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>>ment pressentir. »« On ne commet pas, y » dit-il, de grandes fautes dans un Séminaire; on >> en risque quelquefois de petites. Mon devoir est » de les prévenir toutes. J'y veillerai de mes deux » yeux. Veillez aussi de votre côté. Si vous es»sayez de mettre en défaut la vigilance du nou» veau gardien de la règle, soyez adroits; surtout » ne vous laissez pas prendre. »

<< Quelques jours après, c'est toujours le même » écrivain qui parle, un jeune séminariste qui, » sans doute, avait peine à s'habituer au régime » de la communauté et regrettait la table pater» nelle, regagnait sa chambre muni d'un dîner » supplémentaire ; il ouvrait sa porte quand il fut » surpris par le nouveau supérieur. Cacher ou » déguiser le corps du délit, fut le premier >> mouvement du novice; mais c'était impossible. » Pâle, tremblant, une main sur la clef, tenant, » de l'autre, la preuve trop manifeste de son » infraction à la règle, le coupable s'attendait à >> une confiscation accompagnée d'un long ser» mon sur la gourmandise; mais Louis s'appro» chant, se contenta de lui dire avec un sourire » malin Je vous ai cependant bien recommandé de » ne pas vous laisser prendre. »

Le curé de village a rappelé, Messieurs, au panégyriste de M. Belmas, une autre anecdote qui, s'il en était besoin, prouverait à elle seule, comment << supérieur à tous, il (M. Belmas) savait » se mettre à la portée de tous avec cette amé

» nité, cette douceur, cet agréable abandon qui, >> sans diminuer le respect, inspirait la plus » entière et la plus juste confiance. >>

<<< Dans les dépendances du presbytère de Car» lypa, dit-il, Louis s'était fait construire une » forge, et bien souvent, déposant la robe ecclé»siastique, il prenait le tablier de cuir et passait >> plusieurs heures le marteau ou la lime à la » main. Un jour, la grand'porte du presbytère » étant ouverte, un villageois d'une commune » voisine, attiré par le bruit de l'enclume, entre; » un soc de charrue à la main, il se présente à » Louis, croyant s'adresser au maréchal du vil» lage, il lui demande de remettre son instrument > en état; il s'agissait de l'aiguiser. Je le » ferais volontiers, mon ami, répondit Louis, » mais, vous le voyez, je n'ai pas les instrumens >> nécessaires. Et, sans le tirer d'erreur, il lui >> indique le nom et la demeure de l'homme qu'il » cherchait. >>>

Plusieurs d'entre vous, Messieurs, pourraient vous dire que l'évêque de Cambrai leur a souvent rappelé le bon curé de Carlypa. S'ils étaient heureux de le visiter, non pas dans un humble presbytère, mais dans son palais dont il se plaisait à faire une retraite toujours agréable ou un atelier dont l'aspect variait à son gré, c'est que tous étaient sûrs d'un accueil sans cesse affectueux; c'est que pour chacun il était, suivant l'occurrence, opticien, mécanicien, artiste, homme de lettres; c'est qu'à

tous il avait quelque chose à apprendre ou à conter et qu'il y avait dans ses causeries tant de charmes qu'on ne se lassait pas de l'entendre; c'est que tous enfin, voyaient en lui l'homme de bonne compagnie qui sait mettre tout le monde à l'aise en donnant à chacun l'occasion de se produire à propos.

Le panégyriste de M. Belmas n'a négligé, Messieurs, aucun des faits qui doivent mettre en relief les diverses qualités de l'esprit et du cœur de ce prélat.

« Le catéchisme qu'il composa pour l'instruc» tion de l'enfance, dit-il, est un chef-d'œuvre » d'ordre, de clarté et d'orthodoxie. Nulle part, » que nous sachions, la croyance du chrétien, les » œuvres et les moyens du salut n'ont présenté, » dans une division plus parfaite, une doctrine » plus saine et plus irrépréhensible. »

J'ajouterai que c'est après avoir ainsi enseigné aux enfans ce qu'ils doivent savoir étant hommes, que M. Belmas a voulu prémunir leurs pères contre les dangers des superstitions qui rappellent tous les jours encore le culte des idoles. En 1819, au moment où des pélerins allaient à la frontière visiter pieusement un arbre d'où était, disait-on, sortie l'image de la mère de Dieu, M. Belmas apprenait aux fidèles de son diocèse que l'image révérée n'était rien autre chose qu'« une excrois» sance informe, dernier effort d'une végétation >> expirante et trompée dans ses produits. Ah!

» Nos Très Chers Frères, ajoutait-il, pourquoi > nous ôter vous-mêmes l'avantage avec lequel >> nous combattions le culte des augures et des >> auspices; et celui non moins insensé que » l'Egyptien rendait aux légumes de son jardin. >> Pourquoi ajouter, en les imitant, de nouvelles >> pages à l'histoire déjà trop volumineuse des >> travers et des égaremens de l'esprit humain. »

Vous verrez, Messieurs, dans l'éloge de M. Belmas comment, en confiant à deux époques différentes, la surveillance des instituteurs primaires aux curés de son diocèse, ce prélat leur recommandait de se tenir en garde contre les illusions et les surprises d'un zèle irréfléchi. Le récit de son opposition à la translation solennelle des cendres de Fénélon, vous apprendra également qu'à un devoir de haute convenance religieuse, il n'hésita pas à sacrifier une popularité d'un moment. Vous admirerez l'esprit qui a dicté ses mandemens sur la vaccine, écrits dans le but de triompher d'un préjugé funeste à l'humanité. Avec son panégyriste, vous vous plairez, Messieurs, à reconnaître tout à la fois, la variété de ses connaissances et le talent qu'il avait de les mettre à la portée de tous, en parlant à chacun comme il convient; heureux quelquefois de prendre sa revanche avec ceux qui ne doutent de rien, son panégyriste l'a dit en d'autres termes, s'il se plaisait à les embarrasser par une saillie, à les déconcerter par une soudaine observation, il ne voulait

pas de leur rancune, et, en les replaçant sur un terrain moins dangereux, il leur donnait une facile revanche.

<< A son accueil affable, a dit le panégyriste de » M. Belmas, à la noble décence de ses ma» nières, à l'élégante urbanité de sa parole, on >> reconnaissait l'homme naturellement doux, » l'homme distingué et supérieur. D'un mot, d'un » sourire, il savait encourager, récompenser. » Lorsque son attente ou sa confiance avait été » déçue, douloureusement affligé de la faute plus » qu'irrité contre la personne, sa voix était sé» vère, ses plaintes vives, énergiques; mais on >> sentait encore que l'intérêt général et le bien » même du coupable dictaient les reproches et le » blâme. Lorsqu'au contraire sa bonne foi avait » été surprise, qu'il était empressé, dit le même » auteur, qu'il était habile, l'erreur reconnue, à » consoler le cœur qu'il avait contristé ! qu'il y » avait de douceur dans le baume que sa main » versait sur les blessures qu'elle-même avait » faites!.. »

Enfin, Messieurs, et c'est surtout à cette partie de son éloge que vous vous arrêterez sans crainte des commentaires, le panégyriste de M. Belmas s'est plu à raconter avec une naïveté pleine de charmes tous les traits de la bienfaisance de ce prélat.

<< Pour compter, dit-il, les bienfaits du bon » évêque, comme l'appelle le peuple, il faudrait

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