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plus extérieure de l'écorce qui le met à l'abri des rigueurs de l'hiver, n'attend que la douce influence du printemps, pour couronner l'arbre de sa parure annuelle. Chaque liber est donc tout-à-fait comparable à l'herbe, qui naît, se développe, fructifie et meurt dans l'espace de quelques mois; aussi, peut-on dire que le tronc de l'arbre est formé par une succession d'herbes qui se recouvrent les unes les autres, et que les couches du bois marquent la suite des générations qui ont brillé tour-à-tour, et sont allées grossir le squelette du végétal.

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Puisque telles sont les lois de la végétation bien loin d'être surpris de la longue durée de l'arbre on s'étonnera peut-être qu'il soit soumis à la mort. Mais, sans parler des maladies accidentelles qui souvent abrègent sa vie, l'engorgement des vaisseaux, occasionné par la nutrition, en marque le terme inévitable. En effet, lorsqu'après un temps prolongé plus ou moins, selon la nature du végétal et les circonstances où il se trouve, les conduits seveux du bois viennent enfin à s'obstruer: la séve, arrêtée dans son cours, cesse de se porter vers l'écorce; le liber ne se régénère plus, et l'arbre meurt d'inanition.

« L'épanouissement des boutons est le premier indice de la végétation nouvelle. Les boutons s'allongent et se transforment en rameaux chargés de feuilles.

« Les feuilles sont quelquefois opposées deux, à deux. C'est ainsi qu'elles se montrent dans l'hortensia. D'autres fois, elles sont isolées et placées de distance en distance, comme on le remarque dans la giroflée. D'où provient cette différence ? Comment se fait-il qu'ici les feuilles soient, en quelque sorte, jetées au hasard, tandis que là, elles sont constamment opposées? L'anatomie des tiges fournit une réponse à cette question. Les feuilles isolées ou placées

de distance en distance, n'ont aucun lien commun; mais, il n'en est pas de même des feuilles opposées : elles ont, à leur base, une bride interne qui les unit l'une à l'autre, et fait que leur développement, quelque soit la marche de la végétation, ne sauroit être que simultané.

« Cette bride, foible d'abord, se fortifie en vieillissant; elle presse les vaisseaux de la tige, elle suspend l'écoulement du fluide nourricier; elle occasionne des renflemens, des nodus, comparables à ceux que nous pouvons faire naître sur le tronc d'un arbre, en le serrant avec un lien.

Le pétiole, que l'on nomme communément la queue de la feuille, cache sous son épiderme des filets longitudinaux, disposés avec un tel art dans la plupart des plantes, qu'ils se maintiennent tous mutuellement comme des arcs- boutans et des cordes tendues, et donnent au petiole une direction fixe, malgré sa foiblesse apparente. Mais, quand la nature veut produire la feuille mobile du tremble ou du peuplier, elle place les filets du pétiole de manière qu'aucun n'oppose de résistance à la flexion des autres et la feuille pendante est agitée par le plus léger soufle de l'air.

«La fleur est le chef-d'œuvre de la végétation. Elle renferme les organes reproducteurs.

L'anthère, sachet membraneux dans lequel est contenue la poussière fécondante, offre dessous l'épiderme dont il est recouvert, un tissu dont les membranes, coupées en petites lanières, se dilatent et se contractent suivant qu'elles sont plus ou moins humides. De là vient que l'anthère s'ouvre par un mouvement élastique, et lance avec force la poussière fécondante.

« L'ovaire recèle les jeunes embryons. Un savant portugais, M. Corréa, que l'Institut compte parmi ses

correspondans les plus distingués, observa le premier avec exactitude les conduits déliés par lesquels s'opèrent le développement du fruit et la fécondation de la graine; et tandis que cet excellent observateur présentoit à la société royale de Londres, l'exposé de ses découvertes, dans l'ignorance où j'étois de son travail, je poursuivois les mêmes recherches, et j'arrivois aux mêmes résultats.

«Des filets vasculaires passent de la plante-mère dans chaque graine et portent aux embryons, la nourriture nécessaire à leur développement. D'autres filets vasculaires s'élèvent des graines, jusqu'à l'extrémité du stigmate, organe femelle, sur lequel les mâles versent la poussière fécondante.

Mais, cette liqueur onctueuse et volatile que contient chaque grain de poussière, cet aura vitalis, ce souffle vital, pour parler la langue des botanistes, pénètre-t-il à travers le stigmate? parcourtil les conduits déliés qui vont se rendre dans la graine? arrive-t-il enfin jusqu'au fœtus? Sur ce point, l'expérience et l'observation sot muettes : l'extrémité des filets vasculaires se perd dans un tissu d'une finesse extrême, et l'épiderme du stigmate ne laisse apercevoir aucune ouverture. Ainsi, dans les plantes, de même que dans les animaux, la nature a caché le mystère de la fécondation sous un voile que la main de l'homme ne peut soulever.

« Peu de temps avant la fécondation, l'organe femelle de certaines plantes laisse écouler une liqueur odorante et visqueuse; et lorsque la fécondation est opérée, l'écoulement s'arrête; mais, ce n'est pas, comme le pensoit Linnæus, parce que la liqueur est un des principes fécondans; c'est parce qu'elle va nourrir le fruit, et cesse de se répandre en pure perte, dès que l'embryon a reçu l'impulsion vitale.

« L'embryon est une plante en miniature. On y aperçoit une racine et une ou deux feuilles séminales. Lorsqu'il ne paroît qu'une feuille, c'est parce qu'elle forme une gaîne dans laquelle sont renfermées les autres, et dès-lors, on est assuré que la plante aura des feuilles engaînantes, et que la tige sera formée de filets longitudinaux, disséminés dans la moëlle.

«Lorsqu'au contraire, l'embryon présente deux ou plusieurs feuilles séminales, il devient très-probable que les autres feuilles ne seront pas engaînantes, et il est certain que la tige offrira des couches concentriques et un canal medullaire.

« Nous voici revenus au point d'où nous sommes partis, après avoir parcouru rapidement plusieurs des phénomènes les plus importans de l'économie végétale.

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« On peut juger, d'après cet aperçu, qu'aujourd'hui, l'objet principal du physiologiste, doit être de découvrir les rapports des formes extérieures avec l'organisation interne, et d'étendre, s'il se peut, le système d'anatomie comparée des végétaux. Ces recherches qui intéresent à la fois la physique générale, la botanique et l'agriculture, sont très-longues et très-pénibles. L'extrême petitesse des objets y apporte de grandes difficultés ; mais le microscope nous découvre les merveilles de ce monde inconnu, et ce n'est pas sans admiration que nous retrouvons dans les moindres parcelles des plantes, l'empreinte de cette Sagesse infinie qui préside à l'arrangement de l'univers. » II. OBJET. Essais sur la végétation, considérée dans le développement des bourgeons. Par M. DUPETIT-THOUARS (1).

Nous avons dit que le système de M. Dupetit

(1) A Paris, chez Arthus-Bertrand, rue Hautefenille.

Thouars, sur la végétation, s'éloignoit de la doctrine reçue. Il a pressenti lui-même la difficulté qu'il auroit à faire admettre ses idées, et c'est pour préparer le lecteur aux tableaux nouveaux qu'il doit offrir à ses regards, qu'il s'exprime ainsi dans ses réflexions préliminaires :

« On peut, dit-il, signaler sur la route des sciences deux espèces d'écueils, les préjugés et les paradoxes. Gardez-vous, dit celui-ci, d'adopter des opinions trop vulgaires; ce que croit le grand nombre, n'est presque jamais ce qu'il vous convient d'examiner. L'expérience des gens qui appartiennent à la classe commune ne doit pas être la vôtre, et ils rai❤ sonnent si peu leurs usages et leurs habitudes, que vous n'employeriez, à y chercher quelque vérité, qu'une peine inutile. Prenez garde, dit à son tour celui-là, de vous écarter du sentiment des grandshommes qui vous ont précédé dans la carrière que vous parcourez ; ils eurent, au plus hant degré, le talent de l'observation, et la science dont ils ont reculé les limites, fut l'occupation de toute leur vie: marchez donc sur leurs traces, si vous ne voulez pas. vous égarer dans vos recherches.

« Il faut le dire, nous sommes assez naturellement portés à suivre l'un ou l'autre de ces conseils. Il y a, dans notre amour-propre, à mesure que notre intelligence se développe, quelque chose qui nous invite à séparer nos pensées des pensées généralement adoptées. Nous voulons qu'on nous distingue et comment serions-nous distingués, si nous restions trop habituellement dans la foule? H y a d'un autre côté, dans notre cœur, une tendance au repos, qui nous dispose assez naturellement à ne pas faire autrement que ce qu'ont fait les autres, surtout, si, dans ce qu'ils ont fait, nous trouvons des moyens

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