A UN AMI SOUFFRANT. EPITRE. Par Mile Pauline FLAUGERGUES. Regarde en haut. » ous souffrez ! Cependant, ranimant la nature, Le printemps a souri; les bois ont des concerts. Il est aux rochers creux, sous la feuillée obscure, Des abris pour l'oiseau, des échos pour les vers. Vous souffrez, et pourtant, dans la vallée ombreuse, Vous avez un asile, un modeste foyer Qui vous fête le soir; une retraite henreuse, Un toit calme où l'on voit la fumée ondoyer. Vers le toit brun, s'élance en longs festons le lierre, Le jasmin étoilé jette, frèle espalier, Au mur qu'il réjouit, sa grâce printanière, La fenêtre en s'ouvrant froisse un jeune églantier. Le soleil renaissant dore le clair vitrage Et des senteurs d'Avril les airs sont enivrés. La rose au buisson vert, le ramier sous l'ombrage, Près de vous tout fleurit, tout chante, et vous souffrez! Souffrir, ah! c'est la loi de tout ce qui s'élève. Celui dont le cœur bat autrement que la foule, Torrents aux flots troublés, mais aux lointains échos. Diadème épineux, le laurier qu'on encense S'il rencontre parfois ces oasis de l'âme Edens aux frais berceaux où luit un ciel de flamme, Où le voyageur passe et s'arrête enchanté ; Cet attrait d'un moment, cette joie éphémère La coupe qu'il saisit soudain devient amère, C'est qu'ailleurs est le but, le pôle qui l'attire ; O toi qu'il méconnaît, qu'il aime et qu'il appelle, N'es-tu pas ce pouvoir sans égal, sans limite, Mais dans ses jours de deuil et de lutte et d'attente, O poète! chantez, dites-nous vos alarmes, Que de fois à ces chants, à leur douce magie, J'ai vu de mes chagrins la sombre nuit pâlir, Et mon ciel, un moment, sourire et s'embellir! Puis, comme le bonheur qu'amène un léger songe, Fuyant l'éclat du monde, en mon âme oppressée, De votre âme mon âme a senti la blessure: Barde inspire! chantez, et trop longtemps muette, Que votre voix encore attendrisse nos cœurs. L'éclair luit dans l'orage, et l'âme du poète Mieux qu'en ses voluptés vibre dans ses douleurs. |