il est peut-être possible de détruire << la France, mais non de l'intimider. Vous dites « vouloir la paix, exécutez donc les traités. Mal<«< heur à ceux qui ne les respectent pas; ils en << seront responsables à toute l'Europe, dont ils «< causeront la ruine! » Je me retìrai ensuite trop agité pour ne pas craindre de me laisser entraîner de nouveau.

anglais re

Cependant mes ministres ayant proposé de Ultimatum souscrire à tout arrangement pour rassurer les Anglais sur l'Égypte, ils feignirent de consentir

à ne pas conserver Malte comme propriété, mais de se réserver le droit de l'occuper pendant dix ans. Ils demandaient en outre, 1o qu'on leur fît céder l'île de Lampedouse par le roi de Naples; 2o que mes troupes évacuassent la Hollande et la Suisse; 3° qu'on assurât une indemnité en Italie au roi de Sardaigne. A ces conditions, ils reconnaîtraient le roi d'Étrurie et la république ligurienne. Ferme dans ma résolution de ne pas déroger aux conditions du traité d'Amiens, je rejetai ces différents articles, et il fallut de nouveau courir aux armes. J'avoue que c'était mettre beau

jeté.

J'occupe de

nouveau

Naples.

Mes troupes

coup en jeu pour un mince avantage; j'aurais pu sans honte et sans danger admettre ces propositions qui peut-être n'étaient pas sincères.

Je ne pouvais faire la guerre qu'en m'assurant des compensations pour les colonies que nous pourrions perdre, et des pays maritimes pour nous aider à la soutenir. Mes troupes rentrèrent dans le royaume de Naples afin d'occuper de rechef la presqu'île de Tarente et de fermer les ports de la péninsule au commerce anglais. St.Cyr conclut à cet effet une nouvelle convention et occupa les Abruzzes.

Mes troupes, renforcées en Hollande, passèrent envahissent le Rhin, et pénétrèrent dans le Hanovre dont Mortier prit possession. Les troupes hanovriennes,

le Hanovre.

Effet pro

invasions

acculées au nombre de 15 mille hommes sur le bas Elbe, capitulèrent à Artlenbourg, et furent licenciées sous condition de rentrer dans leurs foyers.

Ces invasions nous convenaient certainement

duit par ces beaucoup; mais elles n'étaient pas du goût des en Europe. autres puissances: on leur reprochait d'être con

traires aux principes reconnus du droit public, qui ne permettent pas à une puissance d'envahir tout ce qui est à sa convenance. La Russie avait quelque intérêt au sort de la Hollande, et l'Autriche ne voyait pas sans déplaisir le sol germanique violé par l'entrée dans le Hanovre. Toutefois, comme le cabinet de Vienne sentait que j'étais

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